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Bouteflika veut accélérer la libéralisation de l’économie

mardi 3 mai 2005, par nassim

Attendu depuis des semaines, le remaniement partiel du gouvernement, annoncé dimanche soir, révèle les grandes ambitions d’Abdelaziz Bouteflika : accélérer la libéralisation de l’économie, asseoir un pouvoir sans partage et renforcer son action sur la scène internationale.

En renouvelant sa

Abdelaziz Bouteflika

confiance au premier ministre Ahmed Ouyahia, le président algérien a voulu conforter un chef d’équipe qui a su conduire l’alliance présidentielle sans fausse note. Dans cette coalition, le FLN (ex-parti unique) obtient seize ministères, contre neuf pour le Rassemblement national démocratique, et cinq pour les islamistes présumés « modérés » du Hamas (Mouvement de la société pour la paix). Parmi les « victimes » de ce ravalement de façade, Abdelatif Benachenhou, ministre des Finances. Opposé au premier ministre sur le rythme des réformes économiques, il a été lâché par le président Bouteflika, qui lui reproche de traîner la patte. Mourad Medelci, 62 ans, qui lui succède, a occupé, dans les années 80, le portefeuille du Commerce et du Budget. Le ministère de la Participation et de la Promotion des investissements est confié à Abdelhamid Temmar, qui a occupé le même poste entre 1999 et 2000.

On attendait l’arrivée d’un civil au portefeuille de la Défense nationale. C’est un militaire à la retraite qui est nommé au poste, créé sur mesure, de ministre délégué auprès du chef de l’Etat, qui reste le patron de l’armée, en mettant la touche finale à un long processus de normalisation de la grande muette. Le général Abdelmalek Guenaïzia, chef d’état-major au début des années 90, était un membre influent du club très fermé des « décideurs » qui avaient annulé, en janvier 1992, les législatives remportées par le FIS. En raison de divergences avec le général Khaled Nezzar, alors ministre de la Défense, il est nommé, en juillet 1993, ambassadeur à Berne. En réhabilitant cet « ennemi intime » des généraux qui avaient mis la main dans le cambouis de la lutte antiterroriste, le président Bouteflika a voulu faire d’une pierre deux coups : asseoir son autorité sur la dernière institution tentée par des velléités de résistance et donner un gage aux islamistes avec lesquels il s’apprête à lancer une campagne pour l’amnistie générale et la réconciliation nationale.

Lors de son premier mandat, Abdelaziz Bouteflika, qui « refusait d’être un trois-quarts de président », se plaignait de la hiérarchie militaire qui, selon son entourage, « multipliait les peaux de banane pour réduire ses pouvoirs au niveau de ceux de la reine d’Angleterre ». Avec le second mandat, les relations entre le président et les chefs de l’armée semblent plus apaisées.

Conséquence d’un deal négocié quelques mois avant le scrutin présidentiel du 8 avril 2004, Abdelaziz Bouteflika s’est peu à peu imposé comme le maître absolu du jeu politique. Le retour progressif de l’armée dans les casernes s’est paradoxalement accompagné d’une régression démocratique : le Parlement est humilié et réduit au rôle de chambre d’enregistrement, la justice est tenue en laisse, l’opposition est laminée et la presse réduite au silence.

En juillet 2004, le général Mohamed Lamari, chef d’état-major dont l’hostilité au président avait franchi les murs du sérail, dépose sa démission. Il est remplacé au pied levé par le général Salah Gaïd, réputé moins fougueux. Avec cette victoire psychologique sur l’homme fort du régime durant la « décennie rouge », le chef de l’Etat algérien a les coudées franches pour remodeler les institutions à sa main.

Après avoir « pacifié » le front intérieur, Abdelaziz Bouteflika veut se consacrer aux relations internationales, son domaine de prédilection. Mohamed Bédjaoui, le nouveau ministre des Affaires étrangères, sera son maître d’oeuvre. Spécialiste en droit international, ce juriste de 76 ans a occupé plusieurs postes prestigieux, notamment la présidence de la Cour internationale de justice de La Haye de 1994 à 1997. Abdelaziz Belkhadem, son prédécesseur à la tête de la diplomatie algérienne, avait été nommé en août 2000 par réaction de dépit à l’égard de la France. Revenu « les mains vides » de sa visite d’Etat dans l’Hexagone, le président algérien avait brandi ce « barbéfélène », un apparatchik pur jus proche des islamistes, comme un repoussoir. Maintenant que les relations entre Paris et Alger, qui s’apprêtent à signer un traité d’amitié, sont au beau fixe, le président Bouteflika ne veut pas être parasité par les états d’âme du patron du FLN, hostile au rapprochement franco-algérien.

Par Arezki Aït-Larbi, lefigaro.fr