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L’Algérie face aux mutations mondiales (2e partie et fin)

mardi 20 juillet 2004, par Hassiba

Il y a lieu de souligner que récemment, en vue de l’horizon 2008/2010, les accords environnementaux (plus de 200 accords internationaux fin 2003 multilatéraux) conçus certes en dehors de l’OMC ont été intégrés dans les préoccupations de l’OMC lorsque cet aspect nuit au bon développement du commerce.

Egalement, les services qui auront un impact important en Algérie notamment les services énergétiques, les capitaux et surtout la propriété intellectuelle dont la protection est une condition essentielle de l’investissement direct étranger et du développement de la sphère réelle nationale afin d’éviter le piratage, renvoyant à la construction de l’Etat de droit et donc à l’intégration de la sphère informelle, produit de la bureaucratie qui tire d’ailleurs sa puissance de l’existence et de l’extension de cette sphère. La citoyenneté se mesurant par rapport à la progressivité de l’impôt direct . Aussi le processus des réformes doit-il intégrer ces éléments directeurs afin d’avoir une vision réaliste et non populiste qui aurait des répercussions sociales négatives pour le pays.
La future politique socio-économique est de s’inscrire dans le cadre des avantages comparatifs mondiaux. Plus généralement cela suppose le fonctionnement de la société sur de nouvelles bases, et ce d’autant plus que l’Algérie a les possibilités, sans chauvinisme, de dépasser la crise multidimensionnelles passagère à laquelle elle est confrontée et de répondre aux nouveaux défis de la mondialisation. Cela pose fondamentalement de définir à l’avenir le nouveau rôle de l’Etat dans le développement économique et social, dans le cadre de l’instauration d’un Etat de droit de la démocratie et de la mise en place des mécanismes de l’économie de marché solidaires de la régulation sociale.

L’objectif central est de nous adapter aux mutations mondiales par la démocratisation de la société grâce à une croissance durable basée sur le savoir seule condition de résorption du chômage. Pour cela l’ action stratégique devra reposer sur une vision dialectique des liens entre l’économique et le social, l’urgence de nous adapter à l’économie mondialisée en évitant les utopies du passé, afin de faire de l’Algérie un vecteur actif et non pas de subir d’une manière passive les événements.
Cela suppose une production et exportation hors hydrocarbures qui demandera entre 5 à 10 ans pour se mettre en place, il faut être réaliste si l’on accélère les réformes de secondes générations. Notre philosophie pour aboutir au développement durable devra se fonder sur un pacte social entre à la fois les partenaires économiques et sociaux, mais également l’ensemble des autres segments de la société civile.

Ce retour à la croissance déjà entamé entre 2000/2003 avec pour objectif un taux de croissance de 7/8% entre 2004/2008 permettra la création d’emplois utiles, au profit de la majorité de la population dont la jeunesse et non le versement de salaires sans contreparties productives qui accroissent paradoxalement le chômage. Réformes - développement sont, selon notre conception, inséparable de l’instauration de la démocratie, long processus se fondant sur une nouvelle culture du droit à la différence, la tolérance et le dialogue.

Le pouvoir doit être le pouvoir et l’opposition doit être l’opposition comme moyen d’alternances politiques. Mais il s’agit d’éviter la généralisation de la sinistrose gratuite et la personnalisation des problèmes nationaux, en approfondissant les libertés. Ainsi, selon notre point de vue, le programme d’action entre 2004/2008 devra s’articuler autour de sept objectifs qui conditionnent la réussite du développement de l’Algérie, inséparable de la construction de la démocratie et la citoyenneté, dont le fondement est la réhabilitation du travail et de l’intelligence et donc de l’élite du pays, seules sources permanentes de la richesse.

Première priorité :
sécurité des biens et personnes

La première priorité est le rétablissement de la paix civile (concorde nationale) et l’instauration de l’Etat de droit passant fondamentalement par la refonte de l’Etat, de la justice et une moralisation profonde de la vie politique, économique et sociale.

Deuxième priorité : mettre fin
à la bureaucratie paralysante

L’aspect sécuritaire s’étant amélioré, la faiblesse de l’investissement national et international, selon les observateurs, est due pour plus de 60% aux obstacles bureaucratiques.
Il s’agit de lever ces obstacles qui nuisent à l’épanouissement des énergies créatrices. L’objectif est l’implication de la société civile, signe le plus évident de la vitalité de toute société à travers des réseaux décentralisés.

Troisième priorité : réformer
le système éducatif

la refonte du système éducatif. C’est la priorité des priorités, du fait de la baisse du niveau, des déperditions scolaires et de la non-adaptation à l’environnement. Le monde est passé de l’ère de la matérialité, ère du XXe siècle à l’ère du savoir ère du XXIe siècle.

Quatrième priorité :
une croissance durable

Une démarche dynamique posant le statut d’une nouvelle organisation de l’économie nationale pour une croissance durable. L’ objectif dans cette nouvelle organisation sera de synchroniser l’acte d’investissement nouveau national ou international, la privatisation selon une nouvelle démarche de la restructuration et de la démonopolisation, concepts complémentaires mais non assimilables, loin de toute vision bureaucratique, dans un cadre concurrentiel. C’est la seule condition d’éviter de dépendre des aléas des hydrocarbures et d’accroître la production et les exportations hors hydrocarbures, facteur d’un retour à une croissance durable.
95 % des ressources en devises provenant de Sonatrach une attention particulière devra être accordée à sa gestion, à la maîtrise des coûts, et à l’efficience du couple solidaire - allocation de la rente- intermédiation financière afin de destiner les ressources rares aux seuls producteurs de richesses. D’où l’importance de la démocratisation de la rente, processus lié à la démocratisation globale du pays.

Cinquième priorité :
refonte du système financier

La mobilisation de toute l’épargne et l’efficacité de l’intermédiation financière et de l’affectation optimale des ressources évitant les assainissements répétitifs dus essentiellement au déficit du secteur public (versement de salaires sans contreparties productives accroissement paradoxalement le chômage) devra constituer une priorité. L’ action consistera en une vision globale du développement pour intégrer l’intermédiation financière informelle qui représente environ 40-50% (plus si l’on inclut les transactions en nature) ainsi que de parer à la faiblesse de la bancarisation de l’économie.

Sixième priorité : dynamisation de l’agriculture et l’hydraulique
Dans ce contexte, constatant les efforts de redressement appréciables entre 1999/2003 et selon une vision synchronisée dans le cadre du processus de restructuration globale de l’économie, une attention particulière devra être accordée à l’agriculture dont le problème foncier (les titres de propriété) et son corollaire l’eau, qui deviendra l’enjeu fondamental du XXIe siècle au niveau de l’espace euro-méditerranéen afin de couvrir les besoins sociaux croissants.

Septième priorité : une solidarité nationale soutenue
Il n’existe pas d’économie de marché spécifique à l’algérienne mais des lois universelles avec des spécificités sociales, source d’enrichissement au niveau planétaire afin de favoriser le dialogue des cultures. Le libéralisme à finalité sociale n’est pas en contradiction avec un rôle important de l’Etat fort régulateur (mais qui n’est fort que par sa moralité permise par la démocratisation de la société).

C’est ainsi qu’ il y a lieu de procéder au démantèlement de tout monopole qu’il soit public ou privé. A ce titre des mécanismes de redistribution transparents durant cette phase douloureuse d’ajustement structurel seront mis en place loin de toute tutelle bureaucratique en ciblant les plus démunis par des actes concrets de solidarité à travers des réseaux souples décentralisés impliquant la régionalisation économique (qui ne saurait signifier régionalisme) impliquant les acteurs locaux notamment la société civile.

L’économique et le social sont dialectiquement liés mais en n’oubliant jamais qu’une nation ne peut distribuer que ce qu’elle a préalablement produit si elle veut éviter une croissance négative ; le chômage, l’inflation, l’endettement intérieur et extérieur nous renvoyant à l’urgence de réhabiliter la valeur du travail.
Le souci constant est de préserver la cohésion sociale car convaincu que toute société qui exclut est vouée à la décadence. Et c’est pourquoi, notre action pose la nécessaire symbiose entre la dynamique économique et la dynamique sociale.

Conclusion générale
Le fondement stratégique est d’arrimer l’Algérie à l’économie mondiale pour une croissance durable. Car une société décrétée bureaucratisée régie par des relations de clientèles, la mentalité de bien vacant conduit à l’irresponsabilité collective et à la régression sociale.
Aussi, l’Algérie ne dispose pas d’autres alternatives que l’adaptation à la mondialisation dont les espaces euro-maghrébins, arabo-africains et euro-méditerranéens constituent son espace naturel.
Prétendre que la mondialisation aliène le développement du pays et les libertés, c’est ignorer une évidence : sans insertion euro-méditerranéenne l’Algérie serait bien davantage ballottée par les vents des marchés avec le risque d’une marginalisation croissante.

Par A.Mebtoul, expert international au colloque de l’université de Mostaganem sur le développement durable, La Nouvelle République