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Rabah MBS et Baâziz s’engagent politiquement

lundi 29 mars 2004, par Hassiba

Entre opportunisme et engagement politique, une pléiade d’artistes, dont Rabah MBS et Baâziz, s’est lancée dans l’arène électorale. Mais tous n’ont pas le même discours, parole “d’artiste”.

“J’ai décidé de me présenter à l’élection présidentielle pour changer le système de l’intérieur. La campagne électorale bat son plein, l’élection présidentielle arrive en Algérie”, dixit Rabah MBS.

Rabah président ? Pourquoi pas ! Pour ce faire, le leader du collectif Micro Brise le Silence, qui a décidé de faire cavalier seul pour l’aventure présidentielle, n’est pas passé par l’épreuve du Conseil constitutionnel. Les 75 000 signatures, il n’aurait trouvé aucun problème pour les recueillir.

Son public, tous ces jeunes qui croient en son discours, qui traduit si bien leurs attentes et leurs souffrances, aurait été d’un soutien inconditionnel.
Sauf que la campagne électorale bat son plein depuis plus d’une semaine et Rabah n’a animé aucun meeting, collé aucune affiche.

On ne l’a pas vu sillonner les quatre coins du pays, affublé au gré de l’électorat à séduire.
Encore moins à l’écran de l’Unique, qui lui a ouvert ses portes, lui et ses compères, pour raconter Ouled El-Bahdja, dans tous leurs états.

Pour cause, Rabah, l’enfant terrible de Hussein Dey, est loin d’être présidentiable.
Il n’a pas l’âge requis pour postuler à la magistrature suprême du pays, même si son discours simple reflète le malaise de toute une génération d’Algériens.
Et il en est bien conscient. “Je rêve. Je le sais. J’ai pas l’âge requis d’ailleurs. Mais cette impuissance concrète et pesante, je l’utilise comme tremplin à ma colère.

En tant que candidat à la présidentielle, je suis dans l’arène, je décortique la classe politique algérienne : ses magouilles, ses discours, ses contradictions. Sans oublier de parler au peuple, aux miens, aux jeunes du quartier, ma muse...” reconnaît-il. Ses fans savent pertinemment que l’engagement de Rabah ne date pas d’hier et n’a rien d’un discours improvisé ou minutieusement concocté pour la grande occasion. Il l’a toujours exprimé dans ses textes bondés de sens et dans ses notes puisées dans des mélodies traditionnelles, tirées du patrimoine algérien et mixées au goût du jour. On l’a compris, Rabah ne sera pas le président espéré. Rabah Président n’est autre que le titre de son dernier produit. Ce n’est qu’une manière, parmi tant d’autres, de dénoncer “le piston”, la compression, el-hogra...

Baâziz dans la place

Dans le politiquement incorrect, Baâziz récidive et commet son énième album, Y’bip emmo, sorti chez Izem Production. Une campagne anti-A...
Le produit est un voyage au cœur d’une Algérie meurtrie par ses dirigeants.
Un cocktail de mots triviaux pour dénoncer l’injustice, une plaidoirie pour la liberté de la presse et l’honneur de la Kabylie violentée dans sa chair. Comme Rabah, Baâziz ne mâche pas ses mots, El-Hadjala est un titre qui ne trompe pas.
La satire est poussée au maximum avec l’imitation en voix off du président-candidat, invitant les Algériens à voter massivement.

Magouilles politiciennes, répression, clanisme, le pouvoir en place est passé au crible, Baâziz sait de quoi il parle, les pratiques qu’il dénonce relèvent du secret de Polichinelle. Plus convaincant que tous les candidats en campagne, Baâziz a toujours trouvé les mots qu’il faut. Y’bip emmo, une salsa très épicée, relevée de satire et d’amertume. Rabah et Baâziz sont les crooners de la contestation, image d’une jeunesse qui a perdu confiance.
“Politiquement plus mûrs”, d’autres artistes ont fait leur choix. Le sempiternel Mohamed Mazouni est de retour avec un tube en l’honneur d’Ali Benflis.
Il faut dire que le chanteur n’en est pas à sa première expérience, les élections semblent bien lui réussir après une éclipse remarquée depuis 1999.
Youcef Boukhentèche a décidé de lui emboîter le pas, il aurait enregistré lui aussi une chanson à la faveur du même candidat.

Hassiba Amrouche, Naïma Ababsa, Cheb Toufik, Chaba Yamina, Katchou... sont les adeptes de “ouada thania”.
Deux titres phare sont à signaler sur l’album commandé, Votez et Ahlan wa sahlan bi raïsna el âaziz. La politique ne laisse décidément pas nos artistes indifférents.
Entre militants et protestataires, le top of the pops présidentiel s’annonce très serré. Qui dit mieux ?

Wahiba Labrèche, Liberté