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Conflit du Proche Orient : Sharon exécute Cheikh Yassine

Le leader du mouvement islamiste Hamas assassiné hier

mardi 23 mars 2004, par Hassiba

Israël a lancé hier, l’opération visant à liquider physiquement les dirigeants de la résistance palestinienne. Cheikh Yassine a été tué, hier à l’aube, sur sa chaise roulante, à la sortie de la mosquée à Gaza.

Après s’en être sorti avec de légères blessures en septembre dernier lors de la première tentative d’assassinat, le leader spirituel du mouvement islamiste Hamas, qu’il a fondé en 1987, a été tué hier à l’aube.

Cela s’est passé au moment où cheikh Ahmed Yassine quittait sur sa chaise roulante la mosquée de Sabra dans la ville de Gaza après avoir accompli la prière d’el fadjr. À cet instant, des hélicoptères de l’armée israélienne se rapprochent de l’endroit.
L’un des appareils tire alors trois missiles en direction du patron du Hamas palestinien et des personnes qui l’entouraient. Il est tué sur le coup.

Selon un témoin, Ahmed Yassine a été touché par le premier missile. Sa dépouille ainsi que celles des sept autres victimes ont été transportées à la morgue de l’hôpital Chifa de Gaza. L’opération a fait huit morts parmi les Palestiniens, dont cheikh Yassine et ses deux gardes du corps, et une dizaine de personnes ont été blessées.

Selon la radio israélienne, Ariel Sharon a supervisé personnellement l’opération de l’assassinat. Après avoir donné le feu vert pour l’assassinat du fondateur du mouvement Hamas, le boucher de Sabra et Chatila a veillé à l’exécution du raid. Sharon a directement donné l’ordre de déclencher le raid de son ranch dans le Néguev, affirme la radio publique israélienne. Une heure après l’opération, l’armée israélienne a diffusé un communiqué annonçant sa responsabilité dans cet assassinat. Par la voix d’Amos Gilad, le conseiller du Chef du gouvernement palestinien, Israël menace de passer à une étape supérieure en désignant comme prochaine cible Yasser Arafat. “Ce raid a été mené par l’armée israélienne, avec le feu vert de la classe politique, dont le Chef du gouvernement”, a déclaré le collaborateur direct d’Ariel Sharon.

Il ne fait plus l’ombre d’un doute quant à l’entière responsabilité de l’État hébreu dans l’assassinat du chef spirituel de Hamas. Israël justifie cet acte par la responsabilité supposée de cheikh Yassine “dans la mort de centaines d’Israéliens dans les attentats suicides revendiqués ou attribués à la branche militaire du Hamas”, connue sous le nom “des brigades Ezzedine Al Qassam”.

Dès que l’information de la disparition de cheikh Yassine a circulé dans les territoires occupés, une marée humaine a déferlé dans les rues des différentes villes et localités palestiniennes. Plusieurs milliers de personnes ont convergé vers l’hôpital Chifa où se trouve le corps de cheikh Yassine. Des minarets des mosquées ont fusé alors des appels “à la guerre” contre Israël et à une grève générale. Écoles et magasins ont spontanément baissé rideau.
Dans les rues, noires de monde, les cris de vengeance déchiraient le silence du matin. La colère gronde dans les territoires autonomes et nul n’est en mesure de dire quelles conséquences découleront de l’acte criminel d’Ariel Sharon. Toutes les déclarations des dirigeants palestiniens promettent le pire à Israël.

K. Abdelkamel.

Son intransigeance l’a imposé sur la scène proche-orientale
Un islamiste emblématique

Cheikh Ahmed Yassine était non seulement le chef spirituel du mouvement islamiste palestinien, Hamas, mais il a fini par devenir une figure emblématique de la résistance palestinienne. Son projet de société est contestable, mais force est de reconnaître que son intransigeance et ses méthodes de lutte ont été imposées et encouragées par le refus des israéliens de voir le peuple palestinien se doter d’un véritable État. Cheikh Yassine a fondé Hamas dans les années 1970 et ce n’est qu’à la faveur de l’Intifadha de 2000 que ce mouvement de résistance islamique sort de ses gesticulations pour mettre en pratique ses menaces.

La répression israélienne contribue à en renforcer l’ancrage au sein des palestiniens, notamment dans la bande de Gaza, qui finit par tomber dans son escarcelle. Hamas profite de la montée de l’islamisme dans le monde. Financés par les mentors de l’islamisme international, Hamas tisse son réseau à Gaza mais aussi en Cisjordanie.
Ses actions caritatives et ses établissements sanitaires et scolaires poussent dans ses bras des pans entiers de la population palestinienne livrée totalement à la précarité depuis que Tel-Aviv lui a fermé les portes de son marché de l’emploi. Paralysé des deux jambes depuis l’âge de 12 ans (il avait reçu un mauvais coup à la colonne vertébrale en jouant au football dans le camp de réfugiés de Chattia, à Gaza où étaient déportés ses parents), le fondateur de Hamas, qui, depuis, se déplaçait en chaise roulante, a rencontré l’islamisme en Égypte.

Ses parents, expulsés en 1948 de Majdel (Ashkelon), s’établissent à Gaza où le jeune Yassine a achevé ses études secondaires avant de partir pour le Caire. Il passe une année à l’université de Aïn Chams et, faute de moyens, abandonne les études supérieures. Livré à lui-même, il croise des islamistes égyptiens qui œuvraient à la constitution du Mouvement des frères musulmans. En 1970, de retour à Gaza, il fonde sa propre organisation, Moujamaat-al-islami, et commence à recruter.

Notamment au sein de ressortissants palestiniens établis dans les pays du golfe et en Égypte. Israël laisse faire et l’y encourage même. Aux yeux des israéliens, cheikh Yassine devait faire pièce au mouvement Fatah et à son incontestable chef, Yasser Arafat. Au début des années 1980, les islamistes palestiniens montent d’un cran.
Dans la foulée du khomeynisme, qui fait de la cause palestinienne un véritable fonds de commerce pour la propagation du modèle iranien dans le monde arabo-musulman, cheikh Yassine renomme son organisation Majd Al Moudjahidine et lui donne un caractère plus radical. Les israéliens, se rendant compte qu’ils ne peuvent pas avoir prise sur l’islamisme palestinien, jettent cheikh Yassine en prison.

Libéré après une année de détention et auréolé du statut de prisonnier politique, il crée alors Hamas en 1985, qu’il va bâtir patiemment grâce aux ayatollahs, aux wahhabites et à Saddam Hussein. Il est de nouveau arrêté en 1989, après le déclenchement de la première Intifadha (1987). Il ne sera libéré qu’en 1997, contre deux agents secrets israéliens neutralisés en Jordanie.

Mais Tsahal réinvestit les territoires autonomes, s’adonnant à des destructions et à des assassinats, sans que la communauté internationale trouve à redire. Hamas n’éprouve aucune difficulté pour enrôler des kamikazes parmi des jeunes des deux sexes, réprimés, violentés et humiliés. Malade depuis des années, cheikh Yassine était, à l’âge de 67 ans, probablement la figure la plus emblématique de la résistance palestinienne. Yasser Arafat, avec qui il entretenait des relations, à la limite de la correction, le dépasse en terme de popularité d’une très courte tête.

D. Bouatta

La communauté internationale condamne
“C’est du terrorisme d’État !”
Les craintes d’un embrasement sont réelles.

La communauté internationale a condamné à l’unanimité hier l’assassinat de cheikh Yassine, fondateur et chef spirituel du Hamas. Un assassinat qui a été assimilé à du "terrorisme d’État".

De nombreux dirigeants arabes et musulmans, mais aussi les pays européens ont dénoncé cet attentat qualifié de "barbare ".

Le président Hosni Moubarak, a qualifié cet acte "d’agression sauvage" et "dont les conséquences, a-t-il dit, sont imprévisibles". Il a ajouté qu’une telle opération fait avorter tous les efforts que "nous étions en train de déployer pour remettre le processus de paix sur les rails". En guise de représailles, il a annoncé l’annulation de la participation de l’Égypte aux cérémonies de commémoration du 25e anniversaire du traité de paix de Camp David, prévues mardi.

Le roi Abdallah II de Jordanie, dont le père, le défunt roi Hussein, avait obtenu d’Israël la libération de cheikh Yassine de sa prison israélienne en 1997, a lui aussi condamné l’assassinat du dirigeant islamiste, en dépit du traité de paix, signé en 1994, qui lie les deux pays. La Syrie, le Koweït, le Yémen, le Bahreïn et le Qatar ont qualifié cet attentat de terrorisme d’État.
Par la voix de son secrétaire général, M. Amr Moussa, la Ligue arabe qui s’apprête à se réunir dans une semaine à Tunis, a condamné vigoureusement l’attentat qui a ciblé le chef islamiste.

Par ailleurs, l’Union européenne a officiellement condamné l’assassinat. Peu de temps auparavant, de nombreux dirigeants européens ont dénoncé la liquidation de cheikh Yassine et n’ont pas caché leurs inquiétudes sur les éventuelles conséquences de cet acte abominable. Parmi ces dirigeants, Javier Solana, haut représentant de l’Union européenne pour la politique étrangère, et le ministre des Affaires étrangères français, Dominique de Villepin. Pour sa part, le secrétaire au Foreign Office Jack Straw a qualifié le raid d’"inacceptable", tandis que son homologue allemand Joschka Fischer a affirmé que "le gouvernement allemand (était) très inquiet de l’évolution de la situation".

À Bruxelles, les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne (UE) ont condamné dans une déclaration commune adoptée à l’issue de leur réunion, l’assassinat du cheikh Yassine redoutant des conséquences graves pour la paix au Proche-Orient. Ces inquiétudes ont été également soulevées par Moscou et Madrid qui craignent la montée d’une nouvelle vague de violence dans la région et qui fera, à leurs yeux, échouer les négociations israélo-palestiniennes.

"Nous reconnaissons à Israël le droit de se défendre contre le terrorisme, mais parallèlement nous estimons que chaque mesure prise doit être conforme aux lois internationales, sans être ni disproportionnée ni excessive", a estimé de son côté le premier ministre britannique.

Washington a déclaré par le biais de la conseillère de la Maison Blanche que les États-Unis n’ont pas été prévenus à l’avance du raid et ont lancé un appel au calme dans la région. "Nous voulons demander à tout le monde de faire une pause et ne rien faire qui puisse empêcher l’avènement de jours meilleurs", a-t-elle ajouté mais le mal est déjà fait. Israël vient de réussir ce que Arafat lui-même peine à réaliser : L’unité des rangs palestiniens.
Hier, Ariel Sharon l’a fait. Il a pu avoir tout un peuple sur le dos. Dans les jours prochains, des dizaines de “kamikazes” se sacrifieront pour venger la mort du leader.

Synthèse Nabila Afroun

Conséquences de l’assassinat du chef spirituel du Hamas
Coup de grâce pour le processus de paix

Israël a recours au terrorisme d’État pour faire échouer le processus de paix, qui semblait en bonne voie avec le lancement de la feuille de route du quartette international.
À l’approche de l’échéance fixé par la feuille de route pour la création d’un État palestinien en 2005, Ariel Sharon a mis en branle sa machine visant à remettre en cause cet objectif. Après avoir gelé les négociations avec les Palestiniens à la suite du limogeage de Mahmoud Abbas par Yasser Arafat, le boucher de Sabra et Chatilla a porté le coup de grâce à la paix, hier, en assassinant cheikh Ahmed Yassine.

Sachant pertinemment qu’en portant atteinte au chef spirituel du Hamas, il allait bloquer le processus de paix, Sharon n’a pas hésité. Pis, il a lui-même supervisé l’assassinat. C’est la provocation suprême pour les Palestiniens. Les milliers d’entre eux, qui ont participé à ses obsèques, ne pouvaient contenir leur colère. Pour eux, il n’est plus question de discuter. Seules les armes “parleront” à l’avenir.

“Il est désormais impossible d’aboutir à un accord de paix avec le gouvernement israélien actuel”, estiment-ils. Cet acte criminel, véritable terrorisme d’État, ne pouvait avoir d’autres conséquences que l’embrasement dans cette région. La colère et la rage qui se lisaient sur les visages des Palestiniens, en disent long sur leurs intentions. Il faut s’attendre au pire.

Entre Palestiniens, on ne parle plus que de vengeance seulement. Toutes les concessions faites pour faire avancer le processus de paix ont été jugées insuffisantes par Ariel Sharon. Par l’assassinat du cheikh Yassine, il a réduit à néant tout espoir de voir un jour côte à côte, un État palestinien et un État israélien, du moins tant qu’Ariel Sharon dirige le gouvernement israélien. En effet, ce sioniste pur et dur qui voue une haine viscérale à tout ce qui peut être assimilé au Palestinien en particulier et à l’Arabe en général, ne peut s’accommoder de l’existence d’un État palestinien.

Depuis le début, il ne cherchait que le moyen de faire capoter tout plan visant à instaurer la paix dans cette partie du monde. Craignant pendant un certain temps les foudres américaines en cas d’opération d’assassinat, il a temporairement mis au frigo ce genre procédé, avant de passer à l’acte hier.

Son audace ne s’explique que par un feu vert officieux de la maison-blanche.
D’ailleurs, l’absence de condamnation de Washington traduit son assentiment pour cet acte criminel. Il n’en pouvait être autrement, vu la protection systématique qu’accordent les États-Unis à Israël sur la scène internationale. En bénissant la décision du gouvernement Sharon de liquider physiquement sans recourir à la justice les leaders de la résistance palestinienne, les Américains ouvrent la voie à des dérives incontrôlables.

L’administration Bush a clairement montré qu’elle veut une paix aux conditions israéliennes, à savoir un État palestinien jouissant dans le meilleur des cas de l’autonomie dans des territoires que voudra bien leur concéder le patron du Likoud. Avec l’assassinat du chef spirituel du Hamas, les données ont changé au Proche-Orient, car les Palestiniens qui se présentaient jusque-là en rangs dispersés sont déterminés à faire bloc pour combattre Israël. Les risques d’aggravation des tensions dans toute la région sont réels. La paix est plus que jamais en danger de mort.

K. ABDELKAMEL

Antoine Basbous à Liberté

“Les hommes du Hamas vont venger violemment la mort de leur chef”

Antoine Basbous est le directeur de l’Observatoire des pays arabes (OPA), un organisme de recherches et d’analyse sur le monde arabe, basé à Paris. Il est notamment l’auteur de L’Arabie Saoudite en question, du wahhabisme à Ben Laden aux éditions Perrin.

Liberté  : Hier matin, l’armée israélienne a assassiné le guide spirituel du mouvement palestinien Hamas. Comment expliquez-vous cet acte ?

Antoine Basbous  : Au fil des mois, nous sommes entrés dans une logique d’accélération de la violence. Une escalade entretenue par les deux parties en conflit. Les Israéliens ont déjà assassiné Abou Chaneb l’été dernier, ils ont raté Al-Rantissi à la même période et ils ont tenté, en septembre 2003, d’éliminer le cheikh Yassine, en vain.

Les Israéliens ont annoncé à plusieurs reprises leur intention d’éliminer les principaux dirigeants de la mouvance armée palestinienne, notamment ceux du Hamas et du Djihad. Une stratégie destinée peut-être à éviter que leur retrait annoncé de la bande de Gaza ne soit présenté comme une victoire des islamistes et de la méthode des kamikazes.

Mais cet assassinat ne va-t-il pas provoquer de nouvelles attaques de la part du mouvement Hamas ?

Il est aujourd’hui certain que les hommes du Hamas vont venger violemment la mort de leur chef spirituel. C’est inéluctable : leur réponse sera lourde. Ils vont essayer de frapper le plus fort possible pour faire payer à l’État d’Israël un prix très élevé.

Cet acte de l’armée israélienne affaiblit-il davantage la position l’Autorité palestinienne et de Yasser Arafat ?

Avant même l’assassinat du cheikh Yassine, l’Autorité palestinienne était déjà très affaiblie. Sa colonne vertébrale, le Fateh, est divisée. Yasser Arafat est contesté y compris au sein même de son propre mouvement. Il a de sérieuses difficultés avec son Premier ministre, son gouvernement, les bailleurs de fonds occidentaux et même les dirigeants arabes. Arafat survit par défaut. En réalité, il ne dirige plus grand-chose au sein du peuple palestinien. Mais il reste une “icône”. En revanche, le Hamas a plus de crédit dans sa démarche et plus de cohérence. Il est aussi moins corrompu. L’assassinat de cheikh Yassine va sans doute donner au Hamas une nouvelle opportunité pour renforcer sa position dans la bande de Gaza, notamment après le retrait de l’armée israélienne.

Yasser Arafat sera-t-il la prochaine cible de l’armée israélienne ?

Je ne crois pas que cela sera le cas, dans un avenir immédiat. Le gouvernement de Sharon a certes menacé à plusieurs reprises de liquider physiquement le président palestinien. Mais je pense que Yasser Arafat est protégé par un accord tacite passé entre Washington et ses alliés arabes, notamment l’Égypte et l’Arabie Saoudite. Pour ne pas mettre en difficulté leurs meilleurs alliés dans la région, les Américains ont donc interdit à Israël de le tuer ou de l’expulser des Territoires autonomes. Une consigne que Tel-Aviv va respecter.

Hier, l’Union européenne a fermement condamné l’assassinat de cheikh Yassine alors que les États-Unis se sont contentés d’appeler les deux parties à la retenue.

Comment expliquez-vous ce décalage entre les deux positions ?

Les États-Unis considèrent le mouvement Hamas comme une organisation terroriste. Pour eux, cheikh Yassine était un chef terroriste qui émettait des fetwas autorisant des attaques suicides contre des civils. L’Europe n’a intégré la branche politique du Hamas dans sa liste d’organisation terroriste que récemment.

Mais les Européens continuaient à voir en la personne de cheikh Yassine un dirigeant politique qui n’agit pas sur le terrain. Et surtout l’Europe cherche toujours à calmer le jeu pour donner un maximum de chances au processus de paix. Ce qui n’est pas le cas des États-Unis : en cette période préélectorale, George W. Bush n’a plus les moyens de peser sur le gouvernement israélien.

Propos recueillis par Lounes Guemache

Les Palestiniens crient vengeance
“Guerre ouverte”

Les différentes organisations palestiniennes semblent décidées à s’unir pour faire vivre l’enfer à Israël. Elles déclarent la guerre ouverte et promettent l’enfer à Israël.
L’attentat qui a tiré brutalement les Palestiniens de leur sommeil plongera, à coup sûr, les territoires occupés dans un véritable engrenage. Le pire est à craindre désormais. Jamais l’espoir de paix n’a été aussi menacé et ébranlé. En fait, c’est toute la région du Proche-Orient qui risque de basculer dans l’horreur. Une provocation israélienne dont la riposte palestinienne peut s’avérer plus sanglante et ouvrir la voie à toutes sortes de représailles.
Promettre de venger l’un des symboles de la résistance a d’ailleurs été la première réaction de milliers de Palestiniens qui ont envahi les rues pour crier leur colère.

Et ce n’est probablement que les premiers pas d’un long et désastreux soulèvement qu’Israël a programmé et risque de regretter. Le ton a été annoncé dès les premières heures qui ont suivi le raid. “La guerre est désormais ouverte avec ces assassins, ces criminels et ces terroristes”, a affirmé M. Rantissi dans une déclaration diffusée par la chaîne de télévision Al-Arabiya. “Ce ne sera pas une revanche mais une guerre ouverte”, a ajouté le responsable du Hamas, avertissant les Israéliens qu’“ils n’auront plus de sécurité qu’en dehors de la Palestine”. “Mais à l’intérieur de la Palestine, il n’y aura point de sécurité pour les sionistes et les juifs qui souillent nos lieux saints et assassinent nos dirigeants musulmans”, a-t-il menacé. “Par ce crime, Sharon, le méprisable, a voulu tuer les droits du peuple palestinien à une patrie, à ses lieux saints et au retour [de ses réfugiés], mais je dis à Sharon et aux autres dirigeants des bandes sionistes qu’ils ne réussiront pas”, a encore dit M. Rantissi. Dénonçant “une guerre contre l’Islam” en Palestine et en Irak, le dirigeant du Hamas a incité les musulmans à “se réveiller de leur sommeil, à revenir à la raison et à faire trembler le sol sous les pieds des sionistes”. De son côté, l’aile militaire du Hamas a promis de tuer des “centaines” d’Israéliens, dans un communiqué parvenu à l’AFP.

“Celui qui a pris la décision d’assassiner Cheikh Ahmad Yassine a, en fait, décidé de tuer des centaines de sionistes”, ont affirmé les Brigades Ezzedine Al-Qassam. “Les sionistes n’ont pas perpétré cet acte sans obtenir le feu vert de l’administration américaine terroriste et celle-ci doit assumer la responsabilité pour ce crime”, ajoute le même communiqué. Pour Al-qassam aussi, la riposte à l’assassinat du cheikh Yassine dépassera le cadre des territoires palestiniens et d’Israël. “Tous les musulmans dans le monde islamique auront l’honneur de participer à la riposte à ce crime”, soulignent encore ces brigades. Intervenant sur la chaîne de télévision Al-Arabia, un interlocuteur des Brigades des martyrs d’Al-Aqsa, un groupe lié au mouvement Fatah de Yasser Arafat, a promis une réplique “dans les heures qui viennent” à cet assassinat. “La réaction palestinienne à cet acte lâche sera un tremblement de terre dans les heures qui viennent”, a déclaré l’interlocuteur, qui se présentait comme Abou Qoussaï, “chef des Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa”. “Nous déclarons, à notre tour, la guerre au peuple sioniste, contre tous les sionistes se trouvant aussi bien à l’intérieur de la Ligne verte de 1948 [Israël] ou dans les territoires occupés depuis 1967.”

La colère des Palestiniens est à son paroxysme et les premières menaces ont même été exécutées. Armé d’une hache, un Palestinien a attaqué une base de l’armée israélienne près de Tel-Aviv. Trois personnes ont été blessées.

Malika Ben, Liberté