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L’aide atteint enfin les zones les plus isolées d’Asie du Sud

lundi 3 janvier 2005, par nassim

BANDA ACEH, Indonésie - L’aide humanitaire a finalement atteint par les airs, dimanche, les zones les plus dévastées par les raz-de-marée de la semaine dernière, dans le nord de Sumatra, où en dépit des efforts déployés, le bilan devrait encore s’alourdir du fait des épidémies et du dénuement.

Les hélicoptères américains et indonésiens chargés de vivres et d’eau potable, qui se sont posés pour la première fois sur la côte nord-ouest de l’île indonésienne, ont été assaillis par des rescapés affamés. Plus de la moitié des 129.817 morts officiellement recensés dans toute l’Asie du Sud ont péri sur cette côte, la plus proche de l’épicentre du séisme de magnitude 9 à l’origine des raz-de- marée. Selon les Nations unies, deux semaines supplémentaires seront nécessaires pour venir en aide à tous les villages dévastés, ce qui laisse le champ libre à la faim, à la déshydratation et aux affections en tous genres. L’Unicef a d’ores et déjà signalé la mort de plusieurs enfants atteints de pneumonie dans la province d’Aceh.

Près de Banda Aceh, chef-lieu de la province, la frénésie suscitée par l’arrivée de l’aide a contraint les équipes de secours à renoncer aux distributions. Quelques hélicoptères ont essayé de se poser dans les villages côtiers aux alentours de Banda Aceh, mais la foule, qui a désespérément besoin de vivres, les a empêchés d’atterrir, déplore le Programme alimentaire mondial (Pam). Jan Egeland, responsable de l’aide d’urgence aux Nations unies, a évalué à 1,8 million le nombre de personnes ayant besoin d’une assistance alimentaire. Dans les trois jours, 700.000 Sri Lankais devraient en bénéficier, a-t-il précisé ajoutant que la tâche serait plus longue pour le million d’Indonésiens dans la même situation.

"LES CHOSES S’ARRANGENT LENTEMENT"
Au Sri Lanka, ou le bilan avoisine les 30.000 morts, des inondations dues aux pluies torrentielles sont venues s’ajouter au calvaire des rescapés. On reste par ailleurs sans nouvelles de nombreuses îles des archipels indiens d’Andaman et de Nicobar.

En Indonésie, en revanche, le porte-avions Abraham Lincoln, qui a jeté l’ancre au large de Sumatra, a apporté un net regain d’optimisme. "L’arrivée du navire américain avec des hélicoptères qui ont été en mesure d’atteindre la côte ouest constitue un changement majeur", a souligné Michael Elmquist, coordonnateur des opérations de secours de l’Onu en Indonésie.

"La situation logistique se présente nettement mieux qu’il y a quelques jours (...) Les choses s’arrangent lentement", a-t-il poursuivi. Le capitaine Larry Burt, commandant d’une unité héliportée du porte-avions Lincoln, a dit avoir vu des cadavres dériver jusqu’à 20 milles du rivage. "C’est indescriptible", s’est-il exclamé de retour d’une mission sur la côte occidentale. "Sur les hauteurs, on voit des gens qui agitent des drapeaux pour qu’on les repère. Mais il y en a tellement qu’on ne peut pas s’arrêter à chaque fois."

DIX TOURISTES RETROUVES VIVANTS A WEH

L’année 2005 a apporté de nouveaux engagements financiers, le Japon ayant promis un demi milliard de dollars tandis que Washington, avec 350 millions de dollars, multipliait par dix sa contribution initiale, portant les promesses de dons à deux milliards de dollars (près d’un milliard et demi d’euros).

Aussi importante soit-elle, la mobilisation humanitaire internationale reste confrontée au véritable cauchemar logistique qui consiste à acheminer l’aide aux près de cinq millions de sans abri. "Le carnage est d’une ampleur qui défie l’entendement", a déclaré George Bush, qui a dépêché son frère Jeb, gouverneur de Floride, ainsi que le secrétaire d’Etat Colin Powell dans la région, dimanche. Washington a en outre envoyé 1.500 soldats au Sri Lanka.

Kofi Annan est quant à lui attendu jeudi en Indonésie où il lancera probablement un nouvel appel à la mobilisation internationale. Qualifiant la catastrophe de "plus grande tragédie à laquelle nous ayons été confrontés", le secrétaire général de l’Onu a estimé que la reconstruction pourrait prendre jusqu’à dix ans. A Calang, à 150 km au sud de Banda Aceh, les autorités ont tout simplement renoncé devant l’ampleur de la tâche, 70% des quelque 10.000 habitants ayant trouvé la mort. "Il n’y aura plus jamais de vie ici", a tranché Alwi Shihab, ministre indonésien des Affaires sociales, ajoutant que plusieurs villages avaient connu le même sort.

Outre l’Indonésie qui a payé le plus lourd tribut à la catastrophe, 12 pays ont été directement frappés. L’Inde, qui a refusé l’aide internationale, déplore près de 15.000 tués et 5.000 personnes, dont de nombreux touristes, ont trouvé la mort en Thaïlande. Au nombre des pays européens les plus touchés, la Suède a réduit dimanche d’un tiers le nombre de ses ressortissants disparus. Au terme de multiples vérifications, le total a ainsi été ramené de 3.686 à 2.915 disparus. Stockholm avait auparavant estimé qu’un millier de Suédois avaient pu trouver la mort dans la catastrophe.

Dix touristes étrangers, venant de Grande-Bretagne, du Canada, du Japon, des Pays-Bas et de Suisse ont par ailleurs été retrouvés vivants sur la petite île de Weh, au large de la province d’Aceh.

Par Tomi Soetjipto et Dean Yates, Reuters