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Le défi ukrainien

samedi 27 novembre 2004, par Hassiba

En cette seconde moitié de novembre 2004, l’Ukraine vit des moments historiques. Deux Viktor, Ianoukovitch et Iouchtchenko, candidats qui se disputent le résultat final de l’élection présidentielle de ce pays, tiennent en haleine tout le pays.

Le premier, donné officiellement vainqueur, est contesté dans la rue. Hier, le proclamé « successeur » de Léonid Koutchma à la tête de l’Etat ukrainien n’a pu se rendre au siège du gouvernement du fait que le bâtiment a été bloqué par des manifestants de l’opposition qui soutiennent leur chef Viktor Iouchtchenko. Ce dernier est considéré comme un « pro-occidental » alors que le Premier ministre « victorieux » de la controversée élection, Viktor Ianoukovitch, est ouvertement « pro-russe ».

Le « Mur », pourtant déclaré en chute à Berlin voilà maintenant près d’une décennie et demie, ne l’a-t-il été que symboliquement ? Décidément, la guerre froide n’a pas fini de surprendre. Et ses soubresauts et réminiscences sont là, à Kiev, comme l’an dernier à Tbilissi (Géorgie) et il y a quelques années à Belgrade (ex-Yougoslavie) et partout ailleurs dans les zones d’influence de l’ex-Union soviétique où le maintien du poids de Moscou s’est toujours manifesté.La Russie, une superpuissance que handicape néanmoins son relatif et considérable retard économique par rapport aux deux autres principaux blocs que sont l’Europe et les Etats-Unis, se voit de la sorte poussée dans ses derniers retranchements. Sa sphère d’influence se réduit davantage bien que, dans ce cas précis, Washington soit demeuré discret. Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, évoque à ce propos, en mettant à l’index hier « certains Etats » de faire sortir la situation ukrainienne du champ du droit, une tendance vers le traçage de « nouvelles lignes de partage » sur le « Vieux Continent » dans le but d’amener l’Ukraine à rejoindre le camp occidental.

Le ballet diplomatique en terre ukrainienne pour la recherche d’une solution à la crise par la négociation et le dialogue entre les deux parties rivales peut certes déboucher sur l’invalidation des résultats de ce scrutin de la discorde -via probablement la saisine de la Cour suprême d’Ukraine-, mais il reste que la rude bataille que se mènent sur le terrain pouvoir et opposition va au-delà des frontières de ce pays convoité pour sa position hautement stratégique pour se poser en véritable bras de fer entre l’Est et l’Ouest. En une réelle querelle géopolitique.

A la différence, tranchant avec l’équilibrisme d’antan, que l’Occident est aujourd’hui de plus en plus pesant. Non seulement en Europe mais dans le monde entier, on flirte avec les limites de ce qui est humain. Bien plus que les huées racistes dans des stades de football, il y a des politiques étatiques qui ne cadrent le plus souvent qu’avec un seul intérêt sans trop se soucier de tout le reste, y compris donc de l’aspect humain. L’accueil triomphal réservé cette semaine à l’ancienne star sportive, Georges Weah, désormais dans la peau d’un candidat à l’élection présidentielle de 2005 au Liberia, laisse-t-il suggérer que les politiciens doivent trembler et que l’œuvre humaine devrait finir par s’imposer ? Si l’Algérie a récemment eu recours à la destruction des mines antipersonnel, d’autres pays en possèdent encore ; pis, continuent d’en planter. Et dans le meilleur des cas, et quand ce ne sont pas de pauvres enfants et malheureux bergers et paysans qui explosent en marchant dessus, ce sont de pauvres animaux que l’on envoie sauter sur les champs de mine !L’Ukraine ? Eh bien, il faudra espérer que c’est une vraie soif de démocratie qui y est enregistrée. C’est là le défi ukrainien. Car, a contrario, la guerre civile pointera et réveillera de douloureux souvenirs. Trop sanglants comme au début du siècle dernier.

Par Younes Hamidouche, la tribune-online.com