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Les aurores polaires n’aiment pas la symétrie

samedi 9 avril 2005, par Hassiba

Le spectacle nocturne des aurores polaires est toujours magnifique. Il se manifeste, tant dans l’hémisphère Nord que dans l’hémisphère Sud, par l’apparition de draperies lumineuses de couleur verte, orangée ou rouge dansant sur la voûte céleste.

Ce ballet fascinant et silencieux que produit la nature résulte d’un ensemble d’interactions complexes entre les particules émises par le Soleil (le vent solaire) et la magnétosphère terrestre.

Cette extension dans l’espace du champ magnétique se présente sous la forme d’un gros cocon dissymétrique. Lorsque le Soleil brille ­ du côté "jour" pour nous ­, la magnétosphère est très aplatie par l’onde de choc produite par le vent solaire. Du côté "nuit", elle s’étend en une longue queue magnétique. Entre ces deux zones, les lignes de force du champ magnétique terrestre sortent verticalement aux pôles, pour former ce qu’on appelle les "cornets" polaires.

D.R.
L’aurore polaire résulte d’un ensemble d’interactions complexes entre les particules émises par le Soleil (le vent solaire) et la magnétosphère terrestre.

"OVALE AURORAL"
Bien que la magnétosphère protège la Terre et les êtres vivants des particules (électrons et protons) du vent solaire, certaines d’entre elles pénètrent quand même dans la haute atmosphère par ces fameux cornets. D’autres encore s’insinuent dans la longue queue de la magnétosphère et reviennent vers les pôles en suivant les lignes de force du champ.

"Toutes ces particules sont alors accélérées vers la Terre, processus qui est à l’origine des aurores polaires, explique Wlodek Kofman, du Laboratoire de planétologie du CNRS (université Joseph-Fourrier, Grenoble). Elles frappent l’atmosphère terrestre autour des pôles en formant une bande circulaire appelée ovale auroral, dont le diamètre varie en fonction de l’activité solaire." En période de fortes convulsions de notre étoile, cet ovale peut s’étendre jusqu’à des latitudes tempérées et donner lieu, comme, en 1937, à une aurore visible depuis l’Ardèche !

En s’engouffrant dans l’atmosphère, les particules solaires entrent en collision avec les ions, les atomes et les molécules ambiantes, qui se désexcitent ensuite en émettant des photons, qui donnent aux aurores leur magie de couleurs. Ainsi, l’oxygène émet une lumière rougeâtre quand il est présent sous forme ionisée (300 km d’altitude) et jaune verdâtre sous sa forme moléculaire (vers 100 km). L’azote moléculaire émet une lumière rouge pâle et l’azote ionisé une lumière bleue ou violette.

Les satellites en orbite autour de la Terre ont jusqu’à présent permis de voir ces aurores polaires depuis l’espace, mais jamais en même temps aux deux pôles. Grâce à l’alignement, en octobre 2002, des orbites de deux satellites américains, Polar et Image (Imager for Magnetopause to Aurora Global Exploration), c’est désormais chose faite. "Pour la première fois, nous avons observé des aurores dans leur totalité dans les deux hémisphères", se réjouit Timothy Stubbs, du laboratoire de physique extraterrestre du Goddard Space Flight Center, organisme qui dépend de la NASA.

Les analyses des images prises par les satellites ont surpris les scientifiques. Car elles montrent que les ovales auroraux des deux hémisphères ne sont pas les "miroirs" l’un de l’autre comme on le pensait jusqu’à présent. Ils bougent l’un par rapport à l’autre dans des directions opposées en fonction du champ magnétique solaire transporté avec le vent solaire, ou encore en relation avec la position du pôle Nord magnétique de la Terre par rapport au Soleil.

"Cette annonce montre l’importance d’observations simultanées pour réaliser des analyses fines des aurores polaires", ajoute Wlodek Kofman. En tout cas, le planétologue n’est pas surpris par la découverte américaine, car "les aurores boréale et australe résultent de phénomènes très complexes que l’on n’a pas encore complètement élucidés". Ces étranges phénomènes ne concernent pas seulement la Terre. Des aurores polaires ont aussi été détectées sur les deux planètes géantes du système solaire, Jupiter et Saturne, par le télescope spatial Hubble.

Par Christiane Galus, lemonde.fr