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Traitement de la maladie d’Alzheimer

mercredi 27 avril 2005, par nassim

Un essai de thérapie génique préliminaire pour huit personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer semble avoir été bien supporté et a donné quelques résultats encourageants.

Certes l’absence de traitement susceptible de ralentir

Espoir dans le traitement de la maladie d’Alzheimer.

l’évolution inéluctable de cette démence progressive justifie la recherche même « héroïque ». On se demande malgré tout quel avenir de telles techniques complexes pourraient avoir, si elles font un jour la preuve de leur bénéfice pour les malades, lorsqu’il s’agira de les proposer à des centaines de milliers voire des millions de sujets. Une équipe de neurochirurgiens de l’université de San Diego (Californie) vient d’annoncer sur le site de la revue britannique Nature Medicine, avoir réalisé un essai préliminaire, dit de phase 1, chez huit personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, avec des résultats positifs à ce stade.

Les propres cellules de la peau de chaque patient (des fibroblastes) ont été modifiées génétiquement, grâce à l’introduction d’un gène humain normal, pour produire en plus grande quantité un facteur de croissance neurologique (NGF). Puis ces préparations de cellules vivantes ont été injectées à la base antérieure du cerveau, là où sont concentrés les neurones cholinergiques qui produisent le plus d’acétylcholine. Car ce sont essentiellement ces neurones cholinergiques qui dégénèrent dans la maladie d’Alzheimer et qui expliqueraient les troubles intellectuels et de la mémoire des personnes malades.

Dans cette démence d’installation progressive - et aujourd’hui inexorable - la perte de synapses et de neurones serait la cause de la baisse d’acétylcholine au niveau cérébral. Or, depuis 1986, on sait dans les modèles animaux que le facteur de croissance neurologique, NGF, stimule ces neurones cholinergiques, en particulier en favorisant la pousse de nouvelles connexions nerveuses qui améliorent la communication avec les cellules nerveuses voisines. Les chercheurs ont donc depuis longtemps voulu tester l’efficacité du NGF chez des sujets humains atteints de maladie d’Alzheimer. Mais le NGF ne peut pas être injecté par voie sanguine au patient. Comme l’explique dans Nature Medicine l’auteur principal, Mark Tuzynski : « Lorsqu’il est injecté directement dans les ventricules du cerveau, le NGF provoque d’intolérables effets secondaires du fait de sa diffusion importante, en particulier des douleurs très vives, une importante perte de poids, des migrations cellulaires dans la moelle épinière. »

Pour être utilisable cliniquement, le NGF doit donc répondre à deux impératifs : il faut pouvoir en injecter suffisamment pour stimuler efficacement les neurones cholinergiques, mais seulement la zone malade pour éviter les effets secondaires. L’injection directe des cellules génétiquement modifiées de manière à produire ce facteur de croissance dans la zone de la base du cerveau, une thérapie génique d’un nouveau genre en somme, répond à ces objectifs.

Malheureusement, chez les deux premiers patients de l’expérience réalisée entre 2001 et 2002 et qui vient d’être rendue publique, des mouvements brusques lors de l’injection des cellules ont provoqué des hémorragies et des blessures cérébrales : un des deux malades est mort, quelques semaines après la procédure, de ces complications. Les autres patients ayant bénéficié de ces injections sous anesthésie générale n’ont eu aucun effet secondaire notable. Surtout, le facteur de croissance a stimulé leurs neurones : cela a pu être observé, par le biais d’une autopsie, pour un des malades décédés quelques années après l’injection : « C’est la première preuve directe que dans un cerveau humain, un neurone en voie de dégénérescence peut faire de nouvelles connexions nerveuses », a expliqué hier un des chercheurs, dans le Washington Post.

L’imagerie fonctionnelle cérébrale (par PET Scan) réalisée chez les personnes ayant participé à l’essai a également montré une activité métabolique supérieure. Une certaine amélioration du score mental et cognitif des malades a également été notée. Il faut souligner cependant que les malades ont de meilleurs scores à ces tests lorsque eux-mêmes et leurs médecins savent qu’ils ont reçu un nouveau traitement (ce que les ethnologues nomment l’effet Hawthorne). Mais attention, préviennent les auteurs de l’étude, « cet essai de phase 1 n’avait pour but que d’étudier la sécurité du traitement, pas son efficacité. Il faudra de longs mois voire plusieurs années pour connaître son efficacité exacte. Et surtout, la technique utilisée est trop complexe et risquée pour être mise en oeuvre pour traiter les 800 000 Français ou les 4,5 à 5 millions d’Américains victimes de la maladie d’Alzheimer... »

Par Jean-Michel Bader, lefigaro.fr