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Dans la nuit des temps, l’homo sapiens avait habité les grottes.
En 2008, «l’homo algerianus» y réside toujours.
Ce n’est absolument pas un canular, les troglodytes existent bel et bien chez-nous.
Pour ceux qui demeurent toujours sceptiques, qu’ils aillent à la bourgade balnéaire de Monte-Cristo, sur la route de la Corniche inférieure, pour qu’ils constatent de visu le destin de cet homme troglodyte, qu’on appellera Mohamed.
D’après le témoignage de ses voisins, Mohamed le solitaire, âgé d’une quarantaine d’années, habite cette grotte, située sur la paroi de la falaise qui borde la route, derrière la brigade de la Gendarmerie, depuis plus de trois années. Auparavant, cette grotte avait été également habitée par des SDF et des alcooliques.
Cependant, tous ses occupants avaient été retrouvés morts, quelques jours ou quelques mois après, ce qui lui vaudra le superlatif de «la grotte maudite».
L’imaginaire fantastique local a même donné des explications aussi fantasmagoriques que saugrenues, en se basant sur d’hypothétiques apparitions du diable, «Cheïtane». D’après les anciens du quartier, «un enfant qui jouait à l’intérieur de la grotte avait été possédé par Satan en personne.
Oui, et tous les exorcistes de l’Oranie n’ont pu chasser le diable. Il a fallu une armada de talebs, ramenés spécialement de Fès (Maroc) pour que l’enfant soit exorcisé.
Les parents de l’enfant qui étaient riches, ont dépensé une somme faramineuse pour sauver leur seul rejeton. Les talebs marocains ont également visité la grotte pour chasser le roi des Djinns. En psalmodiant les versets appris à coups de falaka, les exorcistes avaient disparu comme par enchantement».
D’autres évoqueront, continue à raconter notre interlocuteur, que «tout simplement, les talebs ont pris la poudre d’escampette, après que Cheïtane les a projetés à l’extérieur par son souffle infernal». Enfin, c’est la légende mais la réalité est que Mohamed habite cette grotte qui constitue son seul refuge, sans se préoccuper de ces histoires d’outre...
monde.
Ces histoires diaboliques protègent en fin de compte Mohamed et chassent du périmètre de la grotte les rôdeurs les plus téméraires.
S’étendant sur à peine quatre mètres carrés, la grotte est séparée en deux par un lit, entouré de deux supports en guise de tables de nuits.
Sur l’une d’elle, un bouquet de fleurs sauvages...un peu fanées, adoucit l’étrangeté des lieux. Derrière, au fond de la grotte, une table fait office de cuisine. Des assiettes et des verres y sont exposés.
Le parterre de la grotte est soigneusement balayé. Enfin, tout est bien ordonné. Même le lit a été refait avant que Mohamed ne le quitte, à l’aube, pour partir à la quête de son pain quotidien. Mohamed ramasse tout au long de la route de la Corniche les déchets en plastique et en verre, jetés par les automobilistes, pour les vendre ensuite au kilo à des recycleurs.
La petite charrette fabriquée par Mohamed pour acheminer les déchets collectés est toujours stationnée, au bas de la falaise. A l’extérieur, tout est également nettoyé et agencé minutieusement. Mohamed a même planté un arbre à l’entrée de la grotte et des étagères pour y exposer ses outils.
Sur le gabionnage qui a été installé pour soutenir la falaise et empêcher la chute des pierres sur la route, un amalgame de clefs et autres objets insolites sont accrochés. Un fantasme de ménage qui reflète absolument des envies domestiques de Mohamed ainsi que son caractère tout à fait sociable. Mohamed le taciturne qui a peur qu’on le dérange dans son monde, ne demande rien à l’Etat.
Interrogé sur sa vie d’avant, Mohamed prit sa tête entre les mains et lancera: «Je suis bien chez-moi. Je me couvre bien la nuit, je risque rien», avant de rentrer chez lui, dans la grotte, en hissant un rideau épais, qui le protège des regards curieux. Et du froid...des cœurs de ces concitoyens.
- Pressdz
En 2008, «l’homo algerianus» y réside toujours.
Ce n’est absolument pas un canular, les troglodytes existent bel et bien chez-nous.
Pour ceux qui demeurent toujours sceptiques, qu’ils aillent à la bourgade balnéaire de Monte-Cristo, sur la route de la Corniche inférieure, pour qu’ils constatent de visu le destin de cet homme troglodyte, qu’on appellera Mohamed.
D’après le témoignage de ses voisins, Mohamed le solitaire, âgé d’une quarantaine d’années, habite cette grotte, située sur la paroi de la falaise qui borde la route, derrière la brigade de la Gendarmerie, depuis plus de trois années. Auparavant, cette grotte avait été également habitée par des SDF et des alcooliques.
Cependant, tous ses occupants avaient été retrouvés morts, quelques jours ou quelques mois après, ce qui lui vaudra le superlatif de «la grotte maudite».
L’imaginaire fantastique local a même donné des explications aussi fantasmagoriques que saugrenues, en se basant sur d’hypothétiques apparitions du diable, «Cheïtane». D’après les anciens du quartier, «un enfant qui jouait à l’intérieur de la grotte avait été possédé par Satan en personne.
Oui, et tous les exorcistes de l’Oranie n’ont pu chasser le diable. Il a fallu une armada de talebs, ramenés spécialement de Fès (Maroc) pour que l’enfant soit exorcisé.
Les parents de l’enfant qui étaient riches, ont dépensé une somme faramineuse pour sauver leur seul rejeton. Les talebs marocains ont également visité la grotte pour chasser le roi des Djinns. En psalmodiant les versets appris à coups de falaka, les exorcistes avaient disparu comme par enchantement».
D’autres évoqueront, continue à raconter notre interlocuteur, que «tout simplement, les talebs ont pris la poudre d’escampette, après que Cheïtane les a projetés à l’extérieur par son souffle infernal». Enfin, c’est la légende mais la réalité est que Mohamed habite cette grotte qui constitue son seul refuge, sans se préoccuper de ces histoires d’outre...
monde.
Ces histoires diaboliques protègent en fin de compte Mohamed et chassent du périmètre de la grotte les rôdeurs les plus téméraires.
S’étendant sur à peine quatre mètres carrés, la grotte est séparée en deux par un lit, entouré de deux supports en guise de tables de nuits.
Sur l’une d’elle, un bouquet de fleurs sauvages...un peu fanées, adoucit l’étrangeté des lieux. Derrière, au fond de la grotte, une table fait office de cuisine. Des assiettes et des verres y sont exposés.
Le parterre de la grotte est soigneusement balayé. Enfin, tout est bien ordonné. Même le lit a été refait avant que Mohamed ne le quitte, à l’aube, pour partir à la quête de son pain quotidien. Mohamed ramasse tout au long de la route de la Corniche les déchets en plastique et en verre, jetés par les automobilistes, pour les vendre ensuite au kilo à des recycleurs.
La petite charrette fabriquée par Mohamed pour acheminer les déchets collectés est toujours stationnée, au bas de la falaise. A l’extérieur, tout est également nettoyé et agencé minutieusement. Mohamed a même planté un arbre à l’entrée de la grotte et des étagères pour y exposer ses outils.
Sur le gabionnage qui a été installé pour soutenir la falaise et empêcher la chute des pierres sur la route, un amalgame de clefs et autres objets insolites sont accrochés. Un fantasme de ménage qui reflète absolument des envies domestiques de Mohamed ainsi que son caractère tout à fait sociable. Mohamed le taciturne qui a peur qu’on le dérange dans son monde, ne demande rien à l’Etat.
Interrogé sur sa vie d’avant, Mohamed prit sa tête entre les mains et lancera: «Je suis bien chez-moi. Je me couvre bien la nuit, je risque rien», avant de rentrer chez lui, dans la grotte, en hissant un rideau épais, qui le protège des regards curieux. Et du froid...des cœurs de ces concitoyens.
- Pressdz