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En Chine, des milliers d'entreprises ferment dans la région de Canton

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  • En Chine, des milliers d'entreprises ferment dans la région de Canton

    Le vaisseau amiral de l'économie chinoise navigue par gros temps, secoué par la tempête de la crise financière : la province du Guangdong qui, voici trente ans, fut la figure de proue de l'extraordinaire décollage de la Chine et en symbolisa plus tard la réussite, est aujourd'hui l'une des régions les plus touchées de la République populaire. "On pourrait dire que c'est ici que tout a commencé et que c'est ici que tout pourrait finir", grince un observateur étranger basé à Canton qui ne croit pourtant pas au scénario catastrophe.

    Le Guangdong (province de Canton ou Guangzhou, sud-est du pays) représente un tiers des exportations de la Chine, un huitième de ses recettes fiscales et 25 % des investissements étrangers. Si elle était une nation indépendante, elle serait la 23e économie mondiale !

    Depuis fin 2007, la machine à produire du miracle s'est grippée et le krach de septembre a amplifié la tendance. Entre janvier et juillet, plus de 3 000 PME de l'industrie du jouet, la plupart des sous-traitants, ont fermé boutique. Alors que personne n'a encore pu détrôner Hongkong de sa place de premier investisseur "étranger" dans le Guangdong (plus de 60 %), plusieurs milliers d'entreprises originaires de cette région voisine ont mis la clef sous la porte. Et les experts remarquent que 95 % d'entre elles ne reviendront pas en Chine continentale, préférant se délocaliser au Vietnam, au Cambodge, au Bangladesh. Surtout celles du secteur textile. Outre l'industrie du jouet, les fabricants de chaussures et d'ameublement sont les principales victimes.

    Le renchérissement des matières premières, l'appréciation de la monnaie chinoise, le yuan, la flambée des prix du pétrole, le coût social plus élevé en raison de lois destinées à garantir les droits des ouvriers, la hausse des salaires et l'augmentation du salaire minimum, ainsi que les velléités gouvernementales de protéger l'environnement et de garantir la sécurité du consommateur ont rajouté des contraintes aux menaces qui planent sur la province.

    "LA CRISE EST LÀ ET BIEN LÀ"

    Les experts hongkongais interrogés craignent presque tous que le pire soit à venir. "C'est vrai, la crise est là et bien là, mais elle pourrait à terme être positive", tempère Joël Pujol, entrepreneur venu s'établir dans la région il y a dix-sept ans et qui porte la casquette de vice-président de la Chambre de commerce et d'industrie française en Chine.

    Pour lui, une autre phase s'annonce : "La crise pourrait permettre au Guangdong de perdre ce qui l'a fait connaître : son statut d'atelier du monde. Il devra ne plus compter seulement sur la production de produits à faible valeur ajoutée et acquérir l'image d'un atelier plus sophistiqué de produits high tech." Un espoir en phase avec l'ambition du nouveau secrétaire du parti, Wang Yang, qui a dénoncé dans un discours le faible niveau de compétitivité des entreprises de sa province et souhaité que le Guangdong cesse de se cantonner au rôle de sous-traitant de la planète.
    Les conséquences de la crise se font déjà sentir sur l'emploi. Selon le site Sina.com, des milliers d'ouvriers migrants sont en train de quitter le delta de la rivière des Perles et rentrent dans leurs campagnes, faute de travail. Des responsables de la gare de Canton ont indiqué que 130 000 voyageurs quittent chaque jour la métropole en train.

    "La crise aura plus d'impact sur les grandes entreprises, car les PME finiront bien par rebondir", estime M. Xu, un ouvrier qualifié qui préfère ne donner ni son prénom ni le nom de son entreprise parce qu'il est en procès avec son employeur. Son entreprise, qui fabrique des câblages d'ordinateurs pour General Electric et 3M, "n'est pas en faillite mais va très mal", précise-t-il. "Je suis au chômage depuis que j'ai démissionné après le refus du patron de payer au tarif légal mes heures supplémentaires", raconte cet homme de 38 ans, originaire de la province d'Henan.

    Il a tenté de faire valoir ses droits auprès d'une instance d'arbitrage, sorte de juridiction prud'homale, mais il a été débouté. Ne lui reste plus que la possibilité de saisir le tribunal proprement dit. "Je suis pessimiste, constate M. Xu. Je vais essayer de me reconvertir dans les assurances. La plupart des entreprises contournent les lois", explique cet ouvrier qui gagnait un salaire assez élevé pour la Chine : 4 500 yuans (environ 524 euros) par mois.

    La loi sur le travail, entrée en vigueur au 1er janvier 2008, a entraîné une moins grande flexibilité du marché de l'emploi et un renchérissement des coûts de production, selon les entrepreneurs. La nouvelle législation impose à l'employeur de fournir un contrat de travail à son employé, ce qui vaut à ce dernier un niveau de protection inédit dans ce pays sans syndicat libre et où des ouvriers doivent coudre les jambes de 1 000 nounours en douze heures...
    "Cette loi a été contournée de manière systématique", accuse Zhang Zhiru, directeur de l'association Vent du printemps, une ONG défendant le droit des ouvriers de Shenzhen. Il affirme que la Cour suprême du Guangdong vient de faire passer une circulaire secrète promettant aux patrons l'impunité s'ils ne paient pas les heures supplémentaires !

    Le Monde
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