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La crise se propage et la liste des pays secourus par le FMI va s'allonger

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  • La crise se propage et la liste des pays secourus par le FMI va s'allonger

    Après l'Islande, la Hongrie, l'Ukraine, bientôt le Pakistan et peut-être le Liban... Le G20 a confirmé, samedi 15 novembre, le Fonds monétaire international (FMI) dans son rôle de pompier volant, chargé d'étouffer les départs de feux avant qu'ils ne se communiquent, de pays en pays, à la planète entière. Rude mission car l'incendie se propage très rapidement : "Le besoin de liquidités des investisseurs financiers internationaux les amène à vendre des actifs un peu partout dans le monde : tous les pays sont touchés par la contagion boursière", explique Jean-Louis Mourier, coresponsable de la recherche économique de la société de Bourse Aurel. "Les pays du G7 ont exporté leur crise de liquidités vers les pays émergents, même ceux qui étaient "sains"", ajoute Sylvain Broyer, responsable du département économie de Natixis.

    Baisse de la demande mondiale, chute du prix des matières premières, recul du crédit, volatilité des monnaies : les canaux de transmission sont nombreux et atteignent, in fine, l'économie "réelle" - les ménages et les entreprises -, sous la forme, bien concrète, de pertes de commandes, de factures non honorées, de refus de prêts bancaires, de faillites et de suppressions d'emplois. D'où l'intérêt du suivi des "incidents de paiement graves" réalisé pays par pays par la Coface, l'un des leaders du marché de l'assurance-crédit.

    La chronologie des dégradations notées par la Coface retrace le mécanisme de propagation de la crise du crédit. Dès janvier, les Etats-Unis, l'Espagne et le Portugal sont touchés, indique Yves Zlotowski, son économiste en chef. " Il s'agit, pour les deux premiers, de pays où les anticipations de croissance étaient fortes, et la prise de risque par conséquent plus élevée. L'éclatement de la bulle immobilière a inversé du jour au lendemain les perspectives." En mars, c'est le tour du Royaume-Uni, de l'Irlande, du Japon, de l'Italie et des pays Baltes, mais aussi du Canada et du Mexique. "Pour ces deux derniers, comme pour le Portugal en janvier, c'est moins la situation locale que le voisinage avec les pays épicentres de la crise qui explique la dégradation", poursuit M. Zlotowski : pertes de marchés, effet de la défaillance d'un donneur d'ordres, retour des immigrés, premières victimes de l'ajustement dans le pays hôte. Sans parler de la perte de confiance face aux difficultés du grand voisin.

    En septembre, c'est à la France, à l'Islande et à Hongkong de témoigner de la montée des défauts de paiement. Pour la France - comme pour l'Italie et le Japon en mars -, "il s'agit surtout des conséquences de la crise bancaire et d'une crise de confiance qui mine l'investissement et engendre une forte aversion au risque". Simultanément, les pays émergents caractérisés par un fort taux d'endettement des ménages et des entreprises, souvent débiteurs en devises, sont aussi touchés : Vietnam, Afrique du Sud, Hongrie et, à nouveau, les pays baltes.
    "L'Argentine et la Hongrie ont d'importantes dettes externes, publiques et privées, à court terme et en dollars", ce qui les fragilise face à la raréfaction des capitaux, explique M. Broyer : la première doit l'équivalent de 15,6 % de son produit intérieur brut (PIB), exigible à moins de deux ans, et la seconde 11,2 %. De plus - syndrome islandais -, l'expansion du crédit a été "particulièrement robuste" en 2007 dans les pays émergents d'Europe (+ 60 % en Roumanie, + 51 % en Russie, au-delà de 40 % dans les pays baltes), en Amérique latine (+ 37 % en Argentine, + 29 % au Brésil) ou au Vietnam (+ 50 % en rythme annuel au quatrième trimestre 2007), selon Goldman Sachs. Aujourd'hui, cette bulle de crédit éclate, touchant surtout les pays d'Europe centrale et de l'Est ayant un peu trop anticipé leur entrée dans la zone euro : des banques européennes se sont par exemple installées en Hongrie pour accorder des prêts en euros aux ménages et aux entreprises, à des taux inférieurs au loyer de l'argent en monnaie locale. "Mais en février 2007, le pays a dû laisser flotter le forint, qui s'est beaucoup déprécié sous l'effet d'attaques spéculatives tandis que l'entrée dans la zone euro a été repoussée...", explique M. Broyer. Ce type de scénario, craint M. Zlotowski, pourrait s'étendre à d'autres pays qui ont jusqu'ici résisté : la Roumanie, la Bulgarie, "très vulnérables au credit crunch (pénurie de crédit, NDLR)".

    Mais ce sont les notes du Brésil, de la Russie, de l'Inde et de la Chine - les BRIC - que scrute avec le plus d'inquiétude la Coface. Pour l'instant, leurs entreprises résisteraient bien. Le maintien d'une importante consommation interne, mais surtout les immenses liquidités dont elles disposent, elles-mêmes ou via les banques centrales de leurs Etats, leur ont permis d'éviter les défaillances, à l'instar de la Russie. La dette externe brésilienne à court terme pèse seulement 2,5 % de son PIB, la russe 3,7 %, la chinoise 6,2 % et l'indienne 1,2 %, selon Natixis. "La dépendance à l'égard des capitaux étrangers est moins importante que lors de la crise asiatique de 1997. Beaucoup de pays ont accumulé des excédents, des réserves de change, même si elles ne seront pas forcément suffisantes...", explique M. Mourier.

    Le choc mondial auquel les BRIC sont confrontés est multiforme. La baisse de la demande occidentale se répercute sur la production chinoise, et plus violemment encore dans la chute des prix des matières premières, qui touche la Russie, le Venezuela, le Brésil, le Mexique, etc. D'internationale, la crise de confiance peut finir par gagner l'intérieur. Marina Vlasenko, analyste de la Commerzbank, relate, dans une note du 13 novembre, que les retraits dans les banques russes pourraient atteindre 7 % en septembre-octobre, en se basant sur les données publiées dans la presse locale. Ce n'est sans doute pas fini.

    Mais, pour la Coface, c'est en Chine que le risque de défaut des entreprises apparaît aujourd'hui le plus plausible, même s'il ne s'est pas encore vérifié à une échelle suffisante pour justifier une dégradation de la note du pays. Toute la question, maintenant, est de savoir si la capacité d'injection de liquidités du système bancaire étatisé chinois et le plan de relance de 455 milliards d'euros annoncé par Pékin dimanche 9 novembre, seront à la hauteur des pertes abyssales qui pourraient survenir.

    Antoine Reverchon et Adrien de Tricorno

    Le Monde
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