La cour des comptes publie son rapport annuel pour l’année 2007
Cartons rouges pour les communes
241 magistrats financiers de la Cour des comptes ont sillonné le Maroc pour contrôler les institutions et organismes publics. Le bilan est effarant: le gaspillage et les passe-droits semblent être la règle dans la gestion de la chose publique.
C’est un rapport volumineux de 730 pages que vient de rendre public la cour des comptes pour l’année 2007. Un rapport réalisé au terme de 130 missions d’audit concernant plusieurs institutions publiques, chambres de commerce et d’industrie, communes, et autres établissements étatiques relevant de plusieurs ministères. 241 magistrats financiers, formés aux techniques les plus avancées en matière de contrôle des deniers publics, ont concouru à la réalisation de ce rapport, désormais accessible sur Internet sur le site officiel de la Cour des comptes. Ce qu’on y découvre est incroyable. Outre les anomalies et les dysfonctionnements relevés dans la gestion de certaines administrations, le rapport révèle plusieurs cas de dilapidation de deniers publics au degré de gravité variable d’un cas à l’autre.
C’est le cas notamment de l’Office national des hydrocarbures (Onhym), un organisme chargé, entre autres, d’effectuer les explorations pétrolières, qui dépend du ministère de l’Énergie et des Mines. Dans cet office, plusieurs bénéficiaires, dont l’ancien ministre de l’Énergie et des Mines, Mohamed Boutaleb, qui faisait partie du gouvernement Driss Jettou sous les couleurs du Mouvement populaire, puisaient dans ses fonds, contrevenant par là à toutes les règles de bonne gestion de l’argent public. Mohamed Boutaleb, alors qu’il ne faisait pas partie du personnel de l’Onhym, se servait de l’argent de ce dernier pour couvrir ses frais de déplacement à l’étranger sachant aussi que tous les voyages officiels du ministre sont pris en charge par le budget de l’Etat.
Autre organisme, autre scandale. Le centre hospitalier Ibnou Rochd de Casablanca été chargé à fond par le rapport de la Cour des comptes, pour le manque de rigueur dans sa gestion financière. Ce qui est encore plus scandaleux, dans cette gestion, c’est que le CHU impose aux indigents, sans base légale, des contributions qui peuvent aller de 200 dirhams pour l’hospitalisation jusqu’à 50% du tarif de base pour les analyses et la radiologie. Autre aberration relevée, les boxes d’accouchement sont en état d’insalubrité et de vétusté, à tel point que les mort-nés demeurent élevés. Idem également pour le taux de mortalité. Ce taux pour les disciplines de réanimation dépasse 300 cas pour 1.000.
Chevauchement
Dans un tout autre registre qui se rapporte à la gestion communale, le rapport de la Cour des comptes recense toutes les aberrations qu’il a relevées dans plusieurs communes contrôlées. À commencer par le conseil de la ville de Casablanca, accusé par la Cour des comptes de ne pas toujours respecter la procédure de l’octroi des marchés publics. Que ce soit au niveau des appels d’offres ou pendant l’exécution de ces marchés. Les chevauchements constatés entre les différents services du conseil conduisent également à une mauvaise gestion des frais dont bénéficient généralement tous les agents de la commune.
Le conseil de la ville de Casablanca est aussi pointé du doigt pour avoir mal géré et mal entretenu les parcs d’attraction de la ville, qui souffrent dans leur majorité d’une grave crise de propreté. Ce qui a conduit à leur occupation par les SDF et les sans abris, transformant ces espaces initialement réservés aux loisirs et à la détente pour la population de Casablanca en des lieux infréquentables et même dangereux.
Le conseil de la ville de Marrakech n’est pas épargné. Les critiques et les remarques à l’encontre de ce conseil, présidé par Omar Jazouli, foisonnent dans le rapport. La plus importante d’entre elles concerne la mauvaise gestion du domaine public communal. Par exemple, l’occupation de ce domaine par des panneaux publicitaires a attiré l’attention des contrôleurs de la Cour des comptes.
Dotations
L’opération en question démontre bon nombre de fraudes, telles l’absence de référence aux engagements financiers de l’exploitant, ou, plus grave encore, la prise en charge par la commune des dépenses relatives à la consommation de l’électricité utilisée pour le fonctionnement de ces panneaux. Plusieurs élus communaux profitent aussi de téléphones portables et de forfaits de communication en plus des dotations de voyage qui leur sont allouées chaque année. Pour ce qui est des marchés publics, certains travaux à Marrakech ont commencé avant même leur approbation par l’autorité de tutelle et les pièces justificatives se rapportant à ces travaux se contredisent.
Les mêmes griefs ou presque ont été également constatés dans un autre conseil de ville, celui de Fès cette fois-ci, dont les dettes ont atteint des niveaux «faramineux», selon l’expression du rapport. Ces dettes ont culminé à 600 millions de dirhams, sans compter les arrêts judiciaires, estimés à 100 millions de dirhams et les arriérés de consommation de l’éclairage, public dont la facture tourne autour de 200 millions de dirhams
Le conseil de la ville de Fès est aussi accusé d’avoir attribué des marchés publics avant même l’ouverture des plis. Ce qui constitue un manquement très grave à la loi sur les marchés publics.
Si la Cour des comptes a distribué des cartons rouges aux communes, son diagnostic de la gestion dans les chambres de commerce et d’industrie est sans appel. Les accusations sont graves: dépenses fictives, gaspillage, attribution des marchés sans appel à concurrence et centralisation des pouvoirs.
Ainsi, la chambre de commerce et d’industrie d’Agadir est la plus gravement critiquée. En effet, cette chambre n’a pas trouvé mieux, pour une souscription de police d’assurance, que de s’adresser à un bureau de courtage propriété de son président, Saïd Dor.
Détournement
Il ne s’agit pas d’un fait singulier puisque les services de la Cour des comptes stigmatisent le non-retours à la concurrence pour certaines prestations. Sont également pointés du doigt les dépassements de seuils de dépenses autorisés pour certaines rubriques ainsi que des fausses imputations pour certaines dépenses. Un grief qu’on retrouve dans d’autres chambres de commerce comme celle de Casablanca et de Tanger. Concernant la chambre de commerce de Casablanca, le rapport a relevé des sommes importantes qui se sont volatilisées dans la nature. On assimile cela à de détournements de fonds, mais rien n’est encore prouvé.
Toujours est-il, le rapport de la Cour des comptes, qui épingle d’autres institutions, comme la Société des autoroutes du Maroc, et certains régimes d’assurance, comme la CNOPS et le RCAR, ne contient que des remarques transcrites sur papier, mais jamais exposées devant la justice. On se demande alors quand nos responsables publics et nos élus rendront-ils des comptes à la Nation?
Maroc-hebdo
Cartons rouges pour les communes
241 magistrats financiers de la Cour des comptes ont sillonné le Maroc pour contrôler les institutions et organismes publics. Le bilan est effarant: le gaspillage et les passe-droits semblent être la règle dans la gestion de la chose publique.
C’est un rapport volumineux de 730 pages que vient de rendre public la cour des comptes pour l’année 2007. Un rapport réalisé au terme de 130 missions d’audit concernant plusieurs institutions publiques, chambres de commerce et d’industrie, communes, et autres établissements étatiques relevant de plusieurs ministères. 241 magistrats financiers, formés aux techniques les plus avancées en matière de contrôle des deniers publics, ont concouru à la réalisation de ce rapport, désormais accessible sur Internet sur le site officiel de la Cour des comptes. Ce qu’on y découvre est incroyable. Outre les anomalies et les dysfonctionnements relevés dans la gestion de certaines administrations, le rapport révèle plusieurs cas de dilapidation de deniers publics au degré de gravité variable d’un cas à l’autre.
C’est le cas notamment de l’Office national des hydrocarbures (Onhym), un organisme chargé, entre autres, d’effectuer les explorations pétrolières, qui dépend du ministère de l’Énergie et des Mines. Dans cet office, plusieurs bénéficiaires, dont l’ancien ministre de l’Énergie et des Mines, Mohamed Boutaleb, qui faisait partie du gouvernement Driss Jettou sous les couleurs du Mouvement populaire, puisaient dans ses fonds, contrevenant par là à toutes les règles de bonne gestion de l’argent public. Mohamed Boutaleb, alors qu’il ne faisait pas partie du personnel de l’Onhym, se servait de l’argent de ce dernier pour couvrir ses frais de déplacement à l’étranger sachant aussi que tous les voyages officiels du ministre sont pris en charge par le budget de l’Etat.
Autre organisme, autre scandale. Le centre hospitalier Ibnou Rochd de Casablanca été chargé à fond par le rapport de la Cour des comptes, pour le manque de rigueur dans sa gestion financière. Ce qui est encore plus scandaleux, dans cette gestion, c’est que le CHU impose aux indigents, sans base légale, des contributions qui peuvent aller de 200 dirhams pour l’hospitalisation jusqu’à 50% du tarif de base pour les analyses et la radiologie. Autre aberration relevée, les boxes d’accouchement sont en état d’insalubrité et de vétusté, à tel point que les mort-nés demeurent élevés. Idem également pour le taux de mortalité. Ce taux pour les disciplines de réanimation dépasse 300 cas pour 1.000.
Chevauchement
Dans un tout autre registre qui se rapporte à la gestion communale, le rapport de la Cour des comptes recense toutes les aberrations qu’il a relevées dans plusieurs communes contrôlées. À commencer par le conseil de la ville de Casablanca, accusé par la Cour des comptes de ne pas toujours respecter la procédure de l’octroi des marchés publics. Que ce soit au niveau des appels d’offres ou pendant l’exécution de ces marchés. Les chevauchements constatés entre les différents services du conseil conduisent également à une mauvaise gestion des frais dont bénéficient généralement tous les agents de la commune.
Le conseil de la ville de Casablanca est aussi pointé du doigt pour avoir mal géré et mal entretenu les parcs d’attraction de la ville, qui souffrent dans leur majorité d’une grave crise de propreté. Ce qui a conduit à leur occupation par les SDF et les sans abris, transformant ces espaces initialement réservés aux loisirs et à la détente pour la population de Casablanca en des lieux infréquentables et même dangereux.
Le conseil de la ville de Marrakech n’est pas épargné. Les critiques et les remarques à l’encontre de ce conseil, présidé par Omar Jazouli, foisonnent dans le rapport. La plus importante d’entre elles concerne la mauvaise gestion du domaine public communal. Par exemple, l’occupation de ce domaine par des panneaux publicitaires a attiré l’attention des contrôleurs de la Cour des comptes.
Dotations
L’opération en question démontre bon nombre de fraudes, telles l’absence de référence aux engagements financiers de l’exploitant, ou, plus grave encore, la prise en charge par la commune des dépenses relatives à la consommation de l’électricité utilisée pour le fonctionnement de ces panneaux. Plusieurs élus communaux profitent aussi de téléphones portables et de forfaits de communication en plus des dotations de voyage qui leur sont allouées chaque année. Pour ce qui est des marchés publics, certains travaux à Marrakech ont commencé avant même leur approbation par l’autorité de tutelle et les pièces justificatives se rapportant à ces travaux se contredisent.
Les mêmes griefs ou presque ont été également constatés dans un autre conseil de ville, celui de Fès cette fois-ci, dont les dettes ont atteint des niveaux «faramineux», selon l’expression du rapport. Ces dettes ont culminé à 600 millions de dirhams, sans compter les arrêts judiciaires, estimés à 100 millions de dirhams et les arriérés de consommation de l’éclairage, public dont la facture tourne autour de 200 millions de dirhams
Le conseil de la ville de Fès est aussi accusé d’avoir attribué des marchés publics avant même l’ouverture des plis. Ce qui constitue un manquement très grave à la loi sur les marchés publics.
Si la Cour des comptes a distribué des cartons rouges aux communes, son diagnostic de la gestion dans les chambres de commerce et d’industrie est sans appel. Les accusations sont graves: dépenses fictives, gaspillage, attribution des marchés sans appel à concurrence et centralisation des pouvoirs.
Ainsi, la chambre de commerce et d’industrie d’Agadir est la plus gravement critiquée. En effet, cette chambre n’a pas trouvé mieux, pour une souscription de police d’assurance, que de s’adresser à un bureau de courtage propriété de son président, Saïd Dor.
Détournement
Il ne s’agit pas d’un fait singulier puisque les services de la Cour des comptes stigmatisent le non-retours à la concurrence pour certaines prestations. Sont également pointés du doigt les dépassements de seuils de dépenses autorisés pour certaines rubriques ainsi que des fausses imputations pour certaines dépenses. Un grief qu’on retrouve dans d’autres chambres de commerce comme celle de Casablanca et de Tanger. Concernant la chambre de commerce de Casablanca, le rapport a relevé des sommes importantes qui se sont volatilisées dans la nature. On assimile cela à de détournements de fonds, mais rien n’est encore prouvé.
Toujours est-il, le rapport de la Cour des comptes, qui épingle d’autres institutions, comme la Société des autoroutes du Maroc, et certains régimes d’assurance, comme la CNOPS et le RCAR, ne contient que des remarques transcrites sur papier, mais jamais exposées devant la justice. On se demande alors quand nos responsables publics et nos élus rendront-ils des comptes à la Nation?
Maroc-hebdo
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