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L'Amérique n'a jamais détruit autant d'emplois depuis 1945

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  • L'Amérique n'a jamais détruit autant d'emplois depuis 1945

    Après la tornade financière qui a commencé de ravager l'économie américaine, voici la débâcle sociale : le département du travail a annoncé, vendredi 5 décembre, qu'en novembre 533 000 emplois non agricoles avaient été détruits, chiffre le plus élevé depuis trente-quatre ans. Le taux de chômage a progressé de 0,2 point par rapport à octobre pour atteindre 6,7 %, au plus haut depuis quinze ans. Le pays compte 10,2 millions de chômeurs.

    Le président George Bush a aussitôt reconnu que "les chiffres de l'emploi publiés aujourd'hui reflètent le fait que notre économie est en récession". Il a jouté : "Cela est dû, pour une grande part, aux problèmes sévères que connaissent nos marchés de l'immobilier et du crédit et le marché financier, et qui ont causé d'importantes pertes d'emplois." Il en a profité pour presser le Congrès d'adopter des mesures de soutien aux constructeurs automobiles dès la semaine prochaine.

    Son successeur élu, Barack Obama, a déclaré dans un communiqué qu'il n'y avait "pas de remède rapide ou facile à cette crise qui s'est développée depuis plusieurs années et la situation va empirer avant de s'améliorer". Selon lui, "il est temps de réagir avec détermination et célérité pour remettre les gens au travail et relancer notre économie".
    Effectivement, le marché américain du travail est malade. Les 533 000 suppressions d'emplois annoncées en novembre surviennent après 403 000 en octobre (au lieu des 240 000 annoncées) et 320 000 en septembre (au lieu des 284 000 annoncées). Avec 1,9 million sur onze mois, le total des destructions d'emplois pour l'année 2008 tout entière pourrait être le plus élevé depuis 1945, où il avait culminé à 2 750 000.

    L'économie "capitule sur tous les fronts et la menace de récession généralisée est bien réelle", a estimé Peter Morici, professeur à l'Université du Maryland. Les entreprises ont "commencé à se focaliser sur les moyens de survivre à la récession et taillent comme des folles dans leurs effectifs", ajoute Joel Naroff, économiste indépendant interrogé par l'Agence France-Presse (AFP).


    LE PIRE EST À VENIR


    Tous les secteurs sont touchés, et pas seulement l'industrie, comme on pourrait le croire avec la nouvelle annonce de la mise en chômage technique par General Motors de 4 000 ouvriers supplémentaires, le 5 décembre. Les deux tiers des destructions d'emplois concernent le secteur des services.

    "Seuls deux secteurs continuent à créer des emplois : le service public et la sphère santé-éducation, analyse Jean-Marc Lucas, économiste chez BNP Paribas. Désormais, les destructions d'emplois sont plus nombreuses dans les services, et c'est la preuve que la récession s'étend, car ceux-ci représentent 85 % des emplois salariés aux Etats-Unis et sont, en général, plus résistants à la conjoncture." Il ajoute : "Il faut s'attendre à une tendance de 300 000 à 400 000 destructions d'emplois par mois."

    La dégradation du marché de l'emploi est aussi qualitative, car le nombre des chômeurs de longue durée (au-delà de 27 semaines) a bondi de 65 % depuis le début de l'année pour atteindre aujourd'hui 2,2 millions.

    Ces mauvaises nouvelles ont provoqué un repli à Paris (- 5,48 %), à Francfort (- 4 %) et à Londres (- 2,74 %). En revanche, à Wall Street, le Dow Jones a terminé sur un gain de 3,09 %, les investisseurs pariant que la montée du chômage obligera le gouvernement à prendre de nouvelles mesures de soutien à l'économie.

    Car le pire semble à venir. Certes, les salaires horaires ont continué à progresser en novembre de + 0,4 % d'un mois sur l'autre, portant la hausse en glissement annuel à + 3,7 %. Mais ce rythme devrait devenir négatif à bref délai.

    Enfin, selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la récession sera aux Etats-Unis plus sévère que dans les autres économies. Elle devrait provoquer un recul du produit intérieur brut américain de 0,9 % en 2009. L'OCDE prédit également que la conjoncture ne s'améliorera pas avant le troisième trimestre 2009 et encore, à toute petite vitesse, puisque la croissance devrait plafonner à + 1,6 % en 2010. C'est donc une nouvelle dégradation du marché de l'emploi qu'annoncent les experts de l'OCDE : le taux de chômage américain passerait de 5,7 % en 2008, à 7,3 % en 2009, pour atteindre 7,5 % en 2010. Dans ce contexte, seule une décélération rapide de l'inflation, notamment grâce à un baril passé le 5 décembre sous les 40 dollars, pourrait redonner aux ménages l'envie et les moyens de consommer à nouveau.

    Alain Faujas et Clément Lacombe (Le Monde)
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