Crise . Entré en récession, le pays affiche des résultats jugés «épouvantables».
TOKYO, de notre correspondant MICHEL TEMMAN
Libération
Depuis un mois, des limousines noires aux plaques d’immatriculation vert empire, celles de hauts fonctionnaires du gouvernement japonais, restent garées tard la nuit aux abords des grands ministères. Pas de dîners arrosés pour les mandarins du pouvoir à Tokyo, priés d’élaborer dans l’urgence des plans anticrise de génie. Mi-novembre, frappé à son tour par la crise financière venue des Etats-Unis, le Japon (dont le PIB avait chuté de 3,7 % au deuxième trimestre) est entré en récession. «Il n’y a plus guère de raisons d’être optimiste [pour l’économie du Japon]», avait alors estimé Kaoru Yosano, le ministre chargé de la politique économique et du budget. Pas le choix. Les résultats de la seconde économie mondiale sont il est vrai catastrophiques. Les pires depuis le choc pétrolier de 1973. A Tokyo, des économistes jugent «épouvantables» les chutes récentes de la production industrielle et de la consommation, résultant du recul simultané de la demande aux Etats-Unis, en Europe et au Japon.
D’après le Meti (ministère de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie), la production industrielle aurait encore reculé de 6,4 % en novembre et pourrait atteindre - 2,9 % en décembre. Quant aux récents indices du commerce extérieur (- 7,7 % pour les exportations en septembre, - 3,1 % en octobre), ils inquiètent. Les grands exportateurs nippons sont déstabilisés par la flambée du yen face au dollar et à l’euro : un «cauchemar» qui décime leurs profits à l’étranger. Toyota - qui a annoncé une chute de 74 % de son profit opérationnel pour 2008 - «va réduire les bonus [primes salariales, ndlr] de 8 700 de ses managers au Japon», dévoile Akira Adachi, un porte-parole du constructeur, qui vient d’annoncer par ailleurs la suppression de 3 000 postes. Son rival Mazda licencie de son côté 1 300 salariés. Sur le front de l’emploi, les plus vulnérables trinquent déjà. «Je viens de perdre mon emploi comme intérimaire. Je n’ai plus de revenu. J’étais agent de sécurité depuis un an et demi. Que vais-je faire ?» se lamente Masaharu Tadaki, 52 ans, ex-employé du fleuron Softbank. «Depuis un an, j’ai passé une quinzaine d’entretiens. Pas une entreprise n’a voulu de moi. Avec la crise, je suis fichu !» lâche Hirohasa, 22 ans, diplômé en droit d’une prestigieuse université de Tokyo.
Selon une enquête du quotidien économique Nihon Keizai Shimbun, une quarantaine d’entreprises japonaises ont déjà prévu de licencier 21 000 ouvriers sous contrat à durée déterminée ou intérimaire. Et des dizaines de grands groupes industriels ont décidé d’annuler leurs plans de recrutement en 2009. Le choc est rude pour des dizaines de milliers d’étudiants soudain sur le carreau, qui pourraient être tentés d’aller rejoindre les hordes de free timers, ces Japonais vivant de petits boulots. Dans un éditorial au vitriol publié vendredi, le quotidien Asahi critique avec une rare virulence la politique économique du Premier ministre, Taro Aso, accusé de creuser la dette du Japon (150 % du PIB) à coups de plans de relance mal ciblés
TOKYO, de notre correspondant MICHEL TEMMAN
Libération
Depuis un mois, des limousines noires aux plaques d’immatriculation vert empire, celles de hauts fonctionnaires du gouvernement japonais, restent garées tard la nuit aux abords des grands ministères. Pas de dîners arrosés pour les mandarins du pouvoir à Tokyo, priés d’élaborer dans l’urgence des plans anticrise de génie. Mi-novembre, frappé à son tour par la crise financière venue des Etats-Unis, le Japon (dont le PIB avait chuté de 3,7 % au deuxième trimestre) est entré en récession. «Il n’y a plus guère de raisons d’être optimiste [pour l’économie du Japon]», avait alors estimé Kaoru Yosano, le ministre chargé de la politique économique et du budget. Pas le choix. Les résultats de la seconde économie mondiale sont il est vrai catastrophiques. Les pires depuis le choc pétrolier de 1973. A Tokyo, des économistes jugent «épouvantables» les chutes récentes de la production industrielle et de la consommation, résultant du recul simultané de la demande aux Etats-Unis, en Europe et au Japon.
D’après le Meti (ministère de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie), la production industrielle aurait encore reculé de 6,4 % en novembre et pourrait atteindre - 2,9 % en décembre. Quant aux récents indices du commerce extérieur (- 7,7 % pour les exportations en septembre, - 3,1 % en octobre), ils inquiètent. Les grands exportateurs nippons sont déstabilisés par la flambée du yen face au dollar et à l’euro : un «cauchemar» qui décime leurs profits à l’étranger. Toyota - qui a annoncé une chute de 74 % de son profit opérationnel pour 2008 - «va réduire les bonus [primes salariales, ndlr] de 8 700 de ses managers au Japon», dévoile Akira Adachi, un porte-parole du constructeur, qui vient d’annoncer par ailleurs la suppression de 3 000 postes. Son rival Mazda licencie de son côté 1 300 salariés. Sur le front de l’emploi, les plus vulnérables trinquent déjà. «Je viens de perdre mon emploi comme intérimaire. Je n’ai plus de revenu. J’étais agent de sécurité depuis un an et demi. Que vais-je faire ?» se lamente Masaharu Tadaki, 52 ans, ex-employé du fleuron Softbank. «Depuis un an, j’ai passé une quinzaine d’entretiens. Pas une entreprise n’a voulu de moi. Avec la crise, je suis fichu !» lâche Hirohasa, 22 ans, diplômé en droit d’une prestigieuse université de Tokyo.
Selon une enquête du quotidien économique Nihon Keizai Shimbun, une quarantaine d’entreprises japonaises ont déjà prévu de licencier 21 000 ouvriers sous contrat à durée déterminée ou intérimaire. Et des dizaines de grands groupes industriels ont décidé d’annuler leurs plans de recrutement en 2009. Le choc est rude pour des dizaines de milliers d’étudiants soudain sur le carreau, qui pourraient être tentés d’aller rejoindre les hordes de free timers, ces Japonais vivant de petits boulots. Dans un éditorial au vitriol publié vendredi, le quotidien Asahi critique avec une rare virulence la politique économique du Premier ministre, Taro Aso, accusé de creuser la dette du Japon (150 % du PIB) à coups de plans de relance mal ciblés
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