Les porteurs d’un grand nombre de cartes à puce des téléphones portables circulant au Maroc, sont non identifiés. Il s’agit là d’une véritable menace pour la sécurité publique.
Au Maroc, aujourd’hui encore, on peut disposer pour 10 dirhams seulement d’un nouveau numéro de téléphone portable. Pour ce faire, on n’est même pas obligé de décliner son identité. Ces cartes à puce se vendent un peu partout, au point que certains vendeurs à la sauvette en ont fait leur spécialité dans les grands et petits souks de différentes villes et campagnes du Royaume. Certes, c’est là l’illustration la plus manifeste de la démocratisation de l’accès au téléphone dans un pays où jusque dans les années 90, ce privilège était l’apanage d’une toute petite élite. Sauf que certaines utilisations du téléphone portable poussent à la prudence. C’est le cas par exemple de ces SMS publicitaires, de plus en plus nombreux, qui sont envoyés par des anonymes et qui nuisent à la quiétude des utilisateurs des téléphones de jour comme de nuit. C’est le cas aussi pour certains appels incommodants que les voyous des téléphones se font un malin plaisir d’effectuer. Mais il y a plus grave comme l’ont prouvé les attentats de Madrid.
Pour rappel, le 11 mars 2004, la capitale espagnole a été frappée par une série d'attentats terroristes. Ce jour-là, plusieurs bombes, posées par des islamistes, ont explosé dans des trains de banlieue. Près de 200 personnes ont péri et 1.400 ont été blessées. Ce qui fait de ces attaques le plus important acte terroriste survenu en Europe. Que viennent alors faire les cartes téléphoniques dans ce cataclysme ? Ce sont des téléphones portables qui ont servi de détonateurs dans ces attentats meurtriers. Et c’est grâce à la traçabilité qu’a permis une carte téléphonique (puce) retrouvée par les enquêteurs, que la piste des terroristes a été remontée et des coupables retrouvés.
Ce n’est pas par hasard que l’Algérie, voisine du Maroc, en est arrivée à utiliser une méthode radicale. Ce pays a désormais interdit la circulation de toute carte téléphonique non identifiée (voir encadré). C’est ce qui a dû certainement mettre la puce à l’oreille des responsables nationaux. Surtout qu’au Maroc, même si aucun opérateur ne veut dévoiler les statistiques exactes, il y aurait moins d’un million de cartes téléphoniques non identifiées du côté de Méditel et beaucoup plus d’un million de ces cartes estampillées Maroc Télécom.
La question relative aux cartes téléphoniques non identifiées a été déjà soulevée en mai dernier, au cours des travaux du conseil d’administration de l’Agence nationale de régulation des télécoms (ANRT).
Il s’en est suivi des réunions qui ont été tenues par l’Agence avec les opérateurs concernés. «Engagement a été alors pris pour qu’aucune carte SIM ne soit plus vendue qu’après l’identification du client, aussi bien au niveau des agences commerciales des différents opérateurs qu’à travers leur réseau de distribution et leurs revendeurs agréés», apprend-on auprès d’une source proche du dossier. La même source souligne qu’il était convenu que des sanctions soient prises à l’encontre des revendeurs ou distributeurs qui ne respecteraient pas leur engagement dans ce cadre. Le recours à la sensibilisation n’a pas été non plus négligé. Une campagne de sensibilisation par messages courts (SMS) et messages vocaux à destination des abonnés non identifiés a été lancée. Elle a été accompagnée, affirme-t-on, d’un bonus (durée gratuite de communications) en cas d’identification.
Aujourd’hui, il n’est plus un secret pour personne que ce premier plan a échoué. La preuve c’est que les cartes téléphoniques continuent d’être écoulées à gogo sans aucune identification et sans même que les revendeurs aient la moindre information que cela pose un quelconque problème.
Un deuxième plan est lancé
Certains responsables qui suivent le dossier des cartes téléphoniques anonymes parlent de la «volonté d’éradiquer ce phénomène». Sauf que l’Etat et l’ANRT, timorés, veulent y aller avec prudence. Ils craignent peut être, tout comme les opérateurs, une dégringolade du nombre de clients du prépayé si des mesures radicales étaient prises. C’est ce qui pousse certains responsables à y aller avec des pincettes. «Résilier maintenant et d’une manière brutale les lignes des porteurs de cartes non identifiées, serait hasardeux», estiment-ils.
A une question qui lui a été posée à ce sujet au Parlement par le groupe parlementaire de l’Union Constitutionnelle, le ministre de l'Industrie, du Commerce et des Nouvelles technologies, Ahmed Reda Chami – ministre de tutelle - a répondu : «l'Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) s'emploie à élaborer, en collaboration avec les opérateurs concernés, un plan de limitation du nombre des usagers non identifiés du téléphone portable». Le ministre est allé un peu plus loin en affirmant que ce plan pourrait priver partiellement ou totalement de certains services téléphoniques les usagers non encore identifiés malgré les campagnes de sensibilisation et ce, en coordination avec les secteurs concernés.
Dans les faits, le second plan, comme le premier, consiste dans le lancement d’une campagne de sensibilisation par le biais des SMS et des messages vocaux avec des contenus plus incisifs pour faire sortir de l’anonymat les porteurs des cartes de téléphone mobile sans abonnement. Cette fois-ci, une campagne de communication devra appuyer cette action.
En tout cas, si l’on se référait aux seules dispositions réglementaires du secteur, notamment celles contenues dans les cahiers de charges, chaque usager d'une puce-prépayée est obligé de décliner son identité, particulièrement son nom, son prénom, son adresse. Il doit aussi présenter une photocopie de sa Carte d'identité nationale. Cette identification est donc obligatoire lors de la demande d'abonnement ou d'achat d'une puce-prépayée. La vente à tout va des cartes téléphoniques sans aucune identification est donc illégale, depuis toujours.
Peur bleue de Maroc Télécom
Le prépayé est la véritable poule aux œufs d’or qui «pond» l’essentiel du cash-flow pour Maroc Télécom. Chez l’opérateur historique, on parle de quelque 12 millions de clients Jawal dont une bonne partie reste non identifiée. On comprend donc pourquoi cet opérateur résiste au plan visant la lutte contre le phénomène des cartes téléphoniques anonymes. Pour faire bonne figure dans les réunions tenues avec l’ANRT, les responsables d’IAM affirment adhérer à ce plan. Mais, il n’en est rien dans les faits. Si Méditel a recouru à la motivation de ses clients non identifiés pour les faire sortir de l’anonymat, Maroc Télécom continue de faire le mort.
Algérie : La méthode radicale
Contrairement au Maroc où l’on parle de tout sauf du risque sur la sécurité publique que font peser les cartes téléphoniques non identifiées, c’est principalement cet argument qui a été avancé par les voisins algériens pour en finir radicalement avec les cartes anonymes. Pourtant, en Algérie il y avait plus de 11 millions de cartes anonymes en circulation.
Achevée le 10 octobre dernier, après trois mois de préavis, l’opération d’identification des puces anonymes chez les Algériens s’est soldée par la désactivation définitive de 2.578.775 de cartes SIM prépayées anonymes, soit 9% du nombre total d’abonnés enregistrés avant cette opération (29.246.642 abonnés décomptés).
Selon un communiqué de l’Autorité algérienne de régulation de la poste et des télécommunications (ARPT), cette opération a permis de connaître le nombre réel des abonnés de chacun des opérateurs (14.492.091 pour Djezzy, 7.177.602 pour Mobilis et 4.998.174 pour Nedjma).
A noter que les cartes SIM non identifiées ne pourront plus être utilisées en appel entrant ou sortant, comme le souligne le régulateur algérien des télécoms. L’agence précise que la désactivation de ces cartes consiste en « leur mise hors service définitive et irrévocable, entraînant pour leurs détenteurs la perte irrémédiable du numéro ».
Par ailleurs, dorénavant en Algérie, seuls les points de vente agréés sont légalement autorisés à proposer la vente des puces.
Revers de la médaille
L'ARPT algérienne a relevé des cas de tricherie qui se sont produits lors de l’opération d'identification des puces. «Nous avons constaté qu'une seule pièce d'identité a servi pour l'identification de plusieurs puces des trois opérateurs », a fait savoir la présidente de l’Agence, en exigeant des trois opérateurs de transmettre, tous les 15 jours, un point de situation sur l'état d'avancement de l'opération par voie électronique à l'ARPT. Cette agence prévoit des sanctions à l'encontre des opérateurs, si jamais ces derniers n'appliquent pas ces décisions.
Le Reporter
Au Maroc, aujourd’hui encore, on peut disposer pour 10 dirhams seulement d’un nouveau numéro de téléphone portable. Pour ce faire, on n’est même pas obligé de décliner son identité. Ces cartes à puce se vendent un peu partout, au point que certains vendeurs à la sauvette en ont fait leur spécialité dans les grands et petits souks de différentes villes et campagnes du Royaume. Certes, c’est là l’illustration la plus manifeste de la démocratisation de l’accès au téléphone dans un pays où jusque dans les années 90, ce privilège était l’apanage d’une toute petite élite. Sauf que certaines utilisations du téléphone portable poussent à la prudence. C’est le cas par exemple de ces SMS publicitaires, de plus en plus nombreux, qui sont envoyés par des anonymes et qui nuisent à la quiétude des utilisateurs des téléphones de jour comme de nuit. C’est le cas aussi pour certains appels incommodants que les voyous des téléphones se font un malin plaisir d’effectuer. Mais il y a plus grave comme l’ont prouvé les attentats de Madrid.
Pour rappel, le 11 mars 2004, la capitale espagnole a été frappée par une série d'attentats terroristes. Ce jour-là, plusieurs bombes, posées par des islamistes, ont explosé dans des trains de banlieue. Près de 200 personnes ont péri et 1.400 ont été blessées. Ce qui fait de ces attaques le plus important acte terroriste survenu en Europe. Que viennent alors faire les cartes téléphoniques dans ce cataclysme ? Ce sont des téléphones portables qui ont servi de détonateurs dans ces attentats meurtriers. Et c’est grâce à la traçabilité qu’a permis une carte téléphonique (puce) retrouvée par les enquêteurs, que la piste des terroristes a été remontée et des coupables retrouvés.
Ce n’est pas par hasard que l’Algérie, voisine du Maroc, en est arrivée à utiliser une méthode radicale. Ce pays a désormais interdit la circulation de toute carte téléphonique non identifiée (voir encadré). C’est ce qui a dû certainement mettre la puce à l’oreille des responsables nationaux. Surtout qu’au Maroc, même si aucun opérateur ne veut dévoiler les statistiques exactes, il y aurait moins d’un million de cartes téléphoniques non identifiées du côté de Méditel et beaucoup plus d’un million de ces cartes estampillées Maroc Télécom.
La question relative aux cartes téléphoniques non identifiées a été déjà soulevée en mai dernier, au cours des travaux du conseil d’administration de l’Agence nationale de régulation des télécoms (ANRT).
Il s’en est suivi des réunions qui ont été tenues par l’Agence avec les opérateurs concernés. «Engagement a été alors pris pour qu’aucune carte SIM ne soit plus vendue qu’après l’identification du client, aussi bien au niveau des agences commerciales des différents opérateurs qu’à travers leur réseau de distribution et leurs revendeurs agréés», apprend-on auprès d’une source proche du dossier. La même source souligne qu’il était convenu que des sanctions soient prises à l’encontre des revendeurs ou distributeurs qui ne respecteraient pas leur engagement dans ce cadre. Le recours à la sensibilisation n’a pas été non plus négligé. Une campagne de sensibilisation par messages courts (SMS) et messages vocaux à destination des abonnés non identifiés a été lancée. Elle a été accompagnée, affirme-t-on, d’un bonus (durée gratuite de communications) en cas d’identification.
Aujourd’hui, il n’est plus un secret pour personne que ce premier plan a échoué. La preuve c’est que les cartes téléphoniques continuent d’être écoulées à gogo sans aucune identification et sans même que les revendeurs aient la moindre information que cela pose un quelconque problème.
Un deuxième plan est lancé
Certains responsables qui suivent le dossier des cartes téléphoniques anonymes parlent de la «volonté d’éradiquer ce phénomène». Sauf que l’Etat et l’ANRT, timorés, veulent y aller avec prudence. Ils craignent peut être, tout comme les opérateurs, une dégringolade du nombre de clients du prépayé si des mesures radicales étaient prises. C’est ce qui pousse certains responsables à y aller avec des pincettes. «Résilier maintenant et d’une manière brutale les lignes des porteurs de cartes non identifiées, serait hasardeux», estiment-ils.
A une question qui lui a été posée à ce sujet au Parlement par le groupe parlementaire de l’Union Constitutionnelle, le ministre de l'Industrie, du Commerce et des Nouvelles technologies, Ahmed Reda Chami – ministre de tutelle - a répondu : «l'Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) s'emploie à élaborer, en collaboration avec les opérateurs concernés, un plan de limitation du nombre des usagers non identifiés du téléphone portable». Le ministre est allé un peu plus loin en affirmant que ce plan pourrait priver partiellement ou totalement de certains services téléphoniques les usagers non encore identifiés malgré les campagnes de sensibilisation et ce, en coordination avec les secteurs concernés.
Dans les faits, le second plan, comme le premier, consiste dans le lancement d’une campagne de sensibilisation par le biais des SMS et des messages vocaux avec des contenus plus incisifs pour faire sortir de l’anonymat les porteurs des cartes de téléphone mobile sans abonnement. Cette fois-ci, une campagne de communication devra appuyer cette action.
En tout cas, si l’on se référait aux seules dispositions réglementaires du secteur, notamment celles contenues dans les cahiers de charges, chaque usager d'une puce-prépayée est obligé de décliner son identité, particulièrement son nom, son prénom, son adresse. Il doit aussi présenter une photocopie de sa Carte d'identité nationale. Cette identification est donc obligatoire lors de la demande d'abonnement ou d'achat d'une puce-prépayée. La vente à tout va des cartes téléphoniques sans aucune identification est donc illégale, depuis toujours.
Peur bleue de Maroc Télécom
Le prépayé est la véritable poule aux œufs d’or qui «pond» l’essentiel du cash-flow pour Maroc Télécom. Chez l’opérateur historique, on parle de quelque 12 millions de clients Jawal dont une bonne partie reste non identifiée. On comprend donc pourquoi cet opérateur résiste au plan visant la lutte contre le phénomène des cartes téléphoniques anonymes. Pour faire bonne figure dans les réunions tenues avec l’ANRT, les responsables d’IAM affirment adhérer à ce plan. Mais, il n’en est rien dans les faits. Si Méditel a recouru à la motivation de ses clients non identifiés pour les faire sortir de l’anonymat, Maroc Télécom continue de faire le mort.
Algérie : La méthode radicale
Contrairement au Maroc où l’on parle de tout sauf du risque sur la sécurité publique que font peser les cartes téléphoniques non identifiées, c’est principalement cet argument qui a été avancé par les voisins algériens pour en finir radicalement avec les cartes anonymes. Pourtant, en Algérie il y avait plus de 11 millions de cartes anonymes en circulation.
Achevée le 10 octobre dernier, après trois mois de préavis, l’opération d’identification des puces anonymes chez les Algériens s’est soldée par la désactivation définitive de 2.578.775 de cartes SIM prépayées anonymes, soit 9% du nombre total d’abonnés enregistrés avant cette opération (29.246.642 abonnés décomptés).
Selon un communiqué de l’Autorité algérienne de régulation de la poste et des télécommunications (ARPT), cette opération a permis de connaître le nombre réel des abonnés de chacun des opérateurs (14.492.091 pour Djezzy, 7.177.602 pour Mobilis et 4.998.174 pour Nedjma).
A noter que les cartes SIM non identifiées ne pourront plus être utilisées en appel entrant ou sortant, comme le souligne le régulateur algérien des télécoms. L’agence précise que la désactivation de ces cartes consiste en « leur mise hors service définitive et irrévocable, entraînant pour leurs détenteurs la perte irrémédiable du numéro ».
Par ailleurs, dorénavant en Algérie, seuls les points de vente agréés sont légalement autorisés à proposer la vente des puces.
Revers de la médaille
L'ARPT algérienne a relevé des cas de tricherie qui se sont produits lors de l’opération d'identification des puces. «Nous avons constaté qu'une seule pièce d'identité a servi pour l'identification de plusieurs puces des trois opérateurs », a fait savoir la présidente de l’Agence, en exigeant des trois opérateurs de transmettre, tous les 15 jours, un point de situation sur l'état d'avancement de l'opération par voie électronique à l'ARPT. Cette agence prévoit des sanctions à l'encontre des opérateurs, si jamais ces derniers n'appliquent pas ces décisions.
Le Reporter
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