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L'enfance hyperactive de l'Univers

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  • L'enfance hyperactive de l'Univers

    Tout jeune, l'Univers était bien plus peuplé que ce que l'on imaginait. 49 astronomes français et italiens ont cosigné leurs découverte dans le Journal Nature. Pour notre plus grand bonheur.

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    Tout jeune, l'Univers était déjà fort peuplé. «Bien plus que ce que nous ne pensions», reconnaît Olivier Le Fèvre, du laboratoire d'astrophysique de Marseille. Il y a 12 milliards d'années, 2 au plus après le big-bang, les galaxies pullulaient et pétaient le feu. Chacune engendrant des étoiles en série, au rythme infernal d'un Soleil par an, dix fois plus que notre Voie lactée aujourd'hui. Plus peuplé, plus prolifique, déjà structuré, l'Univers jeune révèle sa facette brillante, jusqu'alors cachée aux explorateurs de l'infini. Une découverte cosignée par 49 astronomes français et italiens, publiée par Nature (1), signe indubitable d'une percée dans notre connaissance de l'histoire et de la géographie de l'Univers.

    Une percée soigneusement préparée, consistant à «passer de la 2D à la 3D», explique Olivier Le Fèvre. La 2D, ce sont ces magnifiques images du ciel profond, prises par le télescope franco-canadien-hawaïen (CFHT) installé à Hawaï, ou ceux de l'Observatoire européen austral (ESO) sur le site de La Silla, dans les Andes chiliennes. Des images couvrant de larges portions du ciel, «trois à quatre fois la taille de la pleine Lune». A chaque fois, des dizaines de milliers d'objets. Comme punaisés sur le ciel, ils indiquent bien leur direction, mais restent muets sur leur éloignement. Pour savoir à quelle distance se trouve une galaxie lointaine, les astrophysiciens sortent leur arme de prédilection : le spectre. Nul fantôme, mais l'analyse des différentes couleurs de la lumière d'un objet céleste.

    Armée de spectres.
    Dans un univers en expansion, le nôtre, ces couleurs subissent un décalage spectral vers le rouge, d'autant plus intense que l'objet s'éloigne vite de nous, donc qu'il est loin. Un principe cosmologique découvert par Edwin Hubble dans les années 20. Prendre le spectre d'une galaxie requiert une collecte de photons bien plus précise que la seule image et permet de lui coller une étiquette. Un décalage vers le rouge (noté «z» et baptisé «redshift» dans les labos, où l'on adore les codes et où l'anglais sert de latin) se traduit en distances et en âges de l'Univers. L'Univers lointain, c'est à partir de z = 1, quelques milliards d'années-lumière et quelque milliards d'années tout court.

    Mais comment disposer d'une armée de spectres ? Rien ne sert d'en avoir un, ou même quelques dizaines, si l'on prétend écrire l'histoire et la géographie de l'Univers. Il faut compter par milliers. Ingénieurs et astrophysiciens de l'équipe d'Olivier Le Fèvre ont donc réalisé pour le Very Large Telescope (VLT) de l'ESO * quatre télescopes de 8,2 mètres sur le mont Paranal au Chili * un instrument, Vimos, capable de prendre simultanément 800 spectres de galaxies. Un champion du monde dans sa catégorie, installé sur Mélipal, l'un des quatre géants sur un site qui offre «un ciel unique, permettant des poses de quatre heures et demie». Surtout, la puissance de Vimos permet de rompre avec la rude sélection jusqu'alors en vigueur. «Tous les travaux précédents sur l'univers lointain opéraient une sélection de galaxies sur l'image en 2D, choisissant celles dont la couleur semblait indiquer un éloignement suffisant. Nous, nous avons systématiquement réalisé le spectre (2) de 10 000 galaxies prises au hasard sur 70 000 observées dans la constellation de la Baleine.» Un programme lourd, permis par la garantie de 120 nuits d'observation au VLT.

    Récompense.
    Rigueur et puissance technologiques furent récompensées. «A notre grande surprise, cette méthode systématique a révélé de deux à six fois plus de galaxies dans la tranche d'Univers il y a entre 9 et 12 milliards d'années», se réjouit l'astrophysicien. Le surplus se voit surtout pour les galaxies les plus brillantes, où le rythme de formation d'étoiles est le plus élevé. Au point de trancher un débat en cours dans les labos de cosmologie. Il y a 6 à 7 milliards d'années, le taux de génération stellaire était plus fort qu'ici et aujourd'hui. Mais avant ? L'Univers a-t-il débuté mollo la fabrication de stars ou ses galaxies étaient-elles des pouponnières endiablées ? Faute de données, les cosmologistes hésitaient. Les spectres de Vimos montrent que la formation d'étoiles a commencé fortissimo, puis n'a connu qu'un long decrescendo. Des étoiles dont les plus massives ont rapidement explosé en supernovæ, enrichissant les galaxies en atomes lourds, permettant la formation de planètes rocheuses dotées de tous les éléments chimiques nécessaires à la vie. Ils ont également révélé qu'il y a 8 milliards d'années l'Univers était déjà structuré à très grande échelle par la gravitation, groupant les galaxies en amas séparés par d'immenses vides.

    (1) Olivier Le Fèvre et al., dans Nature du 22 septembre 2005.
    (2) Entre les magnitudes 17 et 24.


    Source : liberation
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