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Maroc, Crise et Bêtises

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    Maroc, Crise et Bêtises

    « Heureusement que nous sommes sous-développés, ça nous évite d’être victimes de la crise » entend-on ça et là dans les salons casablancais suite à certaines déclarations d’économistes, d’historiens et de sociologues nationaux et internationaux.

    Cette phrase à elle seule pourrait constituer un sujet de dissertation ou un thème de débat animé par l’inénarrable Thami Ghorfi sorti tout droit de son école de commerce pour fixer les règles d’un débat dit « participatif » entre personnes autorisées destiné à un auditoire élitiste. Alors abordons cette phrase avec le peu de technique littéraire qui a pu échapper à vingt ans de sclérose et à cinq ans de lassitude. Extrayons-en donc une problématique à soutenir par une thèse elle-même contredite par une antithèse sans oublier d’y adjoindre une synthèse tout en ignorant la rigueur du dimensionnement des parties incompatible avec l’exercice éditorial.

    « Heureusement que nous sommes sous-développés, ça nous évite d’être victimes de la crise ». « Heureusement » sous entend une situation positive fruit du hasard face à un évènement qui aurait pu conduire à des conséquences négatives si la situation était autre. La situation positive serait en ce qui nous concerne le sous-développement. Le « nous » représente l’entité Maroc dans son état national ; ce « nous » mériterait à lui seul un article, que dis-je, un livre, une encyclopédie sociologique destinée à analyser ce sentiment national à schizophrénie masochiste préfabriquée. Les conséquences négatives évitées seraient « d’être victimes de la crise ». Soyons honnête aussi précise que soit la langue française, il faudrait adapter le discours à l’imaginaire méditerranéen ce qui donnerait quelque chose du genre : « Nous subirons sûrement les conséquences de la crise mais le fait que nous soyons sous-développés nous protège en quelques sortes… ». Le mot « crise » résume le cataclysme économico-financier mondial du dernier trimestre 2008 qui a révélé que l’économie planétaire mondiale était une sorte de château de cartes financier ou l’ingéniosité des montages et des systèmes destinés à rémunérer le capital ont honteusement écrasé la création réelle de valeur et de richesses avec le tact et les scrupules d’usage d’un système ultralibéral débridé.
    Le fait d’être « sous développé » est-il donc un avantage face la crise ? Tout d’abord le Maroc a effectivement un système financier performant mais protégé et fortement réglementé afin de préserver une économie réputée fragile. En effet, l’économie marocaine connait un déficit commercial chronique ce qui impose un contrôle des flux monétaires. Ce contrôle restreint les transactions monétaires au niveau de l’économie réelle ce qui atténue les effets de la spéculation. Les flux de capitaux entrants sont donc principalement destinés à l’économie réelle et représentent dans leur extrême majorité des investissements matériels. La place boursière casablancaise quant à elle, bien que dynamique, reste contrôlée par une poignée d’intervenants. Les entreprises cotées n’ayant initialement pas cédé la majorité de leurs actions au public restent entre les mains des actionnaires de référence quoiqu’il arrive ce qui restreint le pouvoir du marché. Au niveau immobilier, la demande en logements au Maroc est loin d’être comblée par les mises en chantier. Le taux d’équipement des ménages, lui, laisse entrevoir des marges de progression importantes notamment au niveau automobile et électroménager. La dynamique des grands travaux constitue une sorte de new deal à la marocaine qui a été engagé bien avant la crise. Le taux d’endettement reste globalement raisonnable et les risques encourus par les banques seraient limités ; le marché ne s’étant pas encore doté de montages complexes et restant fortement contrôlé. Enfin et ce n’est pas le moindre des arguments, le Maroc serait à l’abri de la crise car une grande proportion de son économie serait informelle ; « les milieux autorisés s’autorisent à penser » (Coluche) que cette économie informelle représente 70% de l’économie nationale y mêlant pêle-mêle « l’énorme » business de Derb Ghallef au trafic de drogue dans des airs tout à fait entendus. A : « Tu sais que 80% des dépôts bancaires se concentrent dans une toute petite région du nord du Maroc ». B : « Ah bon je ne savais pas ». A : « Alors tu sais la crise, c’est un concept pour nous, une étude de cas ! Ahaha ». Le « B » non initié que je suis reste épaté par ces arguments imparables et pourtant vérifiables bien que non vérifiés.
    Si le sous-développement constitue quelques barrières à la brumisation de l’économie nationale par la crise internationale, il constitue un facteur majeur d’attraction et de développement de situations de crise y compris financière. En effet, une économie bâtie sur le trafic de drogue ne peut que mener vers le chaos économique, sécuritaire et militaire. Si le facteur d’influence de l’économie informelle s’accentue et les organisations informelles se structurent, le terme « famille » déjà fortement implanté de la féodalité résistante du pays remplacerait définitivement les termes « mérite » et « compétence ». Les armes se constitueraient en assemblée édictant et appliquant la loi du plus puissant sans recours si ce n’est celui de la violence. La lutte contre l’économie informelle est et doit rester un chantier prioritaire du pays car l’alternative est le chaos ; crise financière ou pas. Le niveau d’endettement des marocains semble largement plus élevé qu’il n’y parait. L’engouement de la classe moyenne et supérieure pour l’immobilier a poussé les sociétés de financement spécialisées dans ce secteur dans une course frénétique offrant jusqu’à 140% du financement d’un bien immobilier se basant sur une part informelle de chaque transaction immobilière communément appelée « le noir ».Oui, mais certains ménages se sont endettés pour se positionner quitte à supporter le crédit de manière temporaire pour réaliser une plus value espérée ; ça ressemble très étrangement au scénario des sub-primes ; il serait intéressant d’avoir accès aux évolutions réelles des défauts de paiement. Il fut un temps pas si lointain (datant tout au plus de quelques mois) ou le simple fait d’évoquer la perspective d’un projet immobilier attirait une noria séductrice de financeurs potentiels. Aujourd’hui, certains chantiers ressemblent à un grand boulevard lors de la rupture du jeûne. Il suffit d’un simple tour en voiture dans l’ex-futur eldorado de la Jet Set mondiale (Marrakech pour les types B) pour ressentir le malaise ambiant. A cela s’ajoute le fort ralentissement subit par l’industrie touristique et l’ensemble des secteurs destinés à l’export, fers de lance de la croissance marocaine dans ses projets de développement.
    Le sous-développement nous protégera-t-il de la crise ? Surement pas bien au contraire. La résilience de l’économie marocaine réside ailleurs. Tout d’abord, il convient de féliciter la banque centrale pour sa gestion rigoureuse du système financier et pour son anticipation de la crise en opérant un atterrissage en douceur de l’économie depuis plus d’un an. Ensuite, la palme d’argent revient à l’état qui accentue le développement et la mise en œuvre de plans et autres visions globales et sectorielles tout en accentuant son implication dans le développement de grands projets structurant. La palme d’or revient à la pluie qui est au rendez-vous pour donner un coup de pouce à la croissance en 2009. C’est bien connu et plus que jamais : « au Maroc, gouverner c’est pleuvoir » (Maréchal Lyautey).

  • #2
    Ce que les gens ont du mal à comprendre. C'est que si la France enchainait trois années de sécheresses consécutives. La phrase de Mr Lyautey s'y appliquerait parfaitement.
    La guerre, c'est la guerre des hommes ; la paix, c'est la guerre des idées. V. Hugo

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    • #3
      interessante analyse !
      ce blog meriterait qu'on poste son adresse ..galapados

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