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Investissements : L'Egypte joue très serré

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    L'Egypte joue très serré
    Al Ahram 24 Décembre 2008

    Investissement. Le troisième forum pour l’investissement en Egypte s’est tenu dimanche et lundi derniers dans un climat de pronostics négatifs pour toute la région. La coopération interarabe et le développement de l'agriculture pourraient être des issues à la crise.


    « Rassurer les investisseurs et satisfaire leurs besoins est notre mission lors de la prochaine période. Les crises engendrent toujours des défis énormes, mais elles apportent autant d'opportunités ». C’est par ces paroles que le ministre de l’Investissement, Mahmoud Mohieddine, a entamé son discours lors de la troisième édition du forum pour l'investissement devant un parterre de quelque 900 représentants de gouvernements, de banques d’investissement et d'hommes d’affaires, surtout arabes. Tout ce beau monde entouré par une armada de ministres et d'officiels égyptiens venus en force assister, le 21 et le 22 décembre derniers, à ce forum d’investissement au moment où la Banque mondiale prédit que l'Egypte sera le pays qui sera le plus affecté dans la région par la crise mondiale.

    Dans les couloirs, on a vu passer, entre autres, le magnat saoudien des médias Saleh Kamel et Mohamed Al-Rajhi, vice-président du groupe saoudien Tabouk pour le développement agricole. En gros, « les vents ont changé, vu la récession économique actuelle. Cependant, cela ne veut pas dire rester les mains croisées, mais plutôt œuvrer à attirer davantage d'investissements arabes », a ajouté le ministre.

    Mais cela est-il réalisable ? L’Egypte pourra-t-elle continuer à être un terrain fertile pour les investissements ? Déjà, le même jour du Forum, la Banque Centrale d'Egypte a dévoilé une baisse des investissements directs étrangers à 1,7 milliard de dollars durant le trimestre juillet-septembre, contre 3 milliards à la même période de l'année précédente.

    Le rapport Global Economic Prospects, publié la semaine dernière par la Banque mondiale, donne une vision pessimiste de l’investissement dans la région arabe et spécialement l’Egypte. Selon le rapport, l’Egypte était le plus grand récepteur des investissements dans la région au cours de l’année fiscale 2007-08, avec un volume total de 13 milliards de dollars, soit 8,4 % du PIB (Produit Intérieur Brut) contre 11 milliards l’année précédente. Or, suite à la crise financière qui a frappé le monde entier, l’Egypte semble être, selon les prévisions du rapport, le pays arabe qui va être le plus touché par la crise. Le total des investissements prévu au cours de l’année prochaine risquerait ainsi d'être coupé de moitié, soit 7 milliards de dollars. Les Etats-Unis et l’Europe, les plus deux grandes économies tourmentées par la crise, sont nos partenaires principaux. En même temps, les investissements provenant des pays arabes pétroliers, qui représentent les deux tiers des investissements étrangers directs en Egypte, vont connaître un grand recul vu que ces pays ont cumulé des pertes énormes suite à la baisse des cours pétroliers. De plus, la grande majorité de leurs surplus pétroliers sont investis dans des banques étrangères en difficulté. Henri Azzam, directeur exécutif de Deutsche Bank au Moyen-Orient, présent au Forum, appuie ce pronostic pessimiste. « Oui, la région arabe et l’Egypte vont beaucoup souffrir. Ils ont déjà commencé à le sentir actuellement. Il suffit de noter que dès le déclenchement de la crise, tous les secteurs dans les pays du monde arabe ont enregistré des pertes de 30 %, soit 450 milliards de dollars. Cette somme est plus élevée que les revenus pétroliers au cours de l’année 2007. L’année prochaine, la situation pourrait être plus difficile, surtout avec une dépréciation attendue du dollar », renchérit-il.

    Selon lui, l’image serait plus sombre que l'annonce la Banque mondiale. « Espérons que l'Egypte pourra attirer ces 7 milliards de dollars dans un climat si critique ».

    Cap sur l'agriculture

    Pour Samir Radwan, conseiller auprès du ministère de l’Investissement, une coopération interarabe pourrait compenser la chute des investissements européens et américains. « Les Arabes se sont rendu finalement compte de l’importance d'intensifier les relations interarabes afin de pouvoir faire face à la crise. Une grande partie des activités industrielles ont été transférées des pays développés vers les pays en développement. Une orientation capable de garantir un flux d’investissements », explique-t-il. Radwan évoque le domaine de l’agriculture en tant que bouée de sauvetage des investissements au cours de la prochaine période. Opinion partagée par Saad Nassar, conseiller du ministre de l’Agriculture : « Les populations ne cesseront pas de manger. C’est un besoin urgent et continu. Et les pays arabes possèdent un vrai atout dans ce domaine. Exploitons-le donc ». Il ajoute que l’investissement agricole ne nécessite pas des capitaux énormes et en même temps, les pays arabes possèdent la main-d’œuvre et les terrains nécessaires. C’est un domaine fertile donc à exploiter, surtout que le total des investissements interarabes dans l’agriculture, selon le rapport L’investissement dans les pays arabes de 2006, n’ont pas dépassé, en 2005, les 160 millions de dollars.

    Il est à noter que les investissements interarabes sont jusque-là médiocres. Selon un rapport publié par l’Organisation du travail arabe, l’investissement interarabe a doublé, pour s’aligner depuis 2005 à 6 milliards de dollars par an. Or, ce chiffre perd tout son éclat si on le compare au total des investissements arabes à l’étranger qui a atteint, en 2006, 1,6 trillion de dollars.

    Les pays arabes n’ont pas réussi depuis 1951 à créer une zone de libre-échange commune. « La complémentarité arabe signifie également la compétition. Et c’est pour cette raison que la moitié des pays arabes, 12 sur 23, n’ont pas encore signé cet accord. Ils veulent plutôt protéger leur industrie locale, au sens étroit du mot », a expliqué le ministre du Commerce et de l’Industrie, Rachid Mohamad Rachid, lors du forum. Et d'expliquer que ce genre de protection est une myopie économique : « Une complémentarité arabe pourrait détruire quelques entités économiques, mais en même temps elle donnerait naissance à d’autres plus fortes et plus aptes à faire face à la concurrence internationale ».

    Apparemment, cette constatation est dans l'air du temps, puisqu’un sommet arabe se tiendra au Koweït, le 17 janvier prochain, pour discuter d'un plan de secours régional face à la crise économique. Pour l'instant, d'un forum à l'autre, la crise avance à pas pressés, serrant l'étau autour de populations déjà économiquement durement éprouvées.

    Névine Kamel
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