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Hamas : son histoire de l'intérieur

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  • Hamas : son histoire de l'intérieur

    Certains dirtont que ce n'est pas objectif. Peut-être pas...mais au moins ça corrige certaines idées reçues...

    Vous aurez plus d'infos sur le site d'information de la Palestine.

    Il suffit de taper palestine-info dans un moteur de recherche.

    1ère partie

    Dr. Azzam Tamimi



    L’ouvrage Hamas : Son histoire de l’intérieur de Dr. Azzam Tamimi s’inscrit dans une volonté de montrer au monde la vision du mouvement du Hamas et d’expliquer ainsi son développement. Le département français du Centre Palestinien d’Information (CPI) a donc jugé intéressant d’en présenter ici la traduction complète, diffusée régulièrement en de nombreuses parties.
    Préface
    Beyrouth, le 13 août 2006
    Alors que j’écris, la résolution de l’ONU prévue pour résoudre le conflit au Liban doit encore entrer en vigueur. Mais alors que le destin du sud Liban attend encore d’être fixé, il est évident que ces événements-là auront un impact de grande portée. L’impact est déjà manifeste dans la façon dont des mouvements comme le Hezbollah et le Hamas ont partout pris le contrôle de l’imagination des musulmans. Il est aussi certain que les vagues du Liban vont s’étendre bien au-delà de la sphère de l’opinion publique, et il se peut que nous soyons à la limite de changements plus profonds – même si nous ne pouvons êtres certains de ce que ces changements vont entraîner.
    Il est aussi clair du langage employé en occident et notamment aux Etats-Unis vis-à-vis de ce conflit qu’il existe une profonde méprise concernant ce que des mouvements comme le Hezbollah et le Hamas représentent. Ceci est similaire à la mauvaise lecture de la base qui a donné lieu à la terrible “Guerre totale contre le terrorisme”, qui a cherché à mélanger des mouvements comme le Hamas avec al-Qaïda, une union qui viole gravement la vérité – alors qu’il se pourrait qu’elle convienne à quelques politiques qui ne sont intéressés que par la promotion des “modérés” pro-occidentaux partageant leurs opinions.
    En propageant délibérément et en perpétuant le mensonge selon lequel des mouvements islamiques modérés comme le Hamas ne sont pas différents des révolutionnaires d’al-Qaïda, qui croient qu’il faut d’abord brûler une société pour en construire une nouvelle, l’occident renforce la perspective d’un conflit plus vaste entre lui et les courants politiques dominants dans la région. L’amalgame risque de produire un réel conflit, avec la possibilité de conséquences désastreuses, en plaçant l’occident en mauvais termes avec des mouvements comme le Hamas qui symbolisent pour de nombreux musulmans l’espoir d’une réelle réforme et d’une société meilleure. Dans cette condition de profonde méprise, un livre qui aide à présenter le Hamas et à répondre à ces défauts de l’analyse occidentale est plus qu’important : il est vital. La connaissance profonde de Dr. Tamimi de l’islam politique dans son étendue lui permet de parler du Hamas avec une vision plus large ainsi que d’écrire un essai qui fera autorité sur un sujet avec lequel il a une grande familiarité. Non pas comme de nombreux “experts”, il s’agit ici d’un véritable expert.
    Le Hamas se tient dans la tête d’avant-garde des mouvements reflétant un sens de profond mécontentement musulman avec l’ordre mondial actuel et son impact direct sur leurs sociétés. De nombreux musulmans ressentent aussi l’hégémonie qui cherche à imposer le modèle culturel occidental comme unique, en présentant les valeurs universelles de liberté, de justice et de bonne administration. Les islamistes épouses et proclament ces valeurs, mais ils rejettent l’idée que l’occident jouit d’une certaine sorte de copyright culturel sur la façon dont ces valeurs sont appliquées, sur la façon dont elles devraient faire partie de la vie quotidienne. En outre, le Hamas doute que l’occident, dans sa configuration actuelle, ait grand-chose à enseigner aux musulmans pour ce qui est des valeurs de justice (dans son sens large), d’administration éthique ou de respect des autres. Le Hamas ainsi que le Hezbollah soutiennent des élections libres, mais sont d’avis que l’occident est hautement sélectif dans son enthousiasme pour la “liberté”.
    Bien entendu, le Hamas défend la résistance armée. Pour l’occident, ceci est gênant : les occidentaux peuvent comprendre que l’islamisme soit la politisation du mécontentement musulman face à l’actuel ordre mondial, mais l’utilisation de la violence par un acteur non-étatique semblement particulièrement menaçant pour nos susceptibilités. Pour nous, l’eploi de la violence menace d’une descente aux enfers ; cela frappe les certitudes européennes formées depuis que notre “califat chrétien” a pris fin avec le Traité de Westphalie. A ce moment, notre califat du saint empire romain se déchira en plusieurs nations-états séparés ; l’Eglise a été séparée de l’Etat, et la religion, au moins en théorie, est devenue du domaine de la propriété personnelle seulement. Cela a été un tournant dans l’histoire européenne, que nous percevons comme un élément fondamental nécessaire pour les Lumières ainsi que pour le développement de la raison et de la laïcité et pour le progrès de la science. Cette idée a dominé la pensée européenne au cours des deux cents dernières années. Elle est finalement devenue synonyme de modernité pour la plupart des occidentaux.
    Il n’est pas vrai que les gouvernements occidentaux rejettent avec force la violence en soi : l’Irak, l’Afghanistan et maintenant le Liban témoignent de cela ; mais nous voyons la structure westphalienne de nations-états comme seul cadre pour l’utilisation “légitime” de la violence. Les Etats peuvent pratiquer la violence ; mais lorsque des mouvements l’utilisent, cela semble menacer des certitudes traditionnelles, ces mêmes certitudes traditionnelles servent de base aux Lumières. Dans le fond, les mouvements comme le Hamas semblent défier nos certitudes westphalienne. Bien sûr, pour les islamiques, la récente histoire porte un message différent. Les nations-états n’ont rien des idées bienveillantes que nous attribuons aux Lumières. Pour la plupart des Arabes, le dessin des frontières nationales s’est fait récemment et a été imposé, avec quelques idées bienveillantes et peu de “lumière”.
    Lorsque l’occident observe un mouvement comme le Hamas, qui semble contredire nos certitudes fondamentales des Lumières, sa première exigence est qu’il renonce à la violence, qui se désarme et qu’il se joigne à un parti politique.
    Ce qui est implicite dans cette condition, c’est que les mouvements comme le Hamas doivent accepter nos certitudes. Notre pré-condition invariable, avant même toute discussion, est qu’ils doivent s’engager dans nos termes. La violence “légitime”, nous insistons, doit rester seulement entre les mains des acteurs de l’Etat, aussi douteux qu’il puisse être. Notre exigence implique aussi que ces mouvements reconnaissent les déclarations concernant l’ordre mondial qui positionne à jamais l’occident comme propriétaire du modèle pour la réalisation de la modernité. Ceci est le point crucial, car l’adoption par le Hamas de notre modèle équivaut à son acceptation de l’ordre mondial prédominant qui cherche à imposer les termes pour un Etat palestinien sur une base que les Palestiniens considèrent comme étant manifestement injuste. Le Hamas constate aussi que la demande de jouer seulement selon les règles occidentales est un exercice de pouvoir destiné à les “domestiquer”, et à forcer un soutien à l’hégémonie occidentale. Le consentement nie au mouvement son autorité ainsi que sa légitimité : son accord n’est donc pas une option, d’où le besoin de rester une force armée face à l’hostilité occidentale et israélienne.
    Le défi envers l’hégémonie occidentale et israélienne ne doit pas être considéré comme anti-occidental. Le Hamas n’est pas anti-occidental. Le défi du Hamas envers notre soi-disant copyright pour l’organisation socio-économique de la modernité n’implique non plus aucun anti-modernisme virulent. Le Hamas cherche plutôt à former un ordre social et politique juste en Palestine, opposé à un environnement d’oppression et d’exploitation basé sur l’hégémonie de l’occident. Il croit qu’il a de meilleures réponses pour la formation d’un avenir politique palestinien que celles que peuvent présenter l’occident. En agissant de la sorte, le Hamas, comme d’autres mouvements islamiques, croient qu’une nouvelle réflexion politique islamique peut être prise uniquement en se désengageant des perspectives historiques et philosophiques reçues de l’occident.
    Le défi posé par un mouvement comme le Hamas devrait être compris comme étant aussi bien intellectuel que militaire. Le Hamas prend l’action armée comme un seul outil qui peut être utilisé pour accomplir ses objectifs, et son avantage n’est pas perçu comme un ingrédient essentiel de sa philosophie, mais comme une nécessité face à l’hostilité quasi-universelle et à une occupation vouée à mourir. Je crois que l’ouvrage de Dr. Tamimi nous accompagnera pour nous aider à gagner le courage d’examiner ce défi présenté à certaines de nos certitudes et icônes culturelles et à répondre intelligemment plutôt qu’avec notre défensive habituelle.
    Préface rédigée par
    Alastair Crooke
    Conflicts Forum
    Dernière modification par Zakia, 05 janvier 2009, 16h56.
    « N’attribuez jamais à la malveillance ce qui s’explique très bien par l’incompétence. » - Napoléon Bonaparte

  • #2
    suite

    Introduction (1)
    Lorsque ce livre fut lancé en 2003, il y avait peu à parier que moins de trois ans plus tard, le Mouvement de Résistance Islamique en Palestine (Hamas) réaliserait une victoire écrasante dans un des exercices démocratiques les plus inhabituels qui n’aient jamais pu avoir lieu dans le monde arabophone. En dépit de ces derniers développements, de nombreux observateurs voyaient déjà à l’époque le Hamas, qui avait été formé en décembre 1987, comme un acteur majeur dans l’arène palestinienne. Alors que le processus de paix entre les Palestiniens et les Israéliens s’effondrait, la lente mais pénible guerre d’usure sévissant entre eux deux semblerait avoir de plus en plus influé le rôle du Hamas et son impact sur la politique au Moyen-Orient, aux niveaux local, régional et global.
    Il apparut donc qu’un ouvrage était nécessaire pour présenter un rapport sur ce mouvement qui se développe rapidement et sur les phases de son évolution. Quelques livres avaient déjà été publiés en anglais au sujet du Hamas. La plupart d’entre ceux-ci, toutefois, à part l’ouvrage Hamas:Political Thought and Practice de Khalid Hroub, avaient été écrits d’un point de vue israélien, se basant essentiellement sur des données obtenues des dossiers des services de sécurité et de renseignements. Il semblait donc nécessaire d’offrir un récit aussi authentique que possible des événements qui permirent la montée et la prédominance du Hamas, qui permettrait à un lecteur anglais1 de comprendre comment le mouvement se voit et observe le monde autour de lui. Une telle vision est rarement communiquée au monde non-arabophone.
    Nous trouvons une bonne illustration de la manière dont le Hamas est présenté aux lecteurs occidentaux dans le récent livre de Matthew Levitt, qui, au moment de la publication en 2006, était sous-secrétaire adjoint des renseignements et de l’analyse au Département du Trésor Public des Etats-Unis. Hamas: Politics, Charity, and Terrorism in the Service of Jihad décrit le Hamas comme une organisation terroriste qui emploie “son œuvre charitable et éducatif vaste pour promouvoir son objectif principal : plonger Israël dans la mer”. Les activités de charité réputées du Hamas sont condamnées, considérées comme un simple dispositif visant à recruter de nouveaux soldats pour sa “guerre sainte” contre Israël. Les mosquées, écoles, orphelinats et organisations sportives sponsorisés par le mouvement sont décrits comme des “parties intégrales d’un appareil complet de terreur”. Tout regard sur le Hamas qui entre en conflit avec cette image stéréotypée est écarté, considéré comme mal informé ou influencé. Un examen critique de l’ouvrage de Levitt par Steven Erlanger, le chef du bureau du New York Times à Jérusalem, fut dénoncé sans vergogne par Barry Rubin, directeur du Centre de Recherche Générale dans les Affaires Internationales à Israël, estimé comme “une diatribe anti-israélienne choquante”. Rubin déclara qu’Erlanger était un reporter influencé, avec une mauvaise compréhension des questions contemporaines qu’il couvrait. Il insista à dire que le Hamas lui-même et ses principaux supporters gardaient leur opinion en raison de leur désir d’effacer Israël de la carte, plutôt qu’en colère contre la présence d’Israël en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Le propre avis affirmé par Rubin était que « le Hamas croit que continuer à combattre Israël, ignorant les concession israélienne et assurer que la paix échoue, est la meilleure façon de développer un soutien pour une révolution islamique au sein des Palestiniens ». Dans un jugement entièrement représentatif de l’image dominante du Hamas maintenue en Israël et aux Etats-Unis, Rubin caractérise le Hamas comme un groupe raciste et terroriste ayant des intentions génocides contre le peuple israélien.
    Hamas : Son histoire de l’intérieur est une tentative de redresser le déséquilibre dans la littérature contemporaine au sujet du Hamas. Un compte-rendu précis sur les origines du Hamas sera fourni. Une analyse des croyances et valeurs du Hamas fera la distinction entre ce qui est essentiel dans sa position et ce qui est marginal, avec un examen de la manière dont la pensée de ses leaders et idéologues évolua au cours des années. La réaction du Hamas aux défis sera discutée, ainsi que la façon dont il traite avec ses amis et ses rivaux, et sa capacité à se remettre de revers qui pouvaient paraître fatals. Enfin, une explication sera présentée sur la manière dont le Hamas s’est développé pour constituer une alternative convaincante, dans les esprits de nombreux Palestiniens, aux anciens symboles de leur lutte, l’Organisation de la Libération de la Palestine (l’OLP) et le mouvement du Fatah. Le Fatah, la faction dirigée par le défunt Yassir Arafat, est l’épine dorsale de l’OLP, qui maintint un monopole sur la lutte et l’activisme palestiniens pendant plusieurs décennies avant la naissance du Hamas.
    « N’attribuez jamais à la malveillance ce qui s’explique très bien par l’incompétence. » - Napoléon Bonaparte

    Commentaire


    • #3
      suite

      Introduction (2)


      La différence entre ce livre et la plupart des autres écrits sur le Hamas est qu’il parle du Hamas dans un contexte général plutôt qu’en le plaçant exclusivement dans le contexte d’Israël. Le Hamas est une organisation d’Arabes et de musulmans qui se trouvent être palestiniens, et qui se voient comme étant les victimes immédiates d’un complot tramé par un ordre mondial injuste qui crut bon de créer un Etat juif au cœur même des territoires arabes et musulmans. Ils voient les Israéliens comme étant les oppresseurs directs qui les dépossédèrent et qui les persécutèrent pendant des générations. Alors qu’elles s’occupent d’abord de soucis locaux, les activités du Hamas ont des conséquences et des implications régionales ainsi que mondiales. La lutte contre Israël est un des divers éléments qui renseigne sur la pensée du mouvement et qui fait connaître son activisme, mais ce n’est en aucun cas le seul. Le Hamas, qui prit ses origines chez al-Ikhwan al-Muslimun (les Frères Musulmans), partit d’un projet social motivé par la philanthropie et dédié à la charité.
      Les Frères Musulmans sont un mouvement détesté et craint dans certaines régions, mais aimé et soutenu par des millions d’Arabes et admiré par plusieurs millions de musulmans autour du monde. Il est respecté par de nombreux non-musulmans qui l’étudièrent ou qui vinrent à le connaître correctement, soit à travers les écrits de ses leaders, soit en leur ayant parlé directement. Plutôt caractérisés par leurs adhérents comme un mouvement de réforme global, les Frères Musulmans étaient à l’origine des Egyptiens, mais ils se développèrent depuis en un réseau mondial. L’organisation mère fut fondée en 1928 par Hassan al-Banna (1906-1949) dans la ville égyptienne al-Isma’iliyah, où il enseignait dans une école primaire, non loin des quartiers généraux des forces occupantes britanniques. Combinant des éléments de spiritualité acquis de l’association d’al-Banna avec l’ordre soufi Hassafiyah avec les enseignements monothéistes anciens de l’islam qu’il apprit de l’école salafiste de Mohammed Rashid Rida (1865-1935) – un disciple et proche associé de Muhammad Abduh (1849-1905) – le projet reçut un grand accueil populaire. Peu après sa naissance, le mouvement des Frères Musulmans se développa rapidement en Egypte et au-delà. A l’intérieur de l’Egypte, il avait quatre branches en 1929, quinze en 1932, trois cents vers 1938 et plus de deux mille en 1948. Vers 1945, il avait un demi million de membres actifs en Egypte seulement. Entre 1946 et 1948, des branches des Frères Musulmans furent ouvertes en Palestine, au Soudan, en Irak et en Syrie.
      Le talent d’al-Banna était manifeste dans son habileté à présenter aux masses les entreprises des intellectuels de son temps et à transformer en un mouvement populaire les projets élitistes des réformistes qui le précédèrent. Il ne travaillait pas dans les mosquées, car ceux qui fréquentaient les mosquées n’étaient pas sa cible. Il ne travaillait pas non plus dans des cercles culturels ou d’autres lieux de rencontres de la classe supérieure. Son domaine d’activité se trouvait dans les cafés populaires et dans les lieux de rencontres, où il réitérait en des termes plus simples, plus directs, les appels à la réforme effectués par des réformateurs du dix-neuvième siècle. Sur le colonialisme, il transmettait la pensée de Jamal al-Din al-Afghani (1838-1897) et de Mustafa Kamil (1874-1908). Sur l’usure, il prenait son exemple de Muhammad Abduh et de Muhammad Rashid Rida. Mustafa Kamil forma son opinion sur l’influence du commerce étranger, alors que Abduh et Rida formèrent ses idées sur le chaos intellectuel et la perte des valeurs morales. Jamal al-Din al-Afhani et Shakib Arsalan (1869-1946) l’inspirèrent pour sa condamnation de l’imitation aveugle de l’occident, et Shakib Arsalan éveilla sa critique des lois instaurées par l’homme qui échouaient à freiner le crime ou à décourager les criminels. Muhammad Abdul était l’origine de ses pensées sur la mauvaise gestion de l’éducation. Enfin, sur les signes de désespoir et de perte de volonté manifestes dans la communauté musulmane, il prit son inspiration de Arsalan et de Kamil.
      Al-Banna condamna les divisions partisanes pour l’intensification des problèmes dont souffrait déjà la communauté en conséquence du sous-développement et du colonialisme. Sa priorité était d’alerter le peuple d’Egypte sur l’importance de l’unité et de la cohésion. Il avertit que tant que la communauté était fragmentée et noyée dans les disputes, elle ne pourrait jamais affronter la menace de l’hégémonie coloniale. Son message n’était pas limité à l’Egypte, mais la transcendait pour qu’il soit diffusé dans tout le monde musulman, dont la plus grande partie était sous une occupation étrangère à l’époque. Il tint les forces européennes pour responsables du « démembrement de l’empire islamique et l’annihilation de l’Etat islamique et sa suppression de la liste des nations actives et puissantes ». Les objectifs à long terme de son mouvement étaient d’abord de libérer le territoire islamique de toute autorité étrangère, et d’établir ensuite un Etat islamique sur cette terre islamique. Toutefois, aucun objectif ne pouvait être atteint si l’on ne s’occupait pas en premier lieu des besoins immédiats de la société. Le projet d’al-Banna était, au-dessus de tout, un effort visant à “réhabiliter” la communauté, en commençant par l’individu, puis la famille, pour arriver jusqu’à la société dans son ensemble, tout cela à travers un processus de réforme graduel.
      Ces deux mêmes objectifs furent poursuivis, employant la même méthodologie de réforme graduelle, par des branches des Frères Musulmans à travers la région arabe, dont la Palestine, où les Frères Musulmans palestiniens prirent racines immédiatement après la fin de la seconde guerre mondiale. Les Frères Musulmans palestiniens ouvrirent d’abord quelques branches locales à Gaza. Toutefois, le 6 mai 1946, leur structure s’approcha de son achèvement avec l’inauguration officielle du bureau central du mouvement à Jérusalem, en la présence de dignitaires locaux, ainsi que d’invités qui vinrent du Caire pour représenter le mouvement mère en Egypte. La création d’Israël sur deux tiers de la Palestine en 1948 fit séparer les Frères Musulmans palestiniens en deux organisations. L’une était à Gaza, qui se retrouva sous la direction militaire égyptienne, et l’autre en Cisjordanie, qui fut annexée à la Transjordanie et devint en temps voulu une partie du royaume hachémite de Jordanie. Ce livre commence du moment en 1967 où l’occupation israélienne du tiers restant de la Palestine créa une opportunité aux Frères Musulmans de renaître et de se réunifier.
      « N’attribuez jamais à la malveillance ce qui s’explique très bien par l’incompétence. » - Napoléon Bonaparte

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      • #4
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        Introduction (3)
        Ce livre commence du moment en 1967 où l’occupation israélienne du tiers restant de la Palestine créa une opportunité aux Frères Musulmans de renaître et de se réunifier.
        Le premier chapitre, “Les débuts”, commence avec une brève description de l’incident qui causa l’Intifada du 8 décembre 1987 et des circonstances qui amenèrent à la naissance du Hamas peu après. Le chapitre observe ensuite les deux décennies précédentes pour donner à cet événement un contexte approprié. De 1967 à 1977, les Frères Musulmans de Palestine étaient occupés à mettre de l’ordre chez eux, à unir leurs rangs et à regagner certaines bases qu’ils avaient perdu au profit de mouvements nationalistes laïcs qui avaient remporté leur popularité en montrant de la résistance à l’occupation israélienne. A l’intérieur de la Palestine, la direction des Frères Musulmans avait été défiée de prendre une position contre l’occupation israélienne. A l’extérieur de la Palestine, les communautés estudiantines palestiniennes, notamment en Egypte et au Koweït, jouèrent un rôle significatif dans la révolution de la pensée à l’intérieur du mouvement en général.
        Le deuxième chapitre, “Du prêche au djihad”, s’occupe de l’histoire de 1977, date à laquelle les Frères Musulmans en Palestine commencèrent à projeter de lancer leur propre projet de résistance, qui vit la lumière dix ans plus tard avec la révolte de l’Intifada. Cette décennie vit la création d’institutions majeurs, comme al-Mujamma’ al-Islami et l’Université Islamique, qui fournirent à la société palestinienne des services essentiels dans les sphères sociales, médicales et éducationnelles et aidèrent véritablement à élever la position du mouvement et à accroître sa popularité.
        Le chapitre trois, “Une guerre totale”, raconte certains des événements majeurs qui affectèrent le Hamas entre le résultat immédiat du début de l’Intifada dans les premiers jours de 1988 et l’annonce de l’accord d’Oslo entre l’OLP et Israël en 1993. C’était la période pendant laquelle Israël sévit considérablement contre le Hamas, lançant plusieurs vagues d’arrestation contre ses leaders et activistes et déportant des centaines d’entre eux au Liban. La campagne israélienne sans merci contre le mouvement poussa sa direction à transférer toutes ses forces exécutives aux Frères Musulmans palestiniens à l’extérieur de la Palestine. Ce mouvement avait essentiellement pour objectif de protéger l’organisation d’un effondrement total sous l’impact de l’assaut israélien. C’est dans ces circonstances que la branche militaire du Hamas, les brigades du martyr Ezzedine al-Qassam, fut créée en réponse à la brutalité des soldats de l’occupation israélienne.
        Le chapitre quatre, intitulé “En Jordanie”, dit comment la direction du Hamas fut transférée en Jordanie suite à l’invasion du Koweït par Saddam Hussein en 1990. Au début, les Jordaniens toléraient l’opération clandestine du Hamas, mais le climat de mobilisation populaire de la guerre du Golfe en réponse à la menace perçue d’une imminente invasion israélienne prit vit fin, et les activistes du Hamas furent arrêtés ou contraints à la clandestinité ou à sortir du pays. Les Jordaniens reconsidérèrent l’importance qu’ils avaient placée sur le soutien du Hamas dans leur rivalité avec l’OLP. L’accord de paix Wadi Araba entre la Jordanie et Israël, ainsi que l’escalade des pressions sur les autorités jordaniennes, eurent pour résultat la réduction de l’action du Hamas et le retrait du pays de ses leaders non-jordaniens. Deux autres développements sont discutés avec quelques détails dans ce chapitre. Le premier est l’arrestation de la figure majeure du Hamas Moussa Abu Marzouq à l’aéroport Kennedy à New York et sa détention conséquence. La Jordanie, toutefois, n’eut pas le choix de reprendre Marzouq deux ans plus tard. La seconde question est le désaccord croissant entre la direction du Hamas en Jordanie et les Frères Musulmans jordaniens.
        Le chapitre cinq, “L’affaire Meshaal”, raconte l’histoire de la tentative d’assassinat israélienne manquée à l’encontre de la vie du leader du Hamas Khalid Meshaal. L’aventure israélienne dans cet événement apporta des dividendes imprévus au Hamas. Pour sauver leur relation particulière avec la Jordanie, les Israéliens acceptèrent non seulement d’épargner la vie de Meshaal, mais aussi de libérer le fondateur du Hamas Sheikh Ahmed Yassine, qui se trouvait en détention. Sheikh Yassine eut l’occasion de faire un tour dans plusieurs pays arabes et musulmans, rameutant un soutien pour le mouvement. En dépit d’un bref gel dans les relations entre le Hamas et la Jordanie, la crise s’approfondit toutefois par la suite en raison d’une pression croissante sur la Jordanie de la part des Etats-Unis, d’Israël et de l’autorité nationale palestinienne.
        Le chapitre six, intitulé “Hors de la Jordanie”, raconte les événements qui amenèrent au retrait complet du Hamas de la Jordanie. Suite au décès du roi Hussein en janvier 1999, le régime jordanien sembla totalement perdre de l’intérêt pour le Hamas. L’hostilité jordanienne envers le Hamas commença alors que la haute direction de l’organisation était en visite à Téhéran durant l’été de 1999. La relation qui se détériorait entre le Hamas et les Frères Musulmans en Jordanie accéléra la disparition de l’action du Hamas en Jordanie, avec la fermeture de ses bureaux et l’expulsion de ses leaders. Le bureau politique du Hamas se retrouva à Damas, où les autorités syriennes lui accordèrent une place et une protection.
        Le chapitre sept de l’ouvrage, “L’idéologie de libération du Hamas”, traite de la position du Hamas vis-à-vis des Juifs et de l’Etat d’Israël, ainsi que des tactiques militaires appropriés pour le combat, dont l’utilisation des bombardements suicides ou “opérations martyres”. Le chapitre montre comment le discours politique du Hamas sur ces questions et d’autres encore évolua considérablement depuis que sa charte fut publiée pour la première fois durant l’été de 1988. La charte fut aussi bien problématique qu’embarrassante et fut plus citée par ceux qui critiquèrent le mouvement que par ses porte-parole. Ce que ce chapitre cherche à montrer est que depuis le début, la charte ne reflète précisément ni la philosophie du mouvement, ni son point de vue politique. Après avoir soumis la charte à une critique, le chapitre discute avec quelques détails du concept de la hudna, un accord de trêve ou de cessez-le-feu présenté par le Hamas aux Israéliens pas plus tard qu’en 1994.
        Le chapitre huit, “Le djihad et le martyre”, concerne le débat de la question du martyre dans la pensée politique islamique contemporaine. Ce sujet touche directement le Hamas, dont la branche armée employa les “opérations martyres” comme une arme dans la lutte contre l’occupation israélienne. Le chapitre commence avec une explication des concepts du djihad et de la mise à mort (qital), les plaçant tous deux dans un contexte historique avant de discuter de leur rapport à la vie musulmane contemporaine. Comme le chapitre le montre, le débat sur le martyre est plus une affaire de politique que de jurisprudence. Il y a un certain nombre de controverses. Tout d’abord, il y a la question de savoir si l’acte est un suicide immoral ou un noble sacrifice de soi ; ensuite, il y a la question de savoir ce qui est une cible légitime et ce qui ne l’est pas ; et enfin, il y a le débat sur la tactique, à savoir si elle sert ou si elle cause du tort à la cause.
        Le chapitre neuf, “Le Hamas, l’OLP et l’autorité palestinienne”, discute de l’attitude envers le Hamas de son principal rival dans l’arène palestinienne, le mouvement du Fatah. Le Hamas était dès le début perçu comme un sérieux danger, et la direction du Fatah, qui avait aussi dirigé l’OLP et qui était ensuite devenu la direction de l’autorité palestinienne, chercha de diverses façons de le détruire. Parfois, les leaders du Fatah se comportèrent presque comme si le Hamas n’existait pas, alors qu’à d’autres moments, ils prirent des actions contre lui, soit pour le retenir, soit pour se débarrasser de lui.
        Le chapitre dix, qui a pour titre “Le Hamas dans le gouvernement”, commence avec la conséquence de la mort de Arafat en novembre 2004. Il donne un récit des développements qui amenèrent aux élections législatives de janvier 2006 et aux conséquences de la victoire écrasante du Hamas. Le chapitre fournit aux lecteurs un aperçu des mesures entreprises par des opposants du Hamas, dont les Israéliens, les Américains et quelques leaders du Fatah, pour tenter de l’obliger à abandonner la direction de l’autorité palestinienne, dont il avait démocratiquement hérité du Fatah.
        Le chapitre onze, intitulé “Vers la prochaine Intifada ?”, couvre la lutte du pouvoir encours entre le Fatah et le Hamas suite à la victoire électorale du Hamas, qui résultat en fin de compte à la formation d’un gouvernement d’unité nationale le 17 mars 2007, après des négociations à la Mecque. Il ne fut finalement pas requis du Hamas qu’il cède aux conditions internationales en formant un gouvernement d’unité nationale, et continua ainsi de refuser à reconnaître Israël ; néanmoins, immédiatement suite à l’accord, le leader du Hamas Khaled Meshaal effectua la première déclaration claire du mouvement concernant sa bonne volonté à accepter un Etat palestinien restreint aux territoires capturés par Israël en 1967. Cette série d’événements de repère ne mirent toutefois pas fin aux sanctions internationales et ne donna lieu à rien de plus qu’un répit temporaire dans le conflit entre les factions. La violence croissante dans la bande de Gaza finit par donner le contrôle militaire totale au Hamas en juin 2007 ; en réponse, le président Abbas dissout le gouvernement d’unité nationale, et la division entre le Fatah et le Hamas sembla quasiment insurmontable.
        « N’attribuez jamais à la malveillance ce qui s’explique très bien par l’incompétence. » - Napoléon Bonaparte

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        • #5
          suite

          Dans le monde, tous les yeux se tournèrent vers Gaza alors qu’elle faisait face à une crise humanitaire qui devenait de plus en plus dangereux à travers les années de siège.
          L’ouvrage conclut avec six annexes, qui peuvent éclaircir davantage certaines questions soulevées par ces onze chapitres. La première est un document intitulé “Ceci est pour quoi nous combattons”. C’est le texte d’un rapport préparé par le bureau politique du Hamas en anglais à la fin des années 1990, à la demande de diplomates occidentaux dans la capitale jordanienne Amman. La seconde, intitulé “Le mouvement de la résistance islamique (Hamas)”, est un autre rapport, cette fois préparé à l’origine en arabe par le bureau politique du Hamas en 2000, juste avant l’éruption de la seconde Intifada, pour expliquer la position du mouvement sur les diverses questions. La troisième annexe est le texte d’un article de Khalid Meshaal, le chef du bureau politique du Hamas. Sous le titre “Nous ne vendrons pas notre peuple ou nos principes à l’aide étrangère”, il fut publié dans The Guardian le 31 janvier 2006. La quatrième annexe est un autre article qui parut le même jour dans The Washington Post. Rédigé par le chef adjoint du bureau politique du Hamas, Moussa Abu Marzouq, l’article est intitulté “Ce que le Hamas cherche”. La cinquième annexe est un article du premier ministre palestinien Ismaël Haniyeh. Intitulé “Une paix juste ou aucune paix”, il parut dans The Guardian le 31 mars 2006. La sixième et dernière annexe est le texte du manifeste électoral de la liste “Changement et réforme” du Hamas pour les élections législatives tenues le 25 janvier 2006.
          Dans le monde anglophone1, l’histoire que cet ouvrage cherche à raconte a jusqu’ici été peu entendu. C’est l’espoir sincère de l’auteur que ce livre fournisse au public une description plus précise de ce que le Hamas est, et de ce dont il est le symbole. On peut espérer que ceux qui se trouvent dans le milieu universitaire, dans les médias ou dans une autorité politique et qui souhaitent voir une fin du conflit au Moyen-Orient, ou qui travaillent pour ce résultat, trouveront ici une précieuse contribution à cette entreprise.
          « N’attribuez jamais à la malveillance ce qui s’explique très bien par l’incompétence. » - Napoléon Bonaparte

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          • #6
            suite

            Les débuts (1)
            Nos préparations se sont poursuivies, avec nos efforts et les efforts de nos frères, pendant des années et des années. Tout au long de cette période, nous nous sommes rassemblés, nous avons observé et nous avons attendu jusqu’à ce que le moment d’agir est arrivé.
            - Sheikh Ahmed Yassine

            Travaillant à partir de la bande de Gaza, mercredi 9 décembre 1987, un reporter de l’Associated Press décrivit la manière dont les soldats israéliens ouvraient le feu « sur des manifestants arabes lançant des bouteilles dans une vague de violence éveillée par un accident de la route ». Ce que l’agence décrivait d’accident de la route était pour les Palestiniens rien de moins qu’un acte criminel délibéré. L’incident avait eu lieu le soir d’avant, lorsque trois travailleurs palestiniens furent tués et sept autres blessés lorsque le conducteur d’un enfin militaire israélien rentra dans deux camionnettes transportant les travailleurs, alors qu’ils rentraient chez eux d’Israël. Cet “accident de la route” fut le véritable événement duquel découlèrent tous les changements significatifs qui se produirent en Palestine dans les années ultérieures.
            La nuit du 9 décembre, après une journée mouvementée, les sept hommes qui composaient la direction supérieure de al-Ikhwan al-Muslimin (les Frères Musulmans, dorénavant évoqués par le terme “Ikhwan”) à Gaza tinrent un meeting d’urgence. Ils étaient Sheikh Ahmed Yassine, Dr. Abd al-Aziz al-Rantissi, Salah Shihadah, Abd al-Fattah Dukhan, Mohammed Sjam’ah, Ibrahim al-Yazuri et ‘Issa al-Nashar. Plus tôt dans la journée, ils avaient demandé au personnel et aux étudiants de l’Université Islamique, une de leurs institutions les plus importantes dans la bande de Gaza, de fermer à midi et de lancer une grève générale. En réponse, les gens se réunirent autour de l’hôpital al-Shifa dans ce qui devint un rassemblement massif. Jusqu’au soir, on pouvait encore voir de nombreuses personnes en rang à l’extérieur de l’hôpital, pour donner du sang à leur tour. Lors de leur meeting, le soir, les sept leaders des Ikhwan prirent la décision historique de transformer l’organisation Ikhwan en Palestine en un mouvement de résistance qui allait être connu comme étant Harat al-Muqawwamah al-Islamiyah (le Mouvement de Résistance Islamique) [HAMAS]. Dr. Abd al-Aziz al-Rantissi prépara immédiatement le premier communiqué. Il fut remis à la presse le 14 décembre, qui devint alors le jour où le Hamas fut officiellement créé. Pendant dix ans, Sheikh Yassine et ses “frères” s’étaient préparés pour ce monde, même s’ils ne savaient pas à l’avance que ce qu’ils avaient projeté pendant si longtemps allait se produire à ce moment précis ou de cette façon particulière.
            La vie dans la bande de Gaza était devenue de plus en plus insupportable depuis 1977, lorsqu’en juin, le partie de droite Likoud en Israël vint au pouvoir pour la première fois. En novembre, cette même année, le président égyptien Anwar al-Sadat visita Jérusalem pour s’adresser à la Knesset (le parlement d’Israël), donnant ainsi un coup majeur aux espoirs palestiniens selon lesquels leur grande sœur, l’Egypte, pouvait jouer un rôle pour les secourir de l’oppression et libérer leur terre de l’occupation. Bien avant que la monté au pouvoir de Sadat, la plupart des Palestiniens avaient anticipé que l’Egypte allait les libérer. Ceci avait été la promesse du prédécesseur de Sadat, Gamal Abd al-Nassir : une promesse soudainement rompue par un régime qui était seulement intéressé par la reprise du Sinaï d’Israël, qui l’avait occupé dix ans plus tôt.
            De manière paradoxale, depuis qu’ils se retrouvèrent sous l’occupation israélienne en 1967, les Palestiniens de Gaza avaient joui d’une certaine croissance économique. Les travailleurs palestiniens pouvaient assez facilement passer en Israël et gagner un bon montant d’argent pour une journée de travail, travail qui ne manquait pas. Entre-temps, les Israéliens venaient dans la bande de Gaza pour faire des emplettes : dans cette zone de libre échange non déclarée, non sujette aux différentes taxes, les prix étaient attractifs. Incontestablement, la défaite des armées arabes en 1967, qui mena à la capture de ce qui restait de la Palestine par les Israéliens, était une bénédiction déguisée dans bien des aspects. En outre, Gaza devint accessible de la Cisjordanie et les deux régions étaient ouvertes aux citoyens israéliens d’origine arabe, qui virent cela comme une opportunité pour la “réunion familiale”.
            Ce qui graduellement altéra la prospérité que l’occupation israélienne semblait apporter aux territoires occupés en 1967 était l’humiliation auxquels les travailleurs palestiniens étaient sujets. Les travailleurs palestiniens qui traversaient la “Ligne Verte” pour se rendre en Israël laissaient derrière eux leur dignité et leur amour-propre. La société israélienne avait besoin des ouvriers, mais elle les méprisait, car ils étaient “les autres” ; ils étaient vus comme différents, sous-humains, et ils n’étaient pas dignes de respect. En même temps, la simple présence de ces travailleurs parmi eux était un rappel quotidien atroce pour les Israéliens du fait qu’ils vécussent sur une terre volée quelques décennies auparavant des parents ou grands-parents de ces misérables palestiniens. L’indignation et la frustration des Palestiniens étaient alimentées par l’éveil du nationalisme palestinien ainsi que par la brise d’une revivification islamique qui commençait à être sentie. Les leaders nationaux et islamiques décourageaient les Palestiniens de la “cohabitation” avec leurs oppresseurs, encourageant, si ce n’est la résistance, au moins le boycott. Au-dessus de tout, les leaders islamiques s’inquiétaient de l’influence que pouvait avoir sur les travailleurs ce qu’ils voyaient comme étant les coutumes négligées et confuses de la société israélienne. Entre-temps, toutefois, des activités de résistance sporadiques lancées par des membres de groupes de résistance palestiniens, comme le Fatah et le Front Populaire pour la Libération de la Palestine (FPLP), à partir des “territoires” ou de l’autre côté des frontières, attirèrent des mesures punitives sévères et souvent collectives. Les autorités de l’occupation israélienne mirent en place des opérations de sécurité draconiennes et effectuèrent des arrestations arbitraires, notamment contre les populations des camps de réfugiés en Cisjordanie et à Gaza. Alors qu’ils étaient en détention et sous une interrogation, les Palestiniens étaient sujets aussi bien à la torture physique qu’à la torture psychologique, ce qui laissait souvent des cicatrices physiques et mentales permanentes.
            Telle était l’atmosphère en Palestine lorsque le président égyptien Anwar al-Sadar bouleversa le monde avec son voyage de 1977 à Jérusalem, qui prépara le chemin pour les Accords de Camp David. La signature de ceux-ci aboutit au traité de paix entre Israël et l’Egypte, qui fut signé le 26 mars 1979 en la présence du président Jimmy Carter, sur le gazon de la Maison Blanche à Washington D.C. Ironiquement, cette paix fut réalisée entre l’Egypte, historiquement considérée par Israël comme son principal adversaire dans le monde arabe, et le premier gouvernement de la droite israélienne Likoud sous la direction de Menachem Begin. Les supporters du Likoud en général soutenaient l’avis que les frontières de l’Etat d’Israël devaient être celles supposées avoir été offertes aux juifs par le droit divin, c’est-à-dire du Nil à l’Euphrate. Alors que l’opération de paix avec l’Egypte fut célébrée, la question palestinienne fut reléguée au second plan. Pendant ce temps, Israël continuait à lancer des coups destructeurs, les uns après les autres, à l’encontre de la résistance nationaliste palestinienne, affaiblissant ainsi les factions comprises dans l’OLP.
            La venue au pouvoir du gouvernement du Likoud signala un changement majeur pour les gens de Gaza. C’était ce gouvernement qui autorisa l’établissement des premières colonies juives dans la bande de Gaza, déjà l’une des régions les plus densément peuplées du monde. En plus de la frustration ressentie par les Palestiniens suite à la neutralisation de l’Egypte dans le conflit arabo-israélien, il apparut que le peuple de Gaza fut choisi pour payer le prix du processus de paix. Ayant retiré leurs troupes et colons du Sinaï, les Israéliens déployèrent plus de soldats dans la bande de Gaza. En dépit de la paix avec l’Egypte, les Israéliens ne modifièrent pas leur politique de conscription et il n’y avait nulle par ailleurs que les territoires occupés pour déployer les nouveaux conscrits. Avant la réalisation du processus de paix entre Israël et l’Egypte, la frontière de facto d’Israël avec l’Egypte était bien loin de Gaza. Cependant, dans la nouvelle ère de paix israélo-égyptienne, Gaza devint la frontière, et c’était là que les forces frontalières d’Israël furent massivement déployées.
            Graduellement, l’humiliation à laquelle les travailleurs palestiniens étaient sujets dans le marché de l’emploi israélien s’étendit aux résidents de Gaza de manière générale. Dans une politique initiée par Ariel Sharon, qui devint ministre de la défense d’Israël dans le cabinet du Likoud en 1981, des parachutistes israéliens, connus pour les Palestiniens comme les “bérets rouges”, furent déployés avec pour instructions d’intimider et d’humilier les Arabes suspectés de donner une assistance à la résistance. Il devint une pratique commune pour les troupes israéliennes sur les points de contrôle à l’intérieur des territoires occupés d’arrêter des passants arabes, notamment des étudiants à l’université et au lycée, les menaçant avec leur arme et les soumettant à des abus verbaux et physiques pour aucune raison manifeste autre que de montrer qui est le chef.
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            • #7
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              En fin de compte, Gaza devint en pratique une énorme prison. Il n’était plus question qu’un résident de Gaza puisse voyager facilement vers l’Egypte, et peu de temps après, les habitants de la bande de Gaza se virent même interdits de voyager vers la Jordanie. Les restrictions israéliennes imposées aux travailleurs étaient destinées à permettre à moins d’hommes et des femmes de gagner leur vie dans le marché du travail lucratif israélien. Une alternative humiliante était de gagner son pain en travaillant dans la construction des colonies juives bâties sur des terres illégalement saisies des Arabes eux-mêmes. La vie devenait de plus en plus insupportable, et une explosion allait venir.
              La liste des facteurs qui précipitèrent l’Intifada (soulèvement) de décembre 1987 est longue, mais ce n’étaient pas forcément les mêmes facteurs qui permirent l’émergence du Hamas, en dépit de la simultanéité des deux événements. Les leaders des Ikhwan à Gaza employèrent simplement le mouvement de frustration et de colère des habitants de la Bande pour effectuer la transformation de leur organisation en un mouvement de résistance. Quelques membres de l’organisation savaient que la décision de réaliser une telle transformation avait été prise il y a bien dix ans plus tôt. Moins de personnes encore durent être conscients que la décision avait été prise en coordination par les nombreuses branches des Ikhwan palestiniens, à Gaza et en Cisjordanie ainsi qu’en Jordanie et dans la diaspora.
              La guerre de juin 1967 déshonora les Arabes et donna plus de territoires à Israël, dont la bande de Gaza, la Cisjordanie, le Sinaï et la haute Galilée. A travers la décennie suivante, les Ikhwan d’à travers le monde arabe récoltèrent les fruits de ce qui était vu comme l’échec scandaleux du nationalisme arabe. Après le décès d’Abd al-Nassir en 1970, des leaders et des membres des Ikhwan, qui avaient été retenus depuis longtemps dans les prisons égyptiennes, furent libérés. Cela donna aux Ikhwan un avantage sur d’autres organisations concourrant avec eux pour recruter de nouveaux membres, dans un climat rendu favorable par la résurgence islamique éveillée par la défaite de 1967. En Palestine, de jeunes hommes, parmi eux de jeunes adolescents, affluèrent pour rejoindre les rangs des Ikhwan. La plupart des recrues venaient de la communauté estudiantine.
              La réactivation des Ikhwan à Gaza résultait des efforts de quelques hommes dévoués. Ceux-ci voyaient l’ignorance et le manque d’engagement à l’égard de l’islam comme la plus grande menace pour leur communauté. Du point de vue des leaders des Ikhwan, la suppression systématique de l’activisme islamique sous la direction égyptienne était une erreur, et Israël en était le véritable bénéficiaire. L’incapacité du peuple de Gaza à résister aux politiques dépravantes des autorités d’occupation israéliennes alarma les leaders islamistes. Seule une moralité basée sur l’islam pouvait munir un habitant sans travail ou pauvre de Gaza de la capacité de dire non à un officier israélien lui présentant, à lui ou elle, une vie confortable, un bon travail, ou un permis de voyager à l’étranger pour un emploi ou une formation en échange d’une collaboration avec les autorités. En même temps, Israël était simplement incapable de contrôler les territoires occupés sans la collaboration de quelques Palestiniens. Les Israéliens avaient une politique délibérée visant à convertir autant de Palestiniens que possibles en informateurs, en espions contre leur propre peuple, ou au moins en bénéficiaires de l’occupation, afin qu’ils fassent tout ce qu’ils peuvent pour préserver le statu quo. Les outils employés par Israël pour recruter ou faire chanter des collaborateurs étaient l’argent, les drogues, le sexe et l’intimidation, ainsi que la tentation de bénéfices matériels pour atténuer les privations qu’endurait une population assiégée. Les islamistes s’engagèrent dans un projet à long terme pour protéger le peuple de Gaza de ces menaces, avec à la tête un enseignant quadriplégique du nom de Ahmed Yassine.
              Ahmed Yassine était né en juin 1936 dans le village d’al-Jurah, près de la ville moderne d’Ashkelon, moins d’un an après que Sheikh Ezzedine al-Qassam dirigea la première révolution armée contre des troupes de l’occupation étrangère en Palestine. C’était la première année de la Grande Grève réalisée en protestation contre les politiques britanniques pro-sionistes, qui dura six mois, de mai à octobre 1936. Yassine n’était alors qu’un garçon de douze ans lorsque la Nakba (la catastrophe) de 1948 obligea sa mère à fuir avec ses enfants, lors de l’exode général. Des Palestiniens du village d’al-Jurah, comme de nombreux autres villages et villes, fuirent de ce qu’ils craignaient être une mort imminente de la part des miliciens armés sionistes qui cherchaient à créer un Etat exclusivement juif en Palestine.
              Le père d’Ahmed Yassine, Ismaïl, mourut alors qu’Ahmed était âgé de trois ans. Il était destiné à grandir sans père et sans foyer, dans un camp de réfugiés de la bande de Gaza. A quelques pas seulement, dans son ancienne maison d’al-Jurah, des immigrants juifs d’Europe s’étaient installés, prétendant être retournés à la terre que leurs ancêtres avaient quittée deux mille ans plus tôt. Comme des centaines de milliers d’autres Palestiniens, la famille Yassine devait souffrir, apparemment à cause d’un pacte divin accordé aux Israéliens par leur Dieu. Il en viendra plus tard à croire que son pays avait été volé de son peuple pour des raisons purement politiques et mondaines : la religion n’avait rien à voir dans cette histoire. Jusqu’à ce que sa famille ait été forcée de quitter al-Jurah, Ahmed Yassine avait pris plaisir à s’amuser simplement sur le bord de mer, à deux cents mètres à peine de chez lui. Il observa du haut d’une proche colline les soldats britanniques puis les soldats égyptiens alors qu’ils se déplaçaient au-delà d’al-Jurah. Des développements très tragiques allaient se produire, et les nouvelles de massacres sionistes de Palestiniens commencèrent bientôt à arriver, instillant la terreur dans les cœurs et les esprits des villageois. Sa famille rejoint d’autres groupes dans l’expression de leur colère envers les armées arabes. Elles étaient venues avec la promesse de combattre les Sionistes, de sauver la Palestine et de venir au secours des Palestiniens. Toutefois, ils ne firent que désarmer le peuple, déclarant qu’ils étaient les seuls capables de prendre l’action requise. Leur promesse ne fut jamais remplie ; en effet, ils prirent part à la venue de la catastrophe.
              La peine du manque d’abri était exacerbée par la pauvreté. Les dons de nourritures des soldats égyptiens positionnés à Gaza aidaient parfois. Néanmoins, le jeune Yassine fut obligé d’abandonner l’école pendant une année, de 1949 à 1950, pour travailler en tant que serveur dans un restaurant, afin de nourrir les sept membres de sa famille sans père. Puis une catastrophe frappa. A l’âge de seize ans, il tomba sur le dos dans un accident alors qu’il faisait du sport, se blessant gravement à la vertèbre du cou. Par la suite, son état continua de se détériorer, jusqu’à ce qu’il ait perdu la capacité de marcher. Cependant, son immobilité ne l’empêcha pas de poursuivre une carrière dans l’éducation, qui l’amena au contact direct des gens, notamment de la jeune génération.
              Après avoir terminé son éducation en juin 1958, il lui fut offert une place pour étudier pour un diplôme au Caire, mais il n’avait pas les moyens d’y aller. Il travailla en tant qu’enseignant, espérant un jour pouvoir se rendre à l’université, et il visita le Caire plusieurs fois, recherchant un traitement pour sa blessure. Il réalisa presque son rêve lorsqu’il fut accepté en 1964 par l’Université de ‘Ain Shams au Caire. Il se rendit brièvement en Egypte pour compléter ses formations d’inscription, et apparemment après avoir étudié à Gaza en tant qu’étudiant externe, il retourna pour se présenter à un examen en 1965. Plus tard en 1965, toutefois, ses espoirs furent brisés après son retour chez soi par les services de sécurité égyptiennes, alors en charge du contrôle de Gaza. Le 18 décembre 1965, il fut détenu, suspecté d’être affilié aux Ikhwan, qui avaient été sujets d’une campagne de persécution pendant plus d’une décennie par le régime d’Abd al-Nassir. Après un mois de confinement solitaire dans la Prison Centrale de Gaza, auquel il fut sujet en dépit de son incapacité physique, il fut libéré après des investigations qui prouvèrent qu’il était innocent de ce “crime”. On lui interdit tout de même de voyager pour se rendre au Caire.
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              • #8
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                Cette expérience eut un impact durable sur lui. Il n’avait jamais été affilié aux Ikhwan en Egypte, mais s’était retrouvé sous leur influence. En 1966 ou 1967, il rejoignit officiellement les Ikhwan, auxquels ils fut dévoué, détestant l’injustice qui leur était faite. Il rappela plus tard : « Cette expérience d’un mois approfondit ma haine envers l’injustice et m’apprit que la légitimité de toute autorité doit être basée sur la justice et sur la sanctification du droit d’un être humain à vivre avec dignité et liberté ».
                L’adhérence de Yassine aux Ikhwan était un geste de défi. Un monde de différence distinguait le début des années 1960 de la précédente décennie. Au début des années 1950, rejoindre les Ikhwan était à la mode, c’était tendance de le faire. La bravoure et les sacrifices du groupe durant la lutte de 1948 pour empêcher les Sionistes de prendre contrôle de la Palestine et de la transformer en un Etat juif étaient encore vifs dans les esprits des résidents de Gaza comme de la Cisjordanie. Toutefois, de 1954 à au-delà, comme le régime d’Abd al-Nassir en Egypte se tourna contre eux et commença à les réprimer, de moins en moins de personnes souhaitaient avoir un lien quelconque avec les Ikhwan. Au lieu de cela, le nationalisme arabe prit du terrain. Aidé par la machine de propagande grande et puissante d’Abd al-Nassir, l’arabisme se présenta comme une alternative au mouvement détérioré et réactionnaire des Ikhwan, qui était blâme pour toutes les misères du passé et du présent. Vers la fin des années 1960, presque aucune des figures distinguées d’autorité ou de crédibilité ne s’identifiait publiquement comme faisant partie des Ikhwan en Palestine. Nombre de ces figures étaient déjà partis vers d’autres pays, à la recherche de meilleures conditions de vie ou à la poursuite d’une sécurité personnelle. En outre, les Ikhwan avaient commencé à perdre certains de leurs meilleurs membres qui rejoignaient le mouvement du Fatah, dédié à la libération nationale de la Palestine, qui avait été fondé en 1957. L’ambition des leaders du Fatah à ce moment était d’intégrer l’ensemble de l’organisation des Ikhwan palestiniens dans leur mouvement nouvellement fondé. Ils croyaient que les Ikhwan ne servaient plus aucun objectif et que leur incorporation pouvait fournir au projet naissant du Fatah une impulsion majeure à un moment où il faisait aussi face à quelque hostilité de la part d’Abd al-Nassir.
                Peu de personnes allaient prédire qu’un jeune homme quadriplégique comme Ahmed Yassine allait vivre pour guider une transformation massive dans les vies des Palestiniens, non seulement dans la bande de Gaza, mais aussi dans toute la Palestine et au-delà. Depuis le début, ses yeux étaient rivés sur la résistance à l’occupation. Il savait toutefois qu’il ne pouvait guère y avoir de résistance sans endurance et organisation. Comme il le dit lui-même, il soutint pendant de nombreuses années la croyance selon laquelle la résistance à l’occupation nécessitait des préparations ardues. Il fut approché en 1965 par le mouvement du Fatah lorsque ce dernier lança sa lutte contre Israël dans l’espoir d’entraîner les pays arabes dans une guerre contre l’Etat sioniste. Il fut invité à le rejoindre, mais il refusa, insistant à dire que les pays arabes n’étaient pas prêts à combattre et qu’ils n’en avaient pas non plus la volonté. Il ne voyait pas l’intérêt de les attirer dans un duel qui allait très certainement se terminer en leur défaite, et qui pouvait par conséquence faire perdre plus de territoires au profit des Israéliens.
                Peu de temps s’écoula avant que sa réflexion se prouve être juste, à plusieurs occasions. La première fois fut lorsque le Fatah mit en place une attaque de la bande de Gaza contre un bus israéliens à l’est de Deir al-Balah. Les autorités égyptiennes, qui contrôlaient Gaza, répondirent en arrêtant et emprisonnant ces personnes suspectées d’avoir préparé l’attaque. L’Egypte ne souhaitait pas être attirée dans une guerre qu’elle savait qu’elle ne pouvait gagner. A ce moment, le gouvernement égyptien accusa les Ikhwan de chercher à causer des soucis à l’Egypte et de forcer une internationalisation de la bande de Gaza. Bien que les Ikhwan n’avaient aucun lien avec l’attaque, ceux qui l’avaient préparée était à l’origine des membres des Ikhwan qui avaient été amenés à rejoindre le Fatah, dont les fondateurs, à l’exception de Yasser Arafat, avaient tous été d’anciens membres des Ikhwan.
                La seconde occasion où il se révéla qu’Ahmed Yassine avait juste était lors de la guerre de juin 1967. C’était une confrontation avec Israël qui n’était pas désirée par les Etats arabes, dont l’Egypte, qui perdirent de façon lamentable. Le scepticisme exprimé par Ahmed Yassine au cours des jours qui ont conduit à la guerre surprit nombre de ses contemporains. L’Egypte, de son point de vue, n’était tout simplement pas prête à la guerre, et le stratagème d’Abd al-Nassir d’ordonner l’évacuation des gardiens de la paix de l’ONU du Sinaï allait lui coûter très cher. Il put voir de l’état des troupes égyptiennes déployées à Gaza qu’ils étaient vraiment mal préparés. Elles n’avaient pas d’instructions précises et n’avaient pas d’objectif clair. Il craignait aussi qu’Israël puisse donner un coup mortel à la force aérienne égyptienne, laissant l’armée égyptienne délaissée comme un homme solitaire dans le désert du Sinaï.
                C’est exactement ce qui se produisit. Alors que les troupes égyptiennes se faisaient lourdement battre par les Israéliens, la machine de propagande d’Abd al-Nassir déclarait que l’Egypte avait l’avantage et se dirigeait vers une victoire concluante. Finalement les soldats israéliens sont non seulement entrés à Gaza et en Cisjordanie, mais ils ont aussi avancé jusqu’au Canal de Suez, s’emparant aussi de la haute Galilée syrienne, tout cela en quelque six jours. La défaite était des plus choquantes pour ceux qui avaient une foi aveugle en l’autorité égyptienne : ils avaient espéré que la Palestine soit libérée par Gamal Abd al-Nassir, le héro du nationalisme arabe. Ce n’est qu’après que nombre de personnes se rappelèrent avec grande consternation l’annonce qu’Abd al-Nassir avait fait deux ans plus tôt, dans un discours devant le Conseil National de la Palestine au Caire : « Si je vous disais que j’avais un plan pour libérer la Palestine, je vous mentirais ».
                Après la guerre de 1967, Sheikh Yassine, comme il fut alors connu, vit les gens de Gaza se réveiller graduellement de leur choc pour comprendre enfin la nouvelle réalité. Ils semblaient n’avoir de choix que d’accepter le statu quo. Nombre d’entre eux cherchèrent à satisfaire leurs besoins quotidiens en faisant des affaires avec l’autorité d’occupation plutôt qu’à lui résister. Ils sentaient ne plus avoir de choix que de retourner à leur travail et d’être payés en conséquence par les nouvelles autorités. Sheikh Yassine déplora la situation, mais la comprit : « Les gens n’ont pas de quoi manger. Jour après jour, ils commencèrent à accepter la réalité et décidèrent de retourner à leur travail. Si seulement nous avions une bonne organisation, alors nous nous serions organisés et nous aurions boycotté l’occupation. Mais nous n’avions pas d’organisation, il n’y avait pas de garantie que le peuple soit protégé, et les gens ne savaient pas que faire ».
                Il devait lui-même soupeser ses options. Avant l’occupation de Gaza, il avait travaillé en tant qu’enseignant. Lorsqu’il fut annoncé que des écoles allaient rouvrir et que les enseignants devaient se signaler pour travailler, il se demanda : « Supporterais-je l’occupation en enseignant ou servirais-je mon peuple ? ». La raison des doutes de Sheikh Yassine étaient qu’il était supposé que l’autorité de l’occupation devait être boycottée, et non pas servie. Il décida qu’il allait servir son peuple, et il décida donc, avec ses collègues, de retourner au travail. C’est à travers sa profession d’enseignant qu’il entreprit le projet de transformer la société palestinienne de Gaza. En effet, certains de ses étudiants grandirent pour devenir des leaders du mouvement islamique dans la bande de Gaza ; ils étaient les produits du renouveau islamique, mentionnée parfois comme étant la résurgence islamique, un processus qui prit racine dans la société au début des années 1970 et qui était dirigé par Sheikh Yassine.
                L’occupation d’Israël de la bande de Gaza et de la Cisjordanie après la naksa fournit paradoxalement une fenêtre d’opportunité à Sheikh Yassine, qui put pour la première fois voyager à travers l’ensemble de la Palestine historique. Cela lui permit de communiquer sa sagesse et son savoir aux Arabes oubliés d’Israël, ces Palestiniens qui s’étaient vus autorisés à rester dans les territoires occupés en 1948 sur lesquels Israël s’était établie. Des liens furent aussi forgés avec les Palestiniens de la Cisjordanie, et même avec les Palestiniens de la diaspora peu de temps après. Cependant, sa tâche formidable était de persuader une population extrêmement sceptique que les Ikhwan était un mouvement louable. Sa réputation était ternie et sa crédibilité sévèrement touchée par les médias égyptiens d’Abd al-Nassir ; la conséquence en était que le mouvement n’intéressait pas le peuple de Palestine. Une combinaison de propagande, d’intimidation et de répression décourageait les gens de s’associer avec lui.
                L’image que les gens se faisaient en général des Ikhwan de la Cisjordanie étaient encore moins favorable que celle de leurs frères de Gaza. La Cisjordanie était une partie de la Jordanie, et donc sujette à l’autorité directe des Hashémites, depuis la création d’Israël en 1948. Les Ikhwan semblaient être entrés dans un pact non-déclaré avec le régime hashémite.
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                • #9
                  Pour mieux connaître le Hamas, ses bases intellectuelles et politiques, son programme et ses fondamentaux, lire sa charte.

                  CHAPITRE PREMIER
                  Définition du Mouvement
                  Ses Bases intellectuelles :
                  Article premier :
                  Le Mouvement de la Résistance Islamique : L'islam est sa règle de vie; il en tire ses idées, ses concepts de même que ses points de vue sur l'univers, sur la vie et sur l'homme; c'est à lui qu'il se remet pour juger de l'ensemble de ses pratiques et c'est de lui qu'il tire les indications de la Voie droite sur laquelle mettre ses pas.

                  Lien du Mouvement de la Résistance Islamique avec l'Association des Frères musulmans :
                  Article deuxième :
                  Le Mouvement de la Résistance Islamique est l'une des ailes des Frères musulmans en Palestine. Le Mouvement des Frères musulmans est un organisme mondial, le plus important des mouvements islamiques de l'époque moderne; il se distingue par la profondeur de son mode compréhension, la précision de son mode de représentation et l'universalisme parfait des concepts islamiques qui s'appliquent à l'ensemble des domaines de la vie, aux représentations et aux croyances, à la politique et à l'économie, à l'éducation et à la vie sociale, au judiciaire et à l'exécutif, à la mission et à l'enseignement, à l'art et à l'information, à ce qui est caché comme à ce qui est manifeste et à tous les autres domaines de la vie.

                  [6]

                  Sa structure et sa genèse :
                  Article troisième :
                  La structure fondamentale du Mouvement de la Résistance Islamique est constituée de musulmans qui ont fait allé*geance à Dieu, le servant de la seule adoration véritable, "Je n'ai créé les Djinns et les hommes que pour qu'ils m'adorent" [Coran, 51, 56] ; connaissant leur devoir envers eux-mêmes, leur famille et leur patrie, ils vivent en tous ces domaines dans la crainte de Dieu et ont levé l'étendard du jihad contre les Rebelles afin de purifier le pays et les humains de leurs souillures, de leurs turpitudes et de leurs iniquités.

                  "Tout au contraire : Nous lançons contre l'erreur la Vérité qui lui écrase la tête, et voilà que l'erreur disparaît" (21,18).

                  Article quatrième :
                  Le Mouvement de la Résistance Islamique accueille tout musulman qui embrasse sa profession de foi, adopte ses idées, s'attache à sa règle de vie, garde ses secrets et mani*feste son souhait d'appartenir à ses rangs pour faire son devoir. Sa rétribution se trouve auprès de Dieu.

                  [7]

                  Dimensions temporelle et spatiale du Mouvement de la Résistance Islamique :
                  Article cinquième :
                  La dimension temporelle du Mouvement de la Résistance Islamique : En adoptant l'islam pour règle de vie, il se situe en ligne directe avec la naissance de la mission [risâla] islamique, avec les Pieux Ancêtres. Dieu est son but, l'Apôtre son modèle et le Coran sa constitution. Sa dimension spatiale : Partout où se trouvent des musulmans qui adoptent l'islam pour règle de vie, en n'importe quelle partie de la terre. [Le Mouvement] s'enfonce ainsi dans les profondeurs de la terre et at*teint le plus haut des cieux.

                  "N'as-tu pas vu comment Dieu propose en parabole une très bonne parole ? Elle est compa*rable à un arbre excellent dont la racine est solide, la ramure dans le ciel et les fruits abondants en toute saison, -avec la permission de son Seigneur- Dieu propose aux hommes des paraboles; peut-être réfléchiront-ils ? " (14, 24-25).

                  Spécificité et particularisme :
                  Article sixième :
                  Le Mouvement de la Résistance Islamique est un mouve*ment palestinien spécifique qui fait allégeance à Dieu, fait de l'islam sa règle de vie et oeuvre à planter l'étendard de Dieu sur toute parcelle de la Palestine. A l'ombre de l'islam, les fi*dèles de toutes les religions peuvent coexister en toute confiance et sécurité pour leur vie, leurs biens et leurs droits; en l'absence de l'islam, les luttes apparaissent, l'injustice se développe, la corruption se répand, les conflits et les guerres sur*viennent.

                  [8]

                  De quel éclat brille le poète musulman Muhammad Iqbal lorsqu'il dit :

                  "Lorsque la foi est perdue, il n'y a plus ni sécurité ni vie ici-bas pour celui qui n'a pas conservé de religion; celui qui jouit de la vie sans aucune religion a fait du néant son compagnon."

                  Mondialisme du Mouvement de la Résistance Islamique :
                  Article septième :
                  Puisque les musulmans qui adoptent la règle de vie du Mouvement de la Résistance Islamique, travaillent à le soutenir, tiennent ses positions et fortifient son combat se trouvent dans le monde entier, [le Mouvement] constitue un mouvement mondial. La clarté de ses idées, la noblesse de ses buts et l'éminence de ses objectifs le qualifient pour cela.

                  C'est sur cette base qu'il convient de le considérer, de mesurer son pouvoir et de reconnaître son rôle. Qui*conque mé*connaît son authenticité, s'abstient de le soutenir, s'aveugle à son sujet et oeuvre à anéantir son rôle, celui-là est comme celui qui conteste le décret divin et se bouche les yeux devant la contemplation des réalités, volontairement ou involontairement : il sera dépassé, les événe*ments l'ayant déjà doublé alors même qu'il n'aura aucune justification raisonnable à apporter pour défendre sa position. Primauté à celui qui précède.

                  L'injustice du prochain est plus difficile à supporter que le coup de la redoutable épée d'acier indien.

                  "Nous t'avons révélé le Livre et la Vérité, pour confirmer ce qui existait du Livre, avant lui, en le préservant de toute altération. Juge entre ces gens d'après ce que Dieu a révélé; ne te conforme pas à leurs désirs en te détournant de ce que tu as reçu de la Vérité. Nous avons donné, à chacun d'entre eux, une règle et une Loi. Si Dieu l'avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Mais il a voulu vous éprouver par le don qu'il vous a fait. Cherchez à vous surpas*ser les uns les autres dans les bonnes actions. Votre retour, à tous, se fera vers Dieu ; [9] il vous éclairera, alors, au sujet de vos différends" (5, 48).

                  Le Mouvement de la Résistance Islamique est l'un des épisodes du jihad mené contre l'invasion sioniste. Il est étroi*tement lié au soulèvement du martyr "Izz al-Dîn al-Qassâm et de ses frères combattants du jihad des Frères musulmans en 1936 C.; il est aussi étroitement lié à un autre épisode, celui du jihad des Palestiniens, des efforts et du jihad des Frères mu*sulmans dans la guerre de 1948 de même que des opérations de jihad menées par les Frères musulmans en 1968 C. et plus tard.

                  Ainsi, bien que les épisodes soient séparés les uns des autres, la continuité du jihad se trouvant brisée par les obs*tacles placés par ceux qui relèvent de la constellation du sio*nisme, le Mouvement de la Résistance Islamique aspire à l'accomplissement de la promesse de Dieu, quel que soit le temps nécessaire. L'Apôtre de Dieu -que Dieu lui donne bénédic*tion et paix- a dit : "L'Heure ne viendra pas avant que les mu*sulmans n'aient combattu les Juifs (c'est à dire que les musul*mans ne les aient tués), avant que les Juifs ne se fussent ca*chés derrière les pierres et les arbres et que les pierres et les arbres eussent dit : 'Musulman, serviteur de Dieu ! Un Juif se cache derrière moi, viens et tue-le. Un seul arbre aura fait exception, le gharqad [Sorte d'épineux] qui est un arbre des Juifs" (hadîth rapporté par al-Bukhârî et par Muslim).

                  Devise du Mouvement de la Résistance Islamique :
                  Article huitième :
                  Dieu est son but, l'Apôtre son modèle, le Coran sa constitution, le jihad son chemin et la mort sur le chemin de Dieu la plus éminente de ses espérances.

                  [10]

                  CHAPITRE DEUXIEME
                  Les objectifs
                  Mobiles et objectifs :
                  Article neuvième :
                  Le Mouvement de la Résistance Islamique s'est créé à un moment où l'islam avait disparu de la réalité de la vie : tous les critères de jugement avaient alors été déréglés, les concepts avaient été mis sens dessus dessous, les valeurs avaient été changées, les méchants avaient pris le pouvoir, l'injustice régnait ainsi que l'iniquité, les lâches fai*saient les matamores, les patries avaient été usurpées, les peuples avaient été éparpillés errant sur la terre entière, l'Etat de la Vérité avait disparu et l'Etat du Men*songe avait été instauré; rien ne demeurait à sa place. C'est ainsi : lorsque l'islam disparaît, tout est altéré. Tels sont les mobiles [de la création du mouvement].

                  Quant à ses objectifs : Combattre le Mensonge, le dé*faire et le détruire pour que règne la Vérité, que les patries soient restituées, que l'appel à la prière annon*çant l'établissement de l'Etat de l'islam soit lancé du haut de leurs mosquées, que les gens rentrent chez eux et que toute chose retrouve sa juste place ! C'est de Dieu que nous implorons l'aide.

                  "Si Dieu ne repoussait pas certains hommes par d'autres, la terre serait corrompue. Mais Dieu est celui qui dispense la grâce aux mondes" (2, 251).

                  [11]

                  Article dixième :
                  Le Mouvement de la Résistance Islamique, tout en ouvrant le chemin du soutien à tous les déshérités et celui de la défense de toutes les victimes de l'injustice de toute la mesure de sa force, n'épargnera aucun effort pour rétablir la Vérité et dé*truire le Mensonge par la parole et par l'action, en ce lieu et en tout lieu qu'il lui serait possible d'atteindre et dans lequel il aurait de l'influence.

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                  • #10
                    suite

                    En échange d’un statut légal, ils contribuaient apparemment au maintien de la stabilité du régime jordanien en préservant la société contre des influences indésirables jugées nuisibles, dont le communisme, prôné par l’Union Soviétique, et le nationalisme arabe, promu à l’époque par le président de l’Egypte Abd al-Nassir. Alors que ce dernier était perçu comme un personnage patriotique et anti-impérialiste, de nombreux Palestiniens voyaient le régime hashémite comme un laquais des Etats-Unis et un collaborateur avec Israël. Ainsi, alors que les Ikhwan de la Cisjordanie avaient des bureaux inscrits et travaillaient ouvertement, ils avaient des difficultés à attirer un grand soutien populaire ou une sympathie. Dans les années 1950 et 1960, les Ikhwan de la Cisjordanie étaient perçus comme une organisation élitiste et non-démocratique. C’était une image très différente de celle des Ikhwan en Egypte lors des années de la formation du mouvement dans les années 1930 et 1940. En tant que force de critique principale contre le régime égyptien, ils défendaient les pauvres et les opprimés, parlaient ouvertement contre l’influence étrangère, et brandissaient la bannière de la libération du colonialisme.
                    A Gaza, Sheikh Yassine était une de ses quelques figures seulement à s’identifier publiquement aux Ikhwan. Pour cette raison, lorsqu’il dirigeait les prières du vendredi à la mosquée du Camp Nord, de jeunes hommes dans la congrégation commencèrent à se rendre à d’autres mosquées, de crainte d’être accusés de sympathie à son égard ou envers son groupe. Pour atteindre son objectif, le sheikh avait besoin de reconstruire le mouvement, qui était devenu clandestin après des années de persécution. A la suite du nettoyage d’Abd al-Nassir de 1965, de nombreuses figures clés avaient soit été détenues, soit elles avaient déjà fui Gaza pour retrouver d’autres pays arabes pour échapper au tourment et mener une vie digne et confortable. Sheikh Yassine identifia dix Frères (cadres des Ikhwan) de Gaza et de Jérusalem et les invita à un meeting pour discuter du nouveau lancement des Ikhwan. Tous n’étaient pas enthousiastes ou optimistes : en réalité, peu après, certains quittèrent les territoires pour chercher du travail ailleurs dans la “patrie arabe”.
                    Néanmoins, le processus se mit en court, commençant dans les mosquées. La plupart de ceux qui étaient attirés par l’activité des Ikhwan étaient de jeunes hommes, essentiellement des étudiants en fin d’adolescence. C’était la génération qui avait grandi au moment de la défaite de 1967 ; nombre d’entre eux avaient été désillusionnés du mouvement d’Abd al-Nassir et des revendications de nationalisme arabe. D’autre part, d’autres qui avaient été des partisans d’Abd al-Nassir continuèrent à l’idôlatrer jusqu’à ce qu’il soit mort et même après. Pendant plus ou moins une décennie, le mouvement ranimé par Sheikh Yassine se focalisa principalement sur l’introduction des valeurs et de l’étique islamique dans le cœur et l’esprit des jeunes. Non pas comme l’ancienne administration d’Abd al-Nassir à Gaza, les autorités de l’occupation israélienne ne protestèrent pas contre cette activité religieuse apparemment bénigne. L’inquiétude d’Israël reposait ailleurs, elle poursuivait les éléments de la résistance nationaliste qui posaient une menace directe à leur autorité. Sheikh Yassin et son groupe, qui incluait d’anciennes figures des Ikhwan comme Abd al-Fattah Dukhan et Hassan Sham’ah, qui étaient eux aussi des enseignants, n’avaient ni la capacité ni la volonté à ce moment-là de s’engager dans la résistance.
                    L’avis de Sheikh Yassine était qu’il restait encore beaucoup à faire avant que la résistance ne puisse être lancée. A travers ses discours publics et son enseignement dans les écoles, il réussit à rallier autour de lui un ensemble de partisans engagés, tirés d’entre les étudiants d’établissements supérieurs qui avaient d’abord été attirés par le mouvement d’Abd al-Nassir avant de le déserter suite à la guerre de juin 1967. Leur réponse initiale à la défaite était de rechercher une consolation dans la religion, qui semblait présenter une alternative au nationalisme échoué. Les Ikhwan fournirent simplement le véhicule. Le tout premier groupe de jeunes hommes à se regrouper autour du sheikh et à rechercher ses instructions comportait Ibrahim al-Maqadmah, Isma’il Abu Shanab, Abd al-Aziz Awdah, Fathi al-Shiqaqi et Moussa Abu Marzouq. Tous ceux-ci étudièrent en Egypte et y jouèrent un rôle actif dans l’organisation de la communauté estudiantine islamique palestinienne. A divers degrés, ils lancèrent ou prirent part au débat des priorités du mouvement islamique au regard de la question palestinienne.

                    La relation égyptienne
                    Avant l’occupation d’Israël de la bande de Gaza et de la Cisjordanie en 1967, des étudiants qui avaient terminé avec succès leur études au lycée s’en allèrent à l’étranger pour poursuivre leurs études. Il n’y avait pas d’universités locales, et la plupart des très bons élèves lors des études secondaires s’inscrirent dans des universités d’Egypte pour étudier la médecine, l’ingénierie, ou des sujets scientifiques. Un quota précis fut donné pour les étudiants de la bande de Gaza, un autre pour ceux de la Cisjordanie, et un troisième pour ceux qui résidaient à l’extérieur de la Palestine, dans ce qui est devenu connu sous le nom de diaspora palestinienne.
                    Pendant plusieurs années après l’occupation de Gaza et de la Cisjordanie, toutefois, l’entrée des étudiants palestiniens a été suspendue, car leur retour chez eux ne pouvait être garanti. Les autorités égyptiennes, ainsi que les autorités palestiniennes, avaient peur qu’Israël ne permette pas aux étudiants de rentrer après avoir terminé leurs études. Au cours de l’année scolaire 1970-1971, l’entrée d’étudiants palestiniens dans les universités égyptiennes fut reprise, grâce à un accord négocié par la Croix-Rouge Internationale. L’Egypte accepta les étudiants, à condition qu’Israël leur permette de rentrer chez eux ; la Croix-Rouge garantit leur retour chez eux, en sécurité, lors des vacances d’été et lorsqu’ils avaient finalement terminé leurs études. Apparemment, cet arrangement était encouragé par Israël, comme faisant partie de ce qui prit le nom de politique des “ponts ouverts”. C’était le plan pour maintenir un flux contrôlé de gens et de marchandises à travers le Jourdain de la Cisjordanie à la Jordanie. Pour la bande de Gaza, la politique servait essentiellement à diminuer la pression qui avait augmenté en conséquence de l’accumulation de ceux qui quittaient le lycée par milliers chaque année, mais qui ne pouvaient être absorbés localement par l’éducation ou le marché du travail. Ces diplômés du secondaire posaient une menace sérieuse à Israël, car ils étaient des recrues possibles pour la résistance.
                    Sheikh Ahmed Yassine avait plus tôt pensé envoyer certains de ses étudiants en Egypte pour étudier à l’académie militaire égyptienne. L’Egypte permettait aux étudiants palestiniens de Gaza de rejoindre l’académie, mais avec la suspension de l’admission des étudiants palestiniens, seuls ceux qui avaient terminé leurs études secondaires en Egypte même pouvaient bénéficier de ce service. Une jeune recrue des Ikhwan du nom de Moussa Abu Marzouq fut choisi par Sheikh Amed Yassine pour quitter la bande de Gaza et s’installer en Egypte un an avant la fin de ses études secondaires, afin de les y terminer et d’être ainsi éligible à l’entrée dans l’académie militaire. Tout se passa comme prévu jusqu’à peu de temps avant que Abu Marzouq termine ses études secondaires en Egypte, lorsque le gouvernement égyptien annonça une nouvelle régulation permettant à nouveau aux étudiants de Gaza de voyager en Egypte et décernant des bourses d’études aussi bien pour l’éducation de premier et de second cycles. En même temps, cependant, l’Egypte cessa de permettre aux étudiants palestiniens de rejoindre l’académie militaire.
                    « N’attribuez jamais à la malveillance ce qui s’explique très bien par l’incompétence. » - Napoléon Bonaparte

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                    • #11
                      Suite ( )...


                      CHAPITRE TROISIEME
                      La stratégie et les moyens
                      La stratégie du Mouvement de la Résistance Islamique : - La Palestine est une terre islamique waqf :
                      Article onzième :
                      Le Mouvement de la Résistance Islamique considère que la terre de Palestine est une terre islamique waqf [de main-morte] pour toutes les générations de musulmans jusqu'au jour de la résurrection. Il est illicite d'y renoncer en tout ou en partie, de s'en séparer en tout ou en partie : aucun Etat arabe n'en a le droit, ni même tous les Etats arabes réunis; aucun roi ni président n'en a le droit, ni même tous les rois et présidents réunis; aucune organisation n'en a le droit, ni même toutes les organisations réunies, qu'elles soient palestiniennes ou arabes. La Palestine, en effet, est une terre islamique waqf pour toutes les générations de musulmans jusqu'au jour de la résurrection et qui donc pourrait prétendre jouir de la pleine délégation de pouvoir de toutes les générations isla*miques jusqu'au jour de la résurrection ?

                      [12]

                      Tel est son statut selon la Loi islamique, statut identique à celui de toute terre conquise par les musulmans de vive force. A l'époque des conquêtes, en effet, les musulmans ont constitué ces terres en biens waqf pour toutes les générations de musulmans jusqu'au jour de la résurrection.

                      Il en fut ainsi : les commandants-en-chef des armées islamiques, ayant achevé la conquête du Châm et de l'Iraq, dé*pêchèrent des envoyés auprès du calife des musulmans "Umar Ibn al-Khattâb pour lui demander conseil sur les terres con*quises : devait-on les partager entre les soldats, les laisser à leurs propriétaires, ou faire autre chose ? Après consultations et échanges entre le calife des musulmans, "Umar Ibn al-Khattâb et les Compagnons de l'Apôtre -que Dieu lui donne bénédiction et paix-, décision fut prise de laisser la terre entre les mains de leurs propriétaires qui la faisaient fructifier et produire; le con*trôle de la terre, quant à lui, et la terre elle-même fu*rent constitués en biens waqf pour toutes les générations de musulmans jusqu'au jour de la résurrection, la jouissance [de ces terres] par leurs propriétaires n'étant plus qu'une jouis*sance de l'usufruit. Cette constitution en biens waqf demeurera tant que demeureront les cieux et la terre. Pour ce qui concerne la Palestine, toute pratique contraire à la Loi de l'islam est ainsi frappée de nullité tout en étant imputée à son auteur.

                      "Ceci est la Vérité absolue ! Glorifie le Nom de ton Seigneur, le Très-Grand !" (56,95).

                      [13]

                      La patrie et le patriotisme du point de vue du Mouvement de la Résistance Islamique en Palestine :
                      Article douzième :
                      Le patriotisme [al-wataniyya], du point de vue du Mouvement de la Résistance Islamique, est un article de la profes*sion de foi ['aqîda] religieuse. Il n'y a rien de plus fort et de plus profond dans le patriotisme que le jihad qui, lorsque l'ennemi foule du pied la terre des musulmans, incombe à tout musulman et musulmane en tant qu'obligation religieuse individuelle [fard 'ayn]; la femme alors n'a pas besoin de la permission de son mari pour aller le combattre ni l'esclave celle de son maître.

                      Rien de tel ne se trouve dans un quelconque autre code et cela constitue une réalité que nul ne peut mettre en doute. Si les divers patriotismes sont liés à des causes maté*rielles, humaines ou régionales, le patriotisme du Mouvement de la Résistance Islamique relève également de tous ces facteurs; mais, au dessus de tout cela, sa cause première est la soumission à la Seigneurie divine et c'est elle qui lui confère le souffle et la vie. Il procède de la source du souffle et du principe de la vie, déployant dans le ciel de la patrie l'étendard divin qui joint terre et ciel d'un lien inébranlable.

                      Lorsque Moïse vint et trouva le bâton, magie et magi*cien furent réduits à néant.

                      "La voie droite se distingue de l'erreur. Celui qui ne croit pas aux Taghout, et qui croit en Dieu a saisi l'anse la plus solide et sans fêlure. -Dieu est celui qui entend et qui sait tout" (2,256).

                      [14]

                      Les solutions de paix, les initiatives et les conférences internationales :
                      Article treizième :
                      Les initiatives, les prétendues solutions de paix et les conférences internationales préconisées pour régler la question palestinienne vont à l'encontre de la profession de foi du Mouvement de la Résistance Islamique. Renoncer à quelque partie de la Palestine que ce soit, c'est renoncer à une partie de la religion. Ainsi, le patriotisme du Mouvement de la Résis*tance Islamique fait-il partie de sa religion. C'est sur cette base que ses membres ont été éduqués et c'est pour déployer l'étendard de Dieu sur leur patrie qu'ils mènent le jihad, "Dieu est souverain en son commandement mais la plupart des hommes ne savent rien" [Coran, 12, 21].

                      De temps à autres, l'invitation de tenir une confé*rence internationale est lancée pour examiner une éventuelle solu*tion de la question. Certains l'acceptent, d'autres la re*fusent pour telle ou telle raison, mettant une ou plusieurs conditions à l'acceptation de la tenue d'une telle conférence ainsi qu'à leur participation. Connaissant les parties consti*tutives d'une telle conférence et leur attitude passée et pré*sente prise face aux causes des musulmans, le Mouvement de la Résistance Islamique ne considère pas que de telles conférences puissent répondre aux revendications, restituer les droits et rendre justice aux oppri*més. Que sont donc de telles conférences sinon l'une des formes de l'arbitrage des infidèles sur la terre des musulmans ? Or les infidèles ont-ils jamais rendu justice aux croyants? "Les Juifs et les Chrétiens ne seront pas contents de toi tant que tu ne suivras pas leur religion. Dis : 'La Direction de Dieu est vraiment la Direction'. Si tu te conformes à leurs désirs après ce qui t'est parvenu en fait de Science, tu ne trouveras ni maître, ni défenseur susceptible de s'opposer à Dieu" (2,120).

                      Il n'y aura de solution à la cause palestinienne que par le jihad. Quant aux initiatives, propositions et autres confé*rences internationales, ce ne sont que pertes de temps et activités futiles. Le peuple [15] palestinien a trop d'honneur pour dilapider son avenir, son droit et son destin en activités futiles.

                      Dans le noble hadîth, [il est dit] : "Le peuple du Châm est le fouet de Dieu sur la terre qui lui appartient. Il l'utilise contre qui il veut parmi ses serviteurs. Il est illicite que les hypocrites parmi eux l'emportent sur les croyants. Ils ne mourront que de chagrin et de désespoir". (Ce hadîth a été rapporté par al-Tabarânî marfû'an [dont la chaîne de transmission remonte jusqu'à l'un des Compagnons du Prophète] et par Ahmad mawqûfan [dont la chaîne de transmission ne remonte pas jusqu'à l'époque de Muhammad] ; sans doute l'exactitude du contenu et la chaîne de transmission sont-elles dignes de confiance, Dieu seul le sait).

                      Les trois cercles :
                      Article quatorzième :
                      La cause de la libération de la Palestine tient à trois cercles : le cercle palestinien, le cercle arabe et le cercle islamique. Chacun de ces trois cercles a un rôle propre à tenir dans la lutte avec le sionisme, chacun a des devoirs propres. Ce serait une très lourde erreur et [le fruit d'] une ignorance très profonde que de vouloir faire l'économie de l'un de ces cercles. La Palestine est une terre islamique : elle a été la première des deux qibla et c'est le troisième Lieu-saint, point de départ de l'ascension nocturne de l'Apôtre de Dieu -que Dieu lui donne bénédiction et paix-, "Gloire à celui qui a fait voyager de nuit son servi*teur de la Mosquée sacrée à la Mosquée très éloignée dont nous avons béni l'enceinte, et ceci pour lui montrer certains de nos Signes. -Dieu est celui qui entend et qui voit parfaitement" (17, 1).

                      Puisqu'il en est ainsi, sa libération est une obligation religieuse individuelle qui incombe à tout musulman où qu'il soit. C'est sur cette base qu'il faut considérer la cause [palestinienne] et il faut que tout musulman le comprenne.

                      [).

                      Commentaire


                      • #12
                        suite

                        Il fut dit à Abu Marzouq qu’il pouvait toujours entrer dans l’académie s’il en faisait la demande à travers l’OLP, une option qu’il préféra ne pas prendre. Au lieu de cela, il rejoignit la faculté d’ingénierie.
                        Comme ses pairs des Ikhwan, Moussa Abu Marzouq naquit et fut élevé dans un camp de réfugiés. Il naquit en 1951, dans une tente fournie par les Nations Unies, dans un camp de réfugiés à Rafah. C’était le sixième enfant de sa mère, et le premier à être né en exil, dans une famille qui compta cinq garçons et cinq filles. Après que la Palestine fut de nouveau unie après l’expansion d’Israël à la suite de la guerre de 1967, il visita Yubnah, le village duquel ses parents furent chassés en 1948. Dans le village, à mi-chemin entre Jaffa et Gaza, son frère aîné Mahmoud lui montra les restes de la demeure familiale où ses cinq grands frères étaient nés. Le bâtiment qui avait servi d’école était toujours là, mais il avait été saisi par une association de bienfaisance juive, fournissant des services sociaux aux femmes juives sans-abri. Avant qu’elle ne soit vidée de ses habitants palestiniens, Yubnah avait une population de quinze mille personnes et était l’un des plus grands villages dans la région de Jaffa.
                        Lors de son arrivée en Egypte, Abu Marzouq rejoignit un petit cercle des Ikhwan palestiniens sans lien officiel avec l’organisation égyptienne locale des Ikhwan, qui était de toute façon toujours clandestine après la répression de Nasser. Il maintient ses liens avec ce cercle jusqu’à ce que ses autres membres plus âgés aient quitté l’Egypte après avoir terminé leurs études. Ceci coïncida avec l’arrivée en Egypte du premier lot d’étudiants palestiniens des Ikhwan, suite à la reprise de l’admission des étudiants palestiniens par les universités égyptiennes. Le leader du groupe était Abd Al-Aziz Awdah, une des anciennes recrues des Ikhwan et un proche associé de Sheikh Ahmed Yassine. Au début, les étudiants des Ikhwan n’étaient qu’une petite minorité parmi la population totale des étudiants palestiniens. La plupart des sept ou huit cents étudiants arrivant en Egypte chaque année étaient affiliés, ou au moins sympathisaient, avec le camp nationaliste, dirigé par l’OLP. Petit à petit, toutefois, la balance commença à pencher de l’autre côté. Alors que les étudiants des Ikhwan s’accrurent rapidement en ombre, ils avaient besoin d’être organisés. Ils formèrent un comité pour assumer l’administration des affaires des étudiants et pour entretenir la liaison avec la direction à Gaza. Parmi les membres de ce comité se trouvaient Abu Marzouq, Awdah, et un troisième étudiant du nom de Ali Shakshak.
                        Les étudiants des Ikhwan palestiniens arrivèrent en Egypte au moment où l’un des chapitres les plus douloureux de l’histoire palestinienne moderne s’ouvrait en Jordanie : ce à quoi les Palestiniens renvoient comme étant le Septembre noir. Ceci était le sommet de la tension grandissante entre le régime hashémite et l’OLP. Pendant plus de trois ans, l’OLP avait augmenté sa présence militaire en Jordanie et l’utilisation du territoire jordanien pour lancer des attaques contre Israël. La pression s’était élevée sur le roi Hussein, non pas seulement des Etats-Unis et d’Israël, mais aussi de cercles au sein de son propre régime, pour agir contre l’OLP, qui était vue comme construisant un Etat dans l’Etat et qui était ainsi perçue comme une menace pour le trône hashémite. Les événements ont atteint leur point d’ébullition le 6 septembre 1970 avec le détournement de quatre avions de passagers par des membres du Front Populaire pour la Libération de la Palestine (FPLP), un membre constituant de gauche de l’OLP. Ceux qui détournèrent les avions firent atterrir trois des avions sur le terrain de Dawson en Jordanie, un aérodrome abandonné contrôlé par l’OLP non loin de la capitale jordanienne Amman, et un au Caire. Alors que les passagers et l’équipage s’échappèrent sans blessés, les avions furent explosés. Au cours de septembre, l’armée jordanienne continua ses opérations pour pousser l’OLP à l’extérieur de la Jordanie. Des milliers de combattants de la résistance de l’OLP, des soldats jordaniens et des civils furent tués, bien que les véritables chiffres soient encore contestés. Les forces de l’OLP se retirèrent au début au nord de la Jordanie, mais en dix mois, ils furent complètement chassés du pays. N’ayant nulle part où aller, ils se réinstallèrent au Liban. Cet épisode noir et coûteux prouva une fois encore que la vision de Sheikh Yassine était précise. Il avait toujours redouté les conséquences si l’on forçait les régimes faibles, non préparés et non volontaires, à une confrontation avec Israël. Le simple fait de la présence de l’OLP en Jordanie, sans même regarder les excès qu’elle commit et ses violations de la souveraineté jordanienne, plaçait inévitablement le régime hashémite sur une voie de conflit avec Israël.
                        Le destin de l’OLP en Jordanie domina les discussions au sein des étudiants palestiniens en Egypte. Les événements de septembre approfondirent la division parmi les Palestiniens, en deux camps distincts. Les nationalistes, qui étaient affiliés à l’OLP, dénonçaient totalement la Jordanie pour le problème. Pendant ce temps, les islamistes, qui étaient pour la plupart affiliés aux Ikhwan, étaient plus philosophiques dans leur analyse, distribuant le blâme de manière équitable entre le régime jordanien et l’OLP. Il semble que les événements renforcèrent la conviction des islamistes que leur priorité devait être la réforme du système politique arabe et l’établissement d’un Etat islamique fort et indépendant capable de diriger le combat de libération contre Israël.
                        Simultanément, l’Egypte était aussi en crise. Gamal Abd Al-Nasser, l’image de père de la nation autoproclamé, mourut le 29 décembre 1970. Son administration autocratique avait persévéré depuis que lui et ses camarades Officiers Libres firent tomber la monarchie en juillet 1952. Bien que l’écrasante défaite que son régime subit lors de la guerre avec Israël en 1967 l’avait affaibli, le poussant à faire un certain nombre de concessions aux mouvements étudiants et travaillistes d’Egypte, ce n’est pas avant sa mort que des formes tangibles d’opposition firent leur apparition. L’ère post-Nasser vit des forces laïques communistes et socialistes céder le pas pour une tendance islamique se répandant rapidement, qui se manifesta tout d’abord dans des campus universitaires. Les politiques adoptées par le collègue et successeur de Nasser, Anwar Al-Sadar, ont pu aider cette tendance. Se nommant “Le Président Croyant”, Sadat écarta la position laïque, socialiste et nationaliste de son prédécesseur, se jetant au lieu de cela dans le bercail de l’islam, sur lequel il construisit son image et basa sa revendication à une légitimité politique. L’arrivée des étudiants palestiniens en Egypte coïncidait avec ces changements significatifs, qui entraînèrent entre autres le retrait de certaines restrictions sur l’activisme estudiantin.
                        « N’attribuez jamais à la malveillance ce qui s’explique très bien par l’incompétence. » - Napoléon Bonaparte

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                        • #13
                          Suite ()....

                          16]

                          Le jour où la cause sera appréhendée sur cette base par la mobilisation des ressources des trois cercles, ce jour-là la situation qui prévaut actuellement sera changée et le jour de la libération sera proche.

                          "Vous jetez certainement dans leurs coeurs plus de terreur que Dieu lui-même, par ce que ce sont des gens qui ne comprennent pas" (59,13)

                          Le jihad pour libérer la Palestine est une obligation religieuse individuelle :
                          Article quinzième :
                          Le jour où les ennemis usurpent une terre qui appar*tient aux musulmans, le combat devient une obligation reli*gieuse individuelle [fard 'ayn] qui incombe à chaque musulman. Face à l'usurpation de la Palestine par les Juifs, il faut brandir l'étendard du jihad et cela nécessite la diffusion de la conscience islamique parmi les masses locales, arabes, et islamiques. Il faut propager l'esprit du jihad dans la nation, l'engagement face aux ennemis et l'adhésion aux rangs des combattants du jihad.

                          Il faut que les ulémas, les éducateurs et les ensei*gnants, les hommes de médias et de communication, les masses d'intellectuels et tout particulièrement les jeunes des mouvements islamiques et leurs aînés s'associent à cette opération de conscientisation. Il faut introduire des changements essentiels dans les programmes d'enseignement, les épurer de toute trace de l'invasion intellectuelle qui les ont livrés aux mains des orientalistes et des missionnaires chrétiens. Cette invasion de la ré*gion est menée depuis la défaite des ar*mées croisées par Salâh al-Dîn al-Ayyûbî. A ce moment, en ef*fet, les Croisés ont pris conscience [17] qu'il leur était impossible de défaire les musulmans s'ils ne menaient une invasion intellectuelle au préalable, s'ils ne semaient la confusion dans leur pensée, s'ils ne défiguraient leur héritage culturel et calomniaient leurs idées. Ce ne serait qu'après cela seulement que l'invasion se ferait avec des soldats. Voilà ce qui a préparé l'invasion coloniale, ainsi que l'a déclaré Allenby lui-même lors de son entrée à Jérusalem : "C'est maintenant que s'achèvent les Croisades". Le général Gouraud, de son côté, a dé*claré debout devant le tombeau de Salâh al-Dîn : "Nous voici de retour, Saladin!" Le colonialisme a contribué -et ne cesse de le faire- au renforcement de l'invasion intellectuelle et à l'approfondissement de ses ra*cines. C'est tout cela qui a préparé la perte de la Palestine.

                          Il faut que dans l'esprit de toutes les générations musulmanes la cause de Palestine soit bien une cause re*ligieuse qui exige un traitement approprié à cette base. Elle possède des Lieux-saints islamiques comme la mosquée al-Aqsa, qui est atta*chée à l'Esplanade sainte de La Mecque par un noeud que nul ne peut défaire tant que dureront les cieux et la terre le voyage nocturne de l'Apôtre de Dieu -que Dieu lui donne bénédiction et paix- et son ascension.

                          "L'engagement d'un jour sur le chemin de Dieu [ribât] vaut mieux que l'ici-bas et rien ne le surpasse. La position du fouet de l'un d'entre vous dans le paradis vaut mieux que l'ici bas et rien ne la surpasse, le serviteur qui va et vient sur le chemin de Dieu vaut mieux que l'ici bas et rien ne le surpasse."

                          (hadîth rapporté par al-Bukhârî, Muslim, al-Tirmidhî et Ibn Mâjih)

                          "Par celui qui possède l'âme de Muhammad dans ses mains, je m'engage à combattre sur le chemin de Dieu; je tuerai et combattrai, je tuerai et combattrai, je tuerai"

                          (hadîth rap*porté par al-Bukhârî et Muslim)

                          [18]

                          L'éducation des jeunes générations :
                          Article seizième :
                          Il faut que l'éducation des jeunes générations islamiques dans notre région soit une éducation islamique fondée sur l'accomplissement des obligations religieuses, l'étude conscientisée du Livre de Dieu, l'étude de la tradition prophétique, la lecture de l'histoire et du patrimoine islamique dans ses sources fiables, sous la direction des spécialistes et des hommes de science. Les programmes que devra suivre le musulman auront pour fondement de lui donner une représentation saine dans les domaines de la pensée et des articles de foi. Il sera également nécessaire de mener une étude conscientisée de l'ennemi, de ses ressources maté*rielles et humaines; de reconnaître ses points de faiblesse et de force; d'identifier les forces qui le soutiennent et se tiennent à ses côtés. Il sera également nécessaire de reconnaître l'environnement événementiel et de suivre les renouvel*le*ments, d'étudier les analyses et les commentaires à leur pro*pos; il sera également nécessaire de planifier le présent et le futur et d'étudier tous les phénomènes. [Tout cela est néces*saire] pour que le musulman combattant du jihad vive son époque en toute connaissance de son objectif et de son but, du chemin pour y parvenir et de tout ce qui se passe autour de lui.

                          "O mon fils ! Même si c'était l'équivalent du poids d'un grain de moutarde et que cela fût caché dans un rocher ou dans les cieux, ou sur la terre, Dieu le présentera en pleine lumière. -Dieu est subtil et bien informé- O mon fils ! Acquitte-toi de la Prière; ordonne ce qui est convenable; interdis ce qui est blâmable; supporte patiemment ce qui t'arrive : tout cela fait partie des bonnes résolutions. Ne détourne pas ton visage des hommes; ne marche pas sur la terre avec arro*gance. -Dieu n'aime pas l'insolent plein de gloriole" (31, 16-18).

                          [19]

                          Rôle de la femme musulmane :
                          Article dix-septième :
                          Dans la bataille de libération, la femme musulmane a un rôle qui n'est pas inférieur à celui de l'homme : être l'usine à hommes. Elle joue un grand rôle dans l'orientation et l'éducation des jeunes générations. Les ennemis l'ont bien compris et considèrent que s'ils parviennent à la conseiller et à lui faire prendre le chemin de leur désir loin de l'islam, alors ils remporte*ront le combat. C'est pour cela que tu les trouves sans cesse sur la brèche dans le domaine des médias et des films, de même que dans celui des programmes d'enseignement. [Ils agissent] par l'intermédiaire de leurs créatures membres de ces organisa*tions sionistes aux noms et formes multiples, comme la franc-maçonnerie, les clubs Rotary, les sections d'espionnage, etc., qui toutes sont des nids de subversion et de sabotage. Ces organisations sionistes disposent de ressources matérielles considé*rables qui leur permettent de jouer leur rôle au coeur des sociétés visant à atteindre les objectifs sionistes et à enraciner profon*dément les concepts qui servent l'ennemi. Pour agir, ces organisations profitent de l'absence de l'islam de la scène publique et de son étrangeté pour les gens. Il revient aux islamistes de tenir leur rôle dans la confrontation avec les menées de ces sabo*teurs. Le jour où l'islam aura pris le contrôle de l'orientation de la vie, il anéantira ces organisations hostiles à l'humanité et à l'islam.

                          [20]

                          Article dix-huitième :
                          Au foyer d'un combattant du jihad comme dans la famille d'une combattante du jihad, qu'elle soit la mère ou qu'elle soit la soeur, la femme tient le premier rôle dans le maintien de la maison, l'instruction des enfants quant aux concepts et va*leurs morales fondées sur l'islam, ainsi que dans l'éducation de ses fils à l'observance des obligations religieuses les préparant ainsi au rôle de combattant du jihad qui les attend. A partir de là, il faut prêter attention aux écoles et aux programmes qu'y suit la jeune fille musulmane pour qu'elle devienne une mère juste et consciente de son rôle dans la lutte de libération.

                          [La femme] doit posséder un degré de conscience et de perception suffisant quant à la gestion des choses ménagères. L'économie et l'éloignement de tout gaspillage des ressources de la famille constituent l'une des qualités requises pour la capa*cité à maintenir la famille dans les difficiles circonstances ambiantes. Elle doit avoir présent à l'esprit que l'argent dont elle dispose est comme le sang : il ne doit couler que dans les veines pour le maintien en vie des petits et des grands.

                          "Oui, ceux qui sont soumis à Dieu et celles qui lui sont soumises, les croyants et les croyantes, les hommes pieux et les femmes pieuses, les hommes sincères et les femmes sin*cères, les hommes patients et les femmes patientes, les hommes et les femmes qui redoutent Dieu, les hommes et les femmes qui font l'aumône, les hommes et les femmes qui jeûnent, les hommes chastes et les femmes chastes, les hommes et les femmes qui invoquent souvent le nom de Dieu : voilà ceux pour lesquels Dieu a préparé un pardon et une récompense sans limites" (33, 35

                          suite :
                          http://www.gremmo.mom.fr/legrain/voix15.htm

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                          • #14
                            C'est n'importe quoi de dire que la Charte ne correspond pas aux objectifs politiques et à la philosophie du Hamas. Pourquoi a-t-elle été rédigée alors? Et pour n'a-t-elle pas été abrogée?

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                            • #15
                              C'est n'importe quoi de dire que la Charte ne correspond pas aux objectifs politiques et à la philosophie du Hamas
                              Qui a dit ça?

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