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Un Polonais ordinaire devenu terroriste

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    Christian Ganczarski, un Polonais ordinaire devenu terroriste

    Le 11 avril 2002, comme tous les jours, des touristes, surtout des Allemands, étaient venus nombreux à la synagogue de la Ghriba, à Djerba, la plus vieille d'Afrique du Nord. C'est alors qu'un camion bourré de bouteilles de gaz a foncé sur la foule avant d'exploser.
    L'attentat avait fait 21 victimes. Après avoir affirmé qu'il ne s'agissait pas d'un attentat, les autorités tunisiennes avaient changé d'avis et arrêté un complice des terroristes. Il fut condamné à vingt ans de prison. Mais la liste des suspects mêlés à cette affaire est beaucoup plus longue. Parmi eux, Christian Ganczarski, 44 ans, dont le procès vient de s'ouvrir à Paris.

    Comment est-il possible qu'un jeune homme timide originaire de Gliwice [dans le sud de la Pologne], catholique pratiquant se soit transformé en Abou Ibrahim sanglant, terroriste et ami personnel d'Oussama Ben Laden ? Ni les membres de sa famille ni ses amis ne sont capables de fournir une explication. Tout a commencé à Gliwice, dans un petit lotissement de maisons construites au XIXe siècle pour les familles des ouvriers de l'aciérie toute proche. Andrzej Wierzbicki se souvient de la famille Ganczarski comme de bons catholiques. Le dimanche débutait par la messe. Chaque premier vendredi du mois, ils allaient tous se confesser. "J'ai été stupéfait d'apprendre que Krystian était un terroriste, un islamiste ayant des liens avec Al-Qaida. J'aurais pu tout imaginer, mais pas qu'il puisse tuer des innocents. Pas lui !" explique-t-il.

    Les proches de Krystian habitent toujours Gliwice. Son oncle Piotr et sa tante Malgorzata nous demandent de ne pas publier leur adresse. "Nous avons su qu'il avait épousé une femme d'origine arabe. Ils ont eu deux enfants… Mais un terroriste ? Quand nous avons appris la nouvelle, nous avons immédiatement appelé Manfred, son père. Il pleurait et disait qu'il ne vivait que pour supporter le poids des péchés de Krystian. Il refusait d'admettre que l'homme dont on parlait était son fils. Ruta, la mère, est décédée peu après. Cela l'a meurtrie, j'en suis sûre. Son cœur n'a pas tenu", affirme Malgorzata. Autrefois, ils possédaient une photo sur laquelle Krystian, souriant et bronzé, embrassait sa grand-mère devant la maison. Il venait lui rendre visite. Il devait avoir 17-18 ans. Mais son père a demandé qu'on lui renvoie la photo, parce qu'on y voyait une famille heureuse. "Manfred est obsédé par l'image du fils idéal qu'était Krystian. Il vit dans l'espoir que tout cela ne soit qu'un grand malentendu. Je pense qu'il n'acceptera jamais que les journalistes traitent son fils de monstre", ajoute Malgorzata.

    Mais les preuves réunies par les enquêteurs sont incontestables. "Après avoir quitté la Pologne, Ganczarski s'est installé dans les environs de Duisburg, en Allemagne. Là, il a fréquenté un lycée professionnel pour devenir métallo. Il a noué ses premiers contacts avec le monde arabe quand il a commencé à travailler", explique un officier des renseignements polonais. Il s'est converti à l'islam en 1986. "Il voulait s'immerger dans la religion. Petit à petit, il a perdu le contact avec le monde extérieur et le travail. Il était furieux quand on l'appelait Krystian. Il voulait oublier celui qu'il avait été", se souvient un de ses proches qui tient à garder l'anonymat. Quatre ans plus tard, Krystian, devenu Ibrahim, s'est marié avec une convertie allemande, Nicola Gebrecht. Rapidement, ils sont partis pour l'Arabie Saoudite, où Ganczarski a suivi un enseignement coranique qu'il a interrompu pour aller en Tchétchénie combattre les Russes.

    Aujourd'hui, on sait qu'au cours des années 1990 il s'est rendu plusieurs fois au Pakistan, en Bosnie et en Afghanistan. "Selon nos informations, il a rencontré Oussama Ben Laden à plusieurs reprises. Ils ont probablement sympathisé. Il faisait venir les médicaments pour le chef d'Al-Qaida. Pour cela, il se servait des ordonnances de sa fille, atteinte de diabète", poursuit l'officier des renseignements polonais. C'est Ganczarski qui a recruté le Libanais qui pilotait un des avions qui se sont crashés contre le World Trade Center à New York. C'est en 2003 qu'il a été pris dans les mailles du filet antiterroriste. Son manque de vigilance l'a perdu. Un jour, il a eu tort de répondre au téléphone, ce qu'il ne faisait jamais. Un de ses amis de Duisburg, un islamiste fanatique, l'a appelé pour lui annoncer que "la volonté d'Allah [allait] s'accomplir". Puis l'interlocuteur de Ganczarski est monté dans un camion rempli de bouteilles de gaz et a foncé sur des touristes à Djerba.

    "Après cette conversation, Ganczarski a plié bagage et est parti pour l'Arabie Saoudite", explique l'officier polonais. Il a alors été filé par la CIA et les services de renseignements français. Un an plus tard, à l'expiration de son visa, les Occidentaux ont fait en sorte qu'il ne soit pas prolongé. Profitant de son transit à l'aéroport de Roissy, ils l'ont discrètement arrêté. Quelques jours plus tard, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, a présenté cette opération comme un grand succès de la lutte terroriste. "Selon nos informations, il existe d'autres convertis polonais, Ganczarski n'est pas le seul. Al-Qaida dispose d'agents dormants prêts à tout. Peut-être même en Pologne", conclut l'officier des renseignements polonais.


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