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Tesla Roadster, le chic électrique

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  • Tesla Roadster, le chic électrique

    Côté Hollywood, George Clooney, Leonardo DiCaprio et Matt Damon ont un Tesla Roadster. Le producteur de films Jeff Skoll, le rappeur Will.i.am et Mike Balzary, le bassiste des Red Hot Chili Peppers, ont aussi le leur, de même qu'Ari Emanuel, célèbre agent de stars - et par ailleurs frère de Rahm Emanuel, le prochain secrétaire général de la Maison Blanche. Du coup, Arnold Schwarzenegger, gouverneur de Californie et ancien acteur d'Hollywood, ne pouvait pas ne pas avoir son Tesla.

    Côté Silicon Valley, Michael Dell, patron de Dell Computers, roule en Tesla. Larry Page et Sergei Brin, cofondateurs de Google, en ont acheté un chacun, puis Brin s'est ravisé : il en a commandé un deuxième. L'un et l'autre ont aussi investi à titre personnel dans la société qui le fabrique, Tesla Motors, installée à Menlo Park, au coeur de la Silicon Valley, juste en face de l'université Stanford. Le client numéro 100 sur la liste d'attente, Sam Perry, était le manager de la campagne électorale de Barack Obama pour la région.

    Adopté dès sa naissance par l'establishment californien, le Tesla Roadster, première voiture de sport 100 % électrique et 100 % "propre" fabriquée en série, semble bien partie. Près de 1 300 Américains en ont commandé un, et tous devraient être livrés avant fin 2009.

    Il coûte entre 110 000 et 140 000 dollars (de 80 000 à 102 000 euros), selon les options, mais les pouvoirs publics font le maximum pour encourager le client. Tout acheteur d'un "ZEV" (véhicule à émission zéro) peut bénéficier de subventions et dégrèvements fiscaux pouvant dépasser les 10 000 dollars, accordés par l'Etat fédéral, la Californie et certaines collectivités locales.

    Avec ou sans bonus, les amateurs de vitesse en ont pour leur argent. Démarrage foudroyant, tenue de route impeccable, vitesse de pointe de 200 km/heure : le Tesla Roadster procure encore plus de sensations qu'une voiture de sport classique, car son moteur électrique libère la totalité de sa puissance dès le démarrage, en continu. Il fait très peu de bruit, juste un ronflement continu, presque inaudible, à l'extérieur de la voiture.

    Seule contrainte : les longs voyages restent compliqués. Depuis des décennies, le succès de la voiture électrique bute sur le problème des batteries. Leur faible capacité limite l'autonomie, et leur rechargement prend des heures. Or ces problèmes sont peut-être en voie de résolution, par petites étapes. Tesla Motors a centré son effort de recherche-développement sur les batteries, et sous-traite le reste : la carrosserie est fabriquée en Grande-Bretagne, le moteur à Taïwan, mais le pack de batteries, le chargeur et le système d'alimentation piloté par ordinateur sont conçus et produits par les ingénieurs maison. Le Roadster modèle 2008 possède une autonomie moyenne de 300 à 350 km. Sur une prise électrique à haut débit, une recharge complète prend trois heures trente. On peut aussi recharger la voiture sur une prise ordinaire, ce qui peut prendre toute la nuit.

    La batterie elle-même, logée à l'arrière avec le moteur, est un monstre imposant : 1 mètre de long pour 450 kg, avec un système de refroidissement liquide. Elle devra supporter au moins 500 cycles de charge complets, soit environ 160 000 km. Ensuite, il sera temps de la changer, mais selon Kurt Kelty, directeur technique du département batteries de Tesla, les clients peuvent s'attendre à de bonnes surprises : "Si on se réfère au rythme de l'innovation sur les trente dernières années, la capacité des batteries va augmenter de 8 % par an et leur prix baisser de 8 % par an."

    Les premiers utilisateurs semblent satisfaits. Richard Chen, 39 ans, marié, deux enfants, habite Oakland, près de San Francisco, dans une belle villa perchée sur une colline. Depuis qu'il a reçu son Tesla bleu métallisé, il s'en sert pour ses déplacements quotidiens. Il a fait installer dans son garage une prise à haut débit, mais il s'aperçoit à l'usage qu'un système plus modeste aurait suffi : "Même quand j'ai beaucoup de rendez-vous, je ne fais jamais 300 km par jour. Je n'ai pas vidé la batterie une seule fois. Je la recharge en une heure, chaque soir." Il a calculé qu'au tarif actuel de l'électricité, une charge complète lui coûterait 3,60 dollars.

    Ancien patron de start-up Internet, puis cadre supérieur chez Google, Richard Chen est aujourd'hui consultant indépendant. Il a toujours aimé les voitures de sport, mais il fait de son mieux pour être un écocitoyen responsable à la mode californienne. Quand il travaillait chez Google, il a acheté une voiture hybride, car la société offrait une prime de 3 000 dollars à ses employés roulant en voiture propre. Il possède aussi un Audi break, qu'il sort quand il doit transporter ses enfants : "Il n'existe pas encore de voiture électrique familiale, j'attends son arrivée avec impatience."

    Puis il a fait poser sur son toit 15 panneaux solaires, pour produire sa propre électricité : "Ça m'a coûté 25 000 dollars - moins 5 000 dollars de subventions de l'Etat de Californie -, mais mes notes d'électricité, qui variaient entre 70 et 200 dollars par mois, ont baissé de 95 %." Selon Tesla Motors, plus de 15 % des acheteurs de Roadster ont équipé leur maison de panneaux solaires pour compenser leur surconsommation d'électricité. Un panneau coûtant 10 000 dollars fournit assez d'énergie en un an pour faire rouler un Roadster gratuitement sur 15 000 km.

    D'autres clients ont des motivations plus politiques. Jason Calacanis, entrepreneur Internet installé à Los Angeles, aime tellement son Tesla orange vif qu'il délaisse toutes ses autres voitures. Mais au-delà du plaisir personnel, il tient à parler géostratégie : "Je considère que j'ai fait un don à mon pays pour l'aider à guérir de son addiction au pétrole. Je ne me suis pas arrêté dans une station essence depuis six semaines. Chaque fois que j'en vois une, ça me procure un plaisir extrême." Il a le sentiment que, grâce à lui, le monde va bientôt changer : "Plus jamais je ne donnerai 1 dollar aux gouvernements tyranniques des pays pétroliers, qui oppriment leur peuple et menacent les autres. Il faut que l'Occident cesse d'enrichir ces dictateurs."

    Tesla Motors a été conçue et organisée comme une start-up californienne, avec l'aide des firmes de capital-risque locales - aux antipodes de la vieille culture d'entreprise des géants de l'automobile de Detroit, au bord de la faillite faute d'avoir su évoluer. Elon Musk, 37 ans, PDG et premier actionnaire de la société, symbolise à lui seul l'évolution récente de la Silicon Valley. Il s'est enrichi dans les années 1990 grâce à Internet, en inventant le système de paiement en ligne PayPal, revendu à eBay pour 1,5 milliard de dollars. Puis il a réinvesti sa fortune dans deux nouvelles aventures : la création d'une voiture haut de gamme non polluante, et la conquête du système solaire, avec un projet de fusée spatiale.

    Il est aussi président de la société SolarCity, qui loue et installe des panneaux solaires. Les clients n'ont rien à débourser lors de l'installation, et paient seulement un abonnement mensuel, inférieur au montant de leur note d'électricité avant l'installation des panneaux.

    Elon Musk partage son temps entre ses fusées et ses voitures. Tesla est encore en phase de lancement, et bien que PDG, il se rémunère au salaire minimum, mais il considère que son pari est déjà presque réussi : "Quand je roule en ville dans mon Roadster, les passants, et même les flics me font des signes amicaux, ils me félicitent. Les gens ont compris que c'est la voiture de l'avenir."

    Si tout se passe comme prévu, le Roadster n'est que le premier d'une longue série. Elon Musk espère lancer bientôt une berline 5 places plus raisonnable, qui coûtera 50 000 dollars. Pour la suite, il imagine déjà une petite voiture urbaine à moins de 30 000 dollars.

    Pour fabriquer sa future berline au rythme de 20 000 par an, Elon Musk veut construire une usine à San Jose, au sud de San Francisco, ce qui devrait coûter 200 millions de dollars. Pour cela, il compte sur l'aide des pouvoirs publics - une révolution culturelle pour la Silicon Valley. Tesla subit le contrecoup de la crise financière qui secoue l'Amérique et souffre de l'assèchement du crédit.

    Avant la crise, l'Etat fédéral avait prévu d'accorder des prêts et garanties bancaires aux constructeurs automobiles pour les aider à produire enfin des voitures propres. Il semble que l'essentiel de cet argent va plutôt servir à aider les géants de Detroit à éviter la faillite, mais cela n'empêchera pas Elon Musk de réclamer sa part : "Nous n'avons pas besoin d'être sauvés, mais n'oublions pas qu'au départ, cet argent public était destiné en priorité à des gens comme nous, les pionniers de la "clean tech". En théorie, nous pourrions obtenir 450 millions de dollars - un pourcentage infime de ce qui va être dépensé pour renflouer les firmes de Detroit."

    Elon Musk espère lancer la construction de sa nouvelle usine dès 2009. La Silicon Valley, qui s'est puissamment mobilisée en faveur du candidat Obama, attend que le nouveau président tienne ses promesses grandioses en matière d'aide au business vert. Déjà, des villes, des entreprises et la chaîne d'Hôtels Hyatt commencent à équiper leurs parkings de stations de rechargement. Habitué au succès, Elon Musk ne connaît pas le doute : "Un jour, quand nous raconterons à nos petits-enfants que nous circulions dans des gros engins bruyants qui crachaient de la fumée toxique en permanence, ils auront du mal à nous croire."

    Par le Monde


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