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Ayman Mohyeldin, 29 ans, correspondant de guerre à Gaza

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  • Ayman Mohyeldin, 29 ans, correspondant de guerre à Gaza

    Le premier échange par téléphone est lapidaire. "J'ai l'occasion de prendre une douche pour la première fois depuis dix jours. Rappelez-moi dans un quart d'heure." L'homme qui fait cet aveu n'est ni mineur de fond ni marin au long cours. Ayman Mohyeldin, 29 ans, est le correspondant à Gaza d'Al-Jazira International, la cousine anglophone de la célèbre chaîne d'information qatarie, seul média non arabophone présent dans la bande côtière palestinienne.

    Depuis plus de deux semaines, épaulé par sa collègue britannique Sherine Tadros, Ayman, qui est citoyen américain, raconte en direct l'évolution de l'offensive israélienne. A l'inverse de leurs confrères étrangers, cantonnés à la frontière de la bande de Gaza parce qu'Israël leur en refuse l'accès, les deux journalistes d'Al-Jazira International entendent non seulement le fracas des bombardements mais aussi la souffrance de ceux qui les subissent. "Israël présente son opération comme une guerre contre le Hamas, dit Ayman Mohyeldin, mais sur le terrain, la réalité est complètement différente. Il s'agit d'une guerre entre une armée qui dispose des armes les plus sophistiquées au monde et un peuple démuni de tout, qui n'a ni système d'alerte ni abri pour sauver sa peau. Il s'agit d'une guerre contre Gaza."

    "ENTENDRE LES GAZAOUIS"


    Actualité oblige, l'équipe d'Al-Jazira travaille, dort et mange dans les locaux de la chaîne, en plein centre-ville. Des matelas ont été coincés entre les bancs de montage et les ordinateurs, permettant aux journalistes de s'assoupir deux ou trois heures par nuit.

    Un générateur fournit l'électricité absente du reste de la ville. Et quand, par miracle, la pompe à eau des hôtels du bord de mer se remet à fonctionner, les correspondants s'y précipitent pour faire leur toilette, non sans avoir scruté le ciel au préalable. "Les bombardements ne faiblissent jamais, même pendant la soit disant trêve de trois heures, dit Ayman Mohyeldin. La peur ne nous quitte pas mais notre responsabilité vis-à-vis de nos téléspectateurs nous aide à rester concentrés."

    Avant d'atterrir à Gaza pour le compte d'Al-Jazira, le jeune reporter de guerre a travaillé pour les chaînes américaines NBC et CNN, notamment durant la prise de Bagdad en 2003. De père égyptien et de mère palestinienne, il dispose d'une solide connaissance des territoires occupés et de la psychologie de ses habitants. "Pour la plupart des médias, le conflit actuel est la conséquence des tirs de roquettes du Hamas sur Israël et de l'intransigeance de ce mouvement. Il suffit d'aller dans l'une de ces écoles des Nations unies où se sont réfugiés des milliers de Gazaouis, d'entendre ces gens raconter comment cette nouvelle épreuve réveille le souvenir de leurs parents déplacés en 1967 ou de leurs grands-parents expulsés en 1948, pour comprendre que la réalité est beaucoup plus complexe."

    Sur le terrain, l'équipe d'Al-Jazira enquête sur ces carnages à répétition, dont l'armée israélienne tient le Hamas pour responsable dès lors qu'il opère depuis les zones d'habitations. Sherine Tadros a collecté les témoignages des survivants de la famille Al-Samouni, décimée dans le bombardement de la maison où les soldats lui avaient ordonné de se rassembler. Ayman Mohyeldin a inspecté les ruines d'une mosquée visée parce qu'elle aurait servi d'entrepôt à roquettes. "Je ne suis pas un expert, mais je n'ai rien vu qui ressemble à des armes", dit-il.

    Que rêve-t-il de faire lorsque l'assaut prendra fin ? "La même chose que maintenant, répond-il. Quand la violence s'arrête, il y a une autre histoire qui commence, pas moins intéressante."

    Par le Monde
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