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Relaxe au procès de l'hormone de croissance

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  • Relaxe au procès de l'hormone de croissance

    Dix-huit ans après le premier décès, la justice française a prononcé la relaxe générale mercredi pour six responsables médicaux, jugés pour la mort de 117 jeunes traités dans les années 1980 à l'hormone de croissance et qui avaient développé la maladie de Creutzfeldt-Jakob, dite maladie de la «vache folle». Il s'agit de la plus grosse affaire de santé publique jamais jugée en France.

    Les six prévenus, médecins, pharmaciens, appartenaient à l'association France Hypophyse ou à l'Institut Pasteur, qui récupéraient sur des cadavres cette glande crânienne d'où provenait l'hormone alors utilisée pour pallier aux problèmes de croissance. Plusieurs négligences ont abouti à l'ingestion par les jeunes patients d'hypophyses contaminées, qui leur ont inoculé la maladie mortelle de Creutzfeldt-Jakob. Des peines avec sursis avaient été requises contre trois des accusés. Le parquet avait demandé la relaxe des trois autres prévenus.

    Dans son jugement, le tribunal a estimé que l'enquête «ne permet pas d'affirmer que ceux qui participaient au cycle d'élaboration et de distribution» de l'hormone de croissance «avaient conscience à partir de 1980 d'exposer les malades au risque de contamination par Creutzfeldt-Jakob. Cependant, la justice a retenu une responsabilité civile pour Elisabeth Mugnier, qui collectait les hypophyses, et Fernand Dray, ancien responsable du laboratoire de Pasteur, aujourd'hui âgé de 80 ans. Les deux prévenus devront verser des dommages et intérêts à quelques victimes. Il n'y a pas eu de verdict pour le principal accusé du procès. Le professeur Jean-Claude Job. L'ancien président de France Hypophyse, est mort en octobre.

    Les parties civiles vont se tourner vers Dati

    Les parties civiles ont accueilli par un silence stupéfait le jugement. Le président de la Chambre Olivier Perusset n'ayant pas lu les attendus de son jugement, les familles de victimes n'ont compris qu'une fois l'audience levée l'étendue du «scandale». «Le jugement est absurde et socialement dangereux», a déploré Me François Honnorat, avocat d'une dizaine de victimes. «Le mépris délibéré des précautions» concernant le contrôle, la fabrication et l'administration de l'hormone devait «suffire à emporter la faute qualifiée au sens pénal». «La position des juges revient à admettre que des groupes pharmaceutiques mettent sur le marché des produits dont ils savent qu'ils ne répondent pas aux standards de précaution élémentaire», a conclu Me Honnorat.

    Jeanne Goerrian, présidente de l'association des victimes de l'hormone de croissance, a dénoncé avec force «les tout-puissants qui s'arrogent le droit de tuer 116 enfants» et qui «échappent à toute sanction». «Nous n'en resterons pas là», a-t-elle prévenu, appelant le parquet «à tenir ses promesses faites en 2004 de faire appel de cette relaxe». Son avocat, Me Bernard Fau, a annoncé que les victimes allaient se retourner vers la ministre de la Justice afin qu'elle ordonne au parquet de faire appel.

    Un millier de cas toujours à risque

    Depuis l'ouverture du procès, le 6 février 2008 au tribunal correctionnel de Paris, les familles ont défilé à la barre pour raconter l'horrible agonie de leur enfant, tandis que l'accusation martèle que des négligences en série sont à l'origine de cette tragédie.

    Pour le procureur, c'est la volonté de l'association France Hypophyse, qui détenait le monopole de la collecte de glandes, de privilégier le rendement à tout prix, qui est à l'origine de la tragédie. Des glandes à risques étaient collectées. L'institut Pasteur, chargé de leur reconditionnement, est également fautif pour l'accusation : il n'aurait pas assuré, comme il l'aurait dû, la stérilisation des hypophyses desquelles étaient extraites les hormones.

    La défense, elle, s'appuie sur le manque de connaissances scientifiques sur la maladie de Creutzfeldt-Jakob et sur sa transmission à l'homme au début des années 1980. Les experts, qui se sont succédés à la barre, se sont contredits sur ce point, certains parlant d'alertes dès 1974 tandis que le Nobel américain Stanley Prusiner, découvreur du prion, l'agent infectieux de la maladie, disait n'avoir réalisé le danger qu'en 1985.

    On estime qu'un millier de jeunes adultes, qui avaient été traités à l'hormone de croissance, risquent toujours de contracter la maladie de Creutzfeldt-Jakob.

    CHRONOLOGIE - Retour sur quinze années de procédure.

    1974 : début des premiers traitements à base d'hormones de croissance d'origine humaine.

    1980 : le Professeur Luc Montagnier, virologue de l'Institut Pasteur, émet des réserves sur la collecte des hypophyses.

    février 1984 - juin 1985 : période dite «à risque» pendant laquelle un millier d'enfants auraient reçu des injections provenant de lots suspects.

    avril 1985 : après le décès d'un Américain, le lien entre la maladie de Creutzfeldt-Jakob et les hormones de croissance est établi.

    24 décembre 1991 : première plainte des parents d'un enfant atteint de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, à la suite d'un traitement à base d'hormones de croissance.

    24 décembre 1992 : l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) pointe un «grave dysfonctionnement du dispositif français» de fabrication et de diffusion de l'hormone.

    20 juillet 1993 : premières mises en examen.

    novembre 1999 : ouverture d'une information judiciaire pour «corruption». Fernand Dray, de l'Institut Pasteur, aurait touché des commissions d'une société belge liée à l'achat de poudre d'hormones.

    7 juin 2004 : mise en examen de MM. Job, Dray, Cerceau, Mollet et Dangoumau pour «tromperie» et de cinq médecins collecteurs pour «complicité».

    l7 septembre 2005 : fin de l'instruction.

    24 octobre 2006 : mort de Fidel, 110 e et dernière victime à ce jour.

    22 février 2007 : un an et demi plus tard, le parquet requiert le jugement de six des douze mis en examen, responsables de la collecte des hypophyses, de l'extraction, du conditionnement et de la diffusion du produit. Il requiert un non-lieu pour des médecins collecteurs de l'hypophyse et les auteurs présumés de délits financiers.

    6 avril 2007 : le juge Marie-Odile Bertella-Geffroy signe son ordonnance de renvoi.

    6 février 2008 : le procès s'ouvre devant la 31e chambre du tribunal correctionnel de Paris.

    Par le figaro
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