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Harald Veen Fresed, médecin, a vécu l'enfer de l'hôpital Chifa à Gaza

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    Harald Veen Fresed, médecin, a vécu l'enfer de l'hôpital Chifa à Gaza
    LEMONDE.FR | 16.01.09 | 11h05 • Mis à jour le 16.01.09 | 11h05
    Jérusalem, correspondant

    arald Veen Fresed vient de passer une semaine à l'hôpital Chifa, dans la ville de Gaza. Ce chirurgien hollandais est épuisé. Envoyé par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), ce spécialiste des opérations abdominales a du mal à cacher son émotion après ce qu'il appelle "une véritable tragédie". Pourtant habitué aux guerres et aux situations de détresse – tout particulièrement dans les conflits africains –, il revient bouleversé par ce qu'il a vu.
    Pendant huit jours, sans discontinuer, le médecin a vécu toutes les horreurs. "Des membres mutilés, des cervelles qui sortaient, des tripes à l'air, des blessés qui mouraient après s'être vidés de leur sang. L'afflux était énorme. Il était difficile de faire face. On parait au plus pressé, choisissant ceux que l'on pouvait sauver, délaissant ceux pour qui c'était trop tard."

    Harald Veen Fresed explique que trois équipes de quinze médecins se relaient tour à tour, toutes les vingt-quatre heures, pour faire face à un afflux continuel de blessés. "A tel point que l'on peut à peine bouger et qu'il faut soigner au plus vite pour absorber ce trop-plein."

    Le médecin rend hommage à la compétence et au dévouement des docteurs palestiniens. Il y a des médicaments, mais il n'y a pas suffisamment de matériels, ni de place dans les salles ou à la morgue. Les cas les plus graves sont expédiés en Egypte par Rafah. "Je peux vous dire que le chiffre de plus de 1 000 morts est certainement inférieur à la réalité. On croit déjà avoir tout vu, être bien préparé pour affronter l'inaffrontable. Eh bien je peux vous assurer que ce fut une véritable épreuve."

    Grand, blond, filiforme, pesant ses mots, Harald explique que le plus dur fut d'assister "aux drames personnels". "Aux parents, aux familles effondrées face à la mort et à la souffrance. Vous assistez, impuissant, en silence, à ces tragédies. Certains voulaient suivre les blessés jusque dans la salle d'opération de peur de ne plus jamais les revoir vivants. Beaucoup avaient des blessures énormes provoquées par des éclats et je me demandais comment ils pouvaient encore survivre. On dit toujours que la guerre est horrible mais l'on ne peut pas s'imaginer ce que c'est, car l'on n'en voit qu'une partie."

    "UN GRAND TROU DANS LE DOS"

    Pour Harald, il y a tous ces morts mais il y a surtout tous ceux qui sont amputés, paraplégiques, aveugles. "La guerre ne s'arrête pas avec le cessez-le-feu. Pour beaucoup, elle dure pendant des années, toute la vie." Une chose est sûre pour lui : "J'étais content d'être là. Je me considère comme un privilégié d'avoir pu de façon infinitésimale apporter une aide."

    Après être intervenu pendant le génocide des Tutsi au Rwanda, en 1994, il avait décidé d'arrêter pendant deux ans pour en digérer l'horreur. Puis, il est reparti. Et chaque fois que le CICR l'appelle, il reprend sa valise juste pour faire ce qu'il appelle "une petite différence". "Ce qui est important, c'est d'être là." Il se défend d'être un idéaliste. Il en a beaucoup trop vu pour cela. Cela ne l'empêche pas de faire des cauchemars, de revivre des scènes.
    Lorsqu'il a quitté Gaza, ce ne fut pas facile, car il a eu le désagréable sentiment "d'abandonner" ses collègues d'une semaine. Harald est allé retrouver sa petite fille de 3 ans. Le même âge que celle qu'il a vue arriver à l'hôpital Chifa, l'air intact, les yeux grands ouverts. Lorsqu'il l'a retournée, elle avait "un grand trou dans le dos". Plus jamais, elle ne remarchera.


    Michel Bôle-Richard
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