16 janvier 2009 — Quel but fondamental poursuivent les Israéliens à Gaza? Pour parler en termes militaires, puisque certains prétendent qu’il s’agit d’une “guerre”, quelle est leur stratégie? Une réponse abrupte nous vient d’un expert US fameux, représentant une tendance centrale de l’establishment stratégique washingtonien, avec toutes les références de crédit et d’honorabilité qui importent. Sur le site du CSIS de Georgetown University, où il tient une place de choix, Anthony H. Cordesman donne, le 9 janvier, son analyse de l’attaque israélienne contre Gaza.
On lit notamment une reprise du texte de Cordesman, sous la plume de Bernd Debusmann, sur Reuters, le 15 janvier, – Debusmann qui nous dit ceci: «It’s not often that a senior member of Washington’s usually staid and cautious foreign policy establishment likens Israeli political leaders to donkeys and questions their competence. But the fighting in Gaza prompted Anthony Cordesman of the Center for Strategic and International Studies to do just that.»
Dans son étude, Cordesman analyse d’abord les circonstances tactiques et reconnaît divers succès de l’IDF (Israel Defense Force) dans la “campagne” militaire en cours. Ce constat fait, que reste-t-il; ou, mieux dit, à quoi tout cela sert-il?
«This raises a question that every Israeli and its supporters now needs to ask. What is the strategic purpose behind the present fighting? After two weeks of combat Olmert, Livni, and Barak have still not said a word that indicates that Israel will gain strategic or grand strategic benefits, or tactical benefits much larger than the gains it made from selectively striking key Hamas facilities early in the war. In fact, their silence raises haunting questions about whether they will repeat the same massive failures made by Israel’s top political leadership during the Israeli-Hezbollah War in 2006. Has Israel somehow blundered into a steadily escalating war without a clear strategic goal or at least one it can credibly achieve? Will Israel end in empowering an enemy in political terms that it defeated in tactical terms? Will Israel’s actions seriously damage the US position in the region, any hope of peace, as well as moderate Arab regimes and voices in the process?
»To be blunt, the answer so far seems to be yes. To paraphrase a comment about the British government’s management of the British Army in World War I, lions seem to be led by donkeys. If Israel has a credible ceasefire plan that could really secure Gaza, it is not apparent. If Israel has a plan that could credibly destroy and replace Hamas, it is not apparent. If Israel has any plan to help the Gazans and move them back towards peace, it is not apparent. If Israel has any plan to use US or other friendly influence productively, it not apparent.
»As we have seen all too clearly from US mistakes, any leader can take a tough stand and claim that tactical gains are a meaningful victory. If this is all that Olmert, Livni, and Barak have for an answer, then they have disgraced themselves and damaged their country and their friends. If there is more, it is time to make such goals public and demonstrate how they can be achieved. The question is not whether the IDF learned the tactical lessons of the fighting in 2006. It is whether Israel's top political leadership has even minimal competence to lead them.»
Cette analyse est largement partagée par la communauté des experts US, et on la trouvait déjà esquissée dans les commentaires furieux de Zbigniew Brzezinski. Si le jugement de Brzezinski concernait les Israéliens et les Palestiniens, il concerne en fait principalement les Israéliens parce que ce sont eux qui, aujourd’hui, ont pris l’initiative, parce qu’ils ont la puissance, et qu’ils exercent l’une et l’autre de façon massive, d’une façon qui met d’autant en évidence l’absence de stratégie de leur action.
Ces appréciations américanistes rendent compte, pour l'immédiat et le plus pressant, du malaise grandissant dans les relations entre les USA et Israël. Certains, comme Justin Raimondo, transcrivent ces signes de malaise en termes politiques, comme la marque d’une grave détérioration de ces relations entre les deux pays.
Ce “vide stratégique” de l’attaque contre Gaza est largement rencontré par le jugement étonnamment contradictoire des Israéliens, tel qu’il est rapporté par l’Observer du 11 janvier, notamment au travers de déclarations d’un militant israélien pour la paix. On y voit que, dans cette guerre suscitée essentiellement par la peur («Why Israel's war is driven by fear»), les Israéliens affirment être prêts pour la paix, ils sont partisans de la paix et d’une solution avec un Etat palestinien indépendant, mais par ailleurs ils assimilent les Palestiniens à des terroristes, avec lesquels on ne peut par définition faire la paix. A “l’enfermement stratégique”, à l’absence de stratégie, correspond un “enfermement psychologique” interdisant le développement rationnel à la pensée; interdisant d’établir un rapport entre le désir et la nécessité de la paix, et la possibilité de la paix. Il est absurde de vouloir la paix avec un interlocuteur dont on affirme parallèlement qu’il ne peut lui-même, par sa nature même, faire la paix. Lorsque Jeff Halper juge que les Israéliens sont “les otages de leur propre direction”, on serait plutôt tenté de les voir otages de leur propre psychologie, éventuellement à l’image de leurs dirigeants, eux-mêmes avec une pensé construite selon la même pdsychologie.
On lit notamment une reprise du texte de Cordesman, sous la plume de Bernd Debusmann, sur Reuters, le 15 janvier, – Debusmann qui nous dit ceci: «It’s not often that a senior member of Washington’s usually staid and cautious foreign policy establishment likens Israeli political leaders to donkeys and questions their competence. But the fighting in Gaza prompted Anthony Cordesman of the Center for Strategic and International Studies to do just that.»
Dans son étude, Cordesman analyse d’abord les circonstances tactiques et reconnaît divers succès de l’IDF (Israel Defense Force) dans la “campagne” militaire en cours. Ce constat fait, que reste-t-il; ou, mieux dit, à quoi tout cela sert-il?
«This raises a question that every Israeli and its supporters now needs to ask. What is the strategic purpose behind the present fighting? After two weeks of combat Olmert, Livni, and Barak have still not said a word that indicates that Israel will gain strategic or grand strategic benefits, or tactical benefits much larger than the gains it made from selectively striking key Hamas facilities early in the war. In fact, their silence raises haunting questions about whether they will repeat the same massive failures made by Israel’s top political leadership during the Israeli-Hezbollah War in 2006. Has Israel somehow blundered into a steadily escalating war without a clear strategic goal or at least one it can credibly achieve? Will Israel end in empowering an enemy in political terms that it defeated in tactical terms? Will Israel’s actions seriously damage the US position in the region, any hope of peace, as well as moderate Arab regimes and voices in the process?
»To be blunt, the answer so far seems to be yes. To paraphrase a comment about the British government’s management of the British Army in World War I, lions seem to be led by donkeys. If Israel has a credible ceasefire plan that could really secure Gaza, it is not apparent. If Israel has a plan that could credibly destroy and replace Hamas, it is not apparent. If Israel has any plan to help the Gazans and move them back towards peace, it is not apparent. If Israel has any plan to use US or other friendly influence productively, it not apparent.
»As we have seen all too clearly from US mistakes, any leader can take a tough stand and claim that tactical gains are a meaningful victory. If this is all that Olmert, Livni, and Barak have for an answer, then they have disgraced themselves and damaged their country and their friends. If there is more, it is time to make such goals public and demonstrate how they can be achieved. The question is not whether the IDF learned the tactical lessons of the fighting in 2006. It is whether Israel's top political leadership has even minimal competence to lead them.»
Cette analyse est largement partagée par la communauté des experts US, et on la trouvait déjà esquissée dans les commentaires furieux de Zbigniew Brzezinski. Si le jugement de Brzezinski concernait les Israéliens et les Palestiniens, il concerne en fait principalement les Israéliens parce que ce sont eux qui, aujourd’hui, ont pris l’initiative, parce qu’ils ont la puissance, et qu’ils exercent l’une et l’autre de façon massive, d’une façon qui met d’autant en évidence l’absence de stratégie de leur action.
Ces appréciations américanistes rendent compte, pour l'immédiat et le plus pressant, du malaise grandissant dans les relations entre les USA et Israël. Certains, comme Justin Raimondo, transcrivent ces signes de malaise en termes politiques, comme la marque d’une grave détérioration de ces relations entre les deux pays.
Ce “vide stratégique” de l’attaque contre Gaza est largement rencontré par le jugement étonnamment contradictoire des Israéliens, tel qu’il est rapporté par l’Observer du 11 janvier, notamment au travers de déclarations d’un militant israélien pour la paix. On y voit que, dans cette guerre suscitée essentiellement par la peur («Why Israel's war is driven by fear»), les Israéliens affirment être prêts pour la paix, ils sont partisans de la paix et d’une solution avec un Etat palestinien indépendant, mais par ailleurs ils assimilent les Palestiniens à des terroristes, avec lesquels on ne peut par définition faire la paix. A “l’enfermement stratégique”, à l’absence de stratégie, correspond un “enfermement psychologique” interdisant le développement rationnel à la pensée; interdisant d’établir un rapport entre le désir et la nécessité de la paix, et la possibilité de la paix. Il est absurde de vouloir la paix avec un interlocuteur dont on affirme parallèlement qu’il ne peut lui-même, par sa nature même, faire la paix. Lorsque Jeff Halper juge que les Israéliens sont “les otages de leur propre direction”, on serait plutôt tenté de les voir otages de leur propre psychologie, éventuellement à l’image de leurs dirigeants, eux-mêmes avec une pensé construite selon la même pdsychologie.
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