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La Russie veut soustraire l'Asie centrale à l'influence de l'OTAN

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  • La Russie veut soustraire l'Asie centrale à l'influence de l'OTAN

    Au moment où la base américaine de Manas, au Kirghizstan, s'avère cruciale pour la poursuite de l'opération de l'OTAN en Afghanistan, le président kirghiz Kourmanbek Bakiev a annoncé sa fermeture, mardi 4 février, lors d'une visite à Moscou. Quelques minutes plus tôt, il avait obtenu de la Russie un prêt de 2 milliards de dollars, une aide supplémentaire de 150 millions, des investissements russes dans le secteur de l'énergie et l'effacement de la dette de son pays.

    Ouverte après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis dans le cadre du soutien à la force internationale déployée en Afghanistan, la base américaine de Manas est une installation clé pour l'approvisionnement des troupes de l'Alliance. Elle a pris encore plus d'importance depuis l'explosion, mardi, d'un pont stratégique en pleine passe de Khyber, entre le Pakistan et l'Afghanistan, compliquant très sérieusement l'acheminement en hommes et en équipement via le Pakistan.

    L'annonce de la fermeture de la base a été obtenue en échange d'une aide financière substantielle au Kirghizstan, le plus pauvre des Etats de l'Asie centrale post-soviétique. Le président Dmitri Medvedev a eu beau nier que la fermeture de la base et l'octroi d'un prêt russe étaient liés, les faits semblent dire le contraire. Confrontée à des coupures d'énergie sans précédent et à une chute brutale de son PIB - constitué à 45 % des envois d'argent des travailleurs kirghizs employés en Russie -, la petite République, aux abois, n'avait guère d'autre choix que de céder à l'exigence de son grand voisin.

    L'éviction des 1 200 soldats américains déployés sur la base de Manas est une victoire pour Moscou. Hantée par la restauration de sa puissance perdue, la Russie cherchait depuis longtemps à reprendre pied en Asie centrale. Cette zone est considérée par l'élite politico-militaire russe comme son arrière-cour.

    Selon les plans russes, les "boys" seront bientôt remplacés par la force rapide de l'Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), l'alliance militaire de la Communauté des Etats indépendants. "Les autorités kirghizes sont en droit de penser que la base de Manas sera plus utile à la force rapide qu'à des troupes étrangères qui ne respectent pas la souveraineté du pays", a expliqué, mercredi, Dmitri Rogozine, le représentant de la Russie à l'OTAN, sur la chaîne de télévision russe Vesti.

    Selon lui, "l'échec américain en Afghanistan constitue une grave menace pour les pays de la région. Les actions militaires qui font des dégâts parmi la population civile afghane ne font qu'affaiblir le camp des anti-talibans", a-t-il ajouté. C'est pourquoi les soldats du Pacte militaire de la CEI, dominé par la Russie, vont prendre le relais.

    Cette décision ne peut qu'étonner. La Russie n'a-t-elle pas répété maintes fois qu'elle était favorable à la coopération avec l'OTAN en Afghanistan ? Au moment du coup de froid avec l'Alliance, lors de la guerre russo-géorgienne d'août 2008, cette coopération n'avait pas été remise en question. Par ailleurs, le Kremlin n'ignore pas qu'un échec de l'opération anti-talibans serait lourd de conséquences. Avant tout pour la Russie et pour ses alliés d'Asie centrale. Dans les années 1990, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Kirghizstan ont déjà été confrontés aux incursions de mouvements islamistes extrémistes venus d'Afghanistan.

    POLITIQUE DU FAIT ACCOMPLI

    En réalité, la fermeture de la base est une des monnaies d'échange que le Kremlin s'apprête à utiliser dans le cadre du grand marchandage en cours avec l'OTAN. Mécontentée par la perspective d'une adhésion à l'Alliance atlantique de la Géorgie et de l'Ukraine, ulcérée par le déploiement d'un bouclier anti-missiles américain en Europe centrale, la Russie veut peser de tout son poids sur les discussions qui se tiendront à la conférence sur la sécurité de Munich, le 6 février.

    Il s'agit également de faire passer en force l'installation de nouvelles bases russes en Ossétie du Sud et en Abkhazie, ces provinces géorgiennes annexées par Moscou après la guerre d'août 2008. Quitte à négliger les règles du droit international, la Russie impose sa politique du fait accompli. Moscou accepte de reprendre le dialogue avec l'Occident, mais à ses conditions.

    Cette posture de défi contredit les voix optimistes qui croyaient que la crise économique allait conduire la Russie à infléchir sa politique étrangère. L'exemple kirghiz montre que Moscou a encore les moyens d'acheter la loyauté de ses voisins. "En tant que puissance régionale, la Russie n'a jamais été capable de proposer d'autres projets à sa périphérie que des accords militaires ou énergétiques", a déploré Matveï Ganapolski, l'analyste de la radio Echo de Moscou.

    source : Le Monde
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