Le scandale Maroc Telecom au Mali
Samedi, 07 Février 2009 12:41 ...
Le 15 janvier dernier, Maroc Telecom remportait l'adjudication des 51% du capital de Sotelma, l’opérateur télécoms historique du Mali. Deux semaines plus tard, gros scandale et menace d’annulation du marché.
Au Mali, l’affaire mobilise. Elle est remontée jusqu’au chef de l’Etat. Il s’agit de la privatisation de Sothelma, l’opérateur historique du Mali en télécommunications.
Jusqu’au 15 janvier dernier, Sothelma avait pour actionnaire unique l’Etat malien. Après quelque 40 ans de monopole, l’Etat du Mali a décidé de libéraliser le secteur des télécommunications et d’ouvrir le capital de son opérateur Sothelma. Pour la privatisation de Sothelma, le processus devait conduire à un schéma final où l’Etat malien serait minoritaire ne gardant que 20% du capital, un actionnaire de référence aurait 51% des parts, le personnel se verrait réserver 10% et le grand public aurait droit aux 19 % restant.
Prévue depuis plusieurs années, l’opération devait être achevée au premier trimestre 2009.
C’est dans ce cadre qu’un appel d’offres international a été lancé et que parmi les soumissionnaires, il y a eu Maroc Telecom que dirige Abdeslma Ahizoun.
Le 15 janvier dernier, donc, il y a eu l’ouverture des plis et c’est Maroc Telecom qui a remporté le marché. Il était en effet en compétition avec Sudatel (Soudan), Portugal Télécom (Portugal) et Orascom (Egypte). Et le dépouillement auquel a procédé ce jour-là la Commission d'évaluation malienne a révélé que Maroc Telecom était le mieux disant avec une offre de 250 millions d'euros. La seconde offre n’arrivait même pas à la moitié de ce que proposait Maroc Telecom avec ses 110 millions d’euros. Quant au troisième soumissionnaire, il se proposait de débourser 80 millions d’euros seulement pour acquérir les 51% de parts de Sothelma.
Seulement voilà, Maroc Telecom aura à peine eu le temps de se voir notifier son succès qu’elle devra peut être y renoncer.
En effet, au Mali, une tempête a accompagné cette adjudication et, si l’on en croit certaines sources, dans ce pays, l’attribution de l’appel d’offres à Maroc Télécom serait sur le point d'être annulé par le gouvernement.
Pourquoi ? L’appel d’offres aurait été attribué alors qu’il y aurait un désaccord profond sur l’évaluation de Sothelma. Un désaccord entre, d’une part, la ministre de la Communication et des nouvelles technologies, celle-là même qui a présidé la commission d’évaluation des offres, a procédé à l’ouverture des plis et a accordé l’adjudication à Maroc Telecom et, d’autre part, la Direction générale de la Sotelma.
Les deux étaient chargés de conduire le processus de privatisation. Les deux ont chargé, chacun de son côté, un organisme professionnel d’évaluer Sothelma...
La guerre qu’ils se sont menés s’est encore plus envenimée lorsque chacun est venu avec une évaluation de l’opérateur historique différente. L’une allant dans le sens d’une bonne valorisation de la société, l’autre allant dans le sens totalement inverse.
La ministre ayant poursuivi le processus, dans ce qui a été considéré par ses adversaires comme un forcing, elle a été accusée de non transparence, d’autant que cela aurait découragé quatre soumissionnaires qui ont fini par se désister… Les adversaires de la ministre voyant dans ces quatre désistements un possible manque à gagner pour l’Etat malien.
Tout cela, selon nos sources maliennes, sans que ni le Premier ministre, ni le chef de l’Etat n’aient été informés de ces bisbilles et surtout du désaccord sur l’évaluation de l’opérateur historique. Evaluation sans laquelle aucun appel d’offres ne pourrait être valablement défendu.
Les hautes autorités du pays auraient été surprises de recevoir deux rapports différents sur l’attribution des 51% de Sothelma à Maroc Telecom.
Maroc Telecom qui se trouve au centre de ce scandale a-t-il bénéficié d’un quelconque favoritisme, comme l’en accusent les détracteurs de la ministre ? L’adjudication sera-t-elle finalement maintenue ou annulée ?
Quoiqu’il en soit, c’est un très mauvais démarrage pour Maroc Telecom au Mali où il a déjà et d’office contre lui le syndicat de Sothelma, inquiet de cette privatisation.
Dans un document rendu public, la section Sothelma du SYNAPOSTEL (syndicat affilié à la centrale syndicale UNTM), livre cette conclusion qu’elle dit elle-même donner sous forme de métaphore : « la Sothelma est malade (insuffisance de ressources financières pour investir). On lui propose du poison (privatisation) comme remède. Si elle ne consomme pas le remède qui lui est prescrit, elle mourra brusquement, étranglée. Si elle le consomme, elle mourra à petit feu, empoisonnée ».
Et le syndicat qui voit dans Maroc Telecom une multinationale termine sur cette pointe : « les multinationales prennent l’argent des pauvres des pays pauvres pour le donner aux riches des pays riches ».
Cette dernière réflexion, on l’aura compris, n’est valable que pour la part des éventuels bénéfices de Maroc Telecom au Mali qui iraient à Vivendi…
B. Amrani
Samedi, 07 Février 2009 12:41 ...
Le 15 janvier dernier, Maroc Telecom remportait l'adjudication des 51% du capital de Sotelma, l’opérateur télécoms historique du Mali. Deux semaines plus tard, gros scandale et menace d’annulation du marché.
Au Mali, l’affaire mobilise. Elle est remontée jusqu’au chef de l’Etat. Il s’agit de la privatisation de Sothelma, l’opérateur historique du Mali en télécommunications.
Jusqu’au 15 janvier dernier, Sothelma avait pour actionnaire unique l’Etat malien. Après quelque 40 ans de monopole, l’Etat du Mali a décidé de libéraliser le secteur des télécommunications et d’ouvrir le capital de son opérateur Sothelma. Pour la privatisation de Sothelma, le processus devait conduire à un schéma final où l’Etat malien serait minoritaire ne gardant que 20% du capital, un actionnaire de référence aurait 51% des parts, le personnel se verrait réserver 10% et le grand public aurait droit aux 19 % restant.
Prévue depuis plusieurs années, l’opération devait être achevée au premier trimestre 2009.
C’est dans ce cadre qu’un appel d’offres international a été lancé et que parmi les soumissionnaires, il y a eu Maroc Telecom que dirige Abdeslma Ahizoun.
Le 15 janvier dernier, donc, il y a eu l’ouverture des plis et c’est Maroc Telecom qui a remporté le marché. Il était en effet en compétition avec Sudatel (Soudan), Portugal Télécom (Portugal) et Orascom (Egypte). Et le dépouillement auquel a procédé ce jour-là la Commission d'évaluation malienne a révélé que Maroc Telecom était le mieux disant avec une offre de 250 millions d'euros. La seconde offre n’arrivait même pas à la moitié de ce que proposait Maroc Telecom avec ses 110 millions d’euros. Quant au troisième soumissionnaire, il se proposait de débourser 80 millions d’euros seulement pour acquérir les 51% de parts de Sothelma.
Seulement voilà, Maroc Telecom aura à peine eu le temps de se voir notifier son succès qu’elle devra peut être y renoncer.
En effet, au Mali, une tempête a accompagné cette adjudication et, si l’on en croit certaines sources, dans ce pays, l’attribution de l’appel d’offres à Maroc Télécom serait sur le point d'être annulé par le gouvernement.
Pourquoi ? L’appel d’offres aurait été attribué alors qu’il y aurait un désaccord profond sur l’évaluation de Sothelma. Un désaccord entre, d’une part, la ministre de la Communication et des nouvelles technologies, celle-là même qui a présidé la commission d’évaluation des offres, a procédé à l’ouverture des plis et a accordé l’adjudication à Maroc Telecom et, d’autre part, la Direction générale de la Sotelma.
Les deux étaient chargés de conduire le processus de privatisation. Les deux ont chargé, chacun de son côté, un organisme professionnel d’évaluer Sothelma...
La guerre qu’ils se sont menés s’est encore plus envenimée lorsque chacun est venu avec une évaluation de l’opérateur historique différente. L’une allant dans le sens d’une bonne valorisation de la société, l’autre allant dans le sens totalement inverse.
La ministre ayant poursuivi le processus, dans ce qui a été considéré par ses adversaires comme un forcing, elle a été accusée de non transparence, d’autant que cela aurait découragé quatre soumissionnaires qui ont fini par se désister… Les adversaires de la ministre voyant dans ces quatre désistements un possible manque à gagner pour l’Etat malien.
Tout cela, selon nos sources maliennes, sans que ni le Premier ministre, ni le chef de l’Etat n’aient été informés de ces bisbilles et surtout du désaccord sur l’évaluation de l’opérateur historique. Evaluation sans laquelle aucun appel d’offres ne pourrait être valablement défendu.
Les hautes autorités du pays auraient été surprises de recevoir deux rapports différents sur l’attribution des 51% de Sothelma à Maroc Telecom.
Maroc Telecom qui se trouve au centre de ce scandale a-t-il bénéficié d’un quelconque favoritisme, comme l’en accusent les détracteurs de la ministre ? L’adjudication sera-t-elle finalement maintenue ou annulée ?
Quoiqu’il en soit, c’est un très mauvais démarrage pour Maroc Telecom au Mali où il a déjà et d’office contre lui le syndicat de Sothelma, inquiet de cette privatisation.
Dans un document rendu public, la section Sothelma du SYNAPOSTEL (syndicat affilié à la centrale syndicale UNTM), livre cette conclusion qu’elle dit elle-même donner sous forme de métaphore : « la Sothelma est malade (insuffisance de ressources financières pour investir). On lui propose du poison (privatisation) comme remède. Si elle ne consomme pas le remède qui lui est prescrit, elle mourra brusquement, étranglée. Si elle le consomme, elle mourra à petit feu, empoisonnée ».
Et le syndicat qui voit dans Maroc Telecom une multinationale termine sur cette pointe : « les multinationales prennent l’argent des pauvres des pays pauvres pour le donner aux riches des pays riches ».
Cette dernière réflexion, on l’aura compris, n’est valable que pour la part des éventuels bénéfices de Maroc Telecom au Mali qui iraient à Vivendi…
B. Amrani
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