Des rendez-vous manqués, une bonne dose de duplicité, mais un espoir qui s’accroche.
Septembre-novembe 2008. Nouveau report de la mission parlementaire européenne dans les territoire occupés
Le Maroc est une puissance occupante, comme Israël en Palestine. Les ONG et les observateurs internationaux n’ont pas la liberté d’aller et venir au Sahara Occidental.
Du 21 au 24 novembre 2008, une mission du Parlement européen devait pourtant s’y rendre. C’est le second volet, reporté de mois en mois depuis janvier 2006, de la mission d’observation des droits de l’homme du Comité ad hoc Sahara Occidental constitué fin 2005 au sein du Parlement européen. Le premier volet avait été réalisé en septembre 2006 dans les territoires sous administration sahraouie.
Le Maroc s’est maintes fois dérobé, y compris à 48 h du départ de la délégation, au prétexte que la composition de celle-ci ne lui convenait pas !
Après presque 3 ans de dérobades, les autorités marocaines laissent toutefois entendre, à la mi-septembre 2008, qu’elles sont désormais favorables à la venue de la mission. Il est vrai qu’entre temps le sens du compromis des parlementaires européens a fait merveille, puisque la délégation ne comprend plus que 2 membres du Comité ad hoc Sahara Occidental (contre 5 auparavant), les 3 autres membres faisant partie d’autres instances de relation avec les pays du Maghreb.
Mais c’est désormais le programme des visites de la mission parlementaire que les autorités marocaines veulent imposer, cherchant à transformer cette mission d’observation en tournée de rencontres et d’amitiés européo-marocaines ! Les membres du Comité ad hoc ont donc demandé le report de la visite à janvier-février 2009, espérant trouver d’ici là les moyens d’accomplir leur mission…
Fin janvier 2009. La mission du Parlement européen se rend enfin à El Aïoun
Il faut imaginer les circonstances : mardi 27 janvier, les 5 membres de la mission ont pour résidence pendant quelques heures le prestigieux hôtel Parador, qui date de l’époque coloniale espagnole. Ce ne sont pas les parlementaires européens qui rendent visite aux différents représentants de la socété civile sahraouie, mais ces derniers qui viennent à eux sur rendez-vous, par roulement. La ville est bouclée depuis la veille par les forces de sécurité marocaines. Dans les rues menant à l’hôtel, des « checkpoints » interceptent tous ceux qui veulent s’y rendre, rendez-vous pris ou non. Il y a des tabassages en règle, comme le rapporte Amnesty International. Un des membres de la mission est obligé de descendre dans la rue pour permettre à l’un de ses visiteurs d’accéder au Parador. La délégation des Commissions ouvrières sahraouies (travailleurs de Phos Boucraa) sera empêchée d’y pénétrer.
La mission a entendu toutefois la plupart des organisations de défense des droits de l’homme, et, bien sûr, les autorités marocaines locales ainsi que des Sahraouis pro-marocains.
Il reste à attendre son rapport, avec un double espoir :
1) qu’il ne soit pas fait d’eau tiède.
2) que, n’étant pas fait d’eau tiède, il soit néanmoins publié…
L’affaire du « statut avancé » accordé au Maroc.
Entre temps, le Maroc a obtenu le 13 octobre 2008 de l’Union européenne le « statut avancé » qu’il réclamait depuis des années dans le cadre de la politique européenne de voisinage. Les officiels marocains s’en frottent les mains : ils se sentent enfin « plus qu’un partenaire » de l’Union européenne, comme l’a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Taïeb Fassi Fihri, le nouveau statut donne au Maroc « tout de l’Europe, sauf les institutions ».
Il s’agit en effet d’un accord de libre échange approfondi, couvrant de nouveaux domaines tels que les droits de propriété intellectuelle, les mouvements de capitaux ou le développement durable.
Mais si l’accord d’association précédemment signé, en 2000, entre le Maroc et l’Union Européenne est juridiquement contraignant, le « statut avancé » n’a qu’une valeur formelle. C’est une « feuille de route ». Sous la forme d’une déclaration commune entre les deux entités, elle liste les domaines où les relations sont à améliorer. Elle donne des perspectives. Mais elle n’ouvre aucune nouvelle ligne de crédit au royaume. (Les limites de cet accord seront d’ailleurs bien mises en évidence par des observateurs marocains avertis, comme dans Le Journal du 31-01-2009.)
Toutefois, le satisfecit symbolique est énorme pour le Maroc, qui a toutes les raisons de se vanter d’avoir été choisi « parce qu’il est le pays le plus avancé dans le Maghreb arabe ».
Et les opposants au régime, Sahraouis d’une part, militants des droits de l’homme de l’autre (ce sont assez souvent les mêmes), peuvent à bon droit s’inquiéter de l’absence de contrepartie demandée par l’Union européenne à ce pays dont l’attitude en matière de droits de l’homme, au Sahara Occidental en particulier, laisse plus qu’à désirer.
"Le Front Polisario n’est pas, faut-il y insister, contre le fait que l’UE ait des relations de coopération ou des rapports privilégiés avec le Maroc. Ce qu’il redoute, et que vous pouvez aisément comprendre, c’est que le Maroc profite de tels rapports et les considère comme un encouragement ou une caution de la part de votre organisation à son entreprise coloniale", a écrit le président sahraoui Abdelaziz à Nicolas Sarkozy, président en exercice de l’UE.
Quant à Khadija Ryadi, présidente de l’Association marocaine des Droits de l’homme, elle a déclaré : "Dans ce statut avancé accordé par l'Union au Maroc, les Européens n'ont pas voulu faire un mécanisme qui impose au Maroc de reconnaître ses obligations, de les intégrer dans la loi et de les respecter". Elle conclut : "La lutte pour les droits de l'homme ne passe pas par l'UE ; c'est une affaire intérieure."
Imposer quelque chose au Maroc quant au respect de ses obligations, décidément personne n’y songe…
A Suivre ...
Septembre-novembe 2008. Nouveau report de la mission parlementaire européenne dans les territoire occupés
Le Maroc est une puissance occupante, comme Israël en Palestine. Les ONG et les observateurs internationaux n’ont pas la liberté d’aller et venir au Sahara Occidental.
Du 21 au 24 novembre 2008, une mission du Parlement européen devait pourtant s’y rendre. C’est le second volet, reporté de mois en mois depuis janvier 2006, de la mission d’observation des droits de l’homme du Comité ad hoc Sahara Occidental constitué fin 2005 au sein du Parlement européen. Le premier volet avait été réalisé en septembre 2006 dans les territoires sous administration sahraouie.
Le Maroc s’est maintes fois dérobé, y compris à 48 h du départ de la délégation, au prétexte que la composition de celle-ci ne lui convenait pas !
Après presque 3 ans de dérobades, les autorités marocaines laissent toutefois entendre, à la mi-septembre 2008, qu’elles sont désormais favorables à la venue de la mission. Il est vrai qu’entre temps le sens du compromis des parlementaires européens a fait merveille, puisque la délégation ne comprend plus que 2 membres du Comité ad hoc Sahara Occidental (contre 5 auparavant), les 3 autres membres faisant partie d’autres instances de relation avec les pays du Maghreb.
Mais c’est désormais le programme des visites de la mission parlementaire que les autorités marocaines veulent imposer, cherchant à transformer cette mission d’observation en tournée de rencontres et d’amitiés européo-marocaines ! Les membres du Comité ad hoc ont donc demandé le report de la visite à janvier-février 2009, espérant trouver d’ici là les moyens d’accomplir leur mission…
Fin janvier 2009. La mission du Parlement européen se rend enfin à El Aïoun
Il faut imaginer les circonstances : mardi 27 janvier, les 5 membres de la mission ont pour résidence pendant quelques heures le prestigieux hôtel Parador, qui date de l’époque coloniale espagnole. Ce ne sont pas les parlementaires européens qui rendent visite aux différents représentants de la socété civile sahraouie, mais ces derniers qui viennent à eux sur rendez-vous, par roulement. La ville est bouclée depuis la veille par les forces de sécurité marocaines. Dans les rues menant à l’hôtel, des « checkpoints » interceptent tous ceux qui veulent s’y rendre, rendez-vous pris ou non. Il y a des tabassages en règle, comme le rapporte Amnesty International. Un des membres de la mission est obligé de descendre dans la rue pour permettre à l’un de ses visiteurs d’accéder au Parador. La délégation des Commissions ouvrières sahraouies (travailleurs de Phos Boucraa) sera empêchée d’y pénétrer.
La mission a entendu toutefois la plupart des organisations de défense des droits de l’homme, et, bien sûr, les autorités marocaines locales ainsi que des Sahraouis pro-marocains.
Il reste à attendre son rapport, avec un double espoir :
1) qu’il ne soit pas fait d’eau tiède.
2) que, n’étant pas fait d’eau tiède, il soit néanmoins publié…
L’affaire du « statut avancé » accordé au Maroc.
Entre temps, le Maroc a obtenu le 13 octobre 2008 de l’Union européenne le « statut avancé » qu’il réclamait depuis des années dans le cadre de la politique européenne de voisinage. Les officiels marocains s’en frottent les mains : ils se sentent enfin « plus qu’un partenaire » de l’Union européenne, comme l’a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Taïeb Fassi Fihri, le nouveau statut donne au Maroc « tout de l’Europe, sauf les institutions ».
Il s’agit en effet d’un accord de libre échange approfondi, couvrant de nouveaux domaines tels que les droits de propriété intellectuelle, les mouvements de capitaux ou le développement durable.
Mais si l’accord d’association précédemment signé, en 2000, entre le Maroc et l’Union Européenne est juridiquement contraignant, le « statut avancé » n’a qu’une valeur formelle. C’est une « feuille de route ». Sous la forme d’une déclaration commune entre les deux entités, elle liste les domaines où les relations sont à améliorer. Elle donne des perspectives. Mais elle n’ouvre aucune nouvelle ligne de crédit au royaume. (Les limites de cet accord seront d’ailleurs bien mises en évidence par des observateurs marocains avertis, comme dans Le Journal du 31-01-2009.)
Toutefois, le satisfecit symbolique est énorme pour le Maroc, qui a toutes les raisons de se vanter d’avoir été choisi « parce qu’il est le pays le plus avancé dans le Maghreb arabe ».
Et les opposants au régime, Sahraouis d’une part, militants des droits de l’homme de l’autre (ce sont assez souvent les mêmes), peuvent à bon droit s’inquiéter de l’absence de contrepartie demandée par l’Union européenne à ce pays dont l’attitude en matière de droits de l’homme, au Sahara Occidental en particulier, laisse plus qu’à désirer.
"Le Front Polisario n’est pas, faut-il y insister, contre le fait que l’UE ait des relations de coopération ou des rapports privilégiés avec le Maroc. Ce qu’il redoute, et que vous pouvez aisément comprendre, c’est que le Maroc profite de tels rapports et les considère comme un encouragement ou une caution de la part de votre organisation à son entreprise coloniale", a écrit le président sahraoui Abdelaziz à Nicolas Sarkozy, président en exercice de l’UE.
Quant à Khadija Ryadi, présidente de l’Association marocaine des Droits de l’homme, elle a déclaré : "Dans ce statut avancé accordé par l'Union au Maroc, les Européens n'ont pas voulu faire un mécanisme qui impose au Maroc de reconnaître ses obligations, de les intégrer dans la loi et de les respecter". Elle conclut : "La lutte pour les droits de l'homme ne passe pas par l'UE ; c'est une affaire intérieure."
Imposer quelque chose au Maroc quant au respect de ses obligations, décidément personne n’y songe…
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