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Hôpitaux ou lits de mort ?

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  • Hôpitaux ou lits de mort ?

    Les erreurs médicales se multiplient dans de nombreux établissements hospitaliers : Hôpitaux ou lits de mort ?
    Négligence, fautes médicales, incompétence, prise en charge insuffisante... Pas un jour ne passe sans qu’un accouchement par césarienne ou une intervention chirurgicale ne tourne au drame dans les établissements publics ou privés. Le manque de personnel médical et paramédical, les moyens matériels et l’organisation sont souvent évoqués par les gestionnaires et les médecins. De nombreux décès sont enregistrés ces dernières années, mais aucune statistique officielle n’est disponible au niveau des institutions sanitaires.


    Les derniers cas en date : les deux dames décédées à l’hôpital de Ouargla après avoir inhalé par erreur du CO2 lors de leurs interventions chirurgicales. Une jeune dame âgée de 30 ans décède trois jours après son accouchement par césarienne à la clinique Gharafa (ex-Durando) à Bab El Oued, le 14 janvier dernier ont laissé derrière elle deux filles, dont l’aînée est âgée de trois ans.
    Cette victime vient s’ajouter à la longue liste qui ne cesse de s’allonger. Les derniers épisodes malheureux survenus dans certains hôpitaux du pays dus à des dysfonctionnements dans ces structures, ces derniers temps, montrent que des cas de fautes médicales, de négligence et d’insuffisance de prise en charge se multiplient de plus en plus. Le nombre de plaintes déposées auprès des instances médicales et judiciaires révèle l’ampleur du phénomène. Selon le président du conseil de l’Ordre des médecins, près de 500 plaintes au niveau national ont été déposées par des familles de patients contre des médecins durant les trois dernières années, dont la plupart des victimes sont décédées ou portent des séquelles graves et handicapantes. Le cas de cette jeune femme, issue du milieu médical, a marqué les esprits au sein de cette clinique. Un établissement qu’elle a choisi, car recommandé par une amie au professeur chef de service de gynécologie obstétrique.
    « Ils l’ont laissée partir sans rien faire », ne cesse de répéter son époux qui s’est présenté à notre rédaction. Abattu et désemparée, le père des deux fillettes n’arrive pas à croire que son épouse n’ait pas pu survire à une infection post-opératoire qui l’a foudroyée. « Pourtant, elle était très courageuse et elle tenait beaucoup à cette grossesse », ajoute-t-il. Sans accabler quiconque, le mari estime que son épouse a été mal prise en charge, d’autant qu’elle se plaignait de douleurs intenses et d’un écoulement de sa césarienne. « Les médecins sur place l’ont rassurée, mais le résultat est que ma femme est morte d’un choc septique. Pourtant, nous n’avons pas cessé d’alerter les médecins », nous a-t-il résumé après avoir relaté sa mésaventure durant les trois jours d’hospitalisation de son épouse. Les faits remontent au 11 janvier dernier, quand Mme N. S. est admise à la clinique après avoir été examinée par le Pr Chikh, chef de service à la clinique dans un cabinet privé à Bab El Oued, pas loin de la clinique Durando.
    Il l’adresse à la clinique où elle subit une césarienne en urgence dans la soirée pour souffrance fœtale aiguë. Le lendemain, la défunte en réanimation se plaint de douleurs abdominales que les infirmières ont trouvé normales : « Cela est dû aux gaz, nous a-t-on expliqué. Une transfusion sanguine était alors prévue, mais elle n’a pas été faite. » Le 13 janvier, l’accouchée, qui a été transférée dans sa chambre, cela supposant donc qu’elle a émis ses gaz, se plaint toujours à sa famille de douleurs abdominales, ballonnements et écoulement d’un liquide de la plaie et d’un état de faiblesse. L’époux s’inquiète et va voir l’infirmière qui lui répond que sa femme faisait « du chichi ». Son état ne s’améliore pas, puisque dans la soirée aux environs de 19 h, la défunte contacte son mari par téléphone et lui demande d’appeler son médecin traitant, le Pr Chikh, parce qu’elle souffrait de maux de tête intenses et de bouffées de chaleur.
    Le mari appelle le professeur et lui fait part de l’état de santé de sa femme et de ses inquiétudes, le praticien lui répond que « l’accouchée ne souffrait de rien et elle est au même titre que toutes les autres malades et qu’en plus, il y a les médecins de garde ». Selon l’époux, un médecin est passé l’examiner dans la soirée aux environs de 20h15. Inquiets et non rassurés, l’époux et la maman de la victime décident de se rendre à la clinique pour s’enquérir de l’état de santé de N. S. L’accès leur a été interdit. « La visite s’arrête à 15h », leur a-t-on signifié. La maman a dû supplier le gardien pour juste la laisser rentrer la voir. Elle trouve sa fille très fatiguée et les douleurs abdominales n’ont pas cessé. « Ses jambes étaient glacées », rapporte notre interlocuteur. « Dans la même nuit, aux environs de 4 h du matin, la malade a eu un malaise en se rendant aux toilettes et ses appels à l’aide sont restés vains.
    C’est la dame avec qui elle partageait la chambre qui est venue, d’après mon épouse à son aide, pour la ramener dans son lit, sans aller aux toilettes », a-t-il ajouté . Le jour fatidique, c’est-à-dire le 14 janvier, la défunte appelle son mari à 7h du matin pour lui demander des effets vestimentaires, des draps et une couette, parce qu’elle baignait dans un liquide. Arrivée sur les lieux, le même scénario avec le gardien qui finit par autoriser la maman à accéder. A sa surprise, elle trouve sa fille dans un état déplorable. Les jambes bleues et glacées, elle grelottait de froid. La maman alerte le personnel médical et la malade est transférée en réanimation où elle était mise sous perfusion et respiration assistée, en attendant l’arrivée du Pr Chikh. Elle sera par la suite admise au bloc opératoire pour intubation. D’où elle sortira décédée au moment où je suis parti chercher une place en réanimation au niveau du CHU de Bab El Oued », dira-t-il la gorge nouée.
    Sur l’acte du décès, il est mentionné mort naturelle en l’imputant à un choc septique provoqué par une infection bactérienne. S’agit-il d’une infection nosocomiale ? D’un mauvais suivi de la malade ? D’une prise en charge insuffisante de la défunte ? Ou tout simplement d’une négligence ? Autant de questions méritent d’être posées, mais l’énigme reste encore totale. Interrogée à ce propos, la directrice de l’établissement, Mme Boubekeur, écarte toute cause liée à une contamination par un germe dans le bloc opératoire. Elle affirme que dans la même journée, d’autres patientes ont été césarisées avant et après elle et aucun problème n’a été posé. « Elle est même montée toute seule de la réanimation à sa chambre. Elle se portait très bien. Le personnel médical a fait de son mieux pour cette malade », a-t-elle souligné. « Nous aurions souhaité que la famille demande une autopsie pour savoir réellement ce qui s’est passé », a-t-elle ajouté. Un acte que l’époux n’a pas souhaité demander : « Je ne veux pas que mon épouse, même décédée, endure d’autres souffrances. La raison a été bien signifiée. Pour moi, il y a eu négligence. »
    De son côté, le chirurgien de garde, qui a opéré la défunte, certifie que les conditions chirurgicales et l’asepsie ont été respectées : « Elle avait bien coopéré. Nous avons discuté et l’intervention s’est très bien déroulée. Des césariennes ont été effectuées quelques heures avant et après la sienne, nous n’avons eu aucun problème. C’est inexplicable », nous a confié le chirurgien. Quant au professeur, chef de service, le Pr Chikh, le risque d’une contamination au niveau du bloc et à partir du matériel n’est pas à écarter. C’est d’ailleurs l’explication qu’il avait donnée à la famille de la défunte. « Elle a été opérée dans de bonnes conditions et prise en charge correctement et un traitement aux antibiotiques lui a été administré. Elle a très bien évolué après l’intervention. Effectivement, il y avait un suintement au niveau de la plaie, mais le pansement a été changé. Elle m’avait même appelé en me disant qu’elle se portait bien.
    Les médecins de garde se sont bien occupés d’elle et n’ont pas constaté une urgence pour que je vienne la voir, jusqu’au moment où on la transférée aux soins intensifs, suite à un choc septique. Nous avons fait le maximum pour la sauver. Elle souffrait d’une infection à germe très résistant aux antibiotiques. Il se peut aussi qu’elle ait fait une embolie pulmonaire, une complication post-opératoire », a-t-il souligné. De l’avis d’un des experts gynécologues obstétriques, le décès ne peut être imputé qu’à une infection post-opératoire immédiate. Ce qui entraîne une septicémie, donc un choc septique. « Cela peut arriver, en raison de la mauvaise stérilisation du matériel chirurgical.
    Mais devant les multiples plaintes de la patiente, certains gestes sont systématiques, surtout lorsqu’il s’agit d’une post-opérée. Après une échographie pour écarter l’existence de corps étranger dans l’abdomen, la prise de température, un prélèvement sanguin sont indiqués. Un seul antibiotique ne suffit pas. Devant ce cas de figure, il faut bombarder avec du Flagyl, qui ne provoque pas d’allergie », a-t-il précisé en soulignant que le risque zéro n’existe pas, à condition que les médecins fassent leur travail. La famille ne compte pas baisser les bras. Des plaintes seront déposées auprès des instances concernées.



    Par Djamila Kourta
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