Je poste , ici en intégralité, l'histoire de Yazid Sebag, sans doutes un des rares patrons d'origines algeriennes qui a pu gravir les échelons et étre à la téte d'une groupe hautes technologie dans la Défense. Je vous invite à son parcours....il est trés riche en enseignements.
Ps : Ce post est dédicacé à mon ami Djnaoub que je lui souhaite bonne chance et un aussi beau parcours que Yazid.
Ps : Ce post est dédicacé à mon ami Djnaoub que je lui souhaite bonne chance et un aussi beau parcours que Yazid.
Portrait du président de CS Communication & Systèmes Yazid Sabeg
Ce spécialiste de la défense a gravi les échelons du pouvoir en dépit des préjugés raciaux. Décidé à être une force de proposition, pas un alibi.
Yazid Sabeg, président de CS, l’ancienne Compagnie des signaux, une entreprise cotée, spécialisée dans la haute technologie, les systèmes de défense et le cryptage. Un patron atypique, parvenu aux marches des plus hautes responsabilités politiques. Emblématique, la réussite de Yazid Sabeg lui vaut, en effet, autant d’amis que d’ennemis. Il est le seul Français « issu de l’immigration », « d’origine algérienne », à la tête d’une grande entreprise. Lui-même déteste ces circonlocutions linguistiques qui marquent la différence : « Combien de générations faudra-t-il pour que l’on cesse de rappeler les origines des uns et des autres ? » dit-il. Il se définit tout simplement comme un « Français arabe », chef d’entreprise et citoyen passionné. Aîné d’une famille de 13 enfants, il est né dans les Aurès, à Guelma, en janvier 1950, alors que l’Algérie était française. Son père, Khemessi, avait participé aux manifestations de Sétif, en mai 1945, au cours desquelles les musulmans d’Algérie qui avaient fait la guerre contre l’Allemagne nazie réclamaient l’égalité et la citoyenneté française. La réponse fut un massacre, fondateur de l’identité algérienne. Mais la famille ne connaîtra pas directement la guerre. Car ses parents débarquent en France en 1952, avant le déclenchement des hostilités. Khemessi Sabeg aime la mère patrie et veut s’y intégrer. Il devient manutentionnaire à Lille. La suite est une manière de roman à l’eau de rose où se mêlent la promotion républicaine et l’action des militants chrétiens. Ceux-ci prennent en charge la famille Sabeg, dont les enfants seront soutenus et orientés vers les bonnes filières. En particulier Yazid, qui fera ses études chez les jésuites. Il en gardera le goût pour la casuistique, le sens de la diplomatie ainsi qu’une capacité réelle à contourner les obstacles sans perdre de vue son objectif : réussir. Etudiant au lycée Faidherbe à Lille, puis à l’université Paris I, il y montre d’excellentes capacités intellectuelles ainsi qu’une énorme force de travail. Mais Yazid Sabeg est en même temps un séducteur-né, et c’est sans doute cela qui fera la différence : toute sa vie, il saura transformer ainsi le handicap de ses origines en atout – auprès de ceux, nombreux, qui croient en une France plus ouverte et sont prêts à lui donner un coup de main. Ce sera le cas, en premier lieu, de Raymond Barre, que Yazid Sabeg a eu comme professeur d’économie à l’université à Lille et qui est devenu son mentor, à Paris comme à Bruxelles, où il a été commissaire européen avant de devenir Premier ministre. Attiré par la politique. Son doctorat de sciences économiques en poche, Yazid Sabeg entre à l’Union des banques arabes en France (Ubaf), une filiale du Crédit lyonnais. Sa connaissance de l’arabe lui ouvrira aussi les portes du Centre de prospective du ministère des Affaires étrangères, sur proposition de Michel Jobert, alors patron du Quai d’Orsay. Il y croisera, entre autres, Jean-Louis Gergorin, ce proche de Jean-Luc Lagardère, devenu directeur de la stratégie d’EADS. Mais c’est à la Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale (Datar), où il est chargé de mission auprès de Jérôme Monod, que le jeune Sabeg va apprendre « les rouages du fonctionnement de l’Etat et du monde politique ». Un monde qui l’attire. Mais il est en même temps convaincu que seule la réussite dans le business – avec l’aisance financière qu’elle implique – sera la garantie d’une vraie intégration. Sabeg, qui a soutenu sa thèse de doctorat sur le pétrole et l’énergie, devient conseiller du président de Spie-Batignolles, qui appartient au groupe Schneider. Il convainc son patron de créer une société de conseil, Enerfinance, dont il sera le PDG, de 1981 à 1988. Yazid Sabeg vient d’avoir 30 ans, il est mince, beau garçon. Il se marie à Ingrid Larsen, une Danoise qui lui donnera trois enfants : Karim, Mehdi et Camille. Il a déjà tous les attributs de la réussite. Il noue des liens dans différents milieux, fréquente des journalistes. Mais il veut aller plus loin. Conquérir la liberté, c’est quitter le salariat. Pas facile, lorsqu’on n’a pas de fortune. Il va se frotter alors à deux financiers parmi les plus en vue du moment : Vincent Bolloré, dont il devient le conseiller personnel, puis Jean-Charles Naouri, comme directeur général de son holding Euris. Il restera en bons termes avec Naouri mais finira par éviter Bolloré. Très vite, il pense que son tour est venu et crée Quadral, un fonds d’investissement qu’il contrôle, par la magie d’une cascade de holdings, avec le soutien de plusieurs banques, de capitaux d’Abou Dhabi et d’Alain Dumesnil, un banquier français exilé en Suisse avec lequel il a, entre autres, pris le contrôle de la station de ski de Flaine. Bilan flatteur. En 1991, Quadral lance une OPA sur la Compagnie des signaux, et la réussit. Voici Yazid Sabeg patron d’une entreprise cotée, sans avoir demandé ni obtenu 1 franc d’argent public. Il la restructure alors à marche forcée, vend son activité ferroviaire historique à Finmeccanica qui se retire du capital, ainsi qu’une partie des activités de défense à Lagardère. En revanche, il se renforce dans le domaine du cryptage et les systèmes de défense pour l’aéronautique et l’espace. Au total, des milliers d’emplois d’ingénieurs créés, un chiffre d’affaires multiplié par cinq : quatorze ans plus tard, son bilan est flatteur, en dépit de l’effondrement des cours subi en 2001, au même titre que l’ensemble des valeurs techno. Mais, depuis, l’accident boursier a été effacé, et Yazid Sabeg est un homme riche qui s’interroge sur ce qu’il fera de la seconde moitié de sa vie… Car cette réussite exemplaire cache (mal) de profondes blessures. Celles-ci ont été évoquées, pour la première fois publiquement, par François Roussely, son frère en maçonnerie et l’un de ses mentors, lorsqu’il lui remet la Légion d’honneur, en 1999, dans le cadre prestigieux de l’hôtel des Invalides. Directeur de cabinet d’Alain Richard, ministre de la Défense, Roussely a été secrétaire général du ministère, en 1991, et il a mesuré, à l’époque, les obstacles mis devant Sabeg pour prendre le contrôle de la Compagnie des signaux et pour obtenir son habilitation secret-défense. Tout simplement parce que Yazid Sabeg est arabe.
Ce spécialiste de la défense a gravi les échelons du pouvoir en dépit des préjugés raciaux. Décidé à être une force de proposition, pas un alibi.
Yazid Sabeg, président de CS, l’ancienne Compagnie des signaux, une entreprise cotée, spécialisée dans la haute technologie, les systèmes de défense et le cryptage. Un patron atypique, parvenu aux marches des plus hautes responsabilités politiques. Emblématique, la réussite de Yazid Sabeg lui vaut, en effet, autant d’amis que d’ennemis. Il est le seul Français « issu de l’immigration », « d’origine algérienne », à la tête d’une grande entreprise. Lui-même déteste ces circonlocutions linguistiques qui marquent la différence : « Combien de générations faudra-t-il pour que l’on cesse de rappeler les origines des uns et des autres ? » dit-il. Il se définit tout simplement comme un « Français arabe », chef d’entreprise et citoyen passionné. Aîné d’une famille de 13 enfants, il est né dans les Aurès, à Guelma, en janvier 1950, alors que l’Algérie était française. Son père, Khemessi, avait participé aux manifestations de Sétif, en mai 1945, au cours desquelles les musulmans d’Algérie qui avaient fait la guerre contre l’Allemagne nazie réclamaient l’égalité et la citoyenneté française. La réponse fut un massacre, fondateur de l’identité algérienne. Mais la famille ne connaîtra pas directement la guerre. Car ses parents débarquent en France en 1952, avant le déclenchement des hostilités. Khemessi Sabeg aime la mère patrie et veut s’y intégrer. Il devient manutentionnaire à Lille. La suite est une manière de roman à l’eau de rose où se mêlent la promotion républicaine et l’action des militants chrétiens. Ceux-ci prennent en charge la famille Sabeg, dont les enfants seront soutenus et orientés vers les bonnes filières. En particulier Yazid, qui fera ses études chez les jésuites. Il en gardera le goût pour la casuistique, le sens de la diplomatie ainsi qu’une capacité réelle à contourner les obstacles sans perdre de vue son objectif : réussir. Etudiant au lycée Faidherbe à Lille, puis à l’université Paris I, il y montre d’excellentes capacités intellectuelles ainsi qu’une énorme force de travail. Mais Yazid Sabeg est en même temps un séducteur-né, et c’est sans doute cela qui fera la différence : toute sa vie, il saura transformer ainsi le handicap de ses origines en atout – auprès de ceux, nombreux, qui croient en une France plus ouverte et sont prêts à lui donner un coup de main. Ce sera le cas, en premier lieu, de Raymond Barre, que Yazid Sabeg a eu comme professeur d’économie à l’université à Lille et qui est devenu son mentor, à Paris comme à Bruxelles, où il a été commissaire européen avant de devenir Premier ministre. Attiré par la politique. Son doctorat de sciences économiques en poche, Yazid Sabeg entre à l’Union des banques arabes en France (Ubaf), une filiale du Crédit lyonnais. Sa connaissance de l’arabe lui ouvrira aussi les portes du Centre de prospective du ministère des Affaires étrangères, sur proposition de Michel Jobert, alors patron du Quai d’Orsay. Il y croisera, entre autres, Jean-Louis Gergorin, ce proche de Jean-Luc Lagardère, devenu directeur de la stratégie d’EADS. Mais c’est à la Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale (Datar), où il est chargé de mission auprès de Jérôme Monod, que le jeune Sabeg va apprendre « les rouages du fonctionnement de l’Etat et du monde politique ». Un monde qui l’attire. Mais il est en même temps convaincu que seule la réussite dans le business – avec l’aisance financière qu’elle implique – sera la garantie d’une vraie intégration. Sabeg, qui a soutenu sa thèse de doctorat sur le pétrole et l’énergie, devient conseiller du président de Spie-Batignolles, qui appartient au groupe Schneider. Il convainc son patron de créer une société de conseil, Enerfinance, dont il sera le PDG, de 1981 à 1988. Yazid Sabeg vient d’avoir 30 ans, il est mince, beau garçon. Il se marie à Ingrid Larsen, une Danoise qui lui donnera trois enfants : Karim, Mehdi et Camille. Il a déjà tous les attributs de la réussite. Il noue des liens dans différents milieux, fréquente des journalistes. Mais il veut aller plus loin. Conquérir la liberté, c’est quitter le salariat. Pas facile, lorsqu’on n’a pas de fortune. Il va se frotter alors à deux financiers parmi les plus en vue du moment : Vincent Bolloré, dont il devient le conseiller personnel, puis Jean-Charles Naouri, comme directeur général de son holding Euris. Il restera en bons termes avec Naouri mais finira par éviter Bolloré. Très vite, il pense que son tour est venu et crée Quadral, un fonds d’investissement qu’il contrôle, par la magie d’une cascade de holdings, avec le soutien de plusieurs banques, de capitaux d’Abou Dhabi et d’Alain Dumesnil, un banquier français exilé en Suisse avec lequel il a, entre autres, pris le contrôle de la station de ski de Flaine. Bilan flatteur. En 1991, Quadral lance une OPA sur la Compagnie des signaux, et la réussit. Voici Yazid Sabeg patron d’une entreprise cotée, sans avoir demandé ni obtenu 1 franc d’argent public. Il la restructure alors à marche forcée, vend son activité ferroviaire historique à Finmeccanica qui se retire du capital, ainsi qu’une partie des activités de défense à Lagardère. En revanche, il se renforce dans le domaine du cryptage et les systèmes de défense pour l’aéronautique et l’espace. Au total, des milliers d’emplois d’ingénieurs créés, un chiffre d’affaires multiplié par cinq : quatorze ans plus tard, son bilan est flatteur, en dépit de l’effondrement des cours subi en 2001, au même titre que l’ensemble des valeurs techno. Mais, depuis, l’accident boursier a été effacé, et Yazid Sabeg est un homme riche qui s’interroge sur ce qu’il fera de la seconde moitié de sa vie… Car cette réussite exemplaire cache (mal) de profondes blessures. Celles-ci ont été évoquées, pour la première fois publiquement, par François Roussely, son frère en maçonnerie et l’un de ses mentors, lorsqu’il lui remet la Légion d’honneur, en 1999, dans le cadre prestigieux de l’hôtel des Invalides. Directeur de cabinet d’Alain Richard, ministre de la Défense, Roussely a été secrétaire général du ministère, en 1991, et il a mesuré, à l’époque, les obstacles mis devant Sabeg pour prendre le contrôle de la Compagnie des signaux et pour obtenir son habilitation secret-défense. Tout simplement parce que Yazid Sabeg est arabe.
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