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La colonisation à la recherche «d’adoucissants»

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  • La colonisation à la recherche «d’adoucissants»

    On aurait pu comprendre des "excuses" pour l’interdiction faite aux Algériens, à l’époque de la colonisation, de se promener dans les quartiers réservés aux Français comme la rue Michelet (aujourd’hui rue Didouche Mourad)...

    Excuses. Repentance. Pardon. Trois mots, trois significations différentes. Trois mots qui illustrent toute la richesse et la subtilité de la langue française. Quand un Français dont c’est la langue maternelle, choisit l’un des trois mots, quand il s’exprime, il n’y a aucune place au doute, il dit bien ce qu’il veut dire. Quand l’historien français Benjamin Stora parle d’excuses que devrait demander la France à l’Algérie pour toutes les exactions commises lors de la colonisation, il ne faut surtout pas croire qu’il «nous fait des fleurs», que Sarkozy, le chef de l’Etat français, ne veut pas faire en refusant la repentance officiellement comme il l’a déclaré lors de sa dernière visite en Algérie. Ce qu’il nous faut par contre retenir c’est que les deux personnages ont l’air de se répartir les rôles pour rabaisser au plus bas le niveau de notre exigence qui est, qui doit être et ne peut être autre chose, face aux abominables crimes commis au nom de la France contre les Algériens durant un siècle et demi, que le pardon. C’est ce qu’a demandé le précédent chef de l’Etat français, Jacques Chirac, aux juifs. Pas des excuses ou de la repentance mais bien de pardon. Alors pourquoi, s’agissant de l’Algérie, cette «glissade» de palier en palier pour entendre la «coqueluche» de certains intellectuels algériens s’ériger en redresseur de torts et «exiger» de son pays, la France, des excuses au peuple algérien? Sur quelle cotation peut-il s’appuyer pour différencier les victimes juives que la France n’a pas protégées du nazisme durant la Seconde Guerre mondiale, et les victimes algériennes assassinées des mains de Français? Cette récente exigence d’«excuses» sortie récemment en marge de la session conjointe de concertation entre le Cnes algérien et son équivalent français le Cese, est loin d’être innocente ou simple inadvertance dans l’utilisation des mots. Elle est de la même veine que ce déni de ce même historien du million et demi de martyrs algériens quand il déclare: «La guerre (d’Algérie) a causé la perte cruelle de centaines et de centaines d’Algériens». Benjamin Stora est français grâce au fameux décret Crémieux. De ce fait, il a sa propre vision des événements et des hommes. Personne n’a le droit de lui faire grief de mettre toute sa compétence au service de ses objectifs. C’est tout à son honneur. Il a le droit d’utiliser toutes les subtilités de langage qu’il juge appropriées pour ce faire. Comme c’est notre devoir de ne pas le laisser dénaturer des faits historiques que ni lui ni aucun autre ne pourront effacer de notre mémoire. Peut-on s’excuser, c’est-à-dire formuler des regrets, seulement des regrets quand on a enfumé des populations entières? Quand on a brûlé au napalm des villages entiers? Quand on a guillotiné des êtres humains qui demandaient seulement que l’on respectât leur dignité dans leur propre pays? Quand on en a déporté d’autres dans des bagnes si affreux et si lointains qu’ils n’en sont jamais revenus? Quand enfin on a procédé à la punition collective et assassiné sauvagement des innocents? On peut regretter une erreur mais jamais, au grand jamais, la volonté d’établir un système bien pensé au même titre que l’ont été le nazisme et l’apartheid. Le colonialisme a été abominable pour tous ceux qui l’ont subi. «Comptabiliser», comme le fait Stora, les victimes algériennes en «centaines» pour une occupation qui a duré un siècle et demi, c’est réduire le bilan à une ou deux victimes par an. Si cela avait été l’oeuvre d’un ignorant, celui-ci aurait eu droit à toute notre indulgence. Mais ce n’est pas le cas. On aurait pu comprendre des «excuses» pour l’interdiction faite aux Algériens, à l’époque de la colonisation, de se promener dans les quartiers réservés aux Français comme la rue Michelet (aujourd’hui rue Didouche Mourad). Ou celle de ne pas planter leurs parasols dans les plages de leur pays mais réservées aux Français. Pour de telles bêtises, même racistes, on aurait pu comprendre le recours aux «excuses», mais pas pour des massacres en masse d’innocents qui plus est, chez eux. Voyez-vous, M.Stora, l’acculturation programmée par la colonisation n’a pas eu l’effet attendu. Les Algériens ont gardé intacte leur capacité de discernement pour vous dire aujourd’hui que la France doit aux Algériens tout à la fois des excuses, la repentance et le pardon. Nous aspirons tellement à tourner la page et entretenir des relations refondées qu’il est presque sûr que les anciens colonisés que nous sommes, les acceptions. Sincèrement. Sans tricherie. Sans mots édulcorés.

    ([email protected])
    Zouhir MEBARKI

    L'Expression
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