Le militant mécène dévoué de la révolution
« Quand la cause est juste, l’avenir n’est pas insulté. » Boualem Bessaïh (De l’Emir à Chamyl)
Un film sur Mandela est en train d’être produit par les Américains. Aziz leur avait proposé un témoignage de Si Mustafa qui l’avait hébergé durant de longs mois à Oujda. Mustapha disait de Abane « Cette force de la nature était d’une extrême intelligence. Un homme politique accompli et respectable très jalousé par ses pairs. » La mort ne surprend point le sage. Il est toujours prêt à partir
Mustafa Bouabdallah dit Belhadj, né le 18 mars 1906 à Souahlia, près de Ghazaouet, est décédé il y a quelques jours au Maroc, où il a été inhumé. A Oujda, où il a vécu, les gens lui vouaient estime et respect. Issu d’une grande famille de propriétaires terriens originaires de Mascara, Mustafa « était brave et généreux, toujours disponible, sévère mais juste », confie son plus jeune fils Mohamed. On ne peut oublier les grandes qualités humaines de cet homme poli qui utilisait parfois son humour pudique et bienveillant qui lui permettait, quand il voulait changer de sujet, de se retirer derrière l’armure sans défaut de sa constante bonne éducation. « C’était plus qu’un mécène au service d’une cause juste », témoigne l’un de ses vieux amis Abdelkrim Zaoui, qui l’a longtemps côtoyé. Zaoui était le commissaire politique du parti à Oujda, dont on connaît la place prépondérante dans le cours de la lutte armée hors des frontières. Zaoui raconte que les intellectuels algériens, étudiants notamment, établis au Maroc n’étaient pas tous chauds pour rejoindre la révolution.
« Certains y sont venus presque contre leur gré. D’autres par contre étaient enthousiasmés, comme Bouteflika qui a dû faire le pied de grue durant des semaines pour être incorporé. Je suis à l’origine de son intégration parmi ses compagnons… » Hadj Mustafa a fait don de ses biens, soutenu financièrement la lutte et même servi de médiateur entre les dirigeants algériens et le palais, où Mustafa, très respecté, avait ses entrées. Et lorsque les dissensions entre « frères » se faisaient jour, c’est lui qui dénouait les fils. Il avait mis toutes ses fermes à la disposition de la révolution. De nombreuses têtes illustres y ont fait un passage ou y ont séjourné. Luis Cabral, Nelson Mandela, Abane Ramdane, Krim Belkacem, Boudiaf, Boumediène, Neto, Boussouf, Ben Bella, Merbah, Bouteflika, Benbarka et bien d’autres. Frantz Fanon a même installé, à la ferme Deroy, le premier hôpital militaire de l’ALN, où les djounoud venaient soigner leurs blessures physiques et morales. Et le psychiatre qu’il était savait trouver les thérapies nécessaires pour retaper le moral des troupes galvanisées ou soulager celui des êtres plus vulnérables traumatisés. Mustafa, maître des lieux, veillait au confort et à la sécurité de ses hôtes, « les troupes rentraient vers 1h. C’est lui qui nous ouvrait la porte et nous servait à manger. Au petit matin, il était déjà parti pour contrôler ses terres », se souvient l’ancien officier du MALG, Sahli Tahar dit Dris, qui a fait partie de la promotion Ben M’hidi constituée de 74 membres, dont Kasdi Merbah, Yazid Zerhouni, Temmar et bien d’autres.
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