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La névrose laïque

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  • La névrose laïque

    Un texte à lire pour comprendre certaines choses.

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    "La névrose laïque"

    Les Musulmans qui osent afficher trop visiblement leur religion sont aujourd’hui désignés comme des « ennemis de la République ». Porter un voile dans un lycée ou lire le Coran à l’ANPE c’est, paraît-il, mettre en danger cette « République une et indivisible ». Le terrorisme dit « islamique » et la situation internationale viennent rajouter au trouble et au malaise du débat autour du voile mais il ne faut pas s’y tromper, c’est avant tout un problème franco-français. Le mauvais procès que l’on fait aujourd’hui aux Musulmans n’est pas nouveau, loin de là, c’est celui que ce pays a fait aux Catholiques depuis plus de trois cents ans. En 1793, on guillotinait à tours de bras les prêtres et les religieuses, eux aussi accusés de « machinations contre la République ». Cette République qui souhaite « libérer » aujourd’hui les Musulmanes, à coups de lois, est aussi celle qui, il y a trois cents ans, arrachait les bonnes soeurs des monastères, cette foisci, à coups de couteau tout en scandant les mêmes cris de « Liberté ! ». Dans le langage des journalistes « être laïque » signifie « être athée » ! La France n’a jamais pu digérer l’époque de la Terreur, elle fantasme toujours sur la religion, elle en a une trouille bleue.

    Toute personne religieuse est suspecte…

    Soupçonnée de la mettre en danger. Quelques foulards portés un peu trop fièrement (ostensiblement ?) par des gamines dans les écoles publiques ont réussi à mettre tout ce pays en émoi. La Parlement a été sommé de parer à la menace religieuse. Le délire est allé crescendo au fil des semaines jusqu’à établir une taxinomie de l’animal religieux : taille du foulard, niveau de pilosité, vêtements atypiques… C’est la nouvelle Inquisition ! Et elle est laïque. Elle traque de l’ « intégriste ». L’intégriste n’est jamais, bien sûr, l’engagé politique, l’homosexuel militant ou la féministe, c’est toujours l’individu religieux, le vieux démon de la République…

    Catholique, Juif ou Musulman, l’intégriste est toujours accusé, paradoxalement, de ne pas s’intégrer. Il est sommé de faire sa profession
    de foi : « je préfère la République à Dieu » et de lui donner des marques d’allégeance en enlevant son voile, en rasant sa barbe ou en applaudissant des deux mains quand on déniche en rase campagne un prêtre défroqué. La religion est une maladie honteuse en France. Jamais un homme politique, de droite comme de gauche, n’ose se déclarer catholique lors d’un débat public surtout quand il s’agit de « laïcité », même l’héritier des Démocrates Chrétiens, François Bayrou, peine à avouer qu’il a la foi. On dirait quelquefois que l’Islam est la seule religion encore vivante dans cette nation… Le dialogue des Carmélites appellerait aujourd’hui le dialogue des Musulmanes. Car si les Musulmans sont montrés du doigt aujourd’hui c’est parce qu’ils revendiquent fièrement leur religion et l’affichent publiquement en tant que valeur. Une chose que ne font plus, depuis longtemps, les Catholiques pourtant majoritaires en France. Les bonnes soeurs peuvent encore porter le voile, elles, mais on dirait que c’est aussi en guise de bâillon. Silence total. Et pourtant les débats obsessionnels autour du voile, les ricanements et les offuscations feintes autour de la lapidation ou du mariage forcé des Musulmanes devraient rappeler aux Catholiques tous les sarcasmes qu’ils ont eux mêmes essuyés depuis des années sur l’eucharistie, la virginité ou la vie sexuelle des prêtres.

    La République, pour ne pas dire l’athéisme, est devenu la nouvelle religion. Le glissement de sens qui s’est opéré ses derniers temps est révélateur. Jacques Chirac parle de la laïcité comme d’ « une valeur » et dans le langage courant des journalistes « être laïque » signifie maintenant être athée. La religion n’est plus tolérée qu’en tant que gri-gri païen, comme un vieux reste de superstition, une espèce de porte-bonheur. La Musulmane dévoilée a le droit à ses mains de Fatima, le Catholique non pratiquant a le droit de porter la médaille de baptême de sa grand-mère et le Juif athée son étoile de David autour du cou. Que vaut une République qui vacille devant quelques fichus, qui se sent obligée de légiférer à tout va et de re-claironner, à tous, ses pseudo-valeurs ? La plupart des pays européens se marrent en regardant la France empêtrée dans son éternelle névrose laïque. Les Anglo-Saxons ont même des fous rires. Bush, malgré sa politique internationale antiarabe, n’a pas interdit les voiles dans les écoles américaines et Tony Blair n’est pas pris de sueurs froides en voyant s’élever les minarets des mosquées en plein Londres. La religion ne se résume pas à une affaire de politique comme le pensent beaucoup de Français et les nations anglo-saxonnes absorbent la diversité et l’originalité de leurs citoyens, immigrés ou pas, beaucoup plus facilement que la France et sa République laïque sacrée. Tariq Ramadan, stigmatisé en France, vient d’être, très simplement, invité à occuper une place de professeur dans une université américaine catholique. La presse française, fidèle à son obsession du tout-Etat, s’est grotesquement empressée d’y voir un rapprochement entre Washington et les Frères Musulmans.

    Beaucoup de Musulmans savent que vivre sa foi aux Etats-Unis est, paradoxalement, plus facile qu’en France ; c’est même un véritable droit constitutionnel. Il faut se demander pourquoi. Sûrement parce les Français n’ont jamais su choisir entre la Liberté et l’Egalité. La révolution américaine s’est fondée sur la liberté de l’individu alors que la révolution française s’est fondée sur la notion d’égalité et ce pays reste encore aujourd’hui empêtré dans ses valeurs d’égalité. Qu’est-ce que cette laïcité qu’on nous ressert aujourd’hui ? Une véritable pathologie de l’égalité. Ce n’est pas au nom de la Liberté qu’on souhaite interdire les kippas, les voiles et les soi disantes grandes croix à l’école, c’est bien au nom de l’égalité, un totalitarisme de l’égalité.

    Si les jeunes Musulmanes doivent se dévêtir de leur voile, ce n’est pas en vertu de la Liberté (la liberté, bien sûr, c’est de pouvoir porter un voile) mais pour devenir les égales du citoyen français type, ce fantasme de la République de Robespierre. Toutes les revendications auxquelles l’Etat français prête attention relèvent toujours d’une demande d’égalité et jamais d’une demande de véritable liberté, une liberté qui n’est d’ailleurs n’est jamais assumée. Les slogans de type « j’ai le droit à la différence » signifient toujours « j’ai le droit de devenir identique aux autres ». Ainsi les homosexuels demandent à pouvoir se marier ou à avoir des enfants, en dépit des traditions françaises et même de la Nature. Leurs revendications ne mettent pas en danger la République car ils veulent devenir comme le citoyen moyen. Les «Ni putes, ni soumises » sont, de manière similaire, adulées par cette République : elles sont des Musulmanes intégrées, c’est-à-dire défaites de toute originalité, le juste milieu entre la **** et la femme au foyer : la femme française banale.

    Les Catholiques français devraient comprendre que cette affaire de voile est aussi leur affaire. Ce fanatisme de l’égalité pousserait presque ce pays à en vouloir aux Noirs de porter trop ostensiblement la couleur de leur peau ou à un Portugais de faire du prosélytisme parce qu’il se prénomme « Jésus ». Dans ce débat sur la laïcité, la Gauche en est pratiquement venue à prôner le retour de l’uniforme à l’école : tous égaux et identiques, gardant nos signes particuliers bien cachés à l’intérieur de la blouse. Les Juifs vont-ils être obligés de cacher leur kippa sous une casquette Nike et les Musulmanes de planquer leur voile sous des dreadlocks afin de porter l’uniforme en vigueur de la République ? Oui, car les dreadlocks, les bagues à tête de mort et les badges « touche-pas-à-monpote » ne gênent personne, bien qu’ils soient affreusement ostentatoires : ils ont été décrétés officieusement « signes de la République », des signes sensés être inoffensifs puisqu’ils ne relèvent pas de la religion. Il y a vingt ans, les Catholiques défilaient dans la rue pour défendre l’école libre, aujourd’hui les Musulmans ont pris le relais… Rien n’a changé dans ce pays et les Catholiques français qui ont encore peur de l’Islam devraient comprendre que cette affaire de voile est aussi leur affaire : l’affaire de toutes les religions. Les jeunes filles qui manifestent en arborant sur leurs foulards les couleurs bleu, blanc, rouge de la République se trompent. Cette République ne les a jamais aimées, non pas parce qu’elles sont Arabes ou filles d’immigrés mais parce qu’elles sont Musulmanes, c’est-à-dire parce qu’elles persistent à croire…

    Anne-Sophie Benoit

    source:

    http://www.laverite.com/n4.pdf
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