Chronique (Dimanche 12 Avril 2009)
Les dangers d’une “victoire totale”
Par :Mustapha Hammouche
Lu : (1858 fois)
Les dangers d’une “victoire totale”
Par :Mustapha Hammouche
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Il fallait manquer à ce point d’assurance pour tout faire ainsi dans l’excès ! Loin d’être “forte et sereine”, l’Algérie du troisième mandat s’est révélée fragile et agitée. Pour tenter d’authentifier un résultat pourtant assuré, on fit tant et plus. Jusqu’à la démesure.
En s’octroyant des taux inconcevables en démocratie, le pouvoir, au lieu de se satisfaire de la victoire, a préféré délivrer le message de la prépotence totale. Plus qu’une majorité, il lui fallait inventer un enthousiasme électoral et s’offrir un triomphe intégral qui justifieront une autorité sans conteste et sans partage. Un score de 90%, soutenu par les trois-quarts de participation, servirait à annihiler la virtualité même d’une opposition, sinon groupusculaire.
La révision cavalière de la Constitution et les quatre millions de signatures préfiguraient déjà une campagne conçue pour submerger toute expression d’une opinion contraire au dessein de perpétuation du régime.
Le luxe de moyens matériels et l’aplomb verbal visaient à compenser la carence de moyens politiques, inhérente à un régime fondé sur le clientélisme. Le scrutin se devait de traduire, dans les chiffres, l’occupation de terrain par déplacement de populations et par envahissement des espaces publicitaires et médiatiques.
Cette tactique de l’éteignoir est une forme de violence en ce qu’elle donne un sentiment de toute-puissance aux partisans du candidat du pouvoir et tend à produire un effet démoralisateur sur ses adversaires.
Les premiers se voient investis d’un privilège d’arrogance qu’ils sont enclins à conserver au-delà du jubilé de la victoire. C’est ce droit de titiller le “vaincu” qui, le jour de l’annonce du résultat, autorisait un dirigeant de campagne à dépêcher une mission punitive contre le siège du RCD.
Les seconds, on ne leur inflige pas seulement un statut de perdants ; on leur dénie toute existence politique. Nous ne sommes plus dans un schéma d’affrontement démocratique, mais dans un cas de fracture communicationnelle. La méthode est porteuse de risques, parce que le cycle violence-réconciliation, qui semble fonder la longévité du système, n’est pas reconductible à volonté.
Le plus grave est que l’image d’emprise totale du pouvoir ôte au citoyen qui découvre ces pratiques toute illusion sur sa capacité à influer sur sa condition. Constatant qu’il n’y a pas d’alternative démocratique à l’adhésion au pouvoir en place, il ira s’inventer des formes d’expression extra-institutionnelles.
De son côté, le pouvoir, qui semble croire en sa seule raison, pourrait être tenté de n’y opposer que la répression ou la manipulation.
Au-delà de la manière dont elle a été acquise, le bilan du pouvoir ne justifie pas sa victoire. D’ailleurs, lui-même n’en a pas fait son cheval de bataille, la plupart de ses projets ayant fini dans l’impasse. Et comme, en matière de gouvernance, il n’y pas de miracle, il a des chances que les mêmes déboires socioéconomiques soient réédités. Il faudra bien alors organiser la communication avec la société qui en pâtira.
Sans opposition, sans syndicalisme et sans société civile autonome ? Il suffit de se rappeler les désastres historiques causés par la douce tentation de transformer des pays entiers en comités de soutien pour s’en inquiéter.
En s’octroyant des taux inconcevables en démocratie, le pouvoir, au lieu de se satisfaire de la victoire, a préféré délivrer le message de la prépotence totale. Plus qu’une majorité, il lui fallait inventer un enthousiasme électoral et s’offrir un triomphe intégral qui justifieront une autorité sans conteste et sans partage. Un score de 90%, soutenu par les trois-quarts de participation, servirait à annihiler la virtualité même d’une opposition, sinon groupusculaire.
La révision cavalière de la Constitution et les quatre millions de signatures préfiguraient déjà une campagne conçue pour submerger toute expression d’une opinion contraire au dessein de perpétuation du régime.
Le luxe de moyens matériels et l’aplomb verbal visaient à compenser la carence de moyens politiques, inhérente à un régime fondé sur le clientélisme. Le scrutin se devait de traduire, dans les chiffres, l’occupation de terrain par déplacement de populations et par envahissement des espaces publicitaires et médiatiques.
Cette tactique de l’éteignoir est une forme de violence en ce qu’elle donne un sentiment de toute-puissance aux partisans du candidat du pouvoir et tend à produire un effet démoralisateur sur ses adversaires.
Les premiers se voient investis d’un privilège d’arrogance qu’ils sont enclins à conserver au-delà du jubilé de la victoire. C’est ce droit de titiller le “vaincu” qui, le jour de l’annonce du résultat, autorisait un dirigeant de campagne à dépêcher une mission punitive contre le siège du RCD.
Les seconds, on ne leur inflige pas seulement un statut de perdants ; on leur dénie toute existence politique. Nous ne sommes plus dans un schéma d’affrontement démocratique, mais dans un cas de fracture communicationnelle. La méthode est porteuse de risques, parce que le cycle violence-réconciliation, qui semble fonder la longévité du système, n’est pas reconductible à volonté.
Le plus grave est que l’image d’emprise totale du pouvoir ôte au citoyen qui découvre ces pratiques toute illusion sur sa capacité à influer sur sa condition. Constatant qu’il n’y a pas d’alternative démocratique à l’adhésion au pouvoir en place, il ira s’inventer des formes d’expression extra-institutionnelles.
De son côté, le pouvoir, qui semble croire en sa seule raison, pourrait être tenté de n’y opposer que la répression ou la manipulation.
Au-delà de la manière dont elle a été acquise, le bilan du pouvoir ne justifie pas sa victoire. D’ailleurs, lui-même n’en a pas fait son cheval de bataille, la plupart de ses projets ayant fini dans l’impasse. Et comme, en matière de gouvernance, il n’y pas de miracle, il a des chances que les mêmes déboires socioéconomiques soient réédités. Il faudra bien alors organiser la communication avec la société qui en pâtira.
Sans opposition, sans syndicalisme et sans société civile autonome ? Il suffit de se rappeler les désastres historiques causés par la douce tentation de transformer des pays entiers en comités de soutien pour s’en inquiéter.
M. H.
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