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Election Présidentielle:Retour sur un scrutin pas comme les autres

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    Election présidentielle : Retour sur un scrutin pas comme les autres
    par Ghania Oukazi
    Bouteflika a été le seul candidat qui a su transformer les échecs de sa gestion en des atouts électoraux pour se faire réélire à la majorité écrasante.

    Il l'a fait tout au long de sa campagne électorale à chaque fois qu'il se trouvait face aux foules. Il leur disait qu'il n'avait rien à leur promettre, qu'il ne leur apportait rien de nouveau, mais qu'il incarnait la continuité. Mieux, il lui est arrivé à plusieurs reprises d'avouer publiquement qu'en dix ans de règne, il reste encore de nombreux problèmes à résoudre, de logement, d'emploi, de pouvoir d'achat, d'économie informelle, de corruption, de drogue, de criminalité... Il a demandé au peuple, en plus de bien le réélire, de l'aider à les régler. «Parce que seul, je ne peux rien faire !», martelait-il. Il a reconnu que les attentes économiques et sociales du peuple sont importantes et qu'il tient à les régler en injectant 150 milliards de dollars. Il avait pris quand même ses devants en ayant décidé de ce nouveau montant peu avant l'élection présidentielle du 9 avril dernier, tout autant que de l'augmentation du SNMG, des bourses d'études et de l'effacement des dettes des agriculteurs.

    Au temps où un vent doux et prometteur de démocratie soufflait sur le pays, où les libertés bourgeonnaient, où la guerre contre le terrorisme était menée par des corporations entières tenaces et résolues, en ces temps, la continuité ne pouvait être soutenue parce qu'elle impliquait la pérennisation d'un système politique considéré par l'opinion publique mafieux, obsolète et vieillissant. Aujourd'hui, les termes semblent changer de définition à la force qu'a le pouvoir en place à le faire. Bouteflika a en tout cas réussi à faire de la continuité, un slogan rassurant, porteur et gagnant, même si dans cela, on peut y déceler son intention de ne rien changer à ses méthodes de gestion et à ses choix des hommes.

    Bien que réélu jeudi dernier à la majorité écrasante pour un troisième mandat présidentiel, il peut estimer qu'il n'a de compte à rendre à personne en matière de promesses parce qu'il n'en a pas fait véritablement. Certes, il a promis la construction de 1,5 million de logements et de créer 3 millions d'emplois sur les cinq ans à venir. Mais en fait, ce sont là les restes à réaliser des projets initiés au cours de ses deux mandats présidentiels. En plus, il sait que personne ne peut faire déjà le comptage d'un million de logements qu'il avait promis de créer durant les cinq dernières années. L'on doit tous se contenter de statistiques officielles sans pour autant pouvoir les démentir. C'est d'ailleurs, ce qu'il appelle la continuité. Bouteflika a la chance d'être conforté dans sa gestion par des économistes qui, en d'autres temps, lui auraient apporté sans difficulté et sans hésitation, la contradiction dans toute sa splendeur.



    «Riah ! (Assis !)»



    Le Conseil national économique et social le faisait au temps où il était présidé par Mohamed-Salah Mentouri. Par souci d'efficacité ou même par esprit d'entêtement, ses experts le faisaient quand même. Cela servait à déceler «intellectuellement» les insuffisances d'une gouvernance en mal de vision stratégique et de prospective.

    Bouteflika refusait tout au long de sa campagne électorale à ce qu'il lui soit apporté la contradiction. «Riah ! (Assis !)», criait-il à chaque fois que des citoyens tentaient de le faire au cours de ses meetings. «Je ne suis pas venu t'écouter me dire que tu as six enfants et que tu es mal logée», avait-il lancé à la face d'une mère de famille qui criait sa détresse du milieu de la salle. Dans les 34 wilayas qu'il a visitées pour faire sa campagne électorale, à aucun moment, il ne s'est attardé sur la dégradation du pouvoir d'achat des ménages. Seule dans une wilaya, une timide pancarte affichait «70 DA la pomme de terre.» Aujourd'hui, elle a atteint 120 DA le kg et personne ne trouve à redire, du moins publiquement.

    Les échecs ne semblent pas gêner Bouteflika puisqu'il a su les transformer en atouts électoraux, de surcroît super gagnants. D'ailleurs, tout au long de ses dix ans de règne, il a toujours su retourner les choses en sa faveur en tançant vertement et publiquement ses propres ministres et cela à chaque fois que les lacunes de la gouvernance prenaient de l'ampleur. Il l'a fait pour Abdelhamid Temmar à propos de sa stratégie industrielle, pour son ex-ministre des Télécoms quand il avait jugé qu'il avait «mal» négocié l'ouverture du secteur, celui de l'Energie en lui retirant sa loi sur les hydrocarbures, son ministre de l'Intérieur en s'en prenant aux responsables des collectivités locales, notamment les walis.



    «O croyants ! Ils nous ont encerclés comme la Palestine !»



    Réélu aujourd'hui par un score comme au temps des années de plomb, personne ne peut lui reprocher quoi que ce soit. En fait, sa seule et véritable promesse reste sa décision d'une amnistie générale au profit de tous les terroristes et de leurs dirigeants politiques. Aux premiers, il leur exige de déposer les armes et aux seconds de demander pardon à la nation. Et pour étouffer dans l'�"uf tout effet de «mauvaise surprise», il a pris le soin d'en prévenir le peuple voire de le prendre à témoin, en la lui annonçant tout au long des meetings qu'il a animés.

    Il est clair que la problématique du projet en question est déjà bien ficelée. Reste à lui tracer les contours qu'il veut lui donner et à fixer la date du référendum qu'il tient à lui organiser. D'ailleurs, les concernés semblent le savoir et s'y préparent même.

    Un haut responsable nous disait en pleine campagne électorale qu'il avait reçu Lyada et son fils «qui avait du gel sur les cheveux.» Ce responsable a préféré, nous disait-il, discuter avec le fils qu'avec le père parce que, nous avait-il encore affirmé, «j'ai dit à Lyada, ton fils est plus apte à m'écouter parce qu'il est jeune et moderne.» Madani Mezrag a pour rôle de souffler le chaud et le froid en attendant de soutirer mieux et plus du pouvoir.

    Bouteflika n'a pas vu, cependant, les familles des disparus qui manifestaient bruyamment mercredi dernier, devant le siège de la commission Ksentini. «Regardez, ô croyants ! Ils nous ont encerclés comme la Palestine !», scandaient-elles en arabe alors que les forces de l'ordre les bousculaient fortement pour les empêcher d'avancer.

    Ahmed Ouyahia a promis de mettre la machine électorale au service du président pour le faire réélire comme il se doit. Il a mobilisé, pour cela, tous les moyens humains et matériels qu'elle exige. A ceux qui disent que l'administration publique a été totalement partiale et que ses cadres ont travaillé pour Bouteflika, le ministre de l'Intérieur était là vendredi pour leur répondre «le soutien est un sentiment très répandu dans l'administration, on ne peut l'empêcher». Les walis et autres responsables locaux que nous avons approchés durant la campagne nous lâchaient à chaque fois qu'on demandait à l'un d'eux pourquoi êtes-vous là, cette phrase alibi : «On est tenus de le recevoir, n'oubliez pas qu'il est président de la République.» Le retour de manivelle est craint par tout le monde. La fraude, les dépassements, les nombreuses dérives comme le bourrage des urnes par ceux-là mêmes qui étaient censés les surveiller le 9 avril dernier, ne sont aux yeux du ministre de l'Intérieur qu'allégations. «Je dis bien allégations», répétait-il lors de sa conférence de presse de vendredi dernier.
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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