21 avril 2009 — Nous avons, par ailleurs ce 21 avril 2009, sur notre Bloc-Notes, exposé nos tourments autour du choix du néologisme convenant pour désigner notre idée sur une récente intervention d’Obama (la question des mémos de la CIA sur la torture), – «“Gorbamatchev” ou “Gobamatchev”?».
Pourquoi cette mise en jambe, outre le fait d’expliciter nos propres choix en matière de langage? Pour introduire l'observation que le concept d’un Obama pouvant plus ou moins être comparé à Gorbatchev, explicitement nommé, avec une référence explicite de situation, continue à se répandre dans la presse. Cette fois, l’analogie fait son apparition d'une façon détaillée dans la “grande presse”, ou “presse officielle”, dans sa frange honorable puisqu’il s’agit de The Independent. C’est Rupert Cornwell qui l’utilise, ce 21 avril 2009, pour le premier d'une série d'articles du quotidien sur “les premiers cent jours” de BHO, avec le titre: «Gorbachev: the model for the Obama doctrine», – puis cette explication en entame du commentaire:
«Some already talk of an ‘Obama Doctrine’. Others, sensing that everything may end in tears, compare him to Mikhail Gorbachev, who set out to change the image of Communism and ended up by destroying Communism itself.» Cette explication est aussitôt suivie de l’exposé du corps du commentaire, en expliquant que cette analogie concerne la politique extérieure de BHO : «…One thing however is incontestable. Barack Obama has set a new imprint on his country's foreign policy – and far more quickly than the last Soviet leader ever did.»
»Mr Gorbachev had been in power for 18 months before the “new thinking” and “perestroika” got under way in earnest in 1986. By contrast, Mr Obama still has a week left of his first 100 days in office, by which a new American president is judged, and his approach is visible everywhere.»
Là, nous voulons rendre justice à Gorbatchev. Contrairement à ce qu’écrit Cornwell, à notre estime dans tous les cas, Gorbatchev s’est montré bien aussi rapide que BHO dans les mesures amorçant d’une façon explicite, jusqu’à commencer à bouleverser les experts occidentaux fixés avec leur habituelle souplesse d’esprit sur le dogme de l’intangibilité de l’immobilisme soviétique, dès les premières semaines de son arrivée au pouvoir. Après sa nomination à la fonction suprême pour l’URSS de Premier secrétaire du PC de l’URSS (9 mars 1985), Gorbatchev annonce un moratoire sur le déploiement des “euromissiles” SS-20 (8 avril 1985), balance le vieux Gromyko et le remplace au poste de ministre des affaires étrangères par Edouard Chevarnadze avec lequel il va lancer une politique extérieure audacieuse (juin 1985), remplace le Premier ministre Tokhonov par le réformateur Nikolaï Ryzkhov (27 septembre 1985), fait accepter par le Politburo le principe du retrait des forces soviétiques d’Afghanistan (octobre 1985), jusqu’au sommet de Genève avec Reagan, le 19 novembre 1985, qui est l’occasion de constater combien la véritable substance de la réforme, la glasnost, est déjà en plein fonctionnement. (Effectivement, Cornwel parle de perestroïka et de “nouvelle politique” à propos de Gorbatchev, oubliant ainsi le principal, le socle général sur lequel se sont développés une tentative d’une nouvelle économie et une politique extérieure incontestablement novatrice. Il s’agit effectivement de la glasnost [“transparence” ou “publicité”, selon le sens qu’on donne au mot.].)
Cornwell détaille justement les diverses initiatives, contacts, inflexions, etc., qui marquent une véritable nouvelle orientation de la politique extérieure US. Tout cela est aujourd’hui indubitable: il y a un nouveau courant de politique extérieure aux USA. Cornwell appuie justement sur divers aspects de la personnalité d’Obama, sur sa psychologie, etc.
«To a large degree this more respectful approach reflects Mr Obama's unusual background. The first President from a racial minority, the first to have lived in another country (and Muslim Indonesia to boot), he can instinctively understand how other countries see the US in a way that his predecessors – even that super-quick study Bill Clinton – never could.
»But it also reflects Mr Obama's personality. Pragmatism is his trademark, and the quality he is said to prize most highly in those around him. You see it in the cool and measured thoughtfulness with which he articulates policy. Mr Obama is a realist, who surely agrees wholeheartedly with that classic definition of madness: continuing to do the same thing and expecting a different result.»
Le départ de l’analyse est beau, voire prometteur; la beauté se fane vite et l’analyse ne tient pas ses promesses. Il y a un rétrécissement de la pensée à des normes courantes et très classiquement, voire, dirait-on, petitement britanniques. Après avoir mis en évidence le caractère exceptionnel des personnalités (Gorbatchev et BHO) par rapport au vulgaire du recrutement des mondes politiques où ils évoluent, Cornwell assigne aux deux hommes des champs d’action réduits à une vision trop conventionnelles pour les époques considérées (la fin de l’URSS et notre grande crise systémique), qui ne tiennent aucun compte, évidemment, de ces caractères exceptionnels.
«Go too far in the other direction however, and sweet reason can be seen as a sign of weakness. That was the error of Mr Gorbachev. For the first time, the Soviet Union had a leader who did not inspire fear. His own citizens despised him for it; those of its client states rejoiced and broke free.
»America of course does not have an authoritarian system of government, built upon fear. Even so, admission of error clashes with a widespread assumption that America is somehow "better" than other countries. History's great powers have rarely been comfortable apologising for their behaviour. The US, where the doctrine of American exceptionalism still burns bright, is no exception. More important (and more pragmatically), the Obama approach may not work. On the streets of Europe, the crowds were cheering. But in the conference chambers, Europe's governments balked at the new President's demands for a global stimulus package and for more troops to fight the Taliban in Afghanistan.
»The Russians quickly shot down the trial balloon of a trade-off between missile defence and Iran. And Iran responded to US signals of closer diplomatic engagement by hauling the Iranian-American journalist Roxana Saberi before a one-day kangaroo court and sentencing her to eight years in prison for being a spy.
»As Lord Palmerston, among others, pointed out, countries do not have permanent friends, only permanent interests. Foreign powers may admire Mr Obama, but they will not let that affection blind them to their own interests – and the same is true in reverse. Better relations with friend and foe alike are desirable. But what will happens when the Obama doctrine of sweet reason collides with the American national interest?»
Pourquoi cette mise en jambe, outre le fait d’expliciter nos propres choix en matière de langage? Pour introduire l'observation que le concept d’un Obama pouvant plus ou moins être comparé à Gorbatchev, explicitement nommé, avec une référence explicite de situation, continue à se répandre dans la presse. Cette fois, l’analogie fait son apparition d'une façon détaillée dans la “grande presse”, ou “presse officielle”, dans sa frange honorable puisqu’il s’agit de The Independent. C’est Rupert Cornwell qui l’utilise, ce 21 avril 2009, pour le premier d'une série d'articles du quotidien sur “les premiers cent jours” de BHO, avec le titre: «Gorbachev: the model for the Obama doctrine», – puis cette explication en entame du commentaire:
«Some already talk of an ‘Obama Doctrine’. Others, sensing that everything may end in tears, compare him to Mikhail Gorbachev, who set out to change the image of Communism and ended up by destroying Communism itself.» Cette explication est aussitôt suivie de l’exposé du corps du commentaire, en expliquant que cette analogie concerne la politique extérieure de BHO : «…One thing however is incontestable. Barack Obama has set a new imprint on his country's foreign policy – and far more quickly than the last Soviet leader ever did.»
»Mr Gorbachev had been in power for 18 months before the “new thinking” and “perestroika” got under way in earnest in 1986. By contrast, Mr Obama still has a week left of his first 100 days in office, by which a new American president is judged, and his approach is visible everywhere.»
Là, nous voulons rendre justice à Gorbatchev. Contrairement à ce qu’écrit Cornwell, à notre estime dans tous les cas, Gorbatchev s’est montré bien aussi rapide que BHO dans les mesures amorçant d’une façon explicite, jusqu’à commencer à bouleverser les experts occidentaux fixés avec leur habituelle souplesse d’esprit sur le dogme de l’intangibilité de l’immobilisme soviétique, dès les premières semaines de son arrivée au pouvoir. Après sa nomination à la fonction suprême pour l’URSS de Premier secrétaire du PC de l’URSS (9 mars 1985), Gorbatchev annonce un moratoire sur le déploiement des “euromissiles” SS-20 (8 avril 1985), balance le vieux Gromyko et le remplace au poste de ministre des affaires étrangères par Edouard Chevarnadze avec lequel il va lancer une politique extérieure audacieuse (juin 1985), remplace le Premier ministre Tokhonov par le réformateur Nikolaï Ryzkhov (27 septembre 1985), fait accepter par le Politburo le principe du retrait des forces soviétiques d’Afghanistan (octobre 1985), jusqu’au sommet de Genève avec Reagan, le 19 novembre 1985, qui est l’occasion de constater combien la véritable substance de la réforme, la glasnost, est déjà en plein fonctionnement. (Effectivement, Cornwel parle de perestroïka et de “nouvelle politique” à propos de Gorbatchev, oubliant ainsi le principal, le socle général sur lequel se sont développés une tentative d’une nouvelle économie et une politique extérieure incontestablement novatrice. Il s’agit effectivement de la glasnost [“transparence” ou “publicité”, selon le sens qu’on donne au mot.].)
Cornwell détaille justement les diverses initiatives, contacts, inflexions, etc., qui marquent une véritable nouvelle orientation de la politique extérieure US. Tout cela est aujourd’hui indubitable: il y a un nouveau courant de politique extérieure aux USA. Cornwell appuie justement sur divers aspects de la personnalité d’Obama, sur sa psychologie, etc.
«To a large degree this more respectful approach reflects Mr Obama's unusual background. The first President from a racial minority, the first to have lived in another country (and Muslim Indonesia to boot), he can instinctively understand how other countries see the US in a way that his predecessors – even that super-quick study Bill Clinton – never could.
»But it also reflects Mr Obama's personality. Pragmatism is his trademark, and the quality he is said to prize most highly in those around him. You see it in the cool and measured thoughtfulness with which he articulates policy. Mr Obama is a realist, who surely agrees wholeheartedly with that classic definition of madness: continuing to do the same thing and expecting a different result.»
Le départ de l’analyse est beau, voire prometteur; la beauté se fane vite et l’analyse ne tient pas ses promesses. Il y a un rétrécissement de la pensée à des normes courantes et très classiquement, voire, dirait-on, petitement britanniques. Après avoir mis en évidence le caractère exceptionnel des personnalités (Gorbatchev et BHO) par rapport au vulgaire du recrutement des mondes politiques où ils évoluent, Cornwell assigne aux deux hommes des champs d’action réduits à une vision trop conventionnelles pour les époques considérées (la fin de l’URSS et notre grande crise systémique), qui ne tiennent aucun compte, évidemment, de ces caractères exceptionnels.
«Go too far in the other direction however, and sweet reason can be seen as a sign of weakness. That was the error of Mr Gorbachev. For the first time, the Soviet Union had a leader who did not inspire fear. His own citizens despised him for it; those of its client states rejoiced and broke free.
»America of course does not have an authoritarian system of government, built upon fear. Even so, admission of error clashes with a widespread assumption that America is somehow "better" than other countries. History's great powers have rarely been comfortable apologising for their behaviour. The US, where the doctrine of American exceptionalism still burns bright, is no exception. More important (and more pragmatically), the Obama approach may not work. On the streets of Europe, the crowds were cheering. But in the conference chambers, Europe's governments balked at the new President's demands for a global stimulus package and for more troops to fight the Taliban in Afghanistan.
»The Russians quickly shot down the trial balloon of a trade-off between missile defence and Iran. And Iran responded to US signals of closer diplomatic engagement by hauling the Iranian-American journalist Roxana Saberi before a one-day kangaroo court and sentencing her to eight years in prison for being a spy.
»As Lord Palmerston, among others, pointed out, countries do not have permanent friends, only permanent interests. Foreign powers may admire Mr Obama, but they will not let that affection blind them to their own interests – and the same is true in reverse. Better relations with friend and foe alike are desirable. But what will happens when the Obama doctrine of sweet reason collides with the American national interest?»
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