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Kamal Ahmane, un Kabyle à la conquête de la littérature danoise

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  • Kamal Ahmane, un Kabyle à la conquête de la littérature danoise

    Kamal Ahmane a exercé la profession d’enseignant de langue française et a été correspondant de presse en Kabylie avant de prendre la tangente vers le Danemark en 2003. Il s’est imprégné de la culture de son pays d´accueil et a maintenant franchi le pas de l’écriture poétique dans la langue de H. C. Andersen.

    En effet, son premier recueil de poésie est sorti le mois de novembre 2008. Ses poèmes sont exclusivement écrits en danois. Toutefois, et à travers certains poèmes, il rend hommage à sa Kabylie natale et fait découvrir la beauté de cette région et le combat de ses femmes et hommes pour la démocratie et la liberté d´expression. Dans cet entretien, il nous parle de sa vie au Danemark, ses projets d’écriture et, bien entendu, de son premier recueil de poésie intitulé Bindeled qui signifie "Trait d´union".

    La Dépêche de Kabylie : Qui est Kamal Ahmane ?

    Ahcène Ahmane : Je suis âgé de 39 ans et natif de Tizi Rached. J´ai exercé depuis sept ans la profession d’enseignant de langue française et correspondant de presse en Kabylie. En 2001 j´ai pris la tangente vers la France en vue d’y poursuivre des études supérieures, mais le vent de l´amour m´a emporté vers le Nord, au Danemark après une année dans l’Hexagone. Actuellement je vis avec ma femme danoise et mes deux filles, Sarah et Anya dans la ville d´Århus. Outre l´écriture, j´enseigne le français, l´anglais et deux autres matières en danois dans une école privée.

    Enseignant de langue française durant des années, comment avez vous découvert votre passion pour la poésie et le journalisme?

    Parallèlement à l´enseignement, ma passion pour l´écriture m´a guidé vers le journalisme en collaborant aux quotidiens indépendants notamment Lliberté et la Nouvelle République. Le journalisme était pour moi un métier-passion qui m´a permis d´acquérir une expérience des plus enrichissantes. Quant à la poésie, j´avoue que je n´ai jamais osé taquiner la muse ni dans la langue de Si Mohand u Hand, ni celle de Voltaire, mais plutôt dans la langue de H.C. Andersen qui est ma quatrième langue étrangère. Mon tout premier poème en danois intitulé “Ja til livet” qui signifie "Oui à la vie" fut un hommage à ma fille aînée qui a survécu après une naissance extrêmement difficile. C´était une sorte de déclic. Depuis, je ne résiste pas à l´envie de noircir les pages blanches et faire partager mes textes avec les autres. Pour moi, écrire des poèmes est un moyen d'expression.

    Comme tous les Algériens épris du savoir et de l’art, vous avez quitté l’Algérie pour améliorer votre niveau de vie : Comment s´est faite votre aventure?

    Quand j´étais lycéen, et étudiant, j´avais beaucoup d´amis (ies) á l´étranger. J´avais presque une trentaine de correspondants issus de tous les coins du monde. J´écrivais énormément de lettres. D´ailleurs, après 11 années d´échange épistolaire, j´ai rencontré ma correspondante danoise pour la première fois à Paris en juin 2001. C´était merveilleux, une belle histoire d´amour et le vent n Tayri m´a emporté vers le Nord, au Danemark. Partir à l´étranger c´était beaucoup plus pour me soustraire à la bureaucratie qui gangrenait tous les domaines y compris l´enseignement, à un avenir sombre et incertain et à une kyrielle de maux que les mots ne peuvent décrire. En d´autre termes c´était dans le but de m´épanouir et par ricochet concrétiser des projets qui me tenaient à cœur.

    En arrivant au Danemark, vous avez appris rapidement le danois et vous avez réussi à faire connaître la culture berbère par le biais de cette langue: Pouvez-nous nous parler de cette expérience ?

    A mon arrivée, je craignais de ne pas pouvoir maîtriser la langue danoise, et ce eu égard à sa complexité, mais il s’est avéré que j´avais une bonne oreille pour les langues. M’intégrer au Danemark était la seule chose à laquelle je pensais. Je ne me suis pas limité à ce que j´ai appris à l´école de langue ,mais il fallait conquérir le danois par l´écriture. C´était d´ailleurs un exercice intitulé " un petit écrivain dans l´estomac " qui m´a permis de commettre mon premier poème en danois.

    Mes enseignants ainsi que mes camarades de classe, qui faut-il le signaler, représentaient quinze nationalités différentes, m´ont beaucoup encouragé. J´ai commencé alors à taquiner la muse en publiant mes poèmes dans des sites Internet consacrés à la poésie en Scandinavie, mais aussi dans la revue du club de poésie d´Århus dont je suis membre. J´ai par ailleurs écrit la version danoise de ton poème Sidi Valentin, "Sankt Valentin" en danois.

    C´est ma manière à moi de rendre hommage à l´amour qui est un langage universel dépassant toutes les contradictions interculturelles.

    J´ai constaté qu´il y avait un manque quant aux ouvrages inhérents à la culture berbère et aux berbères d´une manière générale, et beaucoup de danois ne savent pas grand-chose sur la Kabylie. Je suis très flatté de savoir que mon recueil ait véhiculé un petit message par le biais de mes poèmes consacrés à la Kabylie.

    "Un berbère écrit des poèmes en danois", "Grandit en Kabylie et publie un recueil en danois", "citoyen du monde publie un recueil de poésie" "Début prometteur pour un artiste local " étaient les quelques articles parus dans la presse danoise.

    Vous venez d’éditer votre premier recueil de poésie en danois : pouvez-vous nous parler de ce nouveau-né ?

    Mon recueil s´intitule Bindeled qui signifie “Trait d´union”.

    Il contient 35 poèmes regroupés dans cinq thèmes différents: pensées d´un immigré, débats et querelles politiques, la poésie comme palliatif, amour pour ma femme et mes filles et enfin un thème consacré à mon pays qui contient entre autres des poèmes tels que “Kabylie, un combat pour les libertés”, “L’effet boomerang” et “Je me souviens”.

    La promotion de mon livre s´est bien faite et le recueil a reçu une bonne critique. Des bibliothèques continuent à l´acheter et mon éditeur est en train d´établir des contacts avec des établissements scolaires , car Bindeled pourrait être utilisé comme outil pédagogique dans l´enseignement du danois notamment dans les lycées.

    Vous écrivez exclusivement en danois sans pour autant passer par le kabyle ou le français... C’est sans doute un " exercice " difficile, d´où vient votre inspiration?

    La poésie n'est pas le genre littéraire le plus facile et il est d´autant plus difficile d´écrire des poèmes rimés dans une langue étrangère.

    Je puise mon inspiration dans la vie de tous les jours et l´ étincelle qui pourrait être la source d'un nouveau poème est bien entendu l'actualité nationale ou internationale, un événement, une injustice, un problème de société noté dans la presse, la lecture d´un livre, d´un poème, un mot, un titre, un objet, une personne, la Kabylie , l´Algérie etc... Il existe également d´autres facteurs qui interviennent au cours de la genèse d’un poème. Bien que mes poèmes soient écrits en danois, mon âme reste viscéralement berbère.

    Les thèmes abordés sont la Kabylie : le Danemark , les débats politiques, l´amour, les problèmes sociaux, la guerre, la paix, l’intégration, les poètes, le racisme, l´amour...etc.

    Peut-on parler de votre vie au Danemark et de la communauté berbère dans ce pays ?

    J´habite à Århus qui est la deuxième ville du Danemark après Copenhague. J´enseigne le français, l’anglais, et deux matières en danois, á savoir Natur &Teknik et l´art. En parallèle je fais une formation pour devenir journaliste.

    Donc, l’enseignement et le journalisme occupent mon quotidien au Danemark.

    C´est donc une sorte de retour à mes deux précédentes sources professionnelles (sourire). Sinon, je fais beaucoup de vélo et je pratique le foot. Quant à la communauté berbère, j´avoue que j´ai rencontré peu de Kabyles. Ils sont formidablement intégrés dans la société danoise.

    Parler s taqbaylit ne vous manque-t-il pas vraiment au Danemark ? Si oui comment arrivez-vous à étancher cette soif ?

    Les CD d´Idir, Takfarinas, Matoub, Inas Mazal, Djurdjura, Malika Domrane et tant d´autres chanteurs de chez nous m´accompagnent régulièrement que ce soit chez moi ou dans la voiture.

    Je fredonne également quelques chansons d´Idir et parler à mes filles s taqbaylit fait aussi partie de mon quotidien. Par ailleurs, j´ai un très bon ami originaire du village Ait Issad (Azazga), et on s´invite souvent autour d´un bon couscous.

    Parlons de vos projets d’avenir, que comptez-vous réaliser encore maintenant que le premier pas est fait?

    Dans les mois à venir, j´ai une parution en vue, mon second recueil de poèmes. À moyen terme, je pense créer une association berbéro-danoise pour promouvoir la culture berbère au Danemark, un projet que je compte réaliser avec l´aide de certains amis. J´ai par ailleurs quelques projets de traduction à même de faire connaître nos grands écrivains et poètes.

    Un dernier mot pour nos lecteurs ?

    Merci à vous, Ahcène, de m'avoir accordé beaucoup de temps pour faire connaître mon recueil de poésie même si son contenu est en danois. J'aimerai aussi remercier de tout mon cœur tous mes amis et par là même saluer tous mes anciens élèves. Je remercie également mes enseignants danois qui m'ont fait découvrir avec amour et passion leur culture tout en me permettant de partager avec eux ma propre culture, mes valeurs et ma Kabylie.

    Par Ahcène Mariche ,La Dépêche de Kabylie
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