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Berlin fait une croix sur le retour de la religion dans les écoles

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  • Berlin fait une croix sur le retour de la religion dans les écoles

    Allemagne. Les habitants de la capitale ont rejeté un référendum soutenu par les Eglises

    Berlin la rouge est restée fidèle à sa réputation de ville anticléricale. Le référendum local, lancé à l’initiative de ProReli, un mouvement citoyen largement soutenu par les Eglises catholique et protestante, en faveur de davantage de religion à l’école publique, a échoué dimanche. Les partisans du oui n’ont recueilli que 48,5 % des voix contre 51,3 % au non. La participation était de toute façon insuffisante pour modifier la loi. Les Berlinois se sont donc exprimés pour le maintien des cours d’éthique obligatoires, reléguant la religion au rang des matières facultatives…
    La scène se passe dans une classe de 8e (l’équivalent d’une 4e en France) d’un collège de Schöneberg, un quartier multiculturel de Berlin. Les adolescents, âgés de 14 à 16 ans, viennent d’entrer en cours d’éthique. La matière est obligatoire depuis 2006 pour tous les élèves de la capitale, de la 7e (la 5e française) à la 10e (la seconde). Ce jour-là, la conversation tourne à bâtons rompus sur le port de doubles noms chez les couples mariés. Salima, une jeune fille énergique au foulard coloré, trouve tout à fait «normal» d’accoler son nom de jeune fille à celui de son futur mari. Filles ou garçons, la plupart des élèves sont du même avis. Leur professeur se tourne alors vers deux garçons silencieux à l’air ennuyé, insiste pour connaître leur opinion… Le jeune Libanais et son camarade d’origine polonaise sont les seuls à considérer qu’une femme doit «forcément porter le nom de son mari».

    Denier du culte. Les cours d’éthique sont apparus dans l’emploi du temps des collégiens berlinois en 2006, au lendemain du meurtre de Hatun Surucu, une jeune Turque assassinée par ses frères qui condamnaient son mode de vie «occidental». Ces cours sont à l’époque perçus comme un facteur d’intégration, dans une ville qui compte un demi-million d’étrangers issus de 184 pays. «Nulle part ailleurs à l’école, les élèves n’ont cette possibilité de discuter tous ensemble, quelle que soit leur origine et, encadrés par un enseignant, des droits et des devoirs des citoyens», insistent les professeurs d’éthique. Au programme : les droits des femmes, le respect des minorités, le racisme, la faim dans le monde…
    Avec ses cours d’éthique laïcs et obligatoires, Berlin fait figure de cas isolé en Allemagne. Partout ailleurs dans ce pays qui, contrairement à la France, ne connaît pas la laïcité, l’éducation civique et morale des jeunes Allemands est assurée à l’école dans le cadre de cours de religion obligatoires, qui garantissent aux Eglises catholique et protestante une influence certaine sur les jeunes générations. En Allemagne, l’Eglise n’est pas séparée de l’Etat. La Loi fondamentale - la constitution - protège explicitement la liberté de culte, avec pour conséquence que l’Etat prélève à la source le denier du culte en même temps que l’impôt sur le revenu. Il redistribue les fonds prélevés en fonction de la confession déclarée par les contribuables, et paie les professeurs de religion, qui officient dans les écoles publiques au même titre que le reste du corps enseignant. Seuls les contribuables non baptisés ou ayant entrepris la démarche de «quitter» l’Eglise sont dispensés du denier du culte. Quant aux cours de religion, seuls les enfants de familles athées, musulmanes, juives ou bouddhistes peuvent, selon les Länder (régions), opter pour des cours d’éthique ou de morale civique à la place.

    Plaies. En apparence donc, rien n’a changé après l’échec du référendum berlinois. La capitale conserve l’éthique, le reste du pays la religion… Mais dans les faits il faudra du temps pour soigner les plaies ouvertes par la virulence des débats autour de la place de la religion à l’école. Proreligions comme proéthiques, les deux camps se réclamaient de la tolérance. Mais pendant la campagne, tous les coups ou presque semblaient permis. A cinq mois des législatives, ProReli a ravivé de vieux clivages : interconfessionnels, droite-gauche, Ossies et Wessies (les anciens Allemands de l’Est et de l’Ouest), opposants et tenants d’une société multiculturelle…
    L’initiative de ProReli, soutenue par le pape et Angela Merkel, a recueilli l’adhesion de plus de 75 % des inscrits dans les beaux quartiers de l’ ancien Berlin-Ouest. A l’Est, le non à la religion s’est imposé à plus de 80 % dans les quartiers rouges de Marzahn ou Lichtenberg.

    Liberation, 29/04/09,NATHALIE VERSIEUX
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