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Les guides Gisserot en péril

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  • Les guides Gisserot en péril

    Au Mont-Saint-Michel, à la cité de Carcassonne et à l'abbaye de Cluny, les guides Gisserot, reconnaissables à leur couverture jaune, ne sont plus référencés. Leur éditeur Jean-Paul Gisserot se plaint d'avoir été évincé des points de vente gérés par le Centre des monuments nationaux (CMN). Il a attaqué l'organisme pour concurrence déloyale.

    Lundi 4 mai, le conflit qui oppose la maison d'édition et l'établissement public qui assure la gestion d'une centaine de monuments français, - parmi lesquels l'Arc de triomphe, la Conciergerie, les mégalithes de Carnac, mais aussi les abbayes du Mont-Saint-Michel et de Cluny et le château de Carcassonne - passait devant le tribunal des conflits. Cette juridiction ne tranche pas sur le fond, mais dit qui est compétent du juge administratif ou judiciaire. Lundi, le juge a estimé que ce conflit commercial relevait du droit privé.

    Cet arrêt permet de relancer le feuilleton judiciaire débuté en avril 2006. La cour d'appel de Paris, officiellement compétente, va pouvoir trancher le litige. L'éditeur, lui, peut saisir l'Autorité de la concurrence pour le non-renouvellement de son marché avec le CMN.

    Dans le milieu de l'art et du patrimoine, la décision est attendue. Car Jean-Paul Gisserot est une personnalité. "Dès l'adolescence, je voulais être éditeur", explique ce Breton, ingénieur de formation, âgé de 70 ans passé, mais qui n'a pas l'intention de dételer. En 1988, il a fondé la maison qui porte son nom qui comprend plus de 500 titres actifs à son catalogue, tous dans le domaine du tourisme culturel. Avant cela, il a créé les éditions Ouest-France, puis les éditions Sud-Ouest, aussi spécialisées dans la mise en valeur du patrimoine. Il peut s'enorgueillir d'avoir vendu au fil de sa carrière près de 50 millions d'exemplaires.

    "IL FAUT ÊTRE PRÉSENT"

    Au coeur du conflit, se situent les librairies boutiques, situées à l'intérieur des monuments du CMN et gérés par leur personnel. "Ce sont des lieux stratégiques où il faut impérativement être présent pour vendre ses titres", explique M. Gisserot.

    Or, depuis avril 2006, il a constaté que sa monographie consacrée au Mont-Saint-Michel, vendue 4 euros au public, "la meilleure vente de leur comptoir", précise-t-il, était progressivement éliminée au profit de la brochure réalisée par le conservateur du Mont-Saint-Michel pour le compte des éditions Bonechi, vendue à 6,50 euros, et de celle des éditions du Patrimoine, service éditorial du CMN, vendue 7 euros. Le motif officiel du retrait invoqué par le CMN était l'étroitesse et le manque de place de la librairie, à l'entrée du monument.

    Vendues 5 euros, les monographies d'Anne Baud sur l'abbaye de Cluny et d'Alain Salamagne, sur la cité médiévale de Carcassonne, éditées par Gisserot, ont subi le même sort. A Cluny, où 95 % des ventes se font sur place, le préjudice apparaît significatif. Au Mont-Saint-Michel, comme à Carcassonne, Gisserot a dû se rabattre sur d'autres points de vente, proches des monuments.

    "A l'origine, je travaillais bien avec le CMN, c'était même mon premier client", note Jean-Paul Gisserot. En deux ans, son chiffre d'affaires a été divisé par deux, passant de 150 000 euros à 70 000 euros. Il sera nul en 2009, puisqu'au 1er janvier, le CMN a décidé de ne plus référencer aucun guide Gisserot.

    Présidente du CMN, Isabelle Lemesle indique que son organisme a respecté les engagements qui le liaient à l'éditeur de 2004 à 2008. Il s'était engagé à un montant d'achat situé de 60 000 euros à 240 000 euros, chaque année. "Le renouvellement n'est pas automatique", précise-t-elle. Elle rappelle aussi que le Conseil de la concurrence a estimé que "les éditions Gisserot ne sont pas dans un état de dépendance économique, vis-à-vis du CMN". Par conséquent, "je n'ai aucun doute quant au rejet de tous les moyens soulevés par M. Gisserot contre le CMN", dit-elle.

    Persuadé d'avoir été évincé pour des motifs économiques - ses guides ne sont pas chers et "de qualité", dit-il -, Jean-Paul Gisserot ne se défend pas que devant les tribunaux. Il a sorti, début 2009, une nouvelle monographie du Mont-Saint-Michel, à 2 euros, et en cinq langues. Tirée à 5 000 exemplaires, elle ne sera pas vendue à la librairie du Mont-Saint-Michel, mais aux alentours.


    Par Alain Beuve-Méry, Le Monde


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