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Hassaïne Zemmouri, ex Pdg de l'Enapal réclame justice et réparation

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  • Hassaïne Zemmouri, ex Pdg de l'Enapal réclame justice et réparation

    Six années et demie d’incarcération à El-Harrach. Dix-sept ans de quête inlassable de réparation. C’est trop pour un homme qui n’a pas commis le crime pour lequel on l’a injustement condamné. Aujourd’hui, finis les dédales éprouvants de la justice. Il est acquitté et innocenté. Mieux vaut tard que jamais. Mais est-ce suffisant pour réparer le préjudice subi ? Il n’y a que celui qui a vécu cette terrible cabale judiciaire qui peut en juger. Lui, c’est Hassaïne Zemmouri, l’ex-Pdg de l’ex-Enapal. Il a tout et tant perdu, jusqu’à l’être cher, sa mère qui mourut alors qu’il était derrière les barreaux. Aucune indemnisation, dit-il. Aujourd’hui, il lance une accusation à l’endroit de ceux qui l’ont voué aux gémonies : des groupes d’intérêts que la transition vers l’économie de marché n’agréait pas. Interview.

    Le Soir d’Algérie : Dix-sept ans après, la justice vous innocente. Vous y attendiez-vous ?

    Hassaïne Zemmouri : Dix-sept ans après, la justice a fini par reconnaître ce qui était parfaitement clair dès le début de cette véritable cabale, délibérément montée de toutes pièces contre ma personne. Je dis bien délibérément, car il ne fait pas l’ombre d’un doute qu’il ne s agit ni d’une erreur accidentelle ni du hasard. Tout a été manifestement décidé et géré par l’ensemble du système de répression de l’époque. Système qui, comme tout le monde le sait, comptait en son sein des individus qui disposaient d’un pouvoir absolu et total sur le pays et le peuple. Ils n’avaient aucune limite, ce qui explique nombre de dépassements et le grand drame qu’a vécu le pays. Pour ma part, convaincu d’avoir très bien fait mon travail, dans la transparence et dans le seul intérêt du pays, j’avais la conscience parfaitement tranquille donc je me suis battu contre cette justice qui était aux ordres.

    Vous n’avez pas répondu à la question…

    Si je me suis systématiquement pourvu en cassation auprès de la Cour suprême qui, d’ailleurs, m’a systématiquement donné raison, c’est parce que j’étais convaincu qu’un jour, avec le temps et les changements qui ne manqueraient pas d’intervenir, il y aurait une justice et des magistrats honnêtes qui prendraient leurs responsabilités et prononceraient le droit et rien que le droit. Ce jour a fini par arriver après 17 longues années de bataille judiciaire. J’ai été acquitté, donc innocenté. Je l’ai toujours clamé haut et fort devant les magistrats qui étaient aux ordres à l’époque.

    Lors de votre procès, vous avez déclaré que vous faites les frais d’un règlement de comptes entre groupes d’intérêts. Pouvez-vous être plus explicite ?

    Oui je l’affirme. J’ai fait les frais d’un règlement de compte entre groupes d’intérêts. Pourquoi ? Pour la seule et bonne raison que je n’ai pas hésité une seconde à donner un grand coup de pied dans la grosse fourmilière qu’était et qu’a toujours été l’Enapal. Cette action entreprise a provoqué une véritable levée de boucliers de la part de ceux qui étaient derrière les intérêts compradores que j’ai dérangés et que j’ai ouvertement combattus. Ils n’ont jamais accepté ce fait qui était inimaginable et inacceptable pour eux. N’ayant rien pu faire tant que j’étais en fonction et du fait également que je n’avais rien à me reprocher, ils m’ont attendu après ma mise en congé spécial, qu’ils ont arrangé au préalable avec un ministre de leur camp, pour actionner l’appareil répressif. Leur démarche était diabolique. Ils ont en premier lieu propagé des rumeurs puis une arrestation qu’il fallait à tout prix crédibiliser. Il fallait aussi donner un coup d’arrêt aux réformes économiques qui n’étaient pas bénéfiques pour eux.

    Il n’en demeure que l’accusation vous a reproché de ne pas avoir respecté la réglementation en vigueur.

    L’accusation m’a reproché mille et une choses, pas seulement d’avoir enfreint la réglementation. Le problème est qu’en vérité, à force d’user de contre-vérités et de falsifications, ils ont fini par se mélanger les pinceaux. La réglementation à laquelle ils se sont référés était liée à l’économie socialiste et elle avait été abrogée depuis longtemps. Hassaine Zemmouri n’a fait qu’appliquer la réglementation et les lois en vigueur. Des lois liées aux choix économiques et stratégiques du pays à cette époque. Un choix porté sur l’économie de marché, et j’étais en conformité totale.

    Si c’était à refaire, reprendriez-vous l’initiative de 1990. C’est-à-dire agir en tant que premier responsable d’une entreprise publique sans disposer de l’autorisation politique ?

    Etant un homme de conviction, de rigueur et d’efficacité, il ne me viendrait pas une seule seconde à l’esprit d’accepter de gérer quoi que ce soit sans au préalable avoir mis les choses au clair. Bien évidemment, en termes de prérogatives. Il était de mon devoir de prendre totalement les responsabilités inhérentes à la gestion performante de toute structure, ce qui était d’ailleurs le cas de l’Enapal. J’avais carte blanche de la part de l’exécutif de l’époque. Il faut dire et reconnaître même que c’était pour la première fois dans l’histoire du pays qu’un exécutif exigeait de ses gestionnaires qu’ils assument et prennent toutes les décisions à leur niveau. Oui, c’était une première pour ma part comme pour le reste des gestionnaires

    Mais, il y a des comptes à rendre à votre tutelle...

    Je rendais compte après coup. Au cours des réunions idoines, la tutelle était informée en temps réel, ce qui est parfaitement normal. Sachant qu’il s’agit d’un secteur public et pour que notre économie décolle, il est obligatoire de libérer totalement les énergies. Il est impératif de passer par une telle démarche. Ce n’est pas en freinant l’initiative ou en embusquant partout des gardes chiourmes parasitaires, que nous serons performants. Il faut instituer la transparence partout et dans tous les domaines. Il faut une véritable démocratie. La liberté de penser, de s’exprimer, d’agir sans avoir peur. Quant à la politique, elle doit s’exprimer au niveau des conceptions et des choix stratégiques qui engagent le pays sur le long terme surtout à avoir un projet de société, une mode d’organisation socioéconomique, une éducation nationale, etc.

  • #2

    Vous aviez mauvaise presse à l’époque où vous étiez P-dg de l’Enapal


    La réponse est simple. Parce que j’exerçais entièrement mes responsabilités. Comme je vous l’ai déjà dit, j’ai combattu et défendu le seul et exclusif intérêt de mon pays. J’ai heurté et dérangé d’autres intérêts qui étaient manifestement en train de creuser la tombe de l’Algérie. La suite vous la connaissez…

    Le cadre gestionnaire public est-il réellement aujourd’hui libre de ses gestes ?
    Le cadre gestionnaire est-il libre de ses gestes ? Oui et non. Le cadre gestionnaire avait évolué dans un cadre d’économie dirigée. Il était chargé par le politique d’assurer le fonctionnement élémentaire de l’entreprise à la tête de laquelle il était désigné. C’était un choix purement politique et stratégique dicté par l’Etat. C’était l’époque où les entreprises publiques distribuaient des bénéfices alors qu’il n’y avait pas trace de bénéfices. Il fallait assurer la paix sociale et on ne demandait à personne d’être performant ou rentable. Cette époque est désormais révolue, sauf à vouloir aller dans le mur. A cette époque, le gestionnaire public ne pouvait pas être libre de ses actions. Aujourd’hui, on ne peut pas être performant, si l’on n’est pas libre de décider, d’agir et d’entreprendre. Le cadre de l’économie de marché, qui se fonde sur la performance, impose la liberté d’initiative, et le cadre gestionnaire ne peut prétendre à cela que sur la base de compétences avérées. Pour ma part, je considère que la fonction à charge publique est avant tout hautement éthique. Il demeure, cependant, qu il y a encore nombre d’autres conditions à remplir pour que le cadre gestionnaire puisse travailler dans des conditions saines et loyales. Là, c’est une affaire de système et de culture.

    Et pourtant, l’acte de gestion a été dépénalisé

    Vous dites que l’acte de gestion a été dépénalisé. Je crois bien que vous faites erreur. L’acte de gestion n’a pas été dépénalisé. C’est un simple subterfuge qui a substitué de nouvelles lois en remplacement des anciennes, tout en gardant un flou flagrant qui ouvre la voie à toutes les interprétations possibles. C’est, encore une fois, la porte ouverte à toutes les dérives. Le cadre gestionnaire est toujours en danger

    Sept années après votre incarcération, l’entreprise que vous avez dirigée, en l’occurrence l’Enapal, a été dissoute. Votre commentaire.

    C’était un des objectifs visés par tous les parasites de l’époque. Après ma liquidation honteuse, alors que le chef du gouvernement de l’époque, après une longue audition en tête à tête, avait conclu que ma gestion était crédible et performante, on a procédé à la liquidation de l’entreprise et partagé ses activités. On a sacrifié 7 500 travailleurs, soit 7 500 familles jetées dans la précarité et la peur du lendemain sans compter que l’Etat a perdu un levier stratégique d’action sur la sécurisation de l’approvisionnement en deniers alimentaires de base. Je considère, pour ma part, que cette décision est une erreur. Il faudrait rectifier rapidement et en marge, je rappelle qu’à l’époque, l’Enapal était en passe de devenir un puissant holding à travers les différents partenariats négociés avec de grands groupes internationaux. Les investisseurs avaient accepté de réaliser ce qui aurait transformé l’Algérie et Alger en véritable plaque tournante du commerce international avec une position dominante sur le Bassin méditerranéen et à moyen terme sur l’Afrique. Hélas, cela a été sabordé. J’avais laissé derrière moi pour sept mois de stock de marchandises, soit trois mois de stock marchand et quatre mois de stock stratégique.

    Comptez-vous demander réparation ?

    Demander réparation ? L’Etat s’est trompé ou a été trompé par des individus que je n’hésiterai pas à qualifier de malveillants. L’Etat peut donc réparer et indemniser équitablement. La justice s’est prononcée. Elle a rétabli la vérité en m’innocentant. C’est public et c’est au nom du peuple algérien qu’elle a jugé et qu’elle a rendu son verdict. L’Etat devrait donc prendre l’initiative de cette réparation en termes de recouvrement de tout mes droits, à savoir préjudices matériel, moral et social

    . Je pose la question : combien coûte une nuit, une journée de prison, lorsque vous êtes innocent ? Combien coûtent six ans et demi d’incarcération injustifiée et injustifiable ? Combien coûtent six ans et demi loin de ma famille ? Enfin, le plus pénible, combien coûte le fait que ma vénérée mère soit décédée, alors que j’étais injustement incarcéré et que je n’ai pu ni être présent à ses côtés ni à son enterrement ?

    Retenons aussi qu’avec l’âge et l’étiquette du repris de justice qu’on vous a collée, malgré votre innocence, je n’ai pu durant cette période de dix-sept ans, c’est-à-dire de novembre 1992 à janvier 2009, trouver un travail car l’affaire était pendante en justice. L’Etat doit donc prendre tous ces éléments en considération pour une juste réparation et me permettre de faire valoir, le cas échéant, mes droits à la retraite.

    Par Le Soir

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