L'histoire va-t-elle se répéter, avec ses combats en trompe-l'oeil préludant à de futurs accords pipés ? Ou a-t-on changé de modèle, de paradigme, avec un Etat pakistanais cette fois franchement rallié au combat anti-taliban, répudiant ses ambivalences passées ? Telles sont les questions que se posaient, les commentateurs pakistanais au lendemain de la reprise des hostilités dans cette emblématique vallée de Swat flanquée de massifs himalayens, ancien paradis touristique du nord-ouest du Pakistan mué en laboratoire taliban depuis l'été 2007.
Prodrome de l'épreuve militaire à venir, l'exode a commencé, avec ses scènes rituelles de familles paniquées se jetant sur des camionnettes ou des charrettes. Près de 40 000 résidents ont d'ores et déjà quitté la région pour affluer vers Peshawar, la capitale de la Province de la frontière du Nord-Ouest (NWFP), où les autorités en attendent dix fois plus.
Autour de Mingora, le chef-lieu du district de Swat, les escarmouches se multiplient depuis le début de la semaine entre les convois militaires, soutenus par des hélicoptères, et les rebelles islamistes qui avaient déjà creusé leur niche en ville, comme dans les montagnes alentour, dans la perspective de ce choc frontal.
Selon les autorités, 35 talibans ont été tués, mercredi 6 mai, dans des affrontements autour d'une mine d'émeraude à proximité de Mingora. Parallèlement, l'armée poursuit ses opérations dans les districts voisins de Lower Dir et Buner, afin d'en déloger les talibans qui, à partir de leur bastion de Swat, s'y étaient infiltrés ces dernières semaines. Il n'a échappé à personne au Pakistan que cette nouvelle offensive militaire, qui porte le coup de grâce à un accord avec les talibans locaux déjà moribond, coïncide avec le sommet tripartite de Washington où le président américain, Barack Obama, a tenté de convaincre ses homologues pakistanais et afghans, Asif Ali Zardari et Hamid Karzaï, de joindre leurs efforts dans la lutte contre l'extrémisme islamiste.
"GUERRE AMÉRICAINE"
Comme de coutume, des voix nationalises se sont élevées pour déplorer que le gouvernement pakistanais cède à la pression américaine en renouant avec la ligne dure contre les talibans. L'anti-américanisme récurrent de l'opinion pakistanaise, encline à mettre les maux du pays sur le compte des ingérences de Washington, a souvent placé sur la défensive le gouvernement pakistanais, accusé de se rallier à une "guerre américaine".
Cette fois-ci, pourtant, le climat a quelque peu changé. Car l'exaspération monte dans l'opinion face à l'intransigeance de talibans avec qui les efforts de compromis se soldent inévitablement par des échecs. "Les doutes qui pouvaient exister sont maintenant dissipés, écrit, jeudi, un éditorialiste du quotidien The News. Les talibans ont démontré qu'ils trompaient leur monde et n'étaient pas dignes de confiance. Il n'y a désormais plus de doute que les talibans de Swat doivent être éradiqués."
Ces commentaires belliqueux s'expliquent par la déception de nombreux Pakistanais qui attendaient beaucoup de l'accord de paix sur la région de Malakand (dont Swat fait partie). Le compromis avait été signé à la mi-janvier entre les autorités locales de la Province de la frontière du Nord-Ouest et Sufi Mohammed, le chef historique du Tehrik Nifaz shariat-e-Mohammadi (TNSM), un groupe qui lutte depuis la fin des années 1980 pour l'imposition de la charia (loi islamique) dans le Malakand.
Libéré opportunément de prison fin 2008, Sufi Mohammed était chargé de convaincre les combattants du Tehrik-e-taliban Pakistan (TTP) - le mouvement taliban qui contrôlait de facto la vallée de Swat depuis l'été 2007 - de déposer les armes en échange de la mise en place de tribunaux islamistes. Une promesse qui n'a pas été tenue.
Comme le craignaient les adversaires du compromis, les talibans ont mis à profit cette trêve pour reconstituer leurs forces et même se projeter au-delà de leurs fiefs traditionnels. Il y a deux semaines, ils effectuaient une percée jusqu'au district voisin de Buner, patrouillant en escouades lourdement armées au coeur du chef-lieu Doggar, situé à 110 km d'Islamabad. Leur objectif proclamé était d'imposer au gouvernement la mise en place des tribunaux islamiques en vertu de l'accord de la mi-janvier, Buner faisant partie de la région de Malakand.
La provocation de trop ? Le spectacle de cette milice de talibans paradant à proximité de la capitale, et surtout leur ambition d'imposer leurs propres termes de l'accord, a créé un choc autant à Washington que dans l'opinion pakistanaise, forçant le gouvernement d'Islamabad à réagir. Depuis, l'armée s'efforce de reprendre le contrôle de Buner et, au-delà, de resserrer l'étau autour des troupes du TTP dans les districts voisins de Swat et Lower Dir.
Dans le même temps, les ponts ne sont pas coupés avec le vieux chef Sufi Mohammed, l'artisan du défunt accord que les autorités ne désespèrent pas d'accommoder afin de le couper des radicaux du TTP. Comme prévu, les tribunaux islamiques seront bien mis en place dans la région de Malakand mais en vertu d'un processus que le gouvernement entend bien maîtriser.
Par le Monde
Prodrome de l'épreuve militaire à venir, l'exode a commencé, avec ses scènes rituelles de familles paniquées se jetant sur des camionnettes ou des charrettes. Près de 40 000 résidents ont d'ores et déjà quitté la région pour affluer vers Peshawar, la capitale de la Province de la frontière du Nord-Ouest (NWFP), où les autorités en attendent dix fois plus.
Autour de Mingora, le chef-lieu du district de Swat, les escarmouches se multiplient depuis le début de la semaine entre les convois militaires, soutenus par des hélicoptères, et les rebelles islamistes qui avaient déjà creusé leur niche en ville, comme dans les montagnes alentour, dans la perspective de ce choc frontal.
Selon les autorités, 35 talibans ont été tués, mercredi 6 mai, dans des affrontements autour d'une mine d'émeraude à proximité de Mingora. Parallèlement, l'armée poursuit ses opérations dans les districts voisins de Lower Dir et Buner, afin d'en déloger les talibans qui, à partir de leur bastion de Swat, s'y étaient infiltrés ces dernières semaines. Il n'a échappé à personne au Pakistan que cette nouvelle offensive militaire, qui porte le coup de grâce à un accord avec les talibans locaux déjà moribond, coïncide avec le sommet tripartite de Washington où le président américain, Barack Obama, a tenté de convaincre ses homologues pakistanais et afghans, Asif Ali Zardari et Hamid Karzaï, de joindre leurs efforts dans la lutte contre l'extrémisme islamiste.
"GUERRE AMÉRICAINE"
Comme de coutume, des voix nationalises se sont élevées pour déplorer que le gouvernement pakistanais cède à la pression américaine en renouant avec la ligne dure contre les talibans. L'anti-américanisme récurrent de l'opinion pakistanaise, encline à mettre les maux du pays sur le compte des ingérences de Washington, a souvent placé sur la défensive le gouvernement pakistanais, accusé de se rallier à une "guerre américaine".
Cette fois-ci, pourtant, le climat a quelque peu changé. Car l'exaspération monte dans l'opinion face à l'intransigeance de talibans avec qui les efforts de compromis se soldent inévitablement par des échecs. "Les doutes qui pouvaient exister sont maintenant dissipés, écrit, jeudi, un éditorialiste du quotidien The News. Les talibans ont démontré qu'ils trompaient leur monde et n'étaient pas dignes de confiance. Il n'y a désormais plus de doute que les talibans de Swat doivent être éradiqués."
Ces commentaires belliqueux s'expliquent par la déception de nombreux Pakistanais qui attendaient beaucoup de l'accord de paix sur la région de Malakand (dont Swat fait partie). Le compromis avait été signé à la mi-janvier entre les autorités locales de la Province de la frontière du Nord-Ouest et Sufi Mohammed, le chef historique du Tehrik Nifaz shariat-e-Mohammadi (TNSM), un groupe qui lutte depuis la fin des années 1980 pour l'imposition de la charia (loi islamique) dans le Malakand.
Libéré opportunément de prison fin 2008, Sufi Mohammed était chargé de convaincre les combattants du Tehrik-e-taliban Pakistan (TTP) - le mouvement taliban qui contrôlait de facto la vallée de Swat depuis l'été 2007 - de déposer les armes en échange de la mise en place de tribunaux islamistes. Une promesse qui n'a pas été tenue.
Comme le craignaient les adversaires du compromis, les talibans ont mis à profit cette trêve pour reconstituer leurs forces et même se projeter au-delà de leurs fiefs traditionnels. Il y a deux semaines, ils effectuaient une percée jusqu'au district voisin de Buner, patrouillant en escouades lourdement armées au coeur du chef-lieu Doggar, situé à 110 km d'Islamabad. Leur objectif proclamé était d'imposer au gouvernement la mise en place des tribunaux islamiques en vertu de l'accord de la mi-janvier, Buner faisant partie de la région de Malakand.
La provocation de trop ? Le spectacle de cette milice de talibans paradant à proximité de la capitale, et surtout leur ambition d'imposer leurs propres termes de l'accord, a créé un choc autant à Washington que dans l'opinion pakistanaise, forçant le gouvernement d'Islamabad à réagir. Depuis, l'armée s'efforce de reprendre le contrôle de Buner et, au-delà, de resserrer l'étau autour des troupes du TTP dans les districts voisins de Swat et Lower Dir.
Dans le même temps, les ponts ne sont pas coupés avec le vieux chef Sufi Mohammed, l'artisan du défunt accord que les autorités ne désespèrent pas d'accommoder afin de le couper des radicaux du TTP. Comme prévu, les tribunaux islamiques seront bien mis en place dans la région de Malakand mais en vertu d'un processus que le gouvernement entend bien maîtriser.
Par le Monde
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