j.-p. guilloteau/l'express
Trop chers ? La crise antillaise et le référendum de Mayotte ont relancé en métropole le débat sur les DOM-TOM. Et ravivé les malentendus sur les "confettis de l'Empire". Voici pourquoi, malgré les apparences, la France n'a pas intérêt à les "larguer".
C'est une petite musique lancinante, qui ne cesse de prendre de l'ampleur. Celle, par exemple, des commentaires laissés par d'anonymes internautes, sur les sites d'informations comme Lexpress.fr, au bas des articles consacrés aux conflits sociaux en Guadeloupe et en Martinique - "Faisons un référendum sur leur indépendance!" - ou évoquant la départementalisation de Mayotte - "C'est encore une fois l'argent du contribuable qui va être dilapidé". Celle, aussi, d'un sondage OpinionWay, publié par Le Figaro-Magazine du samedi 28 février -pendant la grève générale en Guadeloupe- selon lequel 51% des Français seraient favorables à l'indépendance de l'archipel. Celle, encore, de certains parlementaires - "de mon propre camp", soupire Yves Jégo - qui n'hésitent pas à interpeller le secrétaire d'Etat à l'Outre-Mer sur la nécessité de pousser Mayotte hors du giron tricolore...
En 2011, Mayotte deviendra le 101e département français. Ainsi en ont décidé 95,2% des électeurs qui se sont exprimés lors du referendum du 29 mars dernier.
En 2011, Mayotte deviendra le 101e département français. Ainsi en ont décidé 95,2% des électeurs qui se sont exprimés lors du referendum du 29 mars dernier.
Bref, avec un long et spectaculaire conflit aux Antilles et la création d'un cinquième DOM, sur fond de nouvelle loi et d'états généraux, et à quelques semaines de la visite de Nicolas Sarkozy aux Antilles - plusieurs fois ajournée, elle est désormais annoncée pour les 15 et 16 juin - la relation entre la métropole et ses outre-mer se trouve singulièrement chahutée. "Une prise de distance s'est faite, reconnaît Victorin Lurel, président du conseil régional de la Guadeloupe et député PS. L'opinion publique hexagonale est un peu désabusée. J'ai le sentiment que l'on nous dit: 'OK, on s'occupe de vous, mais foutez-nous la paix.' Et le moindre mouvement social est mal pris. Finalement, la Corrèze avant le Zambèze, cela fonctionne toujours !"
Le coût? "Un débat raciste"
Un malaise renforcé par la situation difficile des territoires ultramarins. Alors que, selon l'Insee, le produit intérieur brut (PIB) par habitant s'élève à 30 140 euros en moyenne en métropole, il n'atteint que 19 111 euros en Martinique, 17 221 euros en Guadeloupe, 16 244 euros à la Réunion et 12 965 en Guyane. Côté chômage, ce n'est pas mieux: au deuxième trimestre 2008 (dernières données disponibles) les quatre DOM affichaient des taux supérieurs à 20%, quand il s'élevait, à l'époque, à 7,2% en métropole, avec le triste record de l'Union européenne pour la Réunion (24,2%), et des statistiques apocalyptiques chez les jeunes (55,7% en Guadeloupe !). Les autres collectivités d'outre-mer (Saint-Pierre-et-Miquelon, Nouvelle-Calédonie, etc.) font mieux, mais restent au-dessus de la moyenne nationale.
Les DOM cumulent d'autres handicaps: selon les chiffres 2008 de l'Observatoire national de la délinquance, Guadeloupe, Martinique et Réunion figurent parmi les 10 départements les plus violents. C'est aussi outre-mer que les niveaux de revenus sont les plus faibles et que la proportion de rmistes est la plus élevée (17,8% pour l'ensemble des DOM, contre 3,1% en métropole fin 2007), etc.
Si ces constats-là sont établis depuis longtemps, la crise antillaise de cet hiver a relancé le débat sur le coût de l'outre-mer. Mais la question est complexe. L'effort total de l'Etat en faveur des territoires ultramarins s'élève, en 2009, à 16,7 milliards d'euros -dont 3,3 milliards d'exonérations fiscales. Un chiffre qui comprend les missions régaliennes que l'Etat mène dans tous les territoires de la République (justice, armée, éducation, etc.). "Cela permet d'afficher un budget important pour les populations concernées, relève Jérôme Cahuzac, député PS et rapporteur du budget de l'outre-mer. Mais si l'on retranche ces dépenses communes à tous les départements, l'effort spécifique de la collectivité en direction de l'outre-mer s'élève à quelque 7 milliards d'euros. Auxquels il convient d'ajouter les 850 millions -l'estimation vient du secrétariat d'Etat à l'Outre-Mer- débloqués par l'Etat à la suite de la crise antillaise de cet hiver.
Trop chers ? La crise antillaise et le référendum de Mayotte ont relancé en métropole le débat sur les DOM-TOM. Et ravivé les malentendus sur les "confettis de l'Empire". Voici pourquoi, malgré les apparences, la France n'a pas intérêt à les "larguer".
C'est une petite musique lancinante, qui ne cesse de prendre de l'ampleur. Celle, par exemple, des commentaires laissés par d'anonymes internautes, sur les sites d'informations comme Lexpress.fr, au bas des articles consacrés aux conflits sociaux en Guadeloupe et en Martinique - "Faisons un référendum sur leur indépendance!" - ou évoquant la départementalisation de Mayotte - "C'est encore une fois l'argent du contribuable qui va être dilapidé". Celle, aussi, d'un sondage OpinionWay, publié par Le Figaro-Magazine du samedi 28 février -pendant la grève générale en Guadeloupe- selon lequel 51% des Français seraient favorables à l'indépendance de l'archipel. Celle, encore, de certains parlementaires - "de mon propre camp", soupire Yves Jégo - qui n'hésitent pas à interpeller le secrétaire d'Etat à l'Outre-Mer sur la nécessité de pousser Mayotte hors du giron tricolore...
En 2011, Mayotte deviendra le 101e département français. Ainsi en ont décidé 95,2% des électeurs qui se sont exprimés lors du referendum du 29 mars dernier.
En 2011, Mayotte deviendra le 101e département français. Ainsi en ont décidé 95,2% des électeurs qui se sont exprimés lors du referendum du 29 mars dernier.
Bref, avec un long et spectaculaire conflit aux Antilles et la création d'un cinquième DOM, sur fond de nouvelle loi et d'états généraux, et à quelques semaines de la visite de Nicolas Sarkozy aux Antilles - plusieurs fois ajournée, elle est désormais annoncée pour les 15 et 16 juin - la relation entre la métropole et ses outre-mer se trouve singulièrement chahutée. "Une prise de distance s'est faite, reconnaît Victorin Lurel, président du conseil régional de la Guadeloupe et député PS. L'opinion publique hexagonale est un peu désabusée. J'ai le sentiment que l'on nous dit: 'OK, on s'occupe de vous, mais foutez-nous la paix.' Et le moindre mouvement social est mal pris. Finalement, la Corrèze avant le Zambèze, cela fonctionne toujours !"
Le coût? "Un débat raciste"
Un malaise renforcé par la situation difficile des territoires ultramarins. Alors que, selon l'Insee, le produit intérieur brut (PIB) par habitant s'élève à 30 140 euros en moyenne en métropole, il n'atteint que 19 111 euros en Martinique, 17 221 euros en Guadeloupe, 16 244 euros à la Réunion et 12 965 en Guyane. Côté chômage, ce n'est pas mieux: au deuxième trimestre 2008 (dernières données disponibles) les quatre DOM affichaient des taux supérieurs à 20%, quand il s'élevait, à l'époque, à 7,2% en métropole, avec le triste record de l'Union européenne pour la Réunion (24,2%), et des statistiques apocalyptiques chez les jeunes (55,7% en Guadeloupe !). Les autres collectivités d'outre-mer (Saint-Pierre-et-Miquelon, Nouvelle-Calédonie, etc.) font mieux, mais restent au-dessus de la moyenne nationale.
Les DOM cumulent d'autres handicaps: selon les chiffres 2008 de l'Observatoire national de la délinquance, Guadeloupe, Martinique et Réunion figurent parmi les 10 départements les plus violents. C'est aussi outre-mer que les niveaux de revenus sont les plus faibles et que la proportion de rmistes est la plus élevée (17,8% pour l'ensemble des DOM, contre 3,1% en métropole fin 2007), etc.
Si ces constats-là sont établis depuis longtemps, la crise antillaise de cet hiver a relancé le débat sur le coût de l'outre-mer. Mais la question est complexe. L'effort total de l'Etat en faveur des territoires ultramarins s'élève, en 2009, à 16,7 milliards d'euros -dont 3,3 milliards d'exonérations fiscales. Un chiffre qui comprend les missions régaliennes que l'Etat mène dans tous les territoires de la République (justice, armée, éducation, etc.). "Cela permet d'afficher un budget important pour les populations concernées, relève Jérôme Cahuzac, député PS et rapporteur du budget de l'outre-mer. Mais si l'on retranche ces dépenses communes à tous les départements, l'effort spécifique de la collectivité en direction de l'outre-mer s'élève à quelque 7 milliards d'euros. Auxquels il convient d'ajouter les 850 millions -l'estimation vient du secrétariat d'Etat à l'Outre-Mer- débloqués par l'Etat à la suite de la crise antillaise de cet hiver.
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