L’Observateur du Maroc Le Maroc est de plus en plus présent sur le plan économique en Afrique. Favoriserait-il les relations économiques aux dépens des relations politiques?
Dr. Khalid Chegraoui. Ces deux volets sont complémentaires, en plus d’autres tels que les relations et coopérations culturelles, scientifiques, techniques et sociales. Mais il reste que l’économique influence largement les relations politiques vers plus de pragmatisme et de realpolitik. Chose qui fait défaut parfois au sein du continent, du moment que les passions régissent en certains cas les décisions et les relations interétatiques. Aussi, il faut rappeler que le Maroc depuis son indépendance a privilégié l’action économique en Afrique. Il avait même instauré naguère un ministère des Affaires africaines. La différence c’est qu’auparavant ses actions économiques n’étaient pas visibles. De plus, le libéralisme économique et l’ouverture des frontières, en plus des stabilités politiques que certains pays africains connaissent, poussent à plus d’investissements étrangers au sein leur marché. La conjoncture économique mondiale pousse aussi à la diversification des marchés économiques et à l’élargissement des conglomérats et groupes économiques, afin de pouvoir contrecarrer les rivalités et la concurrence. Ce qui fait que la RAM, Maroc Telecom, Attijariwafa bank, BMCE, ONA, MANAGEM, … s’activent, de manière parfois agressive, à investir sur le continent. Cela ne se passe pas toujours sans heurts, du moment que certaines traditions de mauvaise gouvernance et influences étrangères poussent à une certaine rigidité dans les relations économiques comme le cas d’ Air Sénégal international et la RAM et de Maroc Telecom au Mali. Ce qui fait que l’économique n’arrive pas toujours à surpasser le politique, qui reste de rigueur en Afrique, avec des brins de passion, de non pragmatisme, de mauvaise gouvernance, d’alignement et de raisonnement abscons.
Aujourd'hui, l'Afrique n'est pas coupé idéologiquement. Certains parlent d'un axe Rabat-Dakar-Brazzaville contre un axe Alger-Lagos-Le Cap ?
Le problème dans ces axes c’est qu’ils n’existent que fictivement. A mon avis il y a une lutte pour le leadership en Afrique dont le véritable mentor est l’Afrique du Sud. Et elle en a les moyens, le reste des pays prêchant par alignement et par perfidie tels l’Algérie et le Nigeria. Quant au Maroc, sa présence africaine est plus que géographique, elle est culturelle sociale et historique. Cela dit, sa présence gêne dans le sens où elle contredit le plan stratégique sud-africain qui s’aligne sur un autre plan, celui des USA à vouloir construire un grand Moyen-Orient. Aussi, l’Afrique du Sud travaille pour une dislocation du continent qui tend vers une séparation avec l’Afrique du Nord, considérée comme blanche, arabe, musulmane, conquérante, dominatrice et au passé esclavagiste. Dans tout cela, le Nigeria joue un rôle prépondérant pour le compte de l’Afrique du Sud, du moment qu’il peut superviser cette culture arabo-musulmane, même amazigho-musulmane, avec un autre pays qui intéresse fortement l’Afrique du Sud, comme le Mali qui peut jouer le même rôle. De plus, la force démographique et économique du Nigeria l’impose comme médiateur incontournable en Afrique. D’autres pays essaient aussi de se positionner, comme l’Egypte en perte de pouvoir et surtout l’Algérie, qui travaille principalement et viscéralement pour un seul but, contrer le Maroc. Loin de tout pragmatisme, l’Algérie est en train de faire le sale boulot pour le compte de l’Afrique du Sud, qui la considère pour l’instant comme un allié temporaire ; mais elle reste une Algérie blanche, arabe et musulmane faisant partie du Moyen-Orient. Il faut souligner aussi que l’Algérie ne gêne aucunement par son économie rentière l’agressivité du capitalisme sud-africain, ce qui n’est pas le cas du Maroc.[IMG]http://www.**************.net/forums/images/smilies/biglol.gif[/IMG] En conclusion, l’Afrique du Sud cherche à réussir dans le continent ce qu’elle n’a pas réussi chez elle : évacuer le supposé Blanc d’une Afrique supposée noire.
La question du Sahara n'aurait-elle plus le même intérêt dans les relations du Maroc avec les pays d'Afrique ?
Le Sahara marocain tient une place prépondérante dans les décisions politiques et économiques du Maroc. Mais la gestion de ces relations a fortement changé depuis la fin des années 90. Il y a une forte demande de pays africains amis pour un retour du Maroc dans l’instance de l’Union, pour plus d’équilibre entre les rivalités et les leaderships. Il faut rappeler que les relations maroco-africaines n’ont jamais été plus fortes et variées que depuis le refus du Maroc de siéger dans les instances corrompues de l’Union. Mais le bon sens stipule que le Maroc, avec ses amis et ses alliés, et par pragmatisme, doit œuvrer pour son retour dans l’Union. Il reste à trouver la manière et les circonstances, ce qui ne se fera pas sans embarras. L’Afrique du Sud s’y opposera et ses sous-fifres la suivront car, pour moi, le véritable danger ne vient pas de l’Algérie mais de l’Afrique du Sud.
Le Maroc constitue-t-il aujourd'hui un modèle pour le reste des pays d'Afrique ?
Effectivement, c’est un modèle de développement économique, culturel et social de gouvernance. C’est aussi un bastion de résistance pour une africanité englobant le continent, loin des races et des couleurs. C’est enfin un modèle de tolérance, de métissage et de branchement sur tous les plans. Il représente par sa monarchie, son rite malékite et ses confréries tidjanes et qadirites un espace socioculturel important dans toute l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, principalement les bassins Sénégal et Niger.
lobservateur.ma
Dr. Khalid Chegraoui. Ces deux volets sont complémentaires, en plus d’autres tels que les relations et coopérations culturelles, scientifiques, techniques et sociales. Mais il reste que l’économique influence largement les relations politiques vers plus de pragmatisme et de realpolitik. Chose qui fait défaut parfois au sein du continent, du moment que les passions régissent en certains cas les décisions et les relations interétatiques. Aussi, il faut rappeler que le Maroc depuis son indépendance a privilégié l’action économique en Afrique. Il avait même instauré naguère un ministère des Affaires africaines. La différence c’est qu’auparavant ses actions économiques n’étaient pas visibles. De plus, le libéralisme économique et l’ouverture des frontières, en plus des stabilités politiques que certains pays africains connaissent, poussent à plus d’investissements étrangers au sein leur marché. La conjoncture économique mondiale pousse aussi à la diversification des marchés économiques et à l’élargissement des conglomérats et groupes économiques, afin de pouvoir contrecarrer les rivalités et la concurrence. Ce qui fait que la RAM, Maroc Telecom, Attijariwafa bank, BMCE, ONA, MANAGEM, … s’activent, de manière parfois agressive, à investir sur le continent. Cela ne se passe pas toujours sans heurts, du moment que certaines traditions de mauvaise gouvernance et influences étrangères poussent à une certaine rigidité dans les relations économiques comme le cas d’ Air Sénégal international et la RAM et de Maroc Telecom au Mali. Ce qui fait que l’économique n’arrive pas toujours à surpasser le politique, qui reste de rigueur en Afrique, avec des brins de passion, de non pragmatisme, de mauvaise gouvernance, d’alignement et de raisonnement abscons.
Aujourd'hui, l'Afrique n'est pas coupé idéologiquement. Certains parlent d'un axe Rabat-Dakar-Brazzaville contre un axe Alger-Lagos-Le Cap ?
Le problème dans ces axes c’est qu’ils n’existent que fictivement. A mon avis il y a une lutte pour le leadership en Afrique dont le véritable mentor est l’Afrique du Sud. Et elle en a les moyens, le reste des pays prêchant par alignement et par perfidie tels l’Algérie et le Nigeria. Quant au Maroc, sa présence africaine est plus que géographique, elle est culturelle sociale et historique. Cela dit, sa présence gêne dans le sens où elle contredit le plan stratégique sud-africain qui s’aligne sur un autre plan, celui des USA à vouloir construire un grand Moyen-Orient. Aussi, l’Afrique du Sud travaille pour une dislocation du continent qui tend vers une séparation avec l’Afrique du Nord, considérée comme blanche, arabe, musulmane, conquérante, dominatrice et au passé esclavagiste. Dans tout cela, le Nigeria joue un rôle prépondérant pour le compte de l’Afrique du Sud, du moment qu’il peut superviser cette culture arabo-musulmane, même amazigho-musulmane, avec un autre pays qui intéresse fortement l’Afrique du Sud, comme le Mali qui peut jouer le même rôle. De plus, la force démographique et économique du Nigeria l’impose comme médiateur incontournable en Afrique. D’autres pays essaient aussi de se positionner, comme l’Egypte en perte de pouvoir et surtout l’Algérie, qui travaille principalement et viscéralement pour un seul but, contrer le Maroc. Loin de tout pragmatisme, l’Algérie est en train de faire le sale boulot pour le compte de l’Afrique du Sud, qui la considère pour l’instant comme un allié temporaire ; mais elle reste une Algérie blanche, arabe et musulmane faisant partie du Moyen-Orient. Il faut souligner aussi que l’Algérie ne gêne aucunement par son économie rentière l’agressivité du capitalisme sud-africain, ce qui n’est pas le cas du Maroc.[IMG]http://www.**************.net/forums/images/smilies/biglol.gif[/IMG] En conclusion, l’Afrique du Sud cherche à réussir dans le continent ce qu’elle n’a pas réussi chez elle : évacuer le supposé Blanc d’une Afrique supposée noire.
La question du Sahara n'aurait-elle plus le même intérêt dans les relations du Maroc avec les pays d'Afrique ?
Le Sahara marocain tient une place prépondérante dans les décisions politiques et économiques du Maroc. Mais la gestion de ces relations a fortement changé depuis la fin des années 90. Il y a une forte demande de pays africains amis pour un retour du Maroc dans l’instance de l’Union, pour plus d’équilibre entre les rivalités et les leaderships. Il faut rappeler que les relations maroco-africaines n’ont jamais été plus fortes et variées que depuis le refus du Maroc de siéger dans les instances corrompues de l’Union. Mais le bon sens stipule que le Maroc, avec ses amis et ses alliés, et par pragmatisme, doit œuvrer pour son retour dans l’Union. Il reste à trouver la manière et les circonstances, ce qui ne se fera pas sans embarras. L’Afrique du Sud s’y opposera et ses sous-fifres la suivront car, pour moi, le véritable danger ne vient pas de l’Algérie mais de l’Afrique du Sud.
Le Maroc constitue-t-il aujourd'hui un modèle pour le reste des pays d'Afrique ?
Effectivement, c’est un modèle de développement économique, culturel et social de gouvernance. C’est aussi un bastion de résistance pour une africanité englobant le continent, loin des races et des couleurs. C’est enfin un modèle de tolérance, de métissage et de branchement sur tous les plans. Il représente par sa monarchie, son rite malékite et ses confréries tidjanes et qadirites un espace socioculturel important dans toute l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, principalement les bassins Sénégal et Niger.
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