23-05-2009
Dubaï Port World, Bolloré, Progosa, TMSA... Les mastodontes prennent leurs marques en attendant l’arrivée des Asiatiques, grands acteurs des lignes est-ouest.
Longtemps à l’écart de la conteneurisation, l’Afrique se rattrape à grands pas en cette mi-2009. Au nord comme au sud, des méga-complexes de transbordement doublés de zones industrielles poussent à côté de linéaires de quais, gérés par de grands majors. Ainsi, le port de Doralé à Djibouti, d’un investissement de 400 millions de dollars, aura comme premier apport le désenclavement de l’Ethiopie, améliorant la connexion de toute la zone COMESA avec la mer Rouge et le reste du monde. Le gestionnaire, DP World, tient là les clés devant bouleverser toute la géopolitique de l’Afrique de l’Est.
L’une des caractéristiques du nouvel ordre qui va se créer sera l’accélération de la cadence des échanges entre l’Asie et l’Afrique et le ralentissement progressif avec l’Europe.
Au nord-ouest du continent, le port de Tanger Med, dont l’un des méga-terminaux, géré par Maersk, sera doublé d’une zone franche gigantesque et d’un complexe industriel appelé à capter le mouvement historique de transfert des industries du nord vers le sud, se positionne aux carrefours des routes est-ouest et nord-sud. Les opérateurs industriels ont déjà pris place. Si Renault hésite, retenu par le débat franco-européen autour de la délocalisation, tel n’est pas le cas du Japonais Makita (un des leaders mondiaux des outils électroportatifs) qui a annoncé fin avril son installation dans la zone franche logistique de la capitale du Détroit. Une manière de réduire la chaîne logistique et de se rapprocher des marchés émergents africains. La tendance à la standardisation poussera les ports africains à s’équiper de terminaux de nouvelle génération. D’où les méga-investissements et l’arrivée des méga-groupes, notamment arabes, qui pénètrent pour la première fois plus en profondeur vers l’Afrique. L’annonce, au courant de ce mois d’avril, de la concession des ports de la Guinée équatoriale par Tanger Med (dont ceux de Malabo et de Bata) est tout aussi importante que l’arrivée de Dubaï Port World à Alger, Djen Djen et Dakar. Ce dernier port ayant été arraché au groupe Bolloré.
Forte concurrence
Cette concurrence directe pousse l’opérateur français qui a fondu ses enseignes africaines dans Bolloré Logistics Africa à annoncer un programme d’investissement de 45 millions d’euros pour améliorer la compétitivité du port d’Abidjan. Sera-t-il suffisant pour faire de ce projet économiquement pertinent une entreprise populaire aux yeux des Ivoiriens ? Tout dépendra en fait, susurre-t-on sur les bords du lagune Ebrié, de l’aménagement des montages actuels et de la capacité du groupe à vendre aux autorités ivoiriennes un projet épousant l’air du temps. C’est-à-dire un projet de montage dans lequel les locaux prendront une part, et pas seulement de manière symbolique.
Selon les informations, de telles exigences empêchent la concession du terminal à conteneurs du port de Conakry à Getema International de recueillir le suffrage du Guinéen moyen et l’approbation décisive du CNDD au pouvoir. A cela s’ajoute le ticket de 15 millions de dollars proposé à l’entrée, trois ans de taxes des sociétés exploitantes. A l’heure où nous mettions sous presse, nous apprenions qu’une lettre du directeur général du port autonome ordonnait à ces sociétés exploitantes de quitter le port avant le 27 avril 2009. Quelque 1700 emplois sont concernés.
Bref, malgré ces frictions, les ports africains, devenus attractifs, n’ont d’autres choix que celui de la compétitivité. Après Dakar, DP World s’intéresse à tout le golfe de Guinée. La bataille sera rude autour de Douala, exploité par le groupe Bolloré (dont la concession court jusqu’en 2020) et convoité, entre autres, par l’Espagnol Progrosa. Ce dernier, pourtant prompt à faire la morale à son concurrent, gèrerait le port de Lomé en position de force, selon les explications d’un expert de l’économie portuaire africaine qui trouve inacceptable l’écart énorme entre les loyers annuels et le chiffre d’affaires dégagé par le groupe. Ce modèle déséquilibré pourra-t-il survivre à la redistribution des cartes qui naîtra de l’après crise financière internationale ?
L’arrivée des Chinois
L’une des caractéristiques du nouvel ordre qui va se créer sera l’accélération de la cadence des échanges entre l’Asie et l’Afrique et le ralentissement progressif avec l’Europe. Dans ce contexte, l’arrivée des majors chinois, comme Hutchinson, sur le continent apparaît d’une logique inévitable et laisse prévoir autour de ces concessions une concurrence encore plus ouverte. Toutefois, les nouveaux venus devront lever beaucoup de verrous pour prendre position sur le bassin du Congo, la zone africaine la plus riche en matières premières. Car le fanion de Bolloré, qui flotte depuis le 29 avril 2009 sur Congo Terminal, au port de Pointe Noire, ressemble fortement à une anticipation sur une bataille annoncée. Vincent Bolloré, qui s’est déplacé en personne pour inaugurer le projet, retrouve sur le terrain congolais un éternel rival, Progrosa, signataire le 30 janvier dernier d’un protocole d’accords avec Socotram pour le développement des activités et services portuaires du Congo. Le Congo, qui se sait une pièce maitresse dans la rivalité entre Progrosa et Bolloré, fait jouer la concurrence. Un bon exemple à suivre ?
LesAfriques
Dubaï Port World, Bolloré, Progosa, TMSA... Les mastodontes prennent leurs marques en attendant l’arrivée des Asiatiques, grands acteurs des lignes est-ouest.
Longtemps à l’écart de la conteneurisation, l’Afrique se rattrape à grands pas en cette mi-2009. Au nord comme au sud, des méga-complexes de transbordement doublés de zones industrielles poussent à côté de linéaires de quais, gérés par de grands majors. Ainsi, le port de Doralé à Djibouti, d’un investissement de 400 millions de dollars, aura comme premier apport le désenclavement de l’Ethiopie, améliorant la connexion de toute la zone COMESA avec la mer Rouge et le reste du monde. Le gestionnaire, DP World, tient là les clés devant bouleverser toute la géopolitique de l’Afrique de l’Est.
L’une des caractéristiques du nouvel ordre qui va se créer sera l’accélération de la cadence des échanges entre l’Asie et l’Afrique et le ralentissement progressif avec l’Europe.
Au nord-ouest du continent, le port de Tanger Med, dont l’un des méga-terminaux, géré par Maersk, sera doublé d’une zone franche gigantesque et d’un complexe industriel appelé à capter le mouvement historique de transfert des industries du nord vers le sud, se positionne aux carrefours des routes est-ouest et nord-sud. Les opérateurs industriels ont déjà pris place. Si Renault hésite, retenu par le débat franco-européen autour de la délocalisation, tel n’est pas le cas du Japonais Makita (un des leaders mondiaux des outils électroportatifs) qui a annoncé fin avril son installation dans la zone franche logistique de la capitale du Détroit. Une manière de réduire la chaîne logistique et de se rapprocher des marchés émergents africains. La tendance à la standardisation poussera les ports africains à s’équiper de terminaux de nouvelle génération. D’où les méga-investissements et l’arrivée des méga-groupes, notamment arabes, qui pénètrent pour la première fois plus en profondeur vers l’Afrique. L’annonce, au courant de ce mois d’avril, de la concession des ports de la Guinée équatoriale par Tanger Med (dont ceux de Malabo et de Bata) est tout aussi importante que l’arrivée de Dubaï Port World à Alger, Djen Djen et Dakar. Ce dernier port ayant été arraché au groupe Bolloré.
Forte concurrence
Cette concurrence directe pousse l’opérateur français qui a fondu ses enseignes africaines dans Bolloré Logistics Africa à annoncer un programme d’investissement de 45 millions d’euros pour améliorer la compétitivité du port d’Abidjan. Sera-t-il suffisant pour faire de ce projet économiquement pertinent une entreprise populaire aux yeux des Ivoiriens ? Tout dépendra en fait, susurre-t-on sur les bords du lagune Ebrié, de l’aménagement des montages actuels et de la capacité du groupe à vendre aux autorités ivoiriennes un projet épousant l’air du temps. C’est-à-dire un projet de montage dans lequel les locaux prendront une part, et pas seulement de manière symbolique.
Selon les informations, de telles exigences empêchent la concession du terminal à conteneurs du port de Conakry à Getema International de recueillir le suffrage du Guinéen moyen et l’approbation décisive du CNDD au pouvoir. A cela s’ajoute le ticket de 15 millions de dollars proposé à l’entrée, trois ans de taxes des sociétés exploitantes. A l’heure où nous mettions sous presse, nous apprenions qu’une lettre du directeur général du port autonome ordonnait à ces sociétés exploitantes de quitter le port avant le 27 avril 2009. Quelque 1700 emplois sont concernés.
Bref, malgré ces frictions, les ports africains, devenus attractifs, n’ont d’autres choix que celui de la compétitivité. Après Dakar, DP World s’intéresse à tout le golfe de Guinée. La bataille sera rude autour de Douala, exploité par le groupe Bolloré (dont la concession court jusqu’en 2020) et convoité, entre autres, par l’Espagnol Progrosa. Ce dernier, pourtant prompt à faire la morale à son concurrent, gèrerait le port de Lomé en position de force, selon les explications d’un expert de l’économie portuaire africaine qui trouve inacceptable l’écart énorme entre les loyers annuels et le chiffre d’affaires dégagé par le groupe. Ce modèle déséquilibré pourra-t-il survivre à la redistribution des cartes qui naîtra de l’après crise financière internationale ?
L’arrivée des Chinois
L’une des caractéristiques du nouvel ordre qui va se créer sera l’accélération de la cadence des échanges entre l’Asie et l’Afrique et le ralentissement progressif avec l’Europe. Dans ce contexte, l’arrivée des majors chinois, comme Hutchinson, sur le continent apparaît d’une logique inévitable et laisse prévoir autour de ces concessions une concurrence encore plus ouverte. Toutefois, les nouveaux venus devront lever beaucoup de verrous pour prendre position sur le bassin du Congo, la zone africaine la plus riche en matières premières. Car le fanion de Bolloré, qui flotte depuis le 29 avril 2009 sur Congo Terminal, au port de Pointe Noire, ressemble fortement à une anticipation sur une bataille annoncée. Vincent Bolloré, qui s’est déplacé en personne pour inaugurer le projet, retrouve sur le terrain congolais un éternel rival, Progrosa, signataire le 30 janvier dernier d’un protocole d’accords avec Socotram pour le développement des activités et services portuaires du Congo. Le Congo, qui se sait une pièce maitresse dans la rivalité entre Progrosa et Bolloré, fait jouer la concurrence. Un bon exemple à suivre ?
LesAfriques
Commentaire