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L'eau, un trésor en partage

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    3 questions à…Ghislain de Marsily

    Membre de l'Académie des sciences, Ghislain de Marsily est hydrologue, associé au laboratoire « Structure et fonctionnement des hydrosystèmes continentaux » (Sisyphe, CNRS / EPHE / Université Paris-VI).

    Ce que l'on appelle communément la « crise de l'eau » semble glisser sur les vrais problèmes – puisque « de l'eau, il n'en manque pas ! ». Votre livre, qui s'adresse à tous, propose une analyse rigoureuse de la situation : où est donc le véritable problème ?
    De l'eau, il n'en manque pas et, de plus, cette eau ne s'épuise pas – contrairement au pétrole –, car elle est constamment renouvelée par son « cycle » ! En ce qui concerne les changements climatiques, ils vont plutôt, mondialement, augmenter les ressources en eau que les réduire ; enfin, nous ne consommons, aujourd'hui qu'un peu plus de 5 % des ressources en eau. Le véritable problème n'est pas dans les stocks d'eau mais dans les flux, dans la répartition de cette ressource sur la planète par rapport à la répartition de la population : comment fournir la nourriture nécessaire aux 6,7 milliards d'habitants, dont un milliard de sous-alimentés, et surtout aux 9 milliards prévus pour 2050 ? Or, fournir cette nourriture demande énormément d'eau du fait des habitudes alimentaires de la population mondiale. Si, en particulier, nous mangeons beaucoup de viande, la quantité d'eau nécessaire devient encore plus considérable. Il faut savoir qu'environ 96 % de l'eau que nous consommons, si on y inclut l'eau de l'agriculture pluviale, sert à la production alimentaire. Le problème de fond est donc : comment produire la nourriture dont nous avons besoin ? Une analyse de la capacité de la planète à produire cette nourriture montre que les ressources en eau et en sols sont, pour certains pays, voire pour certains continents, des facteurs limitants de la production alimentaire. Pour ces régions (Afrique du Nord, Moyen-Orient, Asie, Chine du Nord, Australie…), il y a donc bien un problème de ressource en eau pour produire la nourriture. Mais à l'échelle globale, il y a tout à fait suffisamment de sols et d'eau pour nourrir la planète même en 2050, même avec 9 milliards d'habitants – si toutefois, on limite la consommation de viande. Les pays capables de produire la nourriture supplémentaire dont nous aurons besoin seront principalement l'Amérique du Sud, l'Afrique subsaharienne et, du fait du réchauffement climatique, l'Europe du Nord, la Russie (Sibérie) et l'Amérique du Nord.

    Ce n'est donc pas un problème de manque d'eau, mais un problème écologique, démographique, politique ?
    En effet. Écologique : pour produire la nourriture nécessaire, il faudra augmenter considérablement les surfaces cultivées et, donc, réduire inexorablement les espaces naturels (forêts, prairies, savanes), ce qui se fera aux dépens des écosystèmes naturels et de la biodiversité ; démographique : plus la planète sera peuplée, plus difficile sera le problème ; politique : des pays ou des continents entiers devront accepter de ne plus pouvoir assurer leur autosuffisance alimentaire et de dépendre de productions venant d'autres continents.

    Difficile avenir pour Homo sapiens…
    Bien que ce soit là une évidence, souvenons-nous que l'homme n'est pas le seul sur terre à utiliser les ressources en eau : tous les écosystèmes naturels ont besoin d'eau pour exister, que ce soit dans les milieux aquatiques (rivières, lacs) ou surtout dans les milieux terrestres naturels (forêts, savanes). Jusqu'à quel niveau pourrons-nous augmenter nos prélèvements et espérer quand même conserver une planète « vivante » où ces écosystèmes prospèrent et nous permettent d'exister ? En somme, « l'avenir de l'eau », ce n'est pas sa rareté, c'est son partage équitable entre tous, aussi bien entre les hommes qu'avec l'ensemble de la faune et de l'environnement.

    Propos recueillis par Léa Monteverdi
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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