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Quand le consommateur travaille gratis sans le savoir

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  • Quand le consommateur travaille gratis sans le savoir

    Régler ses achats à une caisse automatique, suivre les instructions d'une boîte vocale pour changer de forfait téléphonique, enregistrer ses bagages : le consommateur travaille à l'oeil sans le savoir. C'est la thèse de Marie-Anne Dujarier, sociologue et auteur de l'étude « Le Travail du consommateur » (La Découverte, 2008), qui analyse ce phénomène pour Rue89

    Je pars de l'observation que les entreprises demandent de plus en plus au consommateur de coproduire ce qu'il achète. Je parle de « travail » à partir du moment où la tâche qui lui échoit suppose une implication physique ou cognitive, qu'elle est inscrite dans un rapport social et enfin, qu'elle crée de la valeur pour l'actionnaire.


    Quelles formes peut prendre ce travail du consommateur
    On peut en distinguer trois :

    1_C'est l'externalisation de tâches rendues très simples vers le consommateur. Ceci est surtout visible dans l'extension du self-service : pompes à essence, caisses automatiques dans les gares ou les cinémas, self scanning… La plupart du temps, le client est contraint ou fermement incité à les utiliser.


    2_Le fait de faire appel à l'envie que les gens ont de travailler, même bénévolement. Il s'agit de capter dans la foule, des oeuvres, des données, des idées, des productions dans un but lucratif. Il s'agit typiquement des vidéos sur Youtube, ou des informations abandonnées sur Facebook, comme de la participation à des tests de produits… Ici, le consommateur vient travailler de lui-même, pour le sentiment d'utilité, la quête de reconnaissance et la socialisation que procure l'activité.


    3_Le travail d'organisation : il s'agit des efforts que doivent déployer le consommateur pour résoudre les contradictions créés par le marketing, qui le traque et le fait « roi » simultanément.



    Qui gagne, qui perd à ce système de coproduction ?

    Pour les entreprises, les consommateurs sont vus comme une main d'oeuvre gratuite, abondante et parfois enthousiaste à la tâche. La relation de service réapparaît cependant parfois, lorsque les gens ont trop de difficultés à faire le travail. Mais ce retour est le plus souvent payant, en temps ou en argent.
    En ce qui concerne les clients, c'est d'abord une question de compétence : ceux qui sont capables de se débrouiller avec les systèmes y trouvent un important bénéfice objectif et subjectif. Ça va vite, c'est parfois moins cher, c'est même parfois agréable à faire…

    En revanche, l'incapacité à accomplir la tâche peut être vécue négativement. Dans ce cas, la technologie est mise en accusation plutôt que l'organisation du travail. Par exemple, lorsqu'une consommateur appelle un répondeur pour résoudre un problème technique et qu'il échoue à trouver une solution à son cas, c'est généralement contre celui-ci qu'il s'insurge, plus que contre l'organisation du travail qui lui impose d'effectuer cette réparation lui-même, avec un automate.

    Quelles catégories de la population sont les plus susceptibles d'être exclues par ces nouveaux dispositifs ?

    Contrairement à ce que l'on pense, le critère discriminant est moins l'âge que la classe sociale : un cadre retraité, par exemple, pourra être plus à l'aise qu'un jeune homme qui n'a pas eu d'occasion de se former à l'informatique, par exemple y a aussi la question de la compréhension même de la logique de la tâche à accomplir, et la maîtrise des présupposés culturels et langagiers : quelqu'un qui n'a jamais pris le métro à Paris, peut-il comprendre ce que lui dit la machine lorsqu'elle lui demande de présenter son « pass Navigo » ?
    Enfin, l'illettrisme est évidemment un problème pour réaliser toutes les tâches qui passent par de l'écrit. De nouvelles situations de handicap apparaissent donc ici

    Quel est le bilan social du travail des consommateurs ?

    Les entreprises cherchent à réduire la masse salariale. Néanmoins, la coproduction peut aussi entraîner le développement de nouveaux emplois dans le champ de la conception et de la maintenance des systèmes experts, comme ce fut le cas dans l'automatisation du travail en usine ou dans le tertiaire. De plus, les tâches de contrôle qui ne sont pas prises en charge par la machine et par le consommateur, mènent à multiplier les postes de vigiles


    Peut-on envisager une action en justice d'un consommateur pour « travail dissimulé » ?

    Cette expression juridique a été employée a propos d'une forme spécifique de travail du consommateur : la téléréalité. Selon moi, on peut bien parler de travail concernant les acteurs amateurs dans ce cas.
    Ils sont des téléspectateurs qui coproduisent une émission. De là à appliquer cette expression aux autres formes de coproduction… pour l'instant, aucune action collective n'a été intentée contre ces pratiques.
    Et à ma connaissance, les associations de consommateurs ne sont pas encore emparées de la question de ce point de vue. Notons que des sites Internet mettent en place des petites rémunérations, au statut incertain, pour attirer les meilleurs contributeurs

    La crainte que ces dispositifs ne mènent à une déshumanisation de la consommation vous semble-t-elle justifiée ?

    Il faudrait préciser ce qu'on appelle « déshumanisation ». Le développement technique, par exemple, est tout ce qu'il y a de plus humain ! En outre, l'automatisation n'est pas directement corrélée à la suppression des relations sociales.
    Par exemple, dans certains pays, des agents se tiennent près des caisses automatiques pour aider les clients à remplir leur sac. Les relations sociales peuvent être très correctes en dépit, et même grâce aux machines. C'est l'organisation du travail, résultat d'un rapport social, qui encadre la qualité des relations entre les hommes dans ces situations de consommation

    Par Dominique Albertini
    Source : ru.e89.com.
    Dernière modification par arayzon, 04 juin 2009, 13h42.
    La pire chose pour l'Homme, serait qu'il meurt idiot.
    De grâce épargnez-moi la prolixe, la syntaxe et la chiffrerie à tout va
    .
    Merci.
    " TOUCHE PAS A MA NAPPE ALBIENNE "
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