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La Kabylie malade de son environnement

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  • La Kabylie malade de son environnement

    Des strophes fort inspirées de l’étoile montante de la chanson kabyle, Zedeg Mouloud, nous renvoient à une triste réalité que vit la Kabylie depuis quelques années en matière d’environnement et du cadre de vie.

    Sachets en plastique voltigeant au gré des vents comme des corbeaux, puanteurs drainées par les eaux usées ruisselant à ciel ouvert et autres objets ou milieux pestilentiels font partie du décor quotidien de la nouvelle Kabylie.

    Quel touriste étranger, quel citoyens sensé et quel gestionnaire conscient de ses responsabilité pourront soutenir la vue de ces décharges sauvages, monticules laids et putrides, qui jonchent la belle terre de Kabylie ?

    Le dépotoir de Oued Falli à la sortie de Tizi Ouzou, la décharge de la RN 26 à la sortie de Sidi Aïch, le pic fumant de la décharge sauvage d’Aghbalou en plein Parc national du Djurdjura, les deux grands réceptacles d’ordures de Aïn El Hammam, tous ces lieux méphitiques sont les cloaques de nos échecs et de nos errements.

    En cette Journée mondiale de l’environnement, le 5 juin, il importe de faire le bilan de la gestion environnementale des wilayas de la Kabylie. C’est une actualité lourde qui fait l’inexorable quotidien des habitants de la montagne et des villages kabyles. Les pages des journaux qui en parlent presque régulièrement contiennent paradoxalement l’actualité la plus impérissable, la moins aléatoire et la plus prégnante des femmes et des hommes que le hasard ou la nécessité ont placés sur ces pitons et ces vallons dont on a tant chanté la beauté et l’exubérance.

    Cependant, les luttes politiciennes entre coteries désuètes, les conflits entre administration et élus exacerbés par des intérêts bassement personnels et par l’obsolescence du code communal en vigueur ainsi que d’autres handicaps liés à notre condition de pays sous-développé, particulièrement sur le plan culturel et éducatif, font que les populations sont prises en otage dans leur santé physique et mentale.

    L’un des signes probants de la manière dont sont gérées les affaires locales est justement le cadre de vie des citoyens. Dans les milieux urbains, la chute aux enfers ne date pas d’aujourd’hui. Les monticules d’ordures garnissant même la périphérie immédiate de certains hôpitaux, les eaux usées dégoulinant le long des murs des bâtiments et les conduites d’AEP jaillissant tels des geysers ne choquent presque plus la vue. L’élu ou le policier, dans un sentiment d’impuissance coupable, ferment les yeux sur ces sites immondes comme n’importe quel quidam.

    Cependant, jusqu’à un passé récent, l’arrière-pays montagneux vivait dans un relatif «bonheur» écologique comme ultime compensation des «privilèges» que la ville est censée prodiguer à ses habitants.

    Les habitants de la Kabylie, malgré la pauvreté du sol et le relief accidenté, vivaient en harmonie avec le milieu. Le système austère et discipliné de Tajmaât ne permettait aucun écart ou comportement délictueux qui nuirait à la collectivité. On n’avait même pas besoin de sapeurs-pompiers pour éteindre les incendies de forêt. La moindre déclaration d’une fumée suspecte mobilisait tout le village qui étouffait dans l’œuf le début d’incendie. Aujourd’hui, la dégradation des milieux physique et biologique a atteint sur nos montagnes et dans nos vallées un tel degré de dangerosité qu’aucune demi-mesure ne saurait contenir. Que deviendra le barrage de Taksebt si des stations de traitement ne sont pas installées en son amont ? N’y aurait-il aucune solution au problème du pillage de sable du Sebaou et de la Soummam ?

    Il importe aussi de savoir que le tarissement d’un grand nombre de sources de montagne n’a que peu de chose à voir avec la sécheresse cyclique qui caractérise notre climat. Le phénomène est surtout imputable à l’anarchie dans les travaux d’infrastructure (routes, pistes) et d’urbanisme. Que dire alors du rétrécissement en peau de chagrin du couvert forestier kabyle sinon qu’il expose les versants de ces montagnes à une désertification désastreuse qui réduira l’oxygène, anéantira le bois et les fourrages et déstabilisera dangereusement les sols.

    Une autre politique de l’aménagement du territoire et de la protection des ressources naturelles capable de renverser la vapeur et de sauver ce qui peut encore l’être en travaillant pour un éco-développement durable est toujours possible en Kabylie. Demeure la volonté politique.

    Par Amar Naït Messaoud, La Dépêche de Kabylie
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