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Le Hezbollah séduit au-delà de la communauté chiite au Liban

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  • Le Hezbollah séduit au-delà de la communauté chiite au Liban

    Selon Charles, père de famille qui se rendra aux urnes dans son village chrétien à 10 km au sud de Saïda, "le calcul est simple. Qui nous a libérés de l'occupation israélienne ? Pas l'armée libanaise, ni l'ONU : le Hezbollah. Qui a gagné la guerre de 2006 ? Qui, seul, nous protégera d'une autre attaque ? le Hezbollah". "Après la libération (le 24 mai 2000), se souvient-il, le Hezbollah n'a même pas demandé aux chrétiens d'arrêter de vendre du whisky. Il a juste exigé de ne plus l'importer d'Israël."

    C'est dire si les questions que soulève au Liban une éventuelle victoire du camp du mouvement chiite aux élections législatives, prévues dimanche 7 juin, ne se résument pas à un différend autour d'un projet de société, même si d'autres chrétiens s'épouvantent à l'idée de "se réveiller le 8 juin en tchador".

    L'emprise du Hezbollah dans le Liban sud et dans la place forte de Baalbek, au nord de la Bekaa, est indéniable. Les portraits de "martyrs" jalonnent les routes, avec ceux, plus symptomatique de l'ancrage idéologique du parti, de l'ayatollah Khomeyni ou de Khamenei, l'actuel Guide de la révolution islamique iranienne. Dans les faubourgs du sud de Beyrouth, sa puissance est même totale. Ni l'armée ni la police libanaises n'y pénètrent plus, la sécurité - y compris la circulation routière - étant dévolue à des agents du Hezbollah paradant dans leurs propres uniformes.

    "MENACE POUR LA SÉCURITÉ"

    Ces régions sont à forte majorité chiite, cette communauté longtemps laissée pour compte des richesses et du pouvoir libanais. Pour autant, la popularité du mouvement chiite n'épouse pas nécessairement les contours communautaires. A l'opposé d'une partie de la communauté chrétienne (les partisans du général Michel Aoun clament que "jamais, le chiite n'a tourné ses armes contre le chrétien"), il se trouve des voix chiites pour s'élever contre le Hezbollah. Ainsi Ahmad Al-Assaad, issu d'une vieille famille féodale, jadis grande propriétaire terrienne de Taïbeh, à 5 km de la "Ligne bleue" israélo-libanaise. M. Assaad, candidat aux législatives, est l'initiateur de l'Option libanaise, un parti chiite qui s'oppose à "l'option iranienne" que représenterait son puissant adversaire du Hezbollah. "Notre problème n'est pas de convaincre les chiites du Liban d'adhérer à nos idées. Après la guerre de 2006, beaucoup se sont mis à considérer le Hezbollah comme une menace pour leur sécurité et leur avenir économique, affirme-t-il. Notre problème est de vaincre leur peur. Les chiites subissent ce que les Russes subissaient à l'époque soviétique. S'ils ne sont pas en faveur du Hezbollah, ils sont dénoncés comme traîtres, sionistes et non-croyants. Il faut beaucoup de force pour résister ouvertement."

    Depuis le début de la campagne électorale, M. Assaad a compté 36 voitures de ses partisans brûlées. Fin mai, son quartier général de Chiyyah (sud de Beyrouth) a été attaqué aux cocktails Molotov. Résultat, "les Libanais ont peur, le gouvernement a peur. Même les Européens n'osent pas traiter avec moi de peur de représailles contre leurs casques bleus", dénonce-t-il.

    Conséquence de l'opacité qui caractérise ses structures politiques et militaires, personne ne sait quelle force représente le Hezbollah. Une source du renseignement libanais avance le chiffre invérifiable de "6 000 officiers de premier rang, et 15 000 de second rang". "On a longtemps cru que seuls les Israéliens savaient mais, depuis la guerre de 2006, il est devenu évident qu'ils n'étaient pas mieux renseignés que nous", note un diplomate étranger.

    Lors d'une enquête menée à Téhéran début 2007, Michel Nawfal, rédacteur en chef au quotidien Mustaqbal lié à la majorité, citant des sources proches du centre du pouvoir iranien, a évalué entre 28 et 30 millions de dollars (de 18 à 20 millions d'euros), la somme allouée chaque mois par le Parlement iranien au Hezbollah, ce qui ne prend en compte ni l'armement ni les autres réseaux de financement dont bénéficie le mouvement.

    "Le Hezbollah est sorti renforcé de la guerre de 2006 contre Israël par une nouvelle légitimité et un prestige accru sur le plan régional, analyse aujourd'hui M. Nawfal. Sa normalisation complète au sein de l'Etat libanais qui résulterait d'un succès aux élections serait bénéfique, juge-t-il, dans la mesure où le Hezbollah ne ferait plus figure de carte à jouer entre Syriens et Israéliens ou entre Iraniens et Américains. Mais sa puissance ainsi que sa stratégie "d'Etat de confrontation" qui ressort du discours de ses dirigeants dépassent dangereusement la capacité d'un petit pays comme le Liban."

    Par Le Monde
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