L’Algérie et le Maroc ont tous deux des jeunesses dynamiques, des élites sociales bien ancrées dans leurs passés berbère, arabe et musulman et ouvertes sur la culture occidentale, des ressources naturelles diversifiées, des milliers de kilomètres de côtes donnant sur l’Europe et sur l’Amérique, un marché de 70 millions d’habitants, ce qui permet des économies d’échelle en vue d’une production compétitive, etc. Et pourquoi, malgré ces atouts, cet échec sur le plan culturel, économique et politique, y compris dans la construction maghrébine très en deçà des attentes et des sentiments des populations ? Mon hypothèse est que le nationalisme dans les deux pays a montré des limites idéologiques qui ont empêché les sociétés maghrébines de produire leurs propres modernités. Importé d’Occident, le nationalisme divise et se réduit au chauvinisme lorsqu’il n’y a pas les cadres légaux d’expression des différents groupes, lorsqu’il n’y a pas des institutions de régime démocratique.
Le nationalisme post-colonial a été négatif pour les relations entre les pays du Maghreb, en opposant l’Algérie et le Maroc, reproduisant localement les rivalités de la guerre froide entre l’URSS et les USA. Les deux régimes ne se sont même pas aperçus que la guerre froide a pris fin et que le Mur de Berlin s’est effondré et continuent de s’opposer sur la question du Sahara occidental. Depuis les indépendances, nous avons reproduit entre nos deux pays, des relations de rivalités tribales. Certes, comme des cousins qu’unit et oppose la segmentarité lignagère, nous nourrissons les uns pour les autres affection et jalousie. Comme dit le proverbe de bien de chez nous, «nous nous mâchons, mais nous ne nous avalerons pas». C’est en cela que les relations entre nos deux Etats sont restées traditionnelles, n’arrivant pas à dépasser les sentiments affectifs pour déboucher sur des institutions modernes d’Etat à Etat respectant leurs citoyens considérés comme des sujets de droit dans n’importe quelle partie du Maghreb.
Ce n’est pas le Sahara occidental qui est l’obstacle au rapprochement entre les deux peuples, mais plutôt le déficit démocratique de leurs Etats qui favorise la surenchère nationaliste. Au Maroc, au début des années 1970, les partis et le Palais sont entrés en compétition pour le monopole du nationalisme et se sont mobilisés autour du mot d’ordre d’achèvement de la libération nationale. Nous connaissons la suite. Le Palais a fait de l’achèvement de la libération nationale une «mission sacrée» et a ainsi affaibli politiquement les partis. Critiquer le Roi dans les années 1970 et 1980, c’était l’affaiblir dans sa tentative de récupérer le Sahara occidental et était perçu comme un acte anti-national. La construction de l’Etat de droit, le développement économique, etc. n’étaient plus la priorité. En Algérie, la question du Sahara a relevé des compétences de la hiérarchie militaire et il n’y a jamais eu de débat libre sur cette question. Les quelques articles de journaux, quand ils n’étaient pas commandités par ceux qui savent «chauffer le bendir», relevaient plus de la rivalité inconsciente entre cousins que de l’analyse politique rigoureuse. Parmi les militaires, celui qui aurait proposé une solution de compromis aurait été accusé de tiédeur nationaliste et aurait été écarté du cercle des décideurs. C’est ce qui explique pourquoi le général K. Nezzar a attendu d’être à la retraite pour donner un point de vue diamétralement opposé à celui qu’il défendait quand il exerçait les fonctions de ministre de la Défense. Il a déclaré ici à Rabat à un journal local que le Sahara est marocain. Il n’a pas fait cette déclaration à Alger pour ouvrir un débat national; il l’a faite à Rabat, jetant de l’huile sur le feu. Ceci est révélateur du niveau de maturité politique des dirigeants algériens.
le Texte en entier est ICI
Le nationalisme post-colonial a été négatif pour les relations entre les pays du Maghreb, en opposant l’Algérie et le Maroc, reproduisant localement les rivalités de la guerre froide entre l’URSS et les USA. Les deux régimes ne se sont même pas aperçus que la guerre froide a pris fin et que le Mur de Berlin s’est effondré et continuent de s’opposer sur la question du Sahara occidental. Depuis les indépendances, nous avons reproduit entre nos deux pays, des relations de rivalités tribales. Certes, comme des cousins qu’unit et oppose la segmentarité lignagère, nous nourrissons les uns pour les autres affection et jalousie. Comme dit le proverbe de bien de chez nous, «nous nous mâchons, mais nous ne nous avalerons pas». C’est en cela que les relations entre nos deux Etats sont restées traditionnelles, n’arrivant pas à dépasser les sentiments affectifs pour déboucher sur des institutions modernes d’Etat à Etat respectant leurs citoyens considérés comme des sujets de droit dans n’importe quelle partie du Maghreb.
Ce n’est pas le Sahara occidental qui est l’obstacle au rapprochement entre les deux peuples, mais plutôt le déficit démocratique de leurs Etats qui favorise la surenchère nationaliste. Au Maroc, au début des années 1970, les partis et le Palais sont entrés en compétition pour le monopole du nationalisme et se sont mobilisés autour du mot d’ordre d’achèvement de la libération nationale. Nous connaissons la suite. Le Palais a fait de l’achèvement de la libération nationale une «mission sacrée» et a ainsi affaibli politiquement les partis. Critiquer le Roi dans les années 1970 et 1980, c’était l’affaiblir dans sa tentative de récupérer le Sahara occidental et était perçu comme un acte anti-national. La construction de l’Etat de droit, le développement économique, etc. n’étaient plus la priorité. En Algérie, la question du Sahara a relevé des compétences de la hiérarchie militaire et il n’y a jamais eu de débat libre sur cette question. Les quelques articles de journaux, quand ils n’étaient pas commandités par ceux qui savent «chauffer le bendir», relevaient plus de la rivalité inconsciente entre cousins que de l’analyse politique rigoureuse. Parmi les militaires, celui qui aurait proposé une solution de compromis aurait été accusé de tiédeur nationaliste et aurait été écarté du cercle des décideurs. C’est ce qui explique pourquoi le général K. Nezzar a attendu d’être à la retraite pour donner un point de vue diamétralement opposé à celui qu’il défendait quand il exerçait les fonctions de ministre de la Défense. Il a déclaré ici à Rabat à un journal local que le Sahara est marocain. Il n’a pas fait cette déclaration à Alger pour ouvrir un débat national; il l’a faite à Rabat, jetant de l’huile sur le feu. Ceci est révélateur du niveau de maturité politique des dirigeants algériens.
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