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La camisole hydrocarbure

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    La camisole hydrocarbure
    par Kamel Daoud
    C'est le paradoxe d'un faux Zénon algérois: le régime ne peut tomber que si le pétrole tombe. Mais si le pétrole tombe, c'est le peuple qui tombe en premier. Le régime se tient parce qu'il peut se passer du peuple comme chacun le sait. Vous pouvez pétitionner pour sauver le parc d'El-Kalaa, il vous donnera même du papier et un stylo. Vous laissera jacasser, vider les batteries, se vider puis continuera ce qu'il a décidé. Vous dénoncer une fraude, un vol en live, un projet de déboisement, on vous laissera faire puis on fait ce que l'on a décidé. Le rapport régime/peuple n'est pas filial, mais infantile. Il est à base de farine, pas de respect de la majorité. La raison?

    Selon le faux Zénon, tant que le pétrole coule, le régime est autonome, transcendant, impassible et totalement hermaphrodite. Dans la géographie des pays à hydrocarbures, le peuple n'est qu'un encombrement, un dos d'âne dans un tuyau. Pour que le régime tombe, il faut donc que le pétrole cesse de couler. Appauvri, sans possibilité d'acheter la paix sociale et de vendre du vent par ENTV, le régime devient faible, perd ses dents, se désosse, se rétracte et finit isolé comme une entreprise publique en faillite. Les siens se mangeront les uns les autres et finiront par être réduits à un seul bonhomme, le plus fort d'entre les faibles, qui sera alors lapidé, jugé pour crime contre l'Indépendance et jeté à la mer avec deux olives et une chaloupe récalcitrante. C'est le scénario le plus plausible et la seule voie pour libérer le pays faute d'armes et de possibilité de lutte par les forces vives.

    Reste que ce n'est pas vrai: si le pétrole cesse de couler, c'est le peuple qui coule en premier. Sans métiers hors le pétrole, sans maîtrise des techniques agricoles, sans élites traduisibles en langage simple et sans économie de semoule au-delà de trois jours ouvrables, le peuple va être le premier à ressentir les effets de la faim, le premier à manger la poussière. L'après-pétrole c'est déjà l'au-delà pour nous, un remake du jugement dernier. Le régime sera un peu menacé mais il se contentera d'élaguer un peu son personnel, de réduire ses dépenses et de couper dans ses budgets de corruptions. Il annulera quelques élections faute d'argent, vous obligera à payer la vignette automobile une fois par mois et frappera violemment à la tête toute émeute de semoule et toute prétention de révolution par la foule. Plus intelligent à cause de la menace publique et d'une longue histoire de maquis, il vous divisera en petits morceaux inégalement armés pour que vous vous mangiez les uns les autres et invoquera Dieu et le concept fataliste des «temps durs» pour vous vider de votre colère.

    Tout le monde sait que la zone autonome d'Alger a survécu à tout: Octobre 88, le FIS, les massacres périphériques, les attentats, la troïka européenne et les ONG des droits de l'homme. C'est le pétrole qui le fait vivre et sans le pétrole c'est vous qui mourrez en premier, pas lui. Le faux Zénon est un faux bien sûr, mais le paradoxe est vrai. Il n'a pas de solution mathématique. Dans les deux cas, vous êtes mort. Dans les deux cas, il s'en sortira vivant.

    Source: Le Quotidien d'Oran
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "

  • #2
    Oui!
    Les rares fois où le régime a fait des concessions en matière d'avancées démocratiques, c'est lors des contre-chocs pétroliers. Sinon, il a toujours sorti le bâton!
    "La chose la plus importante qu'on doit emporter au combat, c'est la raison d'y aller."

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